Kathleen Hennesy est placée à l'Assistance publique après que son père a frappé sa petite soeur à mort. Abandonnée par sa mère, son père en prison, sa petite soeur décédée : un drame qui aurait de quoi traumatiser plus d'un enfant de 11 ans. Mais Kathy va survivre. C'est ce qu'on ne cesse de lui répéter. Puis une des assistantes sociales lui offre un chapelet. Et grâce à ces petites perles, elle devient très croyante et prie beaucoup.
Après cette première partie qui présente les mésaventures de Kathy, la seconde partie nous dévoile sa vie d'adulte. La religion et les préceptes chrétiens tiennent toujours une place importante dans sa vie. Elle est devenue aide soignante très dévouée à ses patients. Elle a des amis, des flirts, mais si elle se refuse à se l'avouer, le lecteur comprend qu'elle s'entoure de personnes qui profitent d'elle et ont aussi peu d'estime pour elle que la pauvre Kathleen en a pour elle-même. La jeune femme pense que tel est son destin alors elle accepte, jusqu'au jour c'en est trop, et la soupape éclate, et à nouveau c'est le drame.
C'est un court roman sans pathos ni grand étalage de sentiments, presque factuel qui se lit rapidement. On y retrouve les thèmes (et obsessions) de prédilection de
Joyce Carol Oates comme la sexualité sans amour romantique, la religion et le désespoir. L'histoire a de quoi heurter des lecteurs qui n'ont jamais connu ou côtoyé ce type de personnage dont on se demande souvent "pourquoi ils ne se bougent pas?!". de façon assez subtil, par l'isolement de son personnage, la rationalisation de son drame personnel, son manque d'estime pour elle-même et son sentiment de culpabilité , ces lecteurs pourront avoir quelques éléments de réponse. En cela,
Joyce Carol Oates utilise bien la littérature pour susciter la compréhension et la compassion pour l'Autre (ceux qui sont nés dans les mauvaises familles et sans les clés nécessaires à la reconstruction).
D'un point de vue purement littéraire, ce n'est pas le meilleur de l'auteure, ni un grand roman. L'écriture très épurée et presque mécanique se justifie dans ce roman. Pas de quoi laisser un souvenir impérissable mais il faut reconnaître les mérites de ce roman : l'empathie et la compréhension dont
Joyce Carol Oates fait preuve pour décrire les engrenages de la maltraitance et la difficulté à sortir de ces cercles vicieux sont d'une justesse qui a de quoi au moins interpeller le lecteur.