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EAN : 9791029804144
120 pages
Orphie (11/09/2020)
4.62/5   4 notes
Résumé :
Il court comme il respire. Des contreforts du Massif central aux cirques montagneux de la Réunion, sur le bitume froid de la route ou dans la poussière brune de la terre, il court. Il a pris le relais du vieillard aux cheveux blancs qui l’a tiré de sa diagonale du vide. Il n’a pas d’autre raison de vivre depuis qu’un jeune Créole a noyé sa colère dans l’alcool et les fumées de l’enfer, essayant d’oublier celle qu’il a aimée. Il court, jusqu’au bout, pour qu’un autre... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Deux hommes, deux destins, une passion : la course à pied. L'un cherche, l'autre se perd et ils se trouvent au bord de la route. Que faire ? Choisir la bonne direction ou fuir la réalité. Ils ont tous les deux un passif mais un même décor : l'île de la Réunion, sa beauté sauvage et volcanique, un paradis en trompe-l'oeil avec son mythique trail : la course des fous. Sauront-ils se dépasser pour atteindre à leur manière la ligne d'arrivée ?

Jean-Michel Philibert propose deux personnages chahutés par la vie. Tout d'abord Ulysse, mais pas celui de du Bellay, celui-ci n'est pas heureux et n'a pas fait de grands voyages, au grand dam de son père. Par contre, il décolle souvent vers les paradis artificiels que procurent drogue et alcool. Il était doué pour la course à pied mais il a dégoupillé comme cela au détour d'un chemin dans Mafate et depuis il n'est plus vraiment remonté à la surface. Il tente d'oublier son échec, sa compagne, et les espoirs que fondait, en lui, sa famille.
De l'autre, on découvre le narrateur avec une histoire singulière aux accents de scandale d'Etat. Il se définit d'ailleurs comme un « créopolitain » : natif de l'Ile, on l'a déraciné enfant, sous un prétexte fallacieux, pour l'acheminer et se perdre dans la Creuse. Pas vraiment d'ici mais pas de là-bas non plus. Il n'est qu'un prénom, de sa famille il n'a que des souvenirs évanescents. En quête d'identité, celle que lui a volée la France. Il devient le mentor d'Ulysse. Ensemble ils vont chercher la résilience.

L'auteur met en lumière cette merveilleuse île de l'océan Indien, notamment Hell-Bourg, un village dans le cirque de Salazie et ses cases colorées, évoquant aussi sa faune et sa flore. Mais tout n'est pas rose au paradis, car Jean-Michel évoque aussi les relents du colonialisme, l'alcoolisme, la drogue, la pauvreté. Il nous parle aussi de cette population métissée où «tous vivent en harmonie [car] le racisme n'existe que par l'ignorance de la diversité ». le lecteur découvrira beaucoup de choses sur cette région, je vous conseille d'ailleurs d'effectuer des recherches en même temps que votre lecture si vous ne connaissez pas l'endroit. Un bémol toutefois, l'utilisation du langage créole met certes dans l'ambiance mais le z'oreille que je suis n'a, malheureusement, pas tout compris.

Le traileur que je suis s'est retrouvé dans les propos de l'écrivain même si ce côté est peu abordé pour mon goût de spécialiste. D'une part, cette diagonale des fous, nom donné au Grand Raid par les métropolitains, car il faut être un peu fou pour affronter ces 160 kilomètres et 10000 mètres de dénivelé positif. D'autre part, la course à pied est vécue ici comme une philosophie de vie avec des paragraphes qui parleront aux amateurs d'efforts de longue distance et qui tenteront d'expliquer aux autres toute la passion qu'on peut y mettre.

Ce livre court se dévore comme un sprint mais vous laisse dans une posture du coureur de fond pour les réflexions qu'il engendre sur la responsabilité de la France dans le scandale des enfants de la Creuse, sur la revendication de ses racines, sur la nécessité de vivre sa vie et non celle prônée par d'autres et sur le passage de témoin.
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La diagonale du Fou, c'est ce trail mythique qui traverse l'île de la Réunion sur plus de 160 kilomètres et qui, sous la plume de Jean-Michel Philibert, devient tout à la fois, un but, une toile de fond et un prétexte.

Un but, celui d'Ulysse, un trentenaire paumé, un ex-coureur prometteur et brillant qui s'est perdu dans l'alcool et la fumette et qui va redonner un sens à sa vie en croisant la route du narrateur. Celui-ci est un des enfants de la Creuse, ces gamins déracinés, arrachés à leurs familles et à leurs origine pour soi-disant repeupler les zones rurales de la France des trente glorieuses, pas franchement métropolitains, mais plus vraiment réunionnais. Sa rencontre avec Ulysse, si elle ne le guérit pas de sa lancinante quête de sens et de repères va lui offrir l'opportunité de se muer en ange gardien, accoucheur d'une rédemption et d'une résurrection.

Une toile de fond, car l'auteur nous dépeint avec à-propos et subtilité cette île de la Réunion, souvent fantasmée et travestie en un eldorado de l'océan indien. Si le dépaysement est total au travers des descriptions colorées et sensuelles de paysages grandioses et d'une population à la légendaire hospitalité, on est cependant bien loin de l'image d'Epinal, car l'écrivain n'occulte jamais l'envers d'un décor en apparence paradisiaque : violence, alcoolisme, drogues, chômage, passé esclavagiste,...

Un prétexte, celui qui conduit les deux principaux protagonistes à utiliser la course à pied pour, au-delà de la pure performance sportive, se racheter, s'accomplir en tant qu'être humain et même, plus fondamentalement, en tant qu'être vivant. Sous la plume de Jean-Michel Philibert, courir ce n'est pas seulement, un départ et une arrivée, c'est une philosophie, une parenthèse hors du temps et de l'espace, un don, celui de soi et une réminiscence, celle de temps anciens où l'homme ne se déplaçait d'un point à un autre que grâce à ses deux jambes.

La diagonale du fou est un roman court, 110 pages, qui se dévorent, s'avalent comme des kilomètres d'asphalte et de pistes, le souffle court, la foulée parfois légère, allongée d'autres fois, pesante, chaotique en se laissant bercer par la brise qui caresse les cheveux, le battement de la pluie sur le visage et la musique de Bernard Lavilliers qui résonne dans la tête.
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D'une très belle écriture, variée, sachant user des différents registres de langue pour toucher, émouvoir, secouer le lecteur, ce roman nous plonge dans la vie quotidienne de l'Île de la Réunion. le fil rouge en est bien sûr la course, à travers l'évocation du Grand Raid, et le rôle de cette pratique sportive dans la reconstruction d'une vie ; mais, le roman offre aussi une riche galerie de portraits et captive par son érudition.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Mais il court aussi pour se souvenir. Il court parce que le but de la vie n'est pas le repos. Il court parce qu'il est végétal, que ses racines sont terrestres.
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Ils arrivent par grappes, ou bien seuls. Sales, brûlants de fatigue, caillés de sueur.
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