L’origine de tous les péchés est le sentiment d’infériorité –autrement dit l’ambition.
Si l’on doit perdre une personne très chère, qui ne préfèrerait pas qu’elle meure plutôt qu’elle s’en aille simplement pour recommencer à vivre autre part ? Peut-on tolérer que celle qui était toute votre vie, cesse de l’être pour nous et commence à l’être pour autrui ou pour elle seule ?
Balzac a découvert dans la grande ville une mine de mystère, et le sens qui, chez lui, est en éveil, c'est la curiosité. C'est sa Muse. Il n'est jamais ni comique ni tragique. Il est curieux. Il s'engage dans un enchevêtrement de choses avec l'air de quelqu'un qui flaire et promet un mystère, et qui vous démonte toute la machine pièce par pièce avec un plaisir âpre, vif et triomphal. Regarder comment il s'approche de ses nouveaux personnages : il les toise de toutes parts comme des raretés, les décrit, les sculpte, les définit, les commente, en fait transparaître toute la singularité et promet des merveilles. Ses jugements, ses observations, ses tirades, ses mots ne sont pas des vérités psychologiques, mais des soupçons et des trucs de juge d'instruction, des coups de poing sur ce mystère que, bon Dieu, on doit éclaircir. À cause de cela, quand la recherche, la chasse au mystère se calme et que- au début du livre ou au cours de celui-ci (jamais à la fin, parce que, arrivés à ce point, avec le mystère, tout est dévoilé) - Balzac disserte de son ensemble mystérieux avec un enthousiasme sociologique, psychologique et lyrique, il est admirable. Voir le début de Ferragus ou le début de la seconde partie de Splendeurs et Misères des courtisanes. Il est sublime. C'est Baudelaire qui s'annonce." (2 octobre 1936
L'amour a la vertu de dénuder non point les deux amants l'un face à l'autre, mais chacun d'eux face à soi-même.
Tout le problème de la vie est donc le suivant : comment rompre sa propre solitude, comment communiquer avec d'autres. C'est ainsi que s'explique la persistance du mariage, de la paternité, des amitiés. Parce que, ensuite, voyons, là serait le bonheur. Pourquoi on devrait être mieux en communiquant avec une autre qu'en étant seul, est étrange. C'est peut-être seulement une illusion : la plupart du temps, on est très bien seul. Il est agréable de temps en temps d'avoir une outre où se déverser et où boire soi-même : étant donné que nous demandons aux autres ce que nous avons déjà en nous. Pourquoi il ne nous suffit pas de regarder et de boire en nous-mêmes, et pourquoi il nous faut nous ravoir dans les autres ? mystère.
Vivre au milieu des gens, c'est se sentir comme une feuille dans le vent. Le besoin de s'isoler vient, le besoin d'échapper au déterminisme de toutes ces boules de billard.
Tentation de l’écrivain.
Avoir écrit quelque chose qui te laisse comme un fusil qui vient de tirer, encore ébranlé et brûlant, vidé de tout toi, où non seulement tu as déchargé tout ce que tu sais de toi-même, mais ce que tu soupçonnes et supposes, et les sursauts, les fantômes, l’inconscient –avoir fait cela au prix d’une longue fatigue et d’une longue tension, avec une prudence faite de jours, de tremblements, de brusques découvertes et d’échecs, et en fixant toute sa vie sur ce point –s’apercevoir que tout cela est comme rien si un signe humain, un mot, une présence ne l’accueille pas, ne le réchauffe pas- et mourir de froid –parler dans le désert –être seul nuit et jour comme un mort.
Et soyons justes : qu’est d’autre l’amour en soi que la libido d’un gros singe ?
Celui qui n’est pas jaloux même des slips de sa bien-aimée, n’est pas amoureux.
Tout le problème de la vie consiste à savoir comment rompre sa solitude et comment communiquer avec les autres.