Juin 2011.
Emmanuel Moynot part à la rencontre des Hurlements d'Léo, un groupe de la scène rock alternatif française. L'auteur va suivre ces huit troubadours pendant 5 mois, de juin à novembre 2011, et ainsi couvrir leur tournée estivale.
De festival en festival, les liens vont progressivement se nouer entre l'auteur et le groupe. Sur le site de l'éditeur, on peut lire : « Tensions, incompréhensions, coups de gueules, mais aussi fous rires et déconnades. Une aventure humaine et musicale, sur la route et la scène »… un état d'esprit dans lequel je ne me suis pas retrouvée !
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Pourtant, j'étais très enjouée au départ à l'idée de lire cet album : il s'intéresse à un groupe de j'apprécie énormément et que j'ai découvert (sans grande originalité) suite à l'album Un Air, deux familles que Les Hurlements avaient réalisés avec
Les Ogres de Barback (autre groupe que j'adore sans aucune modération). J'associe les Hurlements à cette mouvance musicale qui diffuse généreusement ses rythmes endiablés, sa bonne humeur et sa convivialité, le tout étant servi par des textes poétiques et engagés.
J'étais donc impatiente de retrouver la vivacité de leur univers musical qui nous embarque dans des mélodies entrainantes au son des guitares, accordéon, trompettes, percussions…
Mais Ô déception, cet entrain est presque inexistant dans cet ouvrage.
Certes, quelques mélodies ont accompagné ma lecture. Bordel de luxe, le P'tit Monsieur en gris… Pourtant, il me semble que pour un lecteur qui ne connaîtrait pas leur veine musicale, rien dans l'album ne permet de ressentir l'entrain qui contamine peu à peu celui qui les écoute.
Plus qu'une immersion dans le groupe, ce récit s'intéresse davantage à la rencontre de l'auteur avec les Hurlements qu'aux Hurlements eux-mêmes. La tonalité du témoignage se charge de jugements de valeur, ce qui alourdit les propos et gâche régulièrement le plaisir de lecture. Sous prétexte qu'
Emmanuel Moynot est lui-même musicien (il fait souvent référence à son groupe), il ne se prive pas de partager ses opinions sur des artistes qu'il va être amené à voir en concert durant la tournée :
J'entends d'une oreille distraite, voire irritée, le concert des Ogres qui est diffusé côté loges par des haut-parleurs crachotants et suraigus. On ne peut pas dire que ce soit à leur avantage.
Emir Kusturica prend la suite. Pour tout dire, je ne suis déjà pas client de son cinéma. Mais comme musicien, à part se servir de son nom pour faire tourner un groupe de baloche et un chanteur en pyjama de Batman, il faudra m'expliquer ce qu'il apporte. Franchement.
« Pour tout dire », je ne suis pas non plus une fervente admiratrice de Kusturica. Je ne l'apprécie pas au point de défendre bec et ongles cet artiste mais en l'occurrence… les propos d'
Emmanuel Moynot sont hors-sujet !! de même, le fait qu'il retranscrive sans vergogne des rumeurs de couloir sur un des chauffeurs de la compagnie de transports (qui véhicule les Hurlements sur leur tournée) sont… futiles et prétentieux !! Ce n'est rien d'autre que de la méchanceté gratuite. Cette accumulation de petits éléments narratifs m'a donné l'impression que l'auteur était pédant. de fait, je tire un trait sur mon envie de lire
Pierre Goldman – La vie d'un autre car je ne me retrouve pas dans la démarche de cet auteur : je n'adhère pas à sa conception du journalisme d'immersion. Si je suis conscience que, pour ce genre d'investigations, les propos trouvent aussi leur pertinence dans la retranscription du vécu et du ressenti de l'auteur, j'apprécie que celui-ci prenne un minimum de recul éthique en livrant son témoignage. Et
Emmanuel Moynot me semble plus soucieux de nous imposer ses a priori que de susciter une émotion chez son lecteur.
Globalement, cet ouvrage a eu sur moi l'effet de casser l'image d'un groupe de copains qui passent tout leur temps ensemble par plaisir. Peut-être était-ce une vision puérile de ma part ? Sur ce point, je reconnais donc que l'ouvrage peut avoir un vague intérêt, celui de ramener les éventuels fans du côté de la réalité (chaque membre du groupe a sa vie, ses opinions qu'il défend jusqu'au bout…). Mais les HDL apparaissent avant tout comme une somme d'individualités hétéroclites, très attachés à leurs petites habitudes et peu soucieux des individus qui tentent de se greffer à leur groupe. Je reconnais aussi qu'il n'a pas dû être facile d'entrer en contact avec eux dans ce contexte précis (tournée de deux mois suppose anxiété, tensions, grosse organisation etc) mais vu que ce projet de rapprochement auteur-musiciens était prévu de longue date… je pense qu'
Emmanuel Moynot aurait mieux fait de taire cette contrariété passagère.
De fait, cette tournée estivale s'impose sur le moral et la dynamique de groupe, d'où le rythme saccadé du récit. Au final, j'ai eu plus l'impression d'assister à des lendemains de cuites et à une succession de défis individuels (d'une prestation à l'autre). La volonté de montrer au public qu'il y a une cohésion dans le groupe semble secondaire !
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