J'ai donc achevé la lecture de "Neige de printemps", premier roman de la tétralogie de la mer de la fertilité de
Yukio Mishima.
Écrit entre 1965 et 1970, ce cycle est considéré par l'auteur lui-même comme son chef-d'oeuvre. Il se suicide d'ailleurs par seppuku quelques heures après avoir envoyé à son éditeur le manuscrit du dernier des quatre romans.
Nous allons dans "Neige de printemps" découvrir la passion amoureuse entre Kiyoaki Mitsugae, jeune homme de 18 ans, et Satoko Ayakura, de deux ans son ainée, dans un Japon de 1912/1913 post ère Meiji (1868-1912) et alors en pleine intégration de certains codes occidentaux.
Kiyo est le fils du riche comte Matsugae, tandis que Satoko est issue d'une vieille famille de la noblesse de Cour, mais dont la santé financière n'est plus ce qu'elle était.
Élevés ensemble, après que le comte ait confié son fils aux Ayakura pour l'élever selon les canons aristocratiques, l'amour de ces deux êtres d'une exceptionnelle beauté va défier les principes et les convenances de l'époque.
Que dire de ce roman de Mishima, si ce n'est qu'il mérite son statut de classique. Essentiellement d'ailleurs pour son écriture, d'une beauté et d'une finesse rares, plus que par l'histoire elle-même.
Mishima va décrire aussi précisément les sentiments de nos protagonistes que les paysages splendides de ce Japon du début du XXème siècle, conférant ainsi à son roman une dimension poétique assez bluffante.
Il convient toutefois de bien avoir conscience de cela pour bien l'appréhender. Puisque l'auteur va passer beaucoup de temps dans ces descriptions, ce qui peut entraîner quelques longueurs et l'impatience du lecteur.
La profondeur de ce roman, sa beauté, ne se révèlent à mon sens que si l'on est dans le bon état d'esprit. A une semaine des vacances, cette lecture m'a paru longuette par moments.
Mais j'ai conscience que cela provient de mon envie d'une lecture peut-être moins exigeante à ce moment-là.
Cela ne m'empêchera pas de lire dans quelques semaines le second volet, "chevaux échappés".
Je me permets de vous laisser deux extraits du livre, qui j'espère vous éclaireront sur la qualité d'écriture évoquée plus haut.
"C'était l'heure étrange, suspendue aux confins du soir, où l'on peut encore se passer des lumières et où, même au sein d'une joyeuse compagnie, on peut être surpris par un vague sentiment de la fragilité des choses."
"La lune brillait avec une intensité éblouissante du côté gauche de Kyoaki, là où la chair pâle se soulevait au rythme de son coeur. S'y trouvaient trois grains de beauté, petits, presque invisibles. Et tout comme les trois étoiles du baudrier d'Orion s'affadissent sous une lune radieuse, ces trois grains étaient presque oblitérés par ses rayons."
Bonne lecture