Naja, tome 2

La froideur est toujours de mise dans ce tome 2 mais c'est surtout dans les propos du narrateur et la distance ou l'indifférence qui s'en dégage, comme un reporter qui lirait froidement son article sans aucune émotion alors que le sujet prête à vomir.
Nous faisons ici connaissance de numéro 1, qui se fait appeler Max et semble être l'exact opposé de Naja dans ses méthodes de travail. Alors qu'elle est froide et réglée comme une machine, lui est beaucoup plus sociable et son naturel avenant ne laisse absolument pas deviner sa véritable nature. Une première confrontation a donc lieu et c'est à l'avantage de Naja mais le narrateur choisit de nous ramener dans le passé pour expliquer celle ci. Il en profite pour décrire ce que pense naja des différents pays qu'elle traverse ( Haïti et le Japon) et c'est loin d'être rose. la critique sociale et politique de chaque pays montre leurs pires côtés, révélant des pratiques loin d'être recommandables. Au passage il fait fi de la richesse du pays, qu'il soit développé ou du tiers monde. Il le fait à travers les yeux de Naja, comme pour expliquer qu'elle déteste tout le monde et justifie en cela sa nature mortifère. Pourtant lorsque Naja doit prendre des décisions par elle même, c'est bien un léger souffle d'humanité qui semble émerger de sa froideur....
Cette bd est passionnante...

Le duo Morvan-Bengal ("Meka", "T.O.O") nous livre ici la suite de cette saga prévue en cinq tomes.

Après avoir présenté Naja, l'héroïne de la série et la une tueuse N°3 d'une mystérieuse organisation, lors du tome précédent, la première partie de ce deuxième tome permet de faire connaissance avec Max, le tueur N°1 de l'organisation. Même si ce tueur est totalement différent de Naja, le procédé de présentation demeure le même et reste diablement efficace. Cette narration en voix-off qui présente au lecteur le personnage qui orne la couverture crée une certaine dépersonnalisation qui accentue le côté froid et insensible du personnage.

On se dit que l'album sera entièrement dédié à ce nouveau personnage, mais le contre-pied ne dure qu'un instant et l'auteur revient vite à son héroïne et à l'évasion de la prison de Bogota qu'elle préparait. Usant d'une narration qui accompagne continuellement le lecteur, lui
donnant parfois l'impression de ne pas lire l'album tout seul, Jean-David Morvan va d'ailleurs continuer de jouer avec la continuité du récit (et avec le lecteur). Combiné avec une construction irréprochable, cette narration efficace insuffle un excellent rythme au récit. Une voix-off souvent très manichéenne, mais également amusante lors des descriptions des populations que l'héroïne déteste. Après les français, les anglais, les colombiens et les islandais, ce sont maintenant les haïtiens et les japonais qui sont la cible d'une critique acerbe. Connaissant l'admiration de l'auteur pour le Japon, cette ‘critique' envers les nippons est d'autant plus amusante (et surprenante).

Graphiquement, Bengal livre à nouveau un album extrêmement dynamique: un découpage aéré qui lui laisse suffisamment de place pour s'exprimer, des scènes d'action très fluides et une mise en couleur splendide et très efficace lors des flashbacks.

Bref, cette série continue de tenir ses promesses avec un album quelque peu en dehors des sentiers battus. Personnellement je l'ai lu après un album de Blake et Mortimer, ce qui fait encore plus ressortir le contraste, le dynamisme et le modernisme de cet album.