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EAN : 9782072787973
592 pages
Gallimard (15/08/2019)
4.03/5   156 notes
Résumé :
Ils étaient si jeunes, quand ils se sont rencontrés, qu’ils ne pouvaient imaginer leur destin. La Madrilène Berta Isla et l’Hispano-Britannique Tomás Nevinson pensaient que leur histoire serait celle de beaucoup de couples de leur époque et de leur condition. Mais il suffit parfois d’une journée - d’une journée quelconque - pour voir sa vie basculer et se retrouver ensuite dans une relation distante, condamnée au secret et à la dissimulation, au faux-semblant et aux... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (45) Voir plus Ajouter une critique
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Selon le quotidien espagnol El País : "Berta Isla est le roman le plus complexe de Javier Marías et sans doute son plus inquiétant". Son "Los enamoramientos" ou "Comme les amours" de 2011 n'était déjà pas exactement simple, donc encore plus complexe, et presque 600 pages... de quoi hésiter un peu, malgré la belle couverture ! Mais comme l'a formulé un quotidien hollandais (Het Parool) de façon si persuasive : "Avec un roman de Marías en main, nous ne lisons pas, nous vivons." Alors, vivons !

Berta Isla et Tom ou Tomás Nevinson sont 2 élèves attrayants d'un lycée madrilène qui, à peine 15 ans, décident de passer leur existence ensemble. Berta adore la littérature et espère trouver plus tard une profession dans ce domaine, tandis que Tom, de père anglais et mère espagnole, est parfaitement bilingue et apprend les langues, comme le Français et l'Italien, pratiquement sans efforts, en jouant. En plus, il jouit d'un talent rare, celui de l'imitation. Il a un sacré succès en imitant à la perfection des politiciens espagnols, vedettes du cinéma, pêcheurs de Tarragone ou de Málaga.

À l'issue de leur enseignement secondaire, Berta et Tomás continuent leurs études : elle, littérature à l'université de Madrid ; lui philologie à l'université d'Oxford en Angleterre. Les jeunes fiancés ne se verront donc que pendant les congés. En conformité à un catholicisme espagnol conservateur, le couple a des rapports très sages.

En 1969, après le Mai 68 de Paris et le Printemps de Prague (janvier-août 1968), les jeunes souhaitent qu'en Espagne les choses bougent également, mais cela n'est sûrement pas l'avis du dictateur Franco qui, au contraire, renforce les pouvoirs de la police. Ainsi, Berta, qui comme l'auteur Javier Marías, a 18 ans, participe à une manifestation, où elle est sauvée d'une confrontation violente avec un cavalier de la police franquiste par un jeune banderillero qui lui vient courageusement en aide et avec qui elle perd ensuite sa virginité.

Tomás prend l'habitude de fréquenter, juste pour le sexe, une vendeuse d'un antiquaire de livres, jusqu'au jour où, peu après sa visite, cette Janet Jefferys est trouvée morte, étranglée. Un événement dramatique qui aura des répercussions importantes sur la vie de Tomás et sa relation avec Berta.

Pour éviter qu'il ne soit soupçonné de meurtre, son professeur favori, un homme qui a le bras long à Westminster et auprès des services secrets, lui offre son aide, moyennant son allégeance envers ces services. En d'autres mots, il faudrait qu'il accepte des missions pour le service de sécurité, MI5 (Military Intelligence, section 5, service du contre-espionnage) et le service MI6 (Military Intelligence, section 6, service de renseignements extérieurs).
Quoique le service en question qui l'emploiera ait l'allure encore plus obscure et fait penser à la PWE (Political Warfare Executive ou direction de la guerre politique), créé par Winston Churchill en 1941 pour lancer des opérations subversives contre les nazis. de cette organisation super-secrète, je ferai prochainement un billet sur un des rares livres qui existent à ce sujet : "The Black Game" d'Ellic Howe (1910-1991).

Une lourde hypothèque sur le couple, qui se marie en mai 1974 à l'église San Fermín de los Navarros à Madrid, d'autant plus que Tomás est tenu au secret complet quant à ses missions clandestines, bien entendu. Berta ne sait par conséquent jamais où il se trouve, ce qu'il fait et quand elle le reverra et pour combien de temps ! Leur amour persiste pourtant et ils auront un fils Guillermo et une fille Elisa.

En avril 1982 commence la Guerre des Malouines entre l'Angleterre de Margaret Thatcher et l'Argentine du général Leopoldo Galtieri. le 4 avril 1982 a lieu le dernier départ de Tomás que Berta présume être en cette partie du globe. Sur ce conflit, qui se termine en juin 1982, Pierre Boulle a écrit un livre remarquable "La Baleine des Malouines". Fin du conflit, mais pas de nouvelles de Tomás. Noël passe et un nouvel an commence et de son homme toujours rien, rien de rien, "nada de nada" !

En novembre 1983, un collègue de Tomás, Bertram Tupra, se pointe chez Berta pour lui dire que le service de Londres n'a strictement aucune information sur ce qu'est devenu son mari, mais qu'une allocation mensuelle lui sera payée tant qu'ils ne disposent pas de données exactes sur son sort. Pour d'actes juridiques tel un remariage, un héritage... Il faudra attendre les délais prescrits par les lois nationales en Espagne et en Angleterre en cas de disparition.

Notre Berta continue péniblement sa vie en s'occupant de ses gosses et de ses cours à l'université. Elle a quelques affaires avec des hommes qui ne durent pas et passe le plus clair de son temps à lire. Entre autres la fameuse nouvelle De Balzac "Le Colonel Chabert" et le retour du brave homme des années après la fin des guerres napoléoniennes, et le roman de Janet Lewis (1899-1998) de 1941 "The Wife of Martin Guerre" sur un thème similaire. Livre rendu célèbre par le film de 1982 de Daniel Vigne "Le retour de Martin Guerre" avec Depardieu, une excellente Nathalie Baye et un convaincant Bernard-Pierre Donnadieu.

Un jour en 1994, au musée de cire de Madame Tussaud à Londres, Tomás aperçoit une gamine qui ressemble comme 2 gouttes d'eau à Janet Jefferys. Il se met à s'enquêter et doit se rendre à l'évidence que le meurtre a été une mise en scène par les services secrets pour le recruter pour ses dons d'imitateur et comme cela lui voler sa vie.
Si cette découverte lui rapprochera de Berta Isla, à vous de le découvrir, chers amis !

J'ai trouvé cet ouvrage riche et passionnant. J'ai "vécu" 2, 3 jours avec Javier Marías et je n'ai retrouvé la paix qu'en lisant le tout dernier paragraphe.
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Aucun couple ne ressemble à un autre. Certains ne durent pas, pour des motifs personnels ou en raison de circonstances externes contre lesquelles on ne peut rien. D'autres durent malgré les difficultés – on pourrait presque dire malgré les impossibilités –, parce que dans le couple, chacun y tient. Dans quelle catégorie faut-il ranger le couple que forment Berta Isla et Tomás Nevinson ?

Tout s'annonçait bien pour eux. Ils sont encore adolescents lorsqu'ils se rencontrent au collège, à Madrid, à la fin des années soixante. Berta est une Madrilène pure souche, Tomás est le fils d'une Madrilène et d'un diplomate anglais. Ils sont beaux, brillants et se destinent très vite l'un à l'autre, même si, pendant des études supérieures qui exilent Tom à Oxford, ils mènent chacun de leur côté les expériences qui en font des adultes équilibrés. Ils se marient un peu plus tard. Il y aura des enfants.

Tom dispose d'une incroyable facilité à apprendre les langues, et un talent exceptionnel d'imitateur lui permet d'adopter n'importe quel accent. Des dispositions qui n'échappent pas aux services secrets britanniques, qui le voient déjà en agent spécial capable de s'infiltrer dans n'importe quel univers étranger. Et malheureusement, Tom se retrouve contraint par à un incident qui s'impose à lui, du moins le croit-il, et de ce fait, il ne pourra plus jamais échapper à des soumissions externes qui guideront sa vie et auxquelles son couple devra s'adapter… Ou pas !

Nous avons tous en tête le brio étincelant de James Bond ou de ses émules. Mais le livre de Javier Marías n'est pas un roman d'aventure ou d'espionnage. Il est l'histoire, racontée par elle-même, d'une femme qui a épousé un agent secret. Elle ne peut rien savoir des missions d'infiltration confiées à Tom, mais elle imagine les ruses, les duperies, les infamies, les meurtres commis au service secret de sa Majesté. Sans oublier les infidélités conjugales sur ordre, assumées plus ou moins plaisamment. Sans oublier non plus les menaces et les pièges mortels auxquels il faut échapper. Des menaces qui pourraient aussi s'exercer sur elle et ses enfants, dans le but de faire pression sur son mari.

Ce mari, cet homme qui dort dans son lit – quand il est là – qui est-il ? Elle a beau insister, Tom ne peut rien dévoiler, ni où il se rend, ni quand il reviendra. Donnera-t-il des nouvelles ? – « Tu le sais bien, si je ne te donne pas de nouvelles pendant un certain temps, et ce peut être long, très long, c'est parce que je ne pourrai pas le faire ». – Jusqu'où peut-on interpréter la notion de ne pas pouvoir ? Et celle de temps très long ? Combien de semaines, combien de mois faudra-t-il pour que Berta arrête d'attendre. Ou d'espérer, ce qui n'est pas la même chose. Berta, qui enseigne la littérature, relit le colonel Chabert, le retour de Martin Guerre.

Le lecteur en sait un tout petit peu plus que Berta. Quelques chapitres sont consacrés aux tribulations de Tomás. Comme un symbole : alors que Berta est la narratrice d'un parcours qu'elle trace elle-même, Tom est soumis au bon vouloir d'un narrateur extérieur.

Les années passent et les armées britanniques de l'ombre n'en finissent jamais : guerre froide avec l'Est, guerre civile en Irlande du Nord, guerre des Malouines ; un bref répit après la chute du mur de Berlin et la dislocation de l'URSS, puis viendra le temps du terrorisme international…

Dans les six cents pages du livre, on peut s'irriter de répétitions, de digressions, de détails inutiles, mais l'ensemble est très agréable à lire, car on se laisse captiver par la destinée de Berta et de Tom. L'écriture est superbe, avec un excellent travail de traduction. Les phrases sont longues et complexes, mais onctueuses, harmonieuses. Et après tout, ces répétitions, ces digressions, ces détails inutiles correspondent aux tourments ressassés par la narratrice, une femme qui ne cesse de s'interroger et qui souffre de ne rien connaître de la vie – si vie il y a toujours ! – d'un mari qu'elle aime.

Berta et Tomás sont des littéraires. Ils trouvent dans des vers de T.S. Eliot, un sens qui éclaire leur relation, et c'est chez Dickens que Berta déniche la conclusion qui s'impose : « Chaque créature humaine est constituée pour être un secret et un mystère profonds pour chaque autre ».

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Quel excellent roman que Berta Isla ! Cela fait un moment que je n'avais pas connu un tel bonheur de lecture !
Après, : le coeur blanc de Javier Marías, je me suis lancée dans Berta Isla. Un livre fantastique, avec une bonne allure de polar qui ne déplaira pas à beaucoup. Et, cette écriture, toute en images évoquées tel le brouillard et la brume qui nous conduit sur les pentes ascendantes des non-dits, des mots qui s'ouvrent et se referment sans nous laisser d'autres choix que de les relire et les méditer.
La trame essentielle de ce livre c'est l'espionnage, Tomas, le mari de Berta est enrôlé malgré lui dans une carrière de taupe, d'infiltré.
Berta, va devoir apprendre à vivre avec cet amour, cet homme qui est là, puis disparaît pendant de nombreuses années.
Comment l'amour en réchappe-t-il ?
Cette phrase énigmatique à la fin du livre nous offre une piste:
"Il existe des loyautés , des fidélités inexplicables, des gens que vous choisissez avec une résolution, une détermination juvénile..."
Je vous laisse en compagnie de cette découverte et vous souhaite beaucoup de futur bonheur de lecture avec Berta Isla.
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Le grand romancier espagnol Javier Marías, sans doute un des plus grands écrivains espagnols vivants, (comme les amours , si Rude soit le début) n'en finit plus d'épater son monde ( ses lecteurs en tout cas) à chaque roman à tel point que chaque année, certains le pronostiquent dans la liste des potentiels Nobel.

A l'instar d'un Victor del Arbol, autre très grand écrivain contemporain espagnol, Javier Marías n'aime rien de plus qu'utiliser ce la littérature de genre - le thriller, le roman d'espionnage, le roman historique- pour embraser dans une prose des plus virtuoses, la peitite et le grande histoire espagnole et sonder les relations les plus intimes.

Dans son dernier roman, qui porte le nom de son héroïne, l'éblouissante Berta Isla, Marias tente d'approcher ce qui pourrait s'apparenter à un roman d''espionnage, sauf qu'on n'est pas vraiment chez John le Carré.

En effet, poursuivant son thème de prédilection, la trahison ( ce qui pourrait s'expliquer vu que Marias est un enfant de l'espagne franquiste) , le romancier espagnol s'intéresse plutôt aux effets sur le couple d'un engagement tel que l'espionnage.

On est totalement immergé dans les doutes et les états d'ame d'une jeune espagnole, qui s'aperçoit que son homme - d'origine britanniques- qui n'est absolument pas celui qu'elle pensait connaitre. puisqu'il travaille pour le compte des services secrets de sa Majesté, et disparait au gré de ses différentes missions

Telle une Pénélope d'aujourd'hui, Berta, qui ignore tout des agissements de son mari vit dans l'attente angoissante et troublée

Revisitant à sa manière, de façon ample et moderne le mythe de Pénélope et Ulysse, cette peinture au scalpel des non-dits et des secrets inhérent à la vie conjugale prend toute sa démesure dans ce cas présent.

On est cosntamment dans la tête de Berta et comme elle on attend le long son Ulysse/ Tomas parti en mission et qui manquera forcément les grands événements de sa vie de couple et de famille .Belle et puissante réflexion sur le couple, et très émouvant portrait de femme délaissée, "Berta Isla" est un vrai enchantement !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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« Pendant quelque temps, elle ne sut pas au juste si son mari était son mari, pas plus que l'on ne sait, dans un demi-sommeil, si l'on pense ou si l'on rêve, si l'on a encore toute sa tête ou si on l'a perdue, épuisé. Parfois elle se disait que oui, et parfois elle décidait de n'en rien croire et de continuer à vivre sa vie avec lui, ou avec cet homme plus âgé qui lui ressemblait tant. »

Sur fond d'Histoire de la seconde moitié du XXème siècle, le roman est centré sur les souvenirs d'une femme aux prises avec l'incertitude, le doute, l'inquiétude, la peur.
« And in short, I was afraid » (Eliot).

Une femme qui attend et espère le retour de celui qu'elle aime et qui n'existe plus que dans le prisme de son imagination, le flou d'un souvenir.

Un mariage nébuleux parsemé d'ombres et de lumières. Une relation à ellipses. Vie fantasmée, condamnée aux conjectures et spéculations.
« Comme il est facile d'être dans l'obscurité, à moins que ce ne soit notre état naturel ».

Le trouble de la double vie, un personnage aux multiples identités fabriquées jusqu'à n'être plus qu'effacé par nécessité. le secret. Raison d'état et états d'âme. Politique, espionnage, loyauté, confiance, devoir, trahison… L'art de la dissimulation.

« Trop de gens s'instituent serviteurs de la cause de leur pays, où qu'ils soient, et à la longue s'en rendent maîtres avec une fougue contagieuse ».

Berta Isla, madrilène, et Tomas Nevinson, hispano-britannique, se rencontrent dans leur jeunesse et l'évidence est qu'ils se marieront un jour après leur parcours universitaire, destinés l'un à l'autre.
Naturellement très doué pour les langues, des talents d'imitateur, Tomas semble promis à un bel avenir au bout d'études prestigieuses à Oxford.

« de la poudre en suspens dans l'air marque une histoire terminée. La mienne se termine ici. Qu'est-ce qui m'attend, car je suis encore ici maintenant, et maintenant c'est toujours. C'est la mort de l'air ».
« Mais on lui survit. Quelle chance et quelle malchance ».

Instruit dans l'éloge du secret « en tant que forme suprême d'intervention en ce monde », Thomas est prédestiné à une belle carrière et aussi à une existence des plus intrigantes, au service des puissants qui gouvernent le monde.
« Ma décision m'affectera pour toujours (…) elle fera de moi presque sûrement un banni de l'univers (…) je serai ce que je ne suis pas, je serai fictif. »

De retour d'Oxford, l'insouciance de la jeunesse a laissé la place à quelque chose de paramétré chez Tomas, Berta perçoit ce changement brutal, sentant son mari étriqué dans une situation imposée, « une chape de plomb l'éloignait de moi, elle qu'il avait endossée à la fin de ses études (…) »
Faux-semblants, voiles d'ombre, secrets et mystères planeront sur leur mariage.
Une clandestinité addictive paraît s'être emparée de lui.
Qui est-il ce mari ? C'est comme s'il était pris par un enchantement ou un sortilège.

Les multiples facettes de son mari inquiètent et questionnent Berta, jamais fixée ni apaisée.
Thomas semble « un spectre qui va et vient, qui s'éloigne et revient ».
Berta voit son couple toujours en balance dans un brouillard de conjectures, ses questions sans réponse. Les allers et retours de son mari, ses absences incessantes, jusqu'à disparaître, peut-être…
Des silences, spirales d'élucubrations, le mental empêtré dans d'interminables possibles.

« Dans les guerres, la perfidie est monnaie courante, tel est l'art de la guerre ». Il y a toujours une guerre quelque part…

« Nul ne sait jamais la part d'ombre qu'il lui convient de garder ».

Une écriture dense, très déployée, au style élégant.

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critiques presse (3)
LaCroix
27 septembre 2019
Autour d’un agent secret, le grand romancier espagnol Javier Marias a cristallisé toute l’opacité d’un monde absurde et merveilleux.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeFigaro
19 septembre 2019
L’écrivain espagnol propose une variation brillante sur le thème du couple miné par un secret. [...] Vous n’allez plus vouloir quitter Berta Isla et Tomas Nevinson avant la dernière page de pareil monument.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
02 septembre 2019
Berta retrouve Tomas, le mari qu’elle croyait mort depuis douze ans. Avec son nouveau roman, le grand écrivain espagnol creuse comme jamais le thème de la trahison.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
Jack Nevinson en avait bavé pour maîtriser la langue de son épouse et s'il avait fini par en posséder la syntaxe et la grammaire ainsi qu'un vocabulaire étendu bien que désuet et livresque, jamais il ne parvint à se débarrasser de son fort accent, aussi ses enfants le voyaient-ils en partie comme un intrus sous le toit familial et s'adressaient-ils toujours à lui en anglais de peur de rougir ou d'être pris d'une irrépressible envie de rire. Ils se sentaient gênés quand, en compagnie de visiteurs espagnols, il n'avait d'autre solution que de recourir à cette langue. A l'entendre parler, on aurait presque cru à une plaisanterie, cela rappelait Laurel et Hardy, le Gros et le Maigre, se doublant eux-mêmes, avec leur prononciation bien personnelle, pour présenter au public espagnol leurs films qui, même alors, ne dataient pas d'hier (en fait, Stan Laurel était anglais et non pas américain, d'où leurs accents très différents quand ils se risquaient à sortir de leur langue).
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Nous sommes plus ou moins comme le narrateur à la troisième personne dans un roman, Nevison, je suis sûr que ça vous est arrivé d'en lire, des romans - poursuivit Tupra d'un ton didactique-. C'est le narrateur qui décide et qui compte, mais on ne peut ni l'interpeller ni le questionner. Il n'a pas de nom et ce n'est pas non plus un personnage, à l'inverse de celui qui raconte à la première personne ; on le croit, et donc on ne se méfie pas de lui ; on ne sait pas pourquoi il sait ce qu'il sait ni pourquoi il omet et tait ce qu'il tait, ni pourquoi il est habilité à déterminer le sort de chacune de ses créatures, sans que jamais on le remette en cause. Il est clair qu'il existe et n'existe pas, tout à la fois, ou qu'il existe tout en étant introuvable. Il est même indétectable. Attention, je parle ici du narrateur et non pas de l'auteur, bien tranquille chez lui et qui n'est pas responsable de ce à quoi se réfère son narrateur et serait même en mal d'expliquer pourquoi ce dernier en sait aussi long. Autrement dit, le narrateur à la troisième personne, omniscient, est une convention que l'on accepte et, d'une façon générale, celui qui ouvre un roman ne se demande ni pour quelle raison ni à quelle fin il prend la parole et garde jalousement durant des centaines de pages cette voix d'homme invisible, cette voix autonome et extérieure venue de nulle part.
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-De par là-bas- répondit-il à ma première question, tel un adolescent à qui ses parents demandent d'où il revient à une heure indue. J'en conclus qu'il n'était pas vraiment d'humeur à être reprimandé ni à entonner un mea culpa. Il ajouta cependant, moins en guise d'excuse que de simple explication :- Tout a été si précipité, imprévu. C'est comme ça le boulot. Je n ai pas pu te prévenir.
-D'où es tu rentré ? - insistai je-. D'Allemagne, comme me l'a dit ton ami Reresby ou de Belfast? - Et je prononçai "Belfast" comme l'avait prononcé Miguel, du temps où il était encore "Miguel".
- Je t'ai dit de par là-bas- répéta-t-il, et cette fois sur un ton qui revenait à me dire:"Écoute, Berta, mêle -toi de tes affaires, tu auras beau essayer, tu ne le sauras pas. " Demain nous parlerons,demain je t'expliquerai dans la mesure où je peux t'expliquer. Je ne sais pas encore jusqu'à quel point : j'ai demandé conseil, ils réfléchissent, ils me le diront aujourd'hui.
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On réfrène au fil de la vie ses élans et ses attentes, on se conforme à des versions caduques de ce que l'on a voulu atteindre ou cru atteindre, à tous les stades de la vie on admet des baisses et des défaillances, on laisse peu à peu de côté les exigences : " Tant pis, ça n'a pas pu se faire" reconnaît-on, " mais il reste encore assez, assez pour compenser et pour donner le change, il serait pire de ne rien avoir et que tout ait tourné court."
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ll faut franchir un point de non-retour pour comprendre et se repentir, pour vouloir faire machine arrière.... Il faut s'embourber dans l'erreur pour reconnaître que c'était une erreur, on essaye alors d'en sortir bien qu'il soit déjà trop tard pour s'en tirer indemne, ou sans trop de dégâts.
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Vidéo de Javier Marías
Javier Marias parle de son livre 'Comme les amours' au festival Passa Porta en 2012.
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