Le titre fait référence à un colis de poupées que le père de l'autrice a envoyé d'Indochine, peu de temps avant de mourir en mission. L'épisode prend 1/2 page dans le livre et est repris en 4è de couverture. Il est relaté en fin de première partie, celle consacrée aux raisons pour lesquelles les gens peuvent bien décider de mourir.
En fait, pour l'autrice, les gens... ce sont les militaires. le vulgus pecus n'a pas vraiment droit aux égards de l'autrice. Elle se concentre sur la gloire, le sacrifice, l'honneur, la patrie. de vrais motifs que les hommes de bien peuvent invoquer pour avoir une mort digne, importante, imposante.
Je pense qu'il faut féliciter la personne qui a eu l'idée du titre. Les poupées en miettes, c'es très porteur. Idem pour la personne qui a eu l'idée de la 4è de couverture. Cela donne un tour à l'ouvrage qu'il ne possède pas. le lecteur peut penser qu'il va lire un récit de famille, une forme de constellation familiale... eh bien pas du tout.
L'autrice parle de ses aïeuls, et de son père. Morts glorieusement pour la patrie. Et si elle semble se détacher un peu dans la conclusion, ce n'est pas très crédible ou cohérent.
Dans la seconde partie
Marie-Hélène du Parc Locmaria parle du deuil. de nouveau on a une succession de lieux communs, entrecoupés (plus fréquemment) de réflexions issues de son vécu, du vécu familial. Cela brise un peu le côté inutile et puéril de son essai. Cela amène du corps, du concret. Mais cela ne sauve rien du tout en fait.
Evidemment, vu qu'on est dans un essai, on pourra dire que l'avis de l'autrice en vaut un autre. L'auteur d'un essai, somme toute, a toujours raison... Mais encore faut-il étayer ses idées. Ce qui n'est pas vraiment le cas. Au final, cet ouvrage semble être un prétexte à diffuser des idées réactionnaires, passéistes. Voire nier les évolutions de la société, mais sans vraiment être honnête dans le jugement porté quant à ces évolutions. C'était mieux avant nous murmure l'autrice à demi-mot. Les hommes, les vrais, savaient mourir et vivre à cette époque. Surtout chez les du Parc Locmaria. Personnellement, je ne suis pas persuadé que c'était mieux avant. Mais je suis prêt à lire les mots qui essaieraient de me le prouver. Ce n'est pas ce que fait l'autrice, qui biaise et nous vend des propos réactionnaires sous le couvert de quelques réflexions assez banales sur la mort des militaires et le deuil qui s'ensuit.
Florilège de positions de l'autrice distillées par la bande... il y en a tellement de ces petites phrases distillées çà et là et qui en disent long sur le fondement de la pensée de l'autrice. Marie Gillain "limite perverse" dans Mon père, ce héros. Dans l'armée, "la ségrégation par grade est quotidienne et normale", justifiant que les enfants d'officiers ne se mélangent pas aux enfants de sous-officiers ou de soldats. Que les enfants restent dans des groupes constitués par le grade de leur père (quoi qu'en dise l'autrice, la féminisation de la Grande Muette semble anachronique et aberrante). "Tant qu'il y aura la vie, il y aura la mort et la guerre!", propos intéressant... mais ridicule, à mon avis. "Les vrais héros meurent dans le silence, dans l'ombre, et c'est là leur gloire, tandis que les survivants ne sont pas forcément si glorieux que ça...", voilà des propos que les descendants de résistants apprécieront sans doute à leur juste valeur. Savoir que leur ancêtre est un héros à condition d'être mort... quelle satisfaction. Et les quelques pas de reculs dans la conclusion n'arrangent rien.
Ajoutons pas mal de charges sur l'Islam, souvent infondées, car hors sujet. Un dédouanement quasi permanent du catholicisme. Comme par exemple, l'idée surgie dans la conclusion que dieu (elle met une majuscule) rappelle les siens, peu importe le moment du décès et que, donc, nous n'avons de prise ni sur notre naissance ni sur notre mort. "Les morts nous précèdent" dit l'autrice, sous-entendu au royaume des cieux, pour que nous soyons "re-suscités dans la gloire de notre être". J'ajouterai... pour les siècles des siècles, amen. Mais on retrouve le mot gloire... gloria... in excelsis deo, en quelque sorte.
Je ne partage pas cette vision. D'autant que l'autrice se moque des croyants de la dernière heure. Ah oui, c'est cohérent avec l'idée qui traverse son "essai" , l'idée que sa famille '(et elle, par corollaire) sont différents du peuple... les gueux, comme elle le dit à plusieurs reprises, mais cela ne sonne pas toujours comme du second degré. Ajoutons un passage plutôt positif sur le
Camp des Saints, ce roman xénophobe et vomitif. Ajoutons la justification de l'apprentissage de "nos ancêtres les gaulois" à des générations de petits Africains... Ajoutons un dégoût pour la Révolution française et ses idées. Ajoutons la glorification de la patrie (avec majuscule). Ajoutons un parfum constant d'élitisme. Ajoutons le mépris pour quelques personnes ne pensant pas comme elle, et qu'elle manifeste en ne citant même pas le nom de ces personnes, comme si les nommer était en-dessous de sa condition. Ajoutons la justification de la guerre, l'idée que les femmes ont une place à respecter, à l'ombre des hommes, le regret de l'époque où les guerres, les famines, les maladies régulaient la population mondiale... ah c'était le bon vieux temps... car nous sommes trop sur terre, clairement, pour
Marie-Hélène du Parc Locmaria. Que dire quand elle déplore que les jeunes ne veulent plus mourir pour un idéal qu'elle considère comme supérieur à la petite vie mesquine de ces jeunes...
Personnellement, jeune ou moins jeune, je ne souhaite pas mourir. Comme dit Brassens, mourir pour ses idées, oui, mais de mort lente... Mais l'autrice n'explique pas pourquoi il serait plus glorieux de mourir que de vivre pour ses idées. A part le fait que son grand-père, son grand-oncle, son père, et d'autres de sa famille semblent l'avoir fait...
Oserait-on dire qu'elle fut épouse de militaire aussi (colonel, si mes souvenirs sont bons).
Je me suis profondément ennuyé. Pas parce que je ne partage pas les idées de l'autrice, mais parce que la démonstration est malhonnêtement développée. Parce que sous le couvert d'une dissertation sur la gloire, la mort et le deuil, ce sont des idées d'un autre type qui sont professées. Parce que l'on prétend livrer au lecteur un livre de souvenirs, de récits familiaux, et que l'on a autre chose, de moins reluisant, de moins convaincant et surtout quelque chose qui avance caché, sans dire son vrai nom. C'est bien dommage, car l'histoire des poupées en miettes, c'était alléchant, attirant mais au final ce n'est qu'un détail du livre, un teaser, une façon de faire du buzz. le résultat est insipide, ennuyeux et à éviter.
Je me suis mépris sur l'intérêt du livre. Mais je remercie néanmoins Masse Critique et les Editions 100.000 milliards (tout en déplorant que des maisons d'édition répandent de telles idées).