" Une avenante petite vieille dans un paisible décor champêtre, quel aimable tableau."
« Dans le jardin d’une maisonnette rouge, une frêle grand- mère s’affairait , un arrosoir jaune à la main, aspergeant d’eau sa bordure de violettes .Des hirondelles tournoyaient en gazouillant , haut dans le ciel limpide, des abeilles bourdonnaient , dans l’herbe somnolait un chat paresseux . Plus loin, à l’orée de la forêt , se dressait un petit sauna en bois gris; de la fumée bleue s’échappait de sa cheminée dans l’air de l’après - midi.
La propriété était ancienne, belle et bien entretenue » ...
Son heure venue, Linnea prit elle aussi le chemin de l'Enfer -comme en tout temps et à jamais tout membre trépassé de tout peuple d'origine finnoise. (p.255)
La société finlandaise et ses criantes inégalités nourrissaient leur amertume. Comment admettre, par exemple, que la pension de Linnea Ravaska atteigne cinq mille marks ? Le seul et unique mérite de cette vieille toupie avait été de vivre avec son croulant de colonel. La pension de Kake (le neveu) ne représentait qu’une infime fraction de celle de sa tante. Et il croyait savoir que certains veinards dans ce pays, pouvaient toucher jusqu’à dix mille marks et plus ? Qu’avait-il donc fait pour être condamné à un sort aussi minable ? Rien. L’écart était encore plus abyssal si l’on comparait sa situation et son mode de vie à ceux de Linnea. De quel droit une frugale petite vieille percevait-elle plus du double de la pension d’un mâle vigoureux qui dépensait pour se nourrir plusieurs fois autant qu’une maigre veuve ? Sans parler de ses autres dépenses : il n’était pas assez cacochyme pour vivoter heureux au coin du feu dans une métairie perdue au fin fond de la brousse. Pour un jeune homme éclatant de santé, vivre en ville revenait horriblement cher, avec les inévitables voyages, les nuits à droite et à gauche. Il devait aussi déjeuner et dîner au restaurant, puisqu’il n’avait pas de domicile convenable, et encore moins de femme pour lui faire la cuisine. Linnea pouvait faire en chemise de nuit, si elle voulait, l’aller retour entre sa ferme et l’épicerie de Harmisto, mais à Helsinski c’était autre chose, s’habiller coûtait une fortune. Quant à s’offrir des cigarettes et de l’alcool, il ne fallait pas y songer. La disproportion des dépenses et des revenus de la colonelle et de son neveu était vertigineuse.
Et si, poussé par le besoin, on se trouvait contraint de voler un peu pour mettre du beurre dans les épinards, on vous collait les flics aux fesses. La Finlande était un état policier. L’action sociale y était digne du Moyen Âge .
Selon Perti Lahtela (le copain du neveu), la responsabilité de cette triste situation incombait aux hommes politiques, et en particulier aux communistes. C’étaient eux qui étaient au pouvoir quand ces misérables lois sociales avaient été votées. Or les cocos appartenaient à la classe ouvrière, et tout le monde savait quelles maigres paies touchaient les prolos . N’ayant aucune idée de ce qu’était un revenu correct, ils avaient fixé les pensions au niveau de leurs salaires. C’était pour cette raison que lui-même votait toujours à droite.
Il semblait en outre assez déraisonnable d'acheter quoi que ce soit de très précieux et durable à un homme qui risquait de mourir bientôt de vieillesse.
Je me suis régalée de bout en bout. Quel plaisir de suivre les aventures de cette petite vieille : on a peur avec elle quand ses harceleurs lui mènent la vie dure, on se réjouit avec elle quand elle prend plaisir à prendre un bain dans l'étang, on s'inquiète avec elle des conséquences de ces actes involontaires..........ou pas !!!!!!!!!
Hormis la difficulté d'enregistrer les noms finlandais que je n'ai pas pour habitude de maitriser, ce livre m'a apporté beaucoup de plaisir, de joie et je l'ai dévoré. Je le conseille vivement.
Concocter une mixture mortelle pourrait aussi être une activité beaucoup plus passionnante que le macramé ou la peinture sur porcelaine.
« Mais de quel droit une frugale petite vieille percevait- elle plus du double de la pension d’un mâle vigoureux qui dépensait pour se nourrir plusieurs fois autant qu’une maigre veuve? » ....
Il faut dire ce qui est, le deuxième classe ordinaire, quand il a un coup dans le nez, se met à brailler, tandis que le gradé, même après plusieurs jours de beuverie, rugit tout au plus un peu.
Concocter une mixture mortelle pourrait aussi être une activité beaucoup plus passionnante que le macramé ou la peinture sur porcelaine.