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Citations sur Le Maître d'escrime (60)

Madame, dit-il sereinement, avec une courtoisie glaciale. Le prix de cette botte qui vous intéresse tant correspond exactement à la valeur que je lui attribue, pas un centime de plus. D’autre part, moi seul décide à qui il convient de l’enseigner, et ce droit je pense continuer à le conserver avec la plus grande jalousie. Il ne m’est jamais venu à l’esprit de spéculer avec vous, et je me trouve encore moins enclin à discuter ce prix comme un vulgaire marchand. Bonsoir.
Il reprit chapeau, gants et canne des mains de la soubrette, et descendit les escaliers d’un air taciturne. Du deuxième étage lui parvenaient les notes de la Polonaise de Chopin, arrachées au piano par des mains qui frappaient le clavier avec une furieuse détermination.
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- L’escrime est comme la communion, l’admonesta-t-il avec un sourire. Il faut s’y rendre dans une convenable disposition de corps et d’esprit. Contrevenir à cette loi suprême implique le châtiment.
- Diable, maître, il faut que je note ceci.
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Il s’agissait sans aucun doute d’une souris astucieuse, car on retrouvait toujours le fromage grignoté près du ressort, sans que les pièges métalliques eussent fonctionné. De toute évidence, il avait affaire à un rongeur de talent…
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Une civilisation qui renonce à la violence en pensée et en action se détruit elle-même. Elle se transforme en un troupeau d'agneaux qui se fera égorger par le premier venu.
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"Vous savez quoi? Parfois je me demande si dans notre pauvre Espagne les rôles n'auraient pas lamentablement changé et si la noblesse ne vous reviendrait pas de droit à vous plutôt qu'à beaucoup de mes connaissances, moi compris.
- Je vous en prie, don Luis...
- Laissez-moi parler, pour l'amour de Dieu! Laissez-moi parler... Mon grand-père, qu'il repose en paix, acheta le titre parce qu'il s'était enrichi en faisant du commerce avec l'Angleterre durant la guerre contre Napoléon. "
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De temps en temps, revenait cette angoisse, cette douleur lancinante qui apparaissait à l'évocation des yeux d'Adela de Otero, du rire éclatant du marquis des Alumbres, des harangues enflammées du pauvre Carceles. Il décida de fermer son esprit à toutes ces réminiscences sous peine de se laisser aller à la mélancolie et à la confusion derrière lesquelles il entrevoyait la peur qu'il se refusait par principe à reconnaître. A son âge et avec le caractère qui était le sien, il ne devait avoir peur de rien, se dit-il. La mort était ce qui pouvait lui arriver de pire, et il était prêt à lui faire face.
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- Savez-vous que votre maison, dit-elle à voix basse, comme en confidence, vous ressemble? Tout y paraît si amoureusement conservé qu'on s'y sent à l'aise et en sécurité. Ici, on a l'impression d'être à l'abri de tout, comme si le temps était figé. Ces murs conservent...
- Toute une vie?
Elle esquissa un geste comme si elle était sur le point de battre des mains, contente qu'il lui eût offert le terme juste.
- Toute une vie, reprit-elle, charmeuse.
Jaime Astarloa se leva et fit quelques pas à travers la pièce, contemplant en silence les objets auxquels elle faisait allusion : le vieux diplôme de l'Académie de Paris, l'écu d'armes taillé dans du bois et portant la devise A moi, un jeu d'antiques pistolets de duel dans une urne de verre, l'insigne de lieutenant de la Garde royale sur fond de velours vert dans un petit cadre accroché au mur... Il passa doucement la main au dos des livres alignés sur les étagères de chêne. Adela de Otero remarqua son geste et le regarda, lèvres entrouvertes, attentive, essayant de capter la lointaine rumeur qui sourdait de tous ces objets entourant le maître d'escrime.
- Il est beau de ne pas se résigner à l'oubli, dit la jeune femme au bout de quelques instants.
Il fit un geste d'impuissance pour signifier que personne ne pouvait choisir ses souvenirs.
- Je ne suis pas sûr que beau soit le mot exact, dit-il en désignant les murs couverts d'objets et de livres. Parfois, je me croirais dans un cimetière... Cette sensation s'en rapproche beaucoup : symboles et silence - il médita sur ce qu'il venait de dire et sourit tristement. Le silence de tous les fantômes que l'on a laissés derrière soi. Comme Enée fuyant Troie.
- Je sais ce que vous voulez dire.
- Vous le savez? Oui, peut-être. Je commence à croire qu'en effet vous le savez.
- Les ombres de ceux que nous aurions pu être et que nous n'avons pas été... N'est-ce pas de cela qu'il s'agit?... De ceux que nous rêvions d'être avant de nous réveiller - elle parlait d'un ton monocorde, sans inflexions, comme si elle récitait de mémoire une leçon apprise voilà bien longtemps. Les ombres de ceux que nous avons aimés, un jour, et que nous n'avons jamais rejoints, de ceux qui nous aimèrent et dont nous tuâmes l'espérance par maladresse, stupidité ou ignorance...
- Oui. Je vois que vous le savez parfaitement.
La cicatrice accentua le sarcasme du sourire :
- Et pourquoi ne le saurais-je pas? Ou alors croyez-vous que seuls les hommes sont capables de laisser derrière eux une Troie en flammes?
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- (...) Vous savez quoi? Parfois je me demande si dans notre pauvre Espagne les rôles n'auraient pas lamentablement changé et si la noblesse ne vous reviendrait pas de droit à vous plutôt qu'à beaucoup de mes connaissances, moi compris.
- Je vous en prie, don Luis...
- Laissez-moi parler, pour l'amour de Dieu! Laissez-moi parler... Mon grand-père, qu'il repose en paix, acheta le titre parce qu'il s'était enrichi en faisant du commerce avec l'Angleterre durant la guerre contre Napoléon. Cela tout le monde le sait. Mais la noblesse authentique, l'ancienne, ne s'est pas constituée grâce à la contrebande de tissus anglais mais bien à la pointe de l'épée. Est-ce vrai ou pas?... Et vous ne me direz pas, cher maître, que vous, une épée à la main, valez moins que n'importe lequel d'entre-eux. Ou même que moi.
Jaime Astarloa releva la tête et planta ses yeux gris dans ceux de Luis de Ayala.
- Une épée à la main, don Luis, je vaux tout autant qu'un autre.
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Son masque sous le bras et le fleuret appuyé au chausson de son pied droit, Alvaro Salanova fit une moue sceptique :
- Peut-être qu'un jour il n'y aura plus de maîtres d'escrime, dit-il.
Un long silence se fit. Jaime Astarloa regardait au loin, l'air absorbé, comme s'il observait le monde au-delà des murs de la salle d'armes.
- Peut-être, murmura-t-il, pris dans la contemplation d'images que lui seul pouvait voir. Mais laissez-moi vous dire une chose... Le jour où s'éteindra le dernier maître d'armes, tout ce que la lutte ancestrale de l'homme contre l'homme a encore de digne et de noble descendra dans la tombe avec lui... Car il n'y aura plus de place que pour le trébuchet et le poignard, le guet-apens et le coup de couteau.
Les quatre garçons l'écoutaient, trop jeunes pour comprendre. Don Jaime les regarda l'un après l'autre pour finalement s'arrêter sur Alvarito Salanova.
- En vérité - les rides s'assemblèrent autour de ses yeux souriants, amers et moqueurs -, je ne vous envie pas les guerres que vous vivrez dans vingt ou trente ans.
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Don Jaime pensa que dans la mémoire de tout homme se niche l'ombre douce et amère d'une femme. Lui aussi avait la sienne ; mais c'était déjà à présent une vieille histoire.
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