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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
****

Ruth Jefferson est infirmière en néonatalogie. C'est une vocation. Elle travaille depuis 20 ans dans le pavillon des naissances de l'hôpital Mercy-West Haven. Elle élève seule son fils de 17 ans, Edison, depuis que son époux est décédé en mission dix ans plus tôt. Jusque là, la vie suit son cours, partagée entre joies, difficultés, fiertés et doutes... Mais un beau matin, alors qu'elle est de service et qu'elle doit prendre en charge une famille née de la veille, elle est confrontée à un problème de taille : sa responsable hiérarchique lui demande de ne plus toucher Davis, le bébé de Brittany et Turk, couple suprémaciste blanc. Son monde bascule...

J'avais ce roman depuis quelques temps dans ma PAL. Je savais que je le lirais et qu'il me plairait. La plume de Jodi Picoult n'est plus à vanter. Elle écrit très bien, elle est centrée sur des personnages étudiés et fins, elle a des histoires qui sonnent juste et des mots toujours choisis.

Dans Mille petits riens, elle s'attaque au racisme, sujet difficile et dangereux. Mais elle réussit avec brio ! Sans cliché, sans jugement, elle peint un portrait de la société qui n'épargne personne. Ruth, le personnage noir du roman, s'est battue pour faire partie du monde des Blancs et l'injustice qu'elle vit la fauche de plein fouet. Elle se croyait à l'abri... Kennedy, l'avocate blanche, se croit au-dessus de ses questions de racisme et de discrimination, mais elle est forcée de voir que les préjugés et les différences existent et perdurent...

C'est un très beau et bon roman non sur l'égalité, mais sur l'équité... A lire, à réfléchir, à partager...
Lien : https://lire-et-vous.fr/2018..
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Sujet délicat : le racisme aux États-Unis de nos jours.
Jodi Picoult s'en sort honorablement. Elle relate l'histoire d'une infirmière noire accusée du meurtre du bébé de parents suprémacistes, en mettant en évidence le racisme ordinaire quotidien.
L'écriture limpide et simple permet une lecture aisée des 649 pages (et la taille des caractères est plutôt petite).
Cependant, certains personnages sont un peu trop appuyés et voire caricaturaux (le père du bébé et son entourage). Cela ne veut pas dire que ce genre de personnes n'existe pas.
Par ailleurs, de nombreux évènements, surtout à la fin de l'ouvrage, sont guère crédibles.
La fin du livre aurait mérité d'être appréhendée avec plus de profondeur.

Ouvrage à découvrir. Une belle lecture qui traite d'un sujet dont il faut parler.
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Une fois n'est pas coutume, je vais d'abord dire quelques mots sur la postface écrite par l'auteure. J'ai été touché par le questionnement ( qui est en résonance avec le roman ) de Jodi Picoult sur sa légitimité de "blanche" à écrire un livre sur le racisme qui touche la communauté noire aux États-Unis, sur son humilité et sa remise en question, qui l'ont conduite à emprunter un véritable chemin initiatique, lequel, dit-elle, l'a profondément changée.
Il m'a paru que cette démarche méritait d'être soulignée, parce qu'elle témoigne à la fois d'un énorme respect pour "le rôle et la place de l'écrivain " dans la société, et parce que cette démarche renvoie ( c'est mon point de vue ) l'image "d'une belle personne".
Ce n'est donc pas Toni Morrison ou Maya Angelou ou bien encore Colson Whitehead ni même Ta-Nehisi Coates qui ont écrit ce "pavé" sur l'état de l'Amérique d'Obama et de Trump, sur ces maux et en particulier sur ces deux cancers, qui n'en sont en fait qu'un qui a métastasé : le racisme et son corollaire le suprématisme blanc, mais une écrivaine blanche... obsédée par le sujet, et qui a attendu longtemps avant de se mettre à la tâche ( j'ai évoqué précédemment les raisons de ses hésitations, de ses scrupules).
Puis un jour, Jodi Picoult a entendu parler d'un évènement survenu dans une maternité : un suprématiste blanc avait refusé qu'une infirmière, parce qu'elle était noire, prodigue les soins qu'elle était habilitée à prodiguer...
Le déclic !
Le roman pouvait prendre naissance.
C'est une histoire articulée autour de trois voix, trois personnages centraux et emblématiques : Ruth , infirmière-sage-femme ( les formations et les diplômes ne sont pas équivalents entre les USA et l'Europe... pour faire large)... noire, Kurt, jeune blanc suprématiste et Kennedy, avocate blanche... a priori dépourvue de toute forme de préjugés raciaux...
Ces trois personnages vont se rencontrer, se confronter à travers la mort d'un nourrisson, qui de "naturelle", va devenir, de par le contexte déjà mentionné, une mort "criminelle".
L'histoire est palpitante, haletante, émouvante, angoissante, irritante, passionnante... et pleine de rebondissements.
Le sujet est bien tenu, les personnages ont du relief, l'écriture est alerte, de qualité, efficace.
Bref, c'est un de ces bouquins qu'on se félicite d'avoir ouvert et dont a du mal à se "défaire".
Pour celles et ceux qui aiment les "procès"... vous savez... la sélection des jurés, le juge revêche, la procureure intraitable, l'avocate dont c'est la première grosse affaire... les interrogatoires, les contre-interrogatoires... les passe d'armes... bref, tout ce qui fait le charme du genre... vous allez vous régaler !
Mon seul regret : le réalisme des 600 et quelques premières pages est un peu mis à mal par l'ultime rebondissement... que je vous laisse découvrir et apprécier.
Un roman, si possible, à ne pas manquer !
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Un sacré coup de chapeau à Jodi Picoult et à ses Mille petits riens pour avoir osé s'identifier à un personnage noir, qui plus est en Amérique où la question raciale fait partie intégrante de l'Histoire.
Sujet délicat s'il en est, je ne suis pas Afro-américaine pour juger avec légitimité de la réussite de son propos, mais à tout le moins, peut-on souligner l'effort remarquable d'écriture pour nous permettre de nous glisser dans sa peau, oserais-je dire, et à ressentir l'injustice de la discrimination.

Au travers d'un roman polyphonique, l'auteure nous sensibilise au sort quotidien des personnes de couleur - aux injustices criantes telles que l'infirmière Ruth en sera victime dans l'exercice de sa profession - mais aussi aux petites choses du quotidien qui donnent les privilèges aux Blancs, inconscients souvent de bonne foi de ceux-ci, au point de se payer le luxe de ne pas y prêter attention. C'est à tous ces petits riens que Jodi Picoult nous éveille et nous questionne.

Avec les personnages de Ruth, l'infirmière noire accusée d'avoir tué le bébé d'un suprématiste blanc, et de Kennedy, son avocate blanche, le roman choral prend tout son sens pour nous faire percevoir les deux versants d'une réalité inégale. La même scène vécue par Ruth et par Kennedy sont à cet égard deux chapitres particulièrement réussis.

Le roman donne aussi la parole à Turk, le néonazi, mais je n'ai pas du tout accroché au personnage qui est une brute épaisse bas de plafond presque caricatural et dont les justifications de la haine ne m'ont - et c'est heureux - pas amenée à le comprendre. de toute façon, quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage, et le racisme à ce point décomplexé n'échappe à personne. Donc, creuser ce personnage ne m'a pas semblé nécessaire et m'a même gênée (et en tout cas pas intéressée). En outre, le dénouement lié à ce personnage parait un brin romanesque, même s'il s'appuie en partie sur des faits réels.

Mais qu'importe, les chapitres sur Turk ne viennent pas ternir l'ensemble qui se lit remarquablement bien. Plus de 650 pages avalées comme on boit du petit lait. Une écriture très agréable, des personnages à la psychologie travaillée et une profondeur de réflexion servie par un travail de recherches exigeant, comme toujours avec cette auteure.

En bref, tout ce que j'aime dans la littérature; lorsqu'elle nous distrait en même temps qu'elle nous enrichit.
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Un roman à trois voix, trois narrateurs qui se partagent le récit, trois personnes qu’un drame va amener à se rencontrer.

Kennedy est une avocate commise d’office, elle ne sera jamais riche, mais elle pourra continuer de se regarder dans une glace. La voilà en charge de la défense d’une infirmière noire accusée d’avoir tué un bébé.

Tucck est un suprémaciste blanc, avec ses amis du White Power, armés de marteaux de tapissier, de crosses de hockey, de matraques ou de barres à mines, ils passent à tabac, les négros, les pédales et les youpins. Son frère aîné a été tué par un nègre. Avec les groupuscules néonazis, skinheads, ils se réunissent le 20 avril pour fêter la naissance d’Hitler. Tout ce qu’il veut c’est offrir à son bébé la plus belle vie possible, mais son fils est mort à la maternité, et c’est la faute à cette négresse d’infirmière.

Ruth, depuis vingt ans elle exerce son métier d’infirmière en obstétrique, elle aide les femmes à accoucher, elle s’occupe des mamans et des nourrissons. Elle est la seule infirmière noire de son hôpital, elle essaye désespérément de s’intégrer sans heurt. Son mari a été tué alors qu’il servait en Afghanistan, son fils Edison, est un étudiant brillant. Mais un jour, le train entier de sa vie déraille, elle fait l’objet d’une mesure de suspension, on la tient pour responsable de la mort d’un bébé.

Loin des stéréotypes, une réflexion sur le racisme quotidien dans l’Amérique contemporaine. Un sujet épineux, difficile à aborder, c’est la raison pour laquelle nous l’évitons la plupart du temps. L’auteur décrit parfaitement le cheminement qui va conduire un jeune à s’enraciner dans un racisme militant. Nous pénétrons au cœur de la salle d’audience où une jeune femme noire souhaite simplement que les gens sachent qu’elle a été traitée injustement à cause de la couleur de sa peau. Elle prend le risque de perdre son travail, son gagne-pain, sa liberté, mais elle veut dire la vérité.

Le temps des excuses, du pardon et de la rédemption. Un roman sur les mille petits riens de la vie quotidienne qui ont sur les autres des conséquences importantes. Un livre manifeste contre la discrimination raciale qui ne peut laisser le lecteur indifférent.


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Avec ce nouveau roman, Jodi Picoult nous plonge dans un véritable bouillon de sentiments et d'émotions contradictoires. De ce bouillon émanent des effluves de professionnalisme, d'efforts d'intégration, de persévérance, de compassion et de tendresse. Mais de ce chaudron bouillonnant ressortent aussi des relents de haine, de colère, de violence, d'aveuglement et d'injustice.

Écoutons la voix de Ruth, africaine-américaine. Elle se souvient de cet instant où sa mère a aidé à mettre au monde le bébé de sa patronne. Cet instant, si fugitif, pendant lequel elle a perçu l'abolition des différences sociales et raciales. Ruth était alors âgée de cinq ans et c'est ce miracle, en suspens, qui l'a conduite à devenir infirmière sage-femme. Pour se donner toutes ses chances, elle choisit d'étudier, de vivre et d'exercer ensuite son métier parmi les blancs. Attachée uniquement au bien-être de ses patientes, elle ne peut envisager les limites de l'intégration qui sont pourtant encore bien réelles aux États-Unis. Ses relations avec sa soeur, plus aigrie ou alors simplement plus réaliste face aux difficultés raciales, sont très conflictuelles tout en étant très fraternelles : une ambigüité que j'ai trouvée très intéressante et très bien exploitée par l'auteure.

Écoutons la voix de Turk, un suprémaciste blanc convaincu. Avec sa femme qui vient d'accoucher dans l'hôpital où exerce Ruth, tous deux refusent que cette infirmière noire touche leur bébé. Il nous relate ce parcours qui l'a fait basculer vers ces groupes extrémistes et leurs idéologies racistes. Lorsque son bébé décède, ce n'est que par la violence et la haine qu'il peut extérioriser sa douleur en accusant Ruth du meurtre de son petit Davis.

Écoutons la voix de Kennedy, jeune avocate de la défense publique. Elle n'a encore jamais plaidé une affaire de meurtre mais va entamer ce procès comme il est de bon ton de le faire dans les tribunaux américains, sans soulever le problème racial alors qu'il semble bien que c'est uniquement lui qui est au coeur de cette tragédie.

Ces trois voix nous chuchotent, nous disent ou nous crient leur propre ressenti. Elles nous submergent, nous révoltent, nous bousculent dans nos propres convictions.

C'est rythmé et profond même si quelques passages dans le procès sont parfois redondants.
Jodi Picoult révèle la part cachée du racisme, les innombrables préjugés raciaux qui hantent encore l'Amérique, mais aussi tous ces petits riens qui font avancer vers une prise de conscience de la justice ou plutôt de l'injustice sociale liée à la couleur de peau.
Pour coller à la réalité, l'auteure s'est appuyée sur une solide documentation qui donne beaucoup de crédibilité à tous les thèmes abordés.

J'ai eu un coup de coeur pour le passage dans lequel Ruth compare la problématique raciale, niée par tous, à l'énormité d'un éléphant qui se promènerait dans le tribunal !

Je remercie Actes Sud et Masse Critique pour l'offre de ces belles heures de lecture.
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Jodi Picoult explique s'être inspirée d'un fait réel dont elle a eu connaissance.
Une infirmière afro-américaine travaillant depuis plus de vingt ans dans la maternité d'un hôpital du Michigan a été confronté à un père, suprémaciste blanc, exigeant auprès de la cadre responsable qu'elle ne touche pas à son bébé.
Voilà : le point de départ d'un roman était trouvé.

Voyons tout d'abord les atouts de ce livre, et ils sont nombreux.
Jodi Picoult a créé des personnages très crédibles, très vivants.
L'histoire est prenante et très bien construite.
C'est un récit à trois voix (l'infirmière, le père, l'avocate), et l'alternance des points de vue permet au lecteur d'être vraiment immergé dans l'action et de bien comprendre tous les enjeux.
Le texte est bien écrit, la lecture est très agréable.
Bref, voilà une lecture très plaisante et les plus de 650 pages de l'édition de poche se tournent à toute vitesse.

Le thème central du livre est le racisme aux États-Unis, qu'il soit ouvertement revendiqué comme chez les suprémacistes ou plus insidieux et présent chez nombre de personnes qui n'en ont pas conscience : des habitudes, des choses qui vont de soi, des questions qu'on ne s'est jamais posé...
Par son récit fictif, Jodi Picoult initie une réflexion que j'ai trouvée fort intéressante.

Si je m'arrêtais là, je conclurais en disant : un excellent roman !

Mais... vous vous doutez bien qu'il y a un "mais"...
Passons maintenant aux points négatifs, ou plutôt au point négatif car je n'en ai vu qu'un : la fin.
Pas juste la dernière page, non. Toute la fin.
Si je me suis régalée lors de cette lecture, mon enthousiasme a été bien refroidi lorsque le récit vire à la leçon de morale, "gros sabots" et sans aucune finesse.
Quel dommage !

L'histoire suffisait !
Les personnages formidables suffisaient !
La narration suffisait pour que le lecteur prenne conscience, pour qu'il réfléchisse.
C'est ça la magie de la littérature : à travers un récit fictif, un auteur peut amener le lecteur à réfléchir. C'est l'un des aspects que j'aime dans la lecture. Des portes s'ouvrent dans mon esprit et je découvre de nouveaux paysages à explorer. J'adore ça !
Mais je n'aime pas du tout quand un auteur me désigne un chemin tout tracé, une voie obligatoire à suivre et me martèle ce qu'il est bon de penser ou de ne pas penser. Je trouve ça lourd !
Le message envoyé par Jodi Picoult est un message fort et important mais il aurait été plus percutant s'il avait été délivré avec plus de finesse.

Je ne voudrais surtout décourager personne de se lancer dans cet ouvrage qui, j'insiste, est très agréable à lire, mais je voulais bien expliquer mon point de vue.
À vous de me dire le vôtre !
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Ruth est infirmière depuis 20 ans à la maternité de New Haven. Elle concentre la reconnaissance des patientes, de ses supérieurs et de ses collègues.
Un couple de suprémacistes blancs vient d'avoir son premier bébé. L'arrivée de Ruth dans la chambre leur coupe le souffle : elle est afro-américaine. Leur demande de changer d'infirmière est acceptée par la direction de l'hôpital. Mais le lendemain, le bébé meurt malgré la tentative de réanimation d'une équipe composée notamment de Ruth.
Un procès s'en suivra.
J'ai un avis très mitigé sur la façon dont le sujet du racisme est traité dans ce roman.
D'un côté, l'auteure attire l'attention sur les mille petits riens qui font de la vie des afro-américains un enfer quand ils vivent dans un quartier de « blancs » : la surveillance renforcée dans les magasins, les changements de file d'attente, les fouilles systématiques après le passage en caisse, les préjugés de violence et de de précarité intellectuelle et sociale. le pire est bien sûr les remarques soi-disant non racistes de personnes bien intentionnées : « je suis si contente que cela arrive à quelqu'un comme vous ! « (ben voyons).
De l'autre côté, il me semble que l'auteure n'avait pas besoin d'avoir recours à des personnages suprémacistes, des comptes rendus de réunion de défense de la race aryenne. de même, le fait que la procureure soit noire ou bien la fin que je ne dévoilerai pas mais qui est indigne au respect du lecteur, sont des artifices caricaturaux qui viennent entacher le propos et le décrédibilisent.
Déçue
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Par cette histoire, l'auteur relate des faits et pose des interrogations sur la place de chacun avec sa couleur et dans la société. Elle décrit également la vision suprémaciste de certains. Cette double description constitue une histoire romanesque mais également un "essai" sur la ségrégation raciale. Jodi Picoult s'en explique et donne sa vérité. A chacun d'en tirer sa conclusion. Par cette lecture passionnante et émotionnellement très forte, je me suis sentie une lectrice active. Je recommande.
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Ca faisait longtemps que je voulais me plonger dans un second roman de Jodi PICOULT, ayant eu un véritable coup de coeur pour « Ma vie pour la tienne ». Cette année, son roman a pour objet un sujet difficile à traiter pour une blanche qui n'a pas à le subir au quotidien : le racisme. Comme l'explique l'auteure en postface, elle ne voulais pas le traiter sous un volet historique comme la plupart des romans, mais bien de nos jours. Les faits divers, mais aussi ses rencontres avec les premiers concernés ainsi que d'anciens suprémacistes l'y ont grandement aidé. Mais c'est encore une fois son talent et sa finesse qui en font une oeuvre réussie.

C'est l'histoire de Ruth, seule infirmière noire du service de maternité, exerçant dans cet hôpital depuis vingt ans. Appréciée de ses collègues, qui sont pour ainsi dire des amies, son talent est reconnu de tous. Elle possède une bonne situation dans un quartier blanc bourgeois où elle élève seule son fils de 17 ans, son père étant mort au combat pour son pays.

Elle a travaillé dur pour en arriver là : Sa mère était l'employée de maison toujours à disposition d'une riche famille blanche. Avec sa soeur Rachel, elles ont des parcours très différents. Beaucoup plus noire de peau, Rachel a subi plus que sa soeur les effets du racisme et de la discrimination, qu'elle ne cesse de dénoncer. Habitant un quartier noir assez peu sûr, elle mène une vie que comprend mal Ruth, qui a tout fait pour s'intégrer, être la meilleure à l'école, faire de bonnes études et offrir la même chose à son fils. Persuadée que, si tu donnes le meilleur de toi et fait tes preuves, la communauté blanche ne te rejettera pas.

Et elle y croit, jusqu'au jour où un suprémaciste blanc demande à sa supérieure de lui interdire de toucher son bébé. Alors le monde de Ruth s'écroule, elle est en colère mais ses collègues blanches ne la soutiennent pas, lui disent que ce n'est pas grave, une exigence d'un patient comme une autre. Et quand le bébé meurt pendant son service, ce n'est pas l'hopital, mais seulement Ruth, qui est poursuivie. le miroir aux alouettes vole en éclat : Pour la première fois, Ruth est ouvertement visée pour sa couleur de peau. Pour la première fois ? C'est alors qu'elle prend conscience des milles petits riens qu'elle ignore au quotidien pour avancer, mais qui la stigmatisent en permanence.

« Je sais ce que vous pensez en ce moment : Je ne suis pas raciste, moi. C'est clair, nous avons eu un exemple vivant de ce qu'est le vrai racisme, incarné par Turk Bauer. (…) Pourtant, même si nous décidions d'envoyer tous les néonazis de cette planète sur Mars, le racisme existerait encore. Parce qu'en réalité le racisme ne se résume pas à la haine. Nous avons des préjugés, même si nous n'en sommes pas conscients. »

Lors de son accusation, son avocate commis d'office lui affirme pourtant que, pour gagner son procès, il faut s'appuyer sur des éléments médicaux mais ne surtout pas aborder la couleur de peau en salle d'audience : Ca mettrait les jurés mal à l'aise, peut-être se poseraient-ils des questions sur eux et il n'aimeraient pas ça. Or, pour être acquittée, il faut plaire au jury…

*****

C'est un magnifique roman à trois voix que nous propose Jodi PICOULT : Nous écoutons alternativement Ruth, le skinhead, et l'avocate blanche (Kennedy) qui défend Ruth. Trois points de vue bien différents mais pas figés : Chacun, au cours du procès, va être amené à évoluer du fait des évènements. Même le skinhead - il n'est évidemment pas question de cautionner l'idéologie -, lorsque l'auteur nous met dans sa peau, parvient à nous expliquer l'immense désarroi à l'origine de ses convictions, qui révèle un fond d'humanité qu'on a envie d'exploiter pour changer les choses. Car souvent, l'élément déclencheur semble tenir à si peu de choses... Il est difficile pour le lecteur de pénétrer un tel milieu, mais l'auteur n'ôte jamais toute humanité à ses personnages, et c'est là tout l'espoir du roman.

Pendant ce temps, Ruth veut absolument aborder la question du racisme dans son procès, même si elle doit perdre, car elle est persuadée que c'est la seule raison pour laquelle est est accusée de meurtre. La relation entre Ruth et l'Avocate permet de dénoncer et de montrer ce racisme invisible pour un oeil blanc, mais composé de mille petits riens qui ébrèchent le quotidien des personnes de couleur.

"- Est-ce que tu savais que, dans le Roi Lion, les hyènes, qui jouent le rôle des méchants, parlent toutes l'argot des Noirs ou des Latino-Américains ? Et que les lionceaux n'ont pas le droit d'approcher le territoire des hyènes ?

Il me dévisage d'un air amusé.

- Est-ce que tu as remarqué que Scar, le vilain de l'histoire, est plus foncé que Mufasa ?

- Kennedy.
Micah pose ses mains sur mes épaules. Puis il se penche vers moi et m'embrasse.
- Tu ne serais pas en train de dramatiser un chouïa ?

A cet instant précis, je sais que je vais remuer ciel et terre pour récupérer le dossier de Ruth."

Un roman magnifique, très réussi et bien traité. L'écriture est fluide, la construction extrêmement soignée, et l'auteure donne la parole à ses personnages au bon moment, ce qui fait de ce roman un page turner qui se lit d'une seule traite !

On se retrouve bourré d'humanité comme dans "Ma vie pour la tienne" même si selon moi il reste peut-être un cran en dessous en émotion. Et encore une fois, un procès parfaitement reconstitué où l'on voit l'importance de la sélection des jurés, de la stratégie des questions ou encore des thèmes à aborder ou non. A lire et à faire lire, sans modération !

Lien : http://onee-chan-a-lu.public..
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