La jeune fille et le hibou

: Non, les contes n'avaient pas attendus les films sensiblement violents pour la jeunesse à la télévision pour être sur ce registre plein de frisson et d'horreur.
Une princesse menacée d'épouser son père, une jeune demoiselle dormant dans une cave sur un sol plein de suie, des enfants abandonnés dans les bois et enfin, une soeur dont les mains seront tranchées par son frère abusé par le mensonge.
Ces coup de frousse et de tyrannie dans les contes sont heureusement toujours associées à une grande bonté rivale, persistante et revigorante, qui devra remettre de l'ordre à l'histoire triste et désastreuse.
Tout devra être bien et bien finir sinon à quoi serviraient les contes?
Qu'à nous mettre en garde contrecla vie et nous faire peur?
Que non.
Mais les bons sentiments ne suffiront pas même si l'on dit que l'amour triomphe de tout.

Ces sentiments devront s'associer à des stratagèmes magiques pour amadouer le lecteur pétrifié parvl'histoire, pour dénouer les tensions, pour détourner l'attention, raviver la flamme d'une idée plus positive.
Les contes sont faits pour rêver.

Comment cette soeur s'en sortira t-elle et où trouvera t-elle cette magie pour conserver le sourire du lecteur?
Il était une fois un frère et une soeur qui s'aimaient beaucoup et qui, suivant la jalousie de la belle-soeur, devront se trouver séparer par des calomnies.
Trois fois la belle-soeur accusera au petit matin la soeur d'un crime qu'elle n'aura pas commis. Elle n'en aura pas été témoin, elle l'aura rêvé et le frère hélas l'aura tragiquement vérifié par la suite.
Mais les apparences sont trompeuses.

Le troisième crime sera tel que le frère ne pourra plus pardonner et la belle-soeur aura, le coeur noir rempli de fierté,enfin gagné.
La soeur sera punie, plus de mains pour commettre l'irréparable. Mais avant de partir en exil, elle promettra au frère que si aujourd'hui il l'a chassé, un jour il viendra la trouver et lui demander son aide ( ceci ne ressemblait pas à un avertissement, ni une revanche de sorcière, cela sonnait plutôt comme une réponse plus douce à leurs adieux).
Les jeunes lecteurs seront donc suspendus à cette intrigue, bien accrochés, se demandant ce qui pourrait arriver de pire que ce qui vient de se passer pour y revenir et nous ajouterons aux fléaux le fait que le frère, qui avait toute confiance en sa soeur, décidera de ne plus l'aimer à jamais.

La magie que nous attendrons: dilligenté par la soeur, un hibou sera chargé par la soeur de veiller sur le frère ( elle est sincère et tenace). le lien ne sera pas brisé, nous le ressentirons.
Une écharde se sera planté dans son pied et poussera, grandira comme une boule au ventre...
Ne nous lamentons point de trop puisque la vie continue, la soeur croisera ailleurs un autre amour, un aimé cette fois qui lui fabriquera des mains.
Nous laisserons le soin aux jeunes lecteurs de découvrir ce qui les attendra pour la suite, d'autres tourments car l'aimé à une mère et vous connaissez les belles-mères de contes ( aïe!)?
Et pendant ce temps? L'écharde de bois poussera, poussera...

Les illustrations d'Anouck Fontaine seront plus douces que le propos, avec des couleurs de nuit et des projections un peu surréalistes, comme un mauvais rêve.
Le texte se prêtera à être lu à haute-voix, la typographie jouant de couleurs et de polices pour distinguer les dialogues et le reste du récit.
Quelle belle fin, ce qui doit sera mais il y aura une grande place au retour accordé sur ce conte, pour ceux qui s'aiment et ne s'oublient jamais.

Cette histoire de fratrie où frère et soeur décident de ne jamais se séparer est bien triste. Les jalousies d'une belle-soeur et d'une belle-mère font éclater les relations familiales. On assiste aux manipulations odieuses qui influencent les agissements du frère car il n'hésite pas à couper les mains de sa soeur.
Le récit prend donc une tournure tragique d'autant que le frère s'enracine peu à peu à cause d'une écharde. Mais la force de l'amour reprendra le dessus.
Cette adaptation du conte des frères Grimm est donc dramatique d'une part par la violence physique et d'autre part par les mensonges et les jalousies qui jalonnent le récit. Mais malgré un fond intéressant, je n'ai pas adhéré aux illustrations, ni à la forme désuète du récit.

La jeune fille et le hibou est une réécriture de la Fille sans Mains des Frères Grimm, et l'auteure s'est inspirée des différentes versions qui ont vu le jour à travers le monde. Alors qu'ils n'étaient que des enfants, un frère et une soeur se sont promis de rester ensemble pour toujours dans la ferme familiale. Des années plus tard, la vie semble en avoir décidé autrement. le frère brise sa promesse en se mariant. Malheureussement, il se laisse aussi suffisamment manipuler par son épouse au point qu'il en vient à couper les mains de soeur. La soeur quitte alors la ferme et le frère est victime d'une malédiction ...


Si le début de ce conte n'est pas spécialement joyeux, l'histoire est finalement porteuse de beaux messages. Si il est d'abord question de mensonges, de manipulation et de jalousie, la suite de la lecture est beaucoup plus symbolique et poétique. La soeur, contrainte de partir, trouve refuge dans une pommeraie. C'est le début d'une aventure pour la jeune fille, qui marque clairement son indépendance. Elle y fait des rencontres, y découvre l'amour et la vie. Et finalement le dernier message est probablement le plus positif : l'amour fraternel reste fort, malgré les embûches.


Les illustrations sont quant à elles fidèles au récit. Elles sont pleines de douceur, de couleurs, mais aussi de fantaisie. La nature y est merveilleusement mise en valeur et chaque peinture nous en met plein les yeux. L'illustratrice joue avec les nuances pour nous plonger dans une atmosphère enchantée. C'est un véritable voyage au même titre que l'aventure de cette soeur qui a quitté la ferme. La lecture reste pleine de sens et il n'est pas difficile d'apprécier la découverte de ce conte fantastique, à la fois sombre et lumineux.

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Dans la plus pure tradition du conte, Catherine Pallaro nous offre ici une version revisitée à l'aune de l'émancipation de la femme du conte traditionnel très empreint de christianisme des frères Grimm. Les illustrations nous transportent dans  l'atmosphère tantôt sombre et étrange de ce récit bouleversants, Car cette histoire est dérangeante car pleine de mensonges, de jalousie, de violence mais aussi d'amour qu'il soit fraternel, amoureux ou maternel. Elle parlera à tous ceux qui aimeront capter dans le récit les éléments d'une réflexion philosophique. Les adultes aimeront transmettre à travers ce récit une part d'humanité qui aide à se construire.
Lien : http://www.liresousletilleul..