AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782348059377
272 pages
La Découverte (27/08/2020)
4.24/5   58 notes
Résumé :
Depuis la naissance de la Ve République, l’État français mène une guerre larvée contre une partie de sa population. Les jeunes des quartiers populaires descendants de l’immigration postcoloniale subissent une opération, quotidiennement répétée, de « désenfantisation » : ils ne sont pas traités comme des enfants mais comme des menaces pour la survie du système. Combien d’entre eux sont morts à cause de cette désenfantisation ? Combien ont été tués par la police en to... >Voir plus
Que lire après La puissance des mèresVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
La puissance des mères est un ouvrage éminemment politique, un cri du coeur porté par l'expérience concrète d'une mère des quartiers populaires, Fatima Ouassak, qui s'est d'abord engagée au sein de l'association des parents d'élèves de l'école de ses enfants – à ses risques et périls, vu les conséquences, à mon sens, odieuses -, avant de cofonder le Front des Mères, « une organisation politique qui lutte contre les discriminations et les violences que subissent les enfants, à travers l'action collective des parents au sein des écoles, et un projet d'auto-organisation dans les quartiers populaires » (je cite ici la page de présentation du site Internet : voir https://www.front2meres.org/).

Racontant la situation connue par nombre de parents des quartiers populaires, cet ouvrage est un superbe manifeste contre la fatalité du système français qui ostracise puissamment une partie de ses enfants – pour être moi-même enseignante, je le constate trop souvent – : ceux qui sont issus de l'immigration postcoloniale. Ce sont ceux qui, dès leur plus jeune âge, apprennent à vivre dans la crainte des contrôles de police arbitraires, dans le regard parfois orienté, consciemment ou pas, de ceux qui sont chargés de leur instruction en dehors du cercle familial. Ce sont ceux qui découvriront en grandissant qu'ils font partie d'une société formée sur le principe d'une hiérarchisation raciale qui aura une incidence très forte sur leur avenir (images d'eux-mêmes, de leurs origines, de leurs capacités, de leur futur professionnel… dépréciées, par exemple).

Superbe manifeste contre cette fatalité, car, après avoir présenté avec force précisions la situation évoquée précédemment, il renvoie à des propositions concrètes, décrites de manière tout aussi précises, et pour certaines déjà mises en place, par exemple à Bagnolet. Sur l'éducation, sur la culture, sur la transmission des origines, sur la représentation féminine, sur l'écologie, de nombreuses idées tout à fait pertinentes sont proposées par Fatima Ouassak, en lien avec le Front des Mères, pour agir d'abord à l'échelle locale, afin de, qui sait, avoir des répercussions à l'échelle nationale, et ainsi permettre aux enfants des quartiers populaires de devenir, véritablement, des enfants, qui auront toutes leurs chances pour se réaliser pleinement. Superbe projet qui, j'espère, parviendra à se développer plus amplement.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
Commenter  J’apprécie          180
L'oeuvre de Fatima Ouassak est féministe, révolutionnaire, encourage avec force l'agentivité des femmes et mères de classe populaire et descendantes d'immigré•es post-coloniaux.
Fatima Ouassak cumule l'expérience d'une politilogue et militante, d'une professionnelle ayant accompagné des politiques publiques, et d'une mère d'origine marocaine qui se bat pour faire entrer la cuisine végétarienne dans la cantine de l'école de ses enfants, se heurtant à l'incompréhension, au racisme et au rejet à un niveau local, pour finir par être revalorisée par le mouvement écologiste. Elle montre avec brio que le mouvement politique de l'écologie s'adresse à des Blancs de classe moyenne et supérieure. Par des exemples précis, type les Amap qui sont localisés principalement dans des quartiers pavillonnaires.
Elle est cofondatrice du collectif Front de mères, syndicat de parents dans les quartiers populaires.
Dans ce livre elle croise idées politiques et expérience individuelle (de mère, de professionnelle, de militante) car tout est bien sûr lié dans son histoire. Elle aborde les discriminations, les violences policières, bref ce que peuvent subir les enfants descendants de l'immigration post-coloniale, avec un processus de désenfantisation. Les mères sont appelées à avoir un rôle de tampon, qui tempère, contient ; Fatima Ouassak refuse ce rôle assigné pour insister sur l'éducation, la transmission d'héritages politiques de résistance, la sensibilisation à l'injustice et à l'oppression.
J'ai beaucoup aimé la finesse de son argumentation, son style incisif et mordant, mais aussi son engouement lyrique sur la fin, quand elle enjoint les mères à être des "dragons".
Puissant !
Commenter  J’apprécie          60
"J'ai vécu le fait d'être mère dans la tension. Je me sentais puissante et, en même temps, neutralisée, dépossédée de cette puissance". Manifeste sur la force politique des mères, le racisme structurel et le refus de la résignation, le livre de Fatima Ouassak, "La puissance des mères", est foisonnant, comme en atteste la voix de son autrice.
"J'écris ce livre en tant que mère. Comme une évidence. Car c'est en tant que mère que j'ai vécu les oppressions et les résistances analysées dans ce livre. J'écris ce livre en tant que mère habitant et militant à Bagnolet en Seine-Saint-Denis. J'écris ce livre en tant que fille d'émigrés-immigrés du Rif au Maroc, et tant que fille d'ouvrier. Mon point de vue est situé, mais je veux changer le monde entier."

Sous le préambule de la puissance des mères s'esquisse cette tension qui agite la réflexion entière de son autrice Fatima Ouassak : l'indignation enlace l'espoir, et le décryptage des discriminations subies par les habitant·e·s des quartiers populaires épouse un panorama plus global, celui des violences subies par les classes ignorées. Mères, prolétaires, enfants. Des causes qui se retrouvent à la source du Front de Mères, le syndicat de parents d'élèves des quartiers populaires fondé par la narratrice.

Un syndicat dont cet ouvrage relate les luttes (pour une alternative végétarienne à la cantine de l'école, contre la stigmatisation des mères qui portent le foulard et l'islamophobie, pour le soin et la valorisation des enfants) tout en racontant la grande histoire dans la petite. Celle des mères de famille qui ne cessent de se battre pour leurs fils et leurs filles, victimes de violences policières et autoritaires, dans l'Argentine d'hier comme dans la France d'aujourd'hui. Celle d'une "hiérarchie raciale" dont l'on ose à peine dire le nom à l'heure où celui d'Adama Traoré reste synonyme d'impunité. Celle d'une lutte, la maternité, sur laquelle s'accumulent les charges - charge mentale, racisme, sexisme, paternalisme...

Une intention ambitieuse pour un récit aux allures de manifeste. Derrière cette prise de parole très personnelle se déploie un désir collectif de réappropriation de l'espace public. Pour faire entendre par l'écriture des voix trop tues. Un ouvrage fédérateur, forcément, et féministe. Son autrice nous le démontre. Tendons-lui l'oreille.
Lien : https://www.terrafemina.com/..
Commenter  J’apprécie          80
Ce livre m'a profondément troublée ! Il y fait le tableau d'une stigmatisation de la population musulmane, certes réelle et à connaitre, mais ce qui m'a dérangé c'est cette généralisation à toute la population, je n'ai pas vu d'exception faite.
En tant que médecin dans une ville où la population est majoritairement musulmane, j'ai été profondément répugnée par les allégations de violences gynécologiques systématiques, d'une réduction des femmes à de vulgaires corps.
Peut-être est-ce que la vie et les points de vue sont différents entre l'Ile-de-France et la "Province" ...
En bref, ce livre apporte certes quelques pistes mais le ton de fond, presque de victimisation m'a semblé offensant et disproportionné à voir le mal absolument partout, dans toutes les sphères et surtout cette généralisation de quelques cas à toutes les personnes "blanches" ainsi décrites dans le livre qui n'ont pas cette mentalité au quotidien.
Commenter  J’apprécie          61
Absolument merveilleux !

Ce livre politique est le fruit d'inquiétudes pour nos enfants qui vivent dans une société qui les traumatise, et ce, même inconsciemment. C'est le rôle des mères de les aider, de les guider. Ce livre est un cri d'espoir par l'unité des mères.

L'auteure emploie un langage simple et accessible pour décrire des constats et des idées.

Le lecteur de trouve grandit, plein d'idées en tête, plein de solutions, même si l'inquiétude et l'angoisse restent présentes, car le monde dans lesquels nos enfants grandissent reste brutal, agressif et terriblement injustes face aux classes sociales, aux raves et aux genres.

Un message d'espoir : battons-nous pour la vie nos enfants.

Chaque sujet important y est traité de manière claire et précise.

Pour résumer : mères, agissons pour nos enfants dans un monde qui les fait souffrir !
Commenter  J’apprécie          50

Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Les mères sont organisées depuis des décennies dans les quartiers populaires, notamment parce qu’on y trouve une plus grande valorisation de leur rôle, y compris dans sa dimension politique. Il n’est pas rare que les mères y mènent les luttes et soient aux premiers rangs, sans que cela pose problème à ceux qui les soutiennent. Parmi les nombreuses luttes de mères, deux sont intimement liées malgré les années et les milliers de kilomètres qui les séparent. En France, au début des années 1980, des femmes de classes populaires et descendantes de l’immigration postcoloniale décident de s’organiser pour obtenir vérité et justice après que leurs enfants ont été victimes de crimes racistes. Ces mères en lutte choisissent de s’appeler les Folles de la place Vendôme en référence à la lutte menée par les Folles de la place de Mai en Argentine quelques années plus tôt, inscrivant d’emblée leur combat dans une solidarité internationaliste. L’expérience politique que mène le Front de mères aujourd’hui se revendique de cette continuité historique, du même combat universel. (p. 84-85)
Commenter  J’apprécie          10
Il faut d’autant moins s’enfermer dans des identités que tout nous pousse aux pièges de ces raisonnements qui consistent à rechercher des causes culturelles pour expliquer les difficultés et les inégalités subies par un individu ou un groupe social. Le culturalisme se traduit par une triple opération : représenter des cultures comme étant homogènes et statiques (1), lire ces cultures à travers un prisme stigmatisant (2), et surmobiliser le facteur culturel ainsi construit pour expliquer les faits sociaux (3). On va dire par exemple que dans la « culture africaine » (1), les parents n’ont jamais de gestes d’affection et d’amour envers leurs enfants (2), et que c’est pour cela que les jeunes des cités deviennent violents, délinquants et qu’ils cherchent à tout brûler (3). (p. 173)
Commenter  J’apprécie          10
Le féminisme en France tend à dissocier radicalement femme et mère, femme et famille, femme et enfant. On peut en comprendre les causes historiques, liées à la structuration du féminisme français en partie autour des luttes pour le droit à l’avortement et pour l’émancipation des femmes du contrôle familial. Ce sont des luttes de libération évidemment nécessaires, mais elles ont certainement contribué à produire une culture politique qui tend à réduire les mères à leur statut de femme. D’autant plus que le travail des mères est largement dévalorisé et invisibilisé, par exemple à travers les représentations stigmatisantes de la « mère au foyer », que l’on peut également rencontrer au sein des milieux féministes. Sur le marché du travail et dans l’emploi, les femmes sont priées de ne jamais évoquer leurs enfants, et surtout pas lors de l’entretien d’embauche. (p. 195)
Commenter  J’apprécie          00
Pourquoi les habitants des quartiers populaires ou les personnes des classes populaires s’intéressent si peu à l’écologie, alors qu’ils sont en France les premières victimes du désastre écologique présent et à venir ? (…) on doit évidemment parler des conditions matérielles d’existence de personnes qui, pour beaucoup, élèvent seules leurs enfants, occupent des emplois précaires, ont des horaires de travail hachés. On a moins de ressources (temps, argent, moyens de garde pour les enfants) pour participer aux rencontres, réunions, ateliers . On a moins accès à une information de qualité sur les enjeux écologiques. On ne vit pas dans des espaces où l’écologie s’organise ; les associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap) par exemple sont souvent situées dans les quartiers pavillonnaires. (p. 211)
Commenter  J’apprécie          00
Il s’agit pour nous de rompre avec une politique de parentalité qui instrumentalise notre rôle de mère à des fins de reproduction du système de hiérarchisation des individus selon leur classe, leur genre et leur race. Et de se donner les moyens d’une parentalité centrée autour de nos aspirations de mères et des aspirations de nos enfants. Le bonheur de nos enfants, et non le maintien de l’ordre. Il faut commencer par se rappeler que la responsabilité des parents vis-à-vis des enfants est sûrement la plus noble et la plus entière qui soit, car les parents représentent la référence ultime de leurs enfants. Personnellement, cette responsabilité m’a grandie. Elle a fait grandir ma foi en Dieu et en l’humanité. Le monde n’est pas assez beau pour mes enfants, il faut s’appliquer à le changer. (p. 133)
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Fatima Ouassak (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Fatima Ouassak
Pour une écologie pirate, Fatima Ouassak
autres livres classés : féminismeVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (276) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

amoureux
positiviste
philosophique

20 questions
852 lecteurs ont répondu
Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..