Citations sur Petits poèmes pour passer le temps (18)
En t'attendant
Quand je t'attends, c'est long.
Les arbres traversent le chemin.
Les oiseaux font leur valise de feuilles.
Les crapauds ont le temps
de se changer trois fois en prince.
Quand je t'attends, c'est long.
Les mille-pattes ont lacé leurs souliers.
Les cigales ont fini de chanter.
Les montres ont le temps
de glisser trois fois des poignets.
Quand tu arrives enfin,
le soleil a déjà compté tous ses rayons,
la mer, ses vagues et le ciel, ses nuages.
Dépêche-toi,
ma lune, ô ma douceur,
il va faire nuit noire sur mon cœur.
DIALOGUES
Je parle miel avec les abeilles.
Je parle sève avec les arbres.
Je parle pollen avec les fleurs.
Je parle terre avec les insectes.
Je parle source avec les poissons.
Je me tais quand le jour se tait.
Au vent, je souffle des histoires.
Sous la nuit, j'épingle mes rêves
pour qu'ils se confondent aux étoiles.
COMPTINE HAÏKU
À LA MODE DU JAPON
QUI NE DURE QU'UN INSTANT
ET DONT LE TITRE AU FOND
PREND TOUT SON TEMPS,
DEVIENT BEAUCOUP PLUS LONG
QUE LE POÈME
LUI-MÊME
(à dire lentement pour mieux en profiter)
Le perce-neige
ne perce rien.
La neige a fondu
ce matin.
(p. 31)
PASTORALE DES HEURES BLEUES
Donnez-moi la nuit
qu'un peu je l'éclaire.
J'ai de la lumière
au bord des paupières
et des heures bleues.
Elle a froid, la nuit.
Ses petons si noirs,
son air de grand soir,
su sol jusqu'au phare,
tout ça tremble et fuit.
Que vienne, imprévu,
le matin, bergère,
qu'il soit découvert,
sous le vent d'hiver,
comme ton cou nu.
Donne-moi ta main,
partons loin, à deux.
J'ai de la lumière
au bord des paupières
et des heures bleues.
p.53
Un battement d'ailes de papillon
peut changer l'avenir.
Alors, que dire du battement de tes cils ?
Tu me regardes en riant
et le futur n'a qu'à bien se tenir.
Tous les instants vont par deux
et prennent tout leur temps
quand ils sont dans tes yeux.
APRÈS LES ANNÉES
« Papa, quand je serai grande, après les années,
est-ce que j’aurai un cœur grand comme ça ?
— Oui, il va grandir un peu.
— Est-ce que ça veut dire que je pourrai mettre plus
de gens à l’intérieur ?
— Pourquoi dis-tu ça ?
— Parce que moi, j’aime tout le monde. »
L’automne peint le bois
en rouge, en jeune, en roux.
Sa palette n’a pas,
n’a plus de vert du tout.
—
C’est toujours le printemps
qui vole la couleur,
pour en couvrir les champs
et la hampe des fleurs.
—
L’automne n’est pas triste.
Il vit trois mois dans l’air
à jouer à l’artiste
sans connaître un hiver.
Le perce-neige
ne perce rien.
La neige a fondu
ce matin.
p.31
Comptine d'automne
(à lire en soufflant très fort)
Le vent d'automne a laissé,
sur mon répondeur, un message.
D'où a-t-il appelé?
S'est-il faufilé
dans une cabine?
Qui lui a donné
mon numéro privé?
Son message disait :
"Schchchchchchchchchchchchch
schchchchchchchchchchchchch
schchchchchchchchchchchchch..."
Puis il a raccroché.
Miel de toi
à chuchoter quand le vent se tait
Je dis du miel de toi,
le dernier miel au goût de pomme,
de tournesol. Septembre va.
Je dis des bogues. Je dis des noix.
Je dis des mots. Je dis des mûres.
Je dis du miel de toi
au premier ciel couleur de pomme.
Tourne, soleil. Octobre est là.