Citations sur Volkswagen Blues (49)
Jack humait l’air et regardait de chaque côté de la route.
C’était une odeur humide et accablante, épaisse et comme un peu vaseuse, semblable à ce que l’on pouvait sentir dans un sous-bois marécageux, un mélange d’eau, de terre et de plantes, une odeur d’eau boueuse et de mousse vieillie.
En arrivant à un pont, ils virent un cours d’eau très large avec des eaux jaunes et lourdes ; ils comprirent tous les deux et sans avoir besoin de se dire un mot que c’était le Mississippi, le Père des Eaux, le fleuve qui séparait l’Amérique en deux et qui reliait le Nord et le Sud, le grand fleuve de Louis Jolliet et du père Marquette, le fleuve sacré des Indiens, le fleuve des esclaves noirs et du coton, le fleuve de Mark Twain et de Faulkner, du jazz et des bayous, le fleuve mythique et légendaire dont on disait qu’il se confondait avec l’âme de l’Amérique.
PRIERE SIOUX POUR LE RETOUR DES BISONS (1889)
Père, aie pitié de nous ;
Nous pleurons parce que nous avons soif,
Tout est fini.
Nous n’avons rien à manger ;
Père, nous sommes misérables.
Nous sommes très malheureux.
Le bison n’est plus.
Ils ont tous disparu.
Aie pitié de nous, Père ;
Nous dansons comme tu le désires
Puisque tu nous l’as ordonné.
Nous dansons avec peine,
Nous dansons longtemps.
Aie pitié,
Père, aide-nous ;
Nous sommes près de toi dans les ténèbres ;
Entends-nous et aide-nous,
Chasse les hommes blancs,
Ramène le bison,
Nous sommes pauvres et faibles,
Nous ne pouvons rien seuls ;
Aide-nous à être ce que nous étions
D’heureux chasseurs de bisons.
Il y a des gens qui disent que l'écriture est une façon de vivre ; moi, je pense que c'est aussi une façon de ne pas vivre. Je veux dire : vous vous enfermez dans un livre, dans une histoire, et vous ne faites pas très attention à ce qui se passe autour de vous et un beau jour la personne que vous aimez le plus au monde s'en va avec quelqu'un dont vous n'avez même pas entendu parler...
Jack trouva un Petit Robert des noms propres et, dans la notice biographique de Saul Bellow, il lut cet extrait des " Aventures d'Augie March":
Je suis une sorte de Colomb pour tous ceux qui sont à portée de la main et je crois fermement qu'on peut les rejoindre dans cette terra incognita immédiate qui s'étend devant chaque regard.
Avec le temps, "le Grand Rêve de l'Amérique" s'était brisé en miettes comme tous les rêves, mais il renaissait de temps à autre comme un feu qui couvait sous la cendre.
Rouge de colère, la fille pointait du doigt une Gatling, une sorte d’ancêtre de la mitrailleuse, avec une culasse fixe et plusieurs tubes accolés les uns aux autre qui faisaient office de canon et obéissaient à un mouvement de rotation. […]
La fille poussait toutes sortes de cris et de jurons, moitié en anglais, moitié en français.
- ESPÈCE DE ZOUAVE !
- Beg your pardon ? fit le jeune homme.
- YOU SHOOT INDIANS WITH THAT TABARNAK DE MACHINE GUN ?
-Chaque fois que... c'est toujours la même chose, disait-il, chaque fois que je vois un vieil homme au bord d'une rivière ou d'un fleuve, il faut que j'aille lui parler-c'est plus fort que moi.
(...) -Longtemps je me suis demandé pourquoi je faisais ça, poursuivit Jack. Je ne comprenais pas. Je voyais un vieil homme au bord de l'eau et, chaque fois, quelque chose me poussait à aller lui parler. Mais aujourd'hui, je pense que j'ai trouvé la raison.
Il se tut; il laissa le silence se prolonger et, finalement, la fille demanda quelle était cette raison.
-Maintenant que je veux le dire, ça me paraît complètement ridicule, dit-il.
-ça ne fait rien, dit-elle.
-Voilà, dit-il. Ce que les vieux contemplent, quand ils rêvent au bord du cours d'eau, c'est leur propre mort; je suis maintenant assez vieux pour le savoir. Et moi, je m'approche d'eux parce qu'au fond de moi, il y a une ou deux questions que je voudrais leur poser. Des questions que je me pose depuis longtemps. Je voudrais qu'ils me disent ce qu'ils aperçoivent de l'autre côté et s'ils ont trouvé comment on fait pour traverser. Voilà, c'est tout. (p. 130)
il ne faut pas juger les livres un par un. Je veux dire : il ne faut pas les voir comme des choses indépendantes. Un livre n’est jamais complet en lui-même ; si on veut le comprendre, il faut le mettre en rapport avec d’autres livres, non seulement avec des livres du même auteur, mais aussi avec les des livres écrits par d’autres personnes.
La première phrase [d'un roman], selon lui, devait toujours être une invitation à laquelle personne ne pouvait résister - une porte ouverte sur un jardin, le sourire d'une femme dans une ville étrangère.
Mon frère Théo, je ne l'ai pas vu depuis une vingtaine d'années, alors il est à moitié vrai et à moitié inventé. Et s'il y avait une autre moitié...(p. 149)