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3,79

sur 163 notes
« ils ont des yeux et ils ne voient pas, ils ont des oreilles et ils n'entendent pas. »

Telle une vague qui roulerait mille fois sur une plage, Antonio-Munoz-Molina nous entraîne et nous aspire dans des phrases fluides comme l'eau, pour mieux nous immerger dans un univers traumatique. Celui d'un inspecteur hanté par les fantômes mortifères de l'ETA, d'un vieux jésuite repentant, d'un tueur haineux, de parents ravagés par la disparition de leur fille. Un monde désespéré et désespérant où seule une institutrice s'autorise à croire en l'avenir après l'assassinat barbare d'une enfant.

Un roman noir — très noir et fascinant. J'avoue que je ne m'attendais pas à être à ce point embarquée. Antonio-Munoz-Molina est magistral. Ses personnages par leur profondeur psychologique, leur densité et leur réalisme envoûtants ont quelque chose à voir avec l'universalité des sentiments humains, et c'est assez perturbant. Merci à michfred et à engie, grâce à leurs superbes critiques j'ai découvert un peu plus de la littérature espagnole et un magnifique auteur.

Challenge MULTI-DÉFIS 2020
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Je suis sortie de la fiction pour entrer de plain-pied dans la réalité et c'est assez perturbant ! Je suis une inconditionnelle d'Antonio Munoz Molina. Il est l'un de mes auteurs favoris mais j'ai dû abandonner, à mon grand regret, ce livre qui me bouleverse trop et me rappelle un drame qui s'est passé dans mon environnement. Je ne m'attendais pas à cela, Antonio Munoz Molina est stupéfiant dans l'écriture d' un roman noir, il excelle !


Lorsque vous habitez dans un village limitrophe de Guermantes, le village de la petite Estelle Mouzin, que vous avez dû rencontrer ses parents au détour d'une course chez le boulanger, celui là même où elle a été vue pour la dernière fois, que vous connaissez le chemin que la petite Estelle a emprunté le jour de sa disparition, celui qu'elle prenait de l'école à chez elle, dans un petit village tout ce qu'il y a de plus calme, que vous avez en mémoire les photographies placardées un peu partout, que vous avez assisté impuissante aux déambulations de la police, vous ne pouvez lire ce livre sans éprouver une vive émotion, une boule au ventre, des larmes aux yeux. Ce livre décrit avec un réalisme saisissant la découverte du corps d'une petite fille de neuf ans et l'enquête qui s'en suit. Alors, le spectre de la disparition d'Estelle refait surface avec violence. Ici, personne n'a oublié, la moindre information télévisuelle, la moindre évocation capte l'attention. Ce fut un véritable traumatisme.

Et sous la plume incomparable d'Antonio Munoz Molina, l'horreur de ce drame reprend toute son intensité. Avec ses phrases qui n'en finissent pas dont le regard ne peut se détacher, la fascination ajoute du réalisme au réalisme de son écriture, cette écriture hypnotique magnifique qui génère une expérience émotionnelle, qui prend le lecteur en otage, il étouffe, médusé sous la précision des états d'âme de tous les protagonistes, mélange de culpabilité, de scrupules, le film de la journée fatidique qui tourne en boucle dans la tête des proches.

Alors je n'ai pas pu continuer, je regrette tant j'apprécie le style de cet auteur. Je suis vraiment désolée mais si, à ma différence, l'Ogre des Ardennes, Fourniret, n'est pas venu roder près de chez vous pour enlever, dans les mêmes conditions que le livre, une enfant du même âge, c'est un livre très fort, très noir mais remarquable de précisions, avec des personnages tous aussi intéressants les uns que les autres. Fourniret, à ce jour, est toujours dans l'incapacité de dire où il a enterré la dépouille d'Estelle.

« Celui qui a fait une telle chose doit le porter sur son visage, dit le père Orduna. Il doit porter un signe, comme Caïn quand il avait tué son frère et cherchait à se cacher de Dieu. »
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Envoûtée.  Je suis définitivement envoûtée par Antonio Muñoz Molina.

 Cette fois, ce ne sont plus,  comme dans Séfarade, des micro récits reliés par une trame arachnéennne d'exil et de solitude, éparpillés dans l'espace-temps en une vaste cosmogonie secrète et douloureuse.

Pleine lune c'est  un roman policier, non, plutôt un  récit noir, resserré, puissant. Une ville d'Espagne,  provinciale et frileuse, un hiver rude, et un inspecteur de police qui fuit les tueurs de l'ETA et traque un tueur de petite fille( peut être même de petiteS filleS) ,  qui tue à la pleine lune selon un rituel aussi barbare qu'imparable. La police scientifique a tout trouvé,  sauf l'homme lui-même. Sans fichier, sans mobile, sans visage. Sans adresse. L'anonyme parfait.

Mais chez Molina il n'y a jamais d'anonymes. La phrase s'insinue au coeur même du vivant, sonde les reins et les coeurs. Scrute les âmes. Les silhouettes lentement prennent une consistance, une couleur, une odeur. Une voix. Et tout le suspense est là,  au plus profond de l'humanité.  L'histoire n'est presque qu'un prétexte à approcher les hommes.

Il y a ce flic harassé qui attend,  résigné,   le coup de feu qui va l'abattre, l'imprudence fatale qui  mettra un point  final à son exil, à ses échecs,  et qui cherche malgré tout dans la foule l'assassin aux yeux morts qui a pu commettre une telle horreur de sang-froid.  Pour retrouver une dignité,  un sens à sa vie. A moins que l'amour, inespéré et généreux, ne le lui donne, enfin.

Il y a cette magnifique institutrice, lumineuse et sans détour, indépendante et blessée, fragile et forte qui a tout donné déjà,  et est prête à rejeter les dés, et à perdre, encore une fois, mais les yeux ouverts.

Il y a ce vieux curé "rouge" toujours un peu sur la touche dans sa paroisse, qui en sait long sur les blessures des petits garçons devenus des hommes au désir bancal et dangereux. Ce médecin légiste voué éternellement au rôle d'ami, de confident. Ce père à jamais détruit  qui refait sans cesse le film du soir de pleine lune où Fatimà , sa petite fille , est sortie acheter carton et crayons...

Et il y a l'assassin, brutal, humilié,  fou, qui cherche dans le sang une puissance qui le fuit.

Dit comme cela, rien que de très banal.

Mais c'est pourtant un miracle de lenteur, de poésie, de tendresse et de terrible cruauté. Molina est un styliste exceptionnel et il a une rare profondeur de vue et de pensée. Ses personnages continueront longtemps de m'entourer, et sans la connaître ni l'avoir identifiée,  je me promènerai souvent dans les rues de la petite ville où se hâte,  le soir, une foule indifférente et pressée,  et jetterai un coup d'oeil plein d'apprehension aux ombres du parc, noyé dans le brouillard, là où le talus, loin du dernier réverbère, plonge dans le gouffre noir de la Cava...


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Il me tardait de graviter dans l'univers d'Antonio Munoz Molina.
Je m'attendais à un coup de coeur, inévitable, inexorable.

Déboussolant: voici l'adjectif qui s'impose à la lecture de Pleine lune!
Ce roman noir d'ébène tient toutes ses promesses.

L'auteur espagnol sème chez le lecteur une angoisse qui s'infiltre comme un vent polaire, distillant avec beaucoup de doigté les informations sur les événements.
Les descriptions crues, parfois insoutenables, laissent une sorte de crasse et de souillure dont on aimerait pouvoir s'en débarrasser, cependant l'on ne peut s'empêcher de tourner les pages.

Dans ce roman choral l'on se retrouve tour à tour dans la peau de la victime et de celle du bourreau, de quoi déstabiliser les âmes sensibles.
Une sorte d'anxiété malsaine nous envahit petit à petit à force de revivre et de repasser les événements, décortiqués sur tous les angles à plusieurs reprises.

La langue du roman, simple en apparence, est travaillée au souffle près, chaque mot, chaque description est pesée pour alimenter un rythme de feu, une urgence à dire.
La psychologie des personnages est admirablement exploitée ainsi que les nombreux questionnements sur l'origine de la violence.

Les points de vue et les perspectives sont multiples, parfois harmonieuses, parfois dissonantes, mais toujours complémentaires.



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J'ai décidé de me faire une petite série de lectures espagnoles variées en vue de mes vacances imminentes à Barcelone. Premier de la liste : Pleine lune. Pour l'ambiance 'légèreté, vacances, joie de vivre', on repassera : c'est un roman très noir autour du meurtre d'une fillette. Un roman que j'ai trouvé vraiment pas mal, mais...

'Vraiment pas mal' pour sa construction originale donnant tour à tour la parole à tous les protagonistes, l'inspecteur, le tueur, la victime, l'institutrice, le prêtre... Pour les personnages eux-mêmes, surtout l'inspecteur sans nom et Susana, pleins de paradoxes et de richesses, vraiment bien rendus. Pour certaines vérités énoncées l'air de rien mais qui tombent en plein dans le mille (par exemple la brutalité qu'on peut aussi appeler franchise). Pour l'histoire aussi, simplement, qui nous tient en haleine avec sa lenteur délibérée.

Mais... je ne suis pas sûre que je garderai un souvenir quelconque de ce livre... Pour être honnête, je me demande même si je ne l'avais pas déjà lu (et déjà oublié) parce que certains passages me disaient vaguement quelque chose. Plus dérangeant encore, je suis restée complètement en dehors de l'histoire, observatrice détachée ne ressentant rien, ou presque. Ça m'arrive régulièrement en ce moment, alors c'est peut-être moi qui déraille... Mais quand même je trouve dommage que le style et la construction prennent le pas sur l'émotion !

Un bilan en demi-teinte donc... mais je ne prendrai plus l'ascenseur avec un inconnu les soirs de pleine lune !

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Le challenge solidaire m'a fait découvrir des auteurs que je n'aurais jamais lus sinon, comme George Eliot ou Elizabeth Gaskell, auteures que j'ai adorées et lues ensuite... Et puis parfois, c'est un pensum, c'est compliqué, c'est long, c'est lent et je me force à lire....
Là c'est le cas. Pourtant mon mari a plutôt apprécié, lui....
.
L'histoire (glauque) : le viol et le meurtre d'une gamine de 8 ans.
Un inspecteur (jamais nommé), une ville (jamais nommée), l'Espagne des attentats basques. Et des phrases de 30,40 lignes voire plus.... Pas des subordonnées, juste des accumulations. Je ne sais pas si ce style qui a fait que j'étais éloignée de l'histoire, mais je n'ai ressenti aucune empathie ni pour l'histoire ni pour aucun personnage. Pourtant avec un meurtre d'une fillette.....
Donc un livre lent, très lent, avec une originalité : chaque chapitre voit un nouveau narrateur jamais annoncé qu'on va découvrir au fil des pages (enfin en 1 phrase longue comme un paragraphe, on a trouvé). Comme j'avais du mal à m'investir dans le livre, ce changement de personnages m'a plutôt perdue qu'autre chose.
.
Sans le challenge solidaire, j'aurais abandonné ce livre. Je vous conseille donc de lire les autres critiques voire le livre pour vous faire une idée. Moi clairement je ne compte pas prolonger ma découverte de l'auteur.....
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Ce roman fut une lecture laborieuse et éprouvante mais il m'est difficile de départager la part de l'écriture et celle des conditions caniculaires. de toute façon c'est une lecture exigeante : beaucoup de longues phrases, heureusement assez simples, des chapitres dont il faut lire parfois plus d'une page avant de savoir ou d'être sûr de savoir de quel personnage il est question. L'écriture est belle, mais déroutante, en tout cas assez efficace pour instaurer atmosphère et rythme. le rythme, justement, est particulièrement lent, presque spiralaire et hypnotisant. Il s'agit bien d'un roman policier mais quasiment sans enquête, sans compter que lecteur fait connaissance de l'assassin, sinon dès le début, en tout cas bien avant la police. L'intérêt de ce roman n'est donc ni du côté de l'enquête ni du côté de l'action. Reste le climat créé par cette écriture, remarquable, sinon agréable. Nous sommes dans une ville du sud de l'Espagne, non nommée. le passé est très présent, voire très pesant (aussi bien la période franquiste que l'ETA) et le personnage complexe de l'inspecteur, jamais nommé, est psychologiquement très intéressant. Un roman qui pourrait se prêter à une très belle adaptation cinématographique. Un roman ténébreux un peu frustrant que j'aurais probablement trouvé envoûtant en d'autres circonstances.
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Verbeux.

C'est une petite ville du sud de l'Andalousie. Sans histoire. Mais une petite fille vient d'être retrouvée morte la culotte enfoncée dans la bouche.

Je partais avec un a priori positif mais je ressors mitigée de ce roman. Je m'attendais à lire un polar écrit avec un style très travaillé, je me suis retrouvée avec un polar avec un style trop travaillé.

L'auteur fait des phrases proustienne qui sont certes belles, mais qui noient le lecteur et lui font perdre le fil de l'histoire. C'est dommage car j'ai trouvé que les personnages étaient très bien travaillé et leur évolution était intéressante.

Le parti pris de l'auteur de ne pas se concentrer sur l'enquête mais sur les personnages est audacieux. Il aurait pu donner un beau résultat, mais le style alourdit l'ensemble.

En conclusion, un roman qui avait du potentiel mais le style alourdit l'ensemble.
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Ce premier roman d'Antonio Muñoz Molina que je lis m'a donné du fil à retordre. A première vue, on pense avoir à faire à un polar. Il en a les ingrédients principaux : un meurtre, horrible, celui d'une fillette, et un inspecteur, chargé de l'enquête. Nous sommes dans une petite ville du Sud de l'Andalousie dont nous ne connaîtrons pas le nom, pas plus que celui de l'inspecteur. La fillette, elle, s'appelle Fatima. Dès le début du roman, quelque chose cloche : d'enquête, il n'y en a point. En tout cas rien qui pourrait nous rattacher aux classiques du genre. L'inspecteur, sur les conseils du père Orduña, un prêtre catholique, étiqueté comme "rouge", et qui fut autrefois son éducateur, décide qu'il trouvera le coupable en remarquant quelque chose de spécial dans son regard. Bien. Le lecteur que nous sommes n'a plus qu'a attendre que cet événement survienne. Et pour tromper cette attente, l'auteur va nous envoûter et parfois nous engloutir sous d'interminables cascades de phrases, où l'on découvrira la vie passée et présente de quelques protagonistes de l'histoire : l'inspecteur, le meurtrier, l'institutrice de la jeune Fatima, le médecin légiste, ami de l'institutrice.

Il serait tentant de résumer ces vies et, finalement, toute l'intrigue, en quelques mots, mais ne serait-ce pas trahir l'intention de l'auteur ? Le résumé, la ligne droite, l'esprit de synthèse, sont à l'opposé des choix stylistiques de l'auteur. Ses phrases sont faites de cercles et de lignes sinueuses qui vous emmènent on ne sait où. Elles s'enroulent, bifurquent, empruntent des chemins de traverse, s'arrêtent à un détail impromptu, avalant le paysage, zoomant sur un geste insignifiant, accumulant les points de vue, dévorant les gens sur le chemin du personnage, haletant comme un coureur de fond, va, vient, recule et ne s'arrête que pour mieux rebondir. Ça fait penser à de la musique baroque, une partita ou une cantate de Bach. Mais en beaucoup plus déroutant, plus fatigant aussi. On aimerait faire "Pause", faire le point, résumer la situation. Mais, avec Muñoz Molina, hors de question de résumer quoi que ce soit. Il s'agit plutôt de décortiquer sans fin, jusqu'à l'étourdissement. Une écriture que j'ai envie de qualifier d'obsessionnelle. Quelle est donc l'obsession qui fait courir Antonio Muñoz Molina, comme un cheval fou ?

Le roman a bien une fin que je ne donnerai pas ici. Mais l'enquête est-elle résolue pour autant ? A-t-on fait le tour de la question ? Rien n'est moins sûr. On sent bien que du côté de l'institution religieuse où a grandi l'inspecteur, tout n'est pas clair, il y reste des zones d'ombres qui appellent d'autres éclaircissements, d'autres romans peut-être. Si tant est que la lumière ait ici une chance contre les ténèbres ? Si nous ne sommes pas dans un polar, nous sommes bien dans un roman noir et le noir y est particulièrement sombre.

Perturbé par ce livre, tantôt conquis et tantôt frustré, comme je peux l'être devant un tableau de Salvador Dali ou de Gérard Garouste, je pose une note qui ne veut pas dire grand-chose. Comment résumer par une note un livre par nature rétif à toute manœuvre de réduction ?
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Un tout grand Muñoz Molina ! Quelle écriture ! J'ai retrouvé le style de 'Dans la grande nuit des temps' que j'avais adoré.

L'intrigue, car il ne s'agit pas ici d'un simple roman mais d'un roman noir avec meurtre et enquête à l'appui, est soutenue et le lecteur est maintenu en haleine jusqu'à la dernière ligne.

Mais avant tout c'est cette écriture, ce rythme dans les phrases qui me séduisent chez cet auteur, un peu comme chez Javer Marìas. de superbes écrivains espagnols !

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