TREIZIÈME POÈME
Extrait 1
J’épie, en faveur de la Nuit, un oiseau noir et blanc,
une pie.
J’épie, ô univers, un oiseau noir et blanc qui m’épie.
L’ombre est divine… elle devine mes rivaux :
Les derniers sangliers, la sanglante forêt, et les
derniers chevaux !
Semblable aux meutes des feuillages qu’un dieu tourmente,
J’écoute, et les oiseaux écoutent, l’unique voix véhémente.
Partout une promesse approfondit l’hymne de l’air.
Solitaire, je me confonds à la disparition de l’éclair.
TREIZIÈME POÈME
Extrait 2
Mon âme est accordée à l’ordre des choses. Qu’importe
Si la pluie en novembre abîme un peu le toit, arrache un
peu la porte !
Mon âme seule… Ainsi les arbres absolus,
En s’insurgeant contre la mer, ne s’insurgent qu’en vain
contre ce qui n’est plus.
Un Nom toujours nouveau a consacré ma bouche indigne.
D’autres signes que le Soleil gravitent autour du Signe.
Je dispute l’Espace à la ténuité des torrents…
Des feux très solennels font les feuillages transparents.
L’univers est une prairie incomparable…
L’essentiel est de savoir pratiquer l’attente méthodique…
L’essentiel est de savoir pratiquer l’attente méthodique,
de ne rien peindre avant que de raison.
Je n’aurai garde de combler mon vide
(je le consulte).
Présages
Présages arbres gonflés de pluie / Inassouvi
désir de lumière / Espace du recueil
Ruissellement / le jour ses fruits
Répandus dans l’ombre / Ensanglantée de l’été
Océan royaume docile des / Secrets de l’âme
sur la crête / Triomphe qui s’impose à toi
Embellie du vieil édifice céleste / Rendu présent à ta vue
TREIZIÈME POÈME
Extrait 3
Les beaux chemins égaux qui couraient à la mer
première,
Les roseaux, et le fleuve, s’inclinent sous la Lumière.
Rivages, je vivrai ! l’abîme a l’éclat de l’Esprit.
Je sonde l’Océan, où l’antique Soleil s’inscrit.
Une vague me jette un bâton. Je dresse un mât de
fortune.
Dans les pierres je sens blanchir comme une voile
opportune.
Debout, je vois les monts ! Debout. Les vaisseaux
et les mers,
Les monts et les vaisseaux font vaciller mes vers.