La raison d’être d’un grain de sable et celle d’un humain, d’un arbre, d’un animal, d’une galaxie, est la même. Ce qui résonne dans les diverses croyances de l’humanité, c’est ce souvenir d’une connexion directe, absolue, avec la matière, où la distinction entre la poussière et la pensée n’a aucune importance, où il n’y a pas de différence entre le fait de penser et celui, comme la poussière, d’être emportée par le vent. Inspiration, respiration : c’est ce qui tient tout.
Ce n’est pas le tabac, l’alcool ou la malbouffe : c’est la vie qui n’est pas bonne pour la santé. C’est à force de vivre qu’on meurt, et ceux qui font tout pour ne pas se brûler trop vite vont tout de même mourir eux aussi. Fumer, c’est célébrer le fait qu’il faut se brûler à vivre, sinon on s’éteint, tout s’éteint.
Nous sommes peu de chose, mais ce peu est tout ce que nous sommes ; nous ne serons jamais rien de plus, rien d’autre : de la matière qui respire ; nous passons comme un souffle, nous ne sommes que ce souffle. Vivre, c’est faire en sorte que la matière ne perde pas tout à fait son temps à être ce que nous sommes.
Le but d’un livre, d’une œuvre musicale, n’est pas d’arriver au plus vite au dernier mot, à la dernière note, et il n’y a rien au-delà de leur dernier mot, de leur dernière note. Vivre longtemps ne garantit pas une meilleure vie, pas plus que la grandeur d’un livre ou d’une composition ne tient à leur longueur.
La vie n’est pas une affaire de record de durée ; ce qui compte, c’est d’en faire quelque chose le temps que ça dure, et pas seulement de la faire durer.