Dis

Jacob Noah sort de sa cachette à la fin de la Deuxième Guerre mondiale pour découvrir que sa famille a disparu et que le commerce de son père a été pris par quelqu'un d'autre. Il reprend possession de ses biens et, avec le temps, acquiert une bonne partie de la ville. Mais rien ne le rend heureux : ni sa fortune, ni sa famille ; il n'a jamais pu faire le deuil de ses parents et son frère. Un soir, Jacob a un accident de voiture. Mais au lieu de mourir, il rencontre un être étrange qui le trimballe dans toute la ville...

J'en ai plus qu'assez de me faire avoir par les quatrièmes de couverture. Soit je ne sais pas lire entre les lignes, soit tout est fait pour ne pas parler de l'histoire comme il le faudrait. Ce livre semblait hyper intéressant, d'autant plus que le nom de Möring semble faire vendre aux Pays-Bas. Quand on me dit que le personnage va découvrir "les profondeurs de son âme" dans une ville modelée sur l'Inferno de Dante et que je vais "embarquer dans un voyage vers la noirceur du 20ème siècle", je comprends que ça va envoyer du lourd, qu'on va suivre Jacob dans des réflexions intenses sur sa vie, peut-être via des paysages ou contextes que l'on trouve dans l'oeuvre de Dante (que je n'ai pas lue), tout en critiquant les catastrophes du 20ème siècle.
Je vous le donne dans le mille : non. Ou plutôt : si on n'a pas lu Dante, alors c'est même pas la peine de s'aventurer dans ce bouquin.
Du point de vue de l'inculte, Jacob effectivement se fait happer par un personnage tout à fait horripilant mais qui ne répond jamais aux questions (sur 300 pages, la frustration est suivie), qui soit-disant le guide on ne sait trop où, qu'on passe effectivement par la ville d'Assen et qu'on nous la présente de manière hyper répétitive comme un lieu de débauche en cette soirée événementielle annuelle sans trop savoir pourquoi, le tout sur fond de questionnement vague sur l'identité juive. On perd son latin dans des parties sur le personnage annexe de Marcus, lui aussi juif de naissance et qui se demande s'il va un jour pouvoir être avec celle qu'il aime ( les deux finissent par se croiser, façon James Joyce avec Stephen Dedalus et Leopold Bloom dans Ulysse), avec des cercles en introduction pour simuler tous ceux de l'Enfer de Dante (ça on est capable de se le figurer même sans formation préalable), avec des parenthèses dont on se fout royalement et une narration dans des styles divers et variés qui correspondent plus à des pastiches peu réussis et pour certains identifiables (en fonction de ses lectures, comme James Joyce que je me suis personnellement farci il y a peu).
C'est du grand n'importe quoi fichtrement insatisfaisant, et c'est d'autant plus déplorable que le début est archi prometteur grâce à une écriture cisaillée, incisive et directe. Tout part en vrille dès lors que Jacob rencontre ce mec, et le récit perd grandement en attrait ainsi qu'en compréhension, surtout pour l'ignare qui ne sait pas tout sur l'Enfer de Dante.
J'ai été pleine de bonne volonté : je suis allée jusqu'à 68% avant de parcourir la fin en diagonale et de constater à quel point ce livre laisse pantois. J'ai été gênée par toutes ces références à dieu dans le langage, le récit, les supputations, les parallèles... Cette désorganisation et ces répétitions... Ce flou intentionnel complètement énervant... Est-ce que la lecture vaut le coup pour quelqu'un qui saurait faire le parallèle ?
Möring est capable de bien écrire, mais à trop vouloir singer et pérorer, à trop chercher à répondre à des questions existentielles sans savoir le faire correctement ou de manière mystérieusement captivante, à trop tenter d'être unique tout en copiant, il perd l'attrait principal que son histoire aurait pu être en partant dans des délires autres qui sont très loin d'être ma tasse de thé à l'origine.
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