Le livre de
Matthieu Peck raconte le désespoir d'une génération qui, même si elle a suivi des études assez poussées, ne trouve pas sa place dans la société. Elle n'appartient pas à la population qui travaille dans les beaux quartiers, elle reste le prolétariat qu'on ne veut pas voir et qu'on repousse toujours plus loin dans la banlieue. Ce texte est composé de courts chapitres comme des tableaux qui dessinent chacun un morceau de la ville ou de sa banlieue ou un épisode de la vie de Léo au bar, au concert, avec ses potes, avant de boire, en buvant, après… Des morceaux de vie qui ne s'emboîtent pas forcément qui plutôt se juxtaposent pour former une vie sans relief, une vie de lutte que Léo veut mener pour sortir du ruisseau mais une lutte qu'il repousse toujours à plus tard parce qu'il n'a pas les armes pour la mener. Sa destinée semble toute tracée, il lui sera difficile d'y échapper.
Plus que l'analyse sociale de cette génération perdue de banlieusards, c'est l'écriture, le style, le processus narratif employés par
Matthieu Peck qui a retenu tout d'abord mon attention. Ce texte foisonnant construit avec des mots détournées de leur sens initial, des images souvent glauques, des expressions lapidaires, des raccourcis fulgurants, des formules de styles : assonances, oxymores, métaphores… charrient des mots, des formules et des images qui peignent parfaitement cette société composite, désunie, multiforme, glauque… Et c'est le rat qui observe en silence le monde des gens debout qui glisse quelques petits textes entre deux chapitres pour montrer comment les humains sont réellement. « Ils sont lourds et pleins de rage à notre encontre. Cette haine qu'ils traduisent. Ils estiment que la terre leur est due. Ils pensent dompter le feuillage de notre monde ». Comme une morale à méditer…
Denis Billamboz
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