La bonne nuit
Je sens comme une main posée
sur mon sommeil,
une main victorieuse de la peur dont j’ai peur…
Belle main, livre-moi aux sables du repos,
où ne marche personne en sa forme charnelle.
J’entends comme une voix qui me dit
d’oublier.
Vient se mettre à l’abri dans ce que j’ai perdu.
Et la nuit nous regarde blottis l’un contre l’autre.
Je vois comme une étoile, sans lieu, sans nom,
et sans clarté. Adieu infiniment lointain,
au commencement de tout.
Qui me parle, ce soir …
Qui me parle, ce soir ? Quelle ombre
a su que j'avais besoin d'elle ,
et d'entendre sa voix
de pluie lointaine, de haut feuillage ?
(...)
Qui vient, qui est venu
par la porte scellée tout au fond de ma vie ?
Lisière
Que s’envolent et volent donc
les feuilles, puisque c’est le moment
et qu’elles semblent heureuses
d’aller vers le sombre des jours.
Si l’une d’elles venait
se poser sur mon cœur,
peut-être aurais-je moins
peur de la mort
Sur la table lustrée…
Sur la table lustrée comme un livre précieux
il y a quelques fruits dans une assiette blanche.
Le chat recueilli trouve pour nous séduire
un calme suffisant
parmi les heures de tous les jours (...)
Je n’aime d’autres vies…
Je n’aime d’autres vies que celles retirées
en des pièces un peu sombres
où les mains, rarement, effleurent
quelque objet
qui se souvient de tout (...)