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EAN : 9782413000402
300 pages
Delcourt Littérature (09/10/2019)
3.38/5   65 notes
Résumé :
« J’ai grandi à Chesterfield County en Virginie. Au bout de ma rue, je pouvais apercevoir un champ et les ruines solitaires d’une plantation, datant d’avant la Guerre Civile, qui se détachaient au milieu de la banlieue en expansion de Richmond. Une image qui m’habite encore aujourd’hui. »

Cette plantation est au centre du second roman de Kevin Powers, dans lequel il tente d’approcher la vérité de ceux qui y ont vécu. Nul n’a jamais su par exemple ce... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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Il y a des livres exigeants, qui nécessitent une totale attention, qui te font parfois douter de là où ils veulent t'emmener, qui t'envoient même, fugacement, la tentation d'abandonner, mais qui ne se révèlent pleinement qu'à la fin de leur lecture, te procurant la satisfaction d'avoir lu un grand livre. L'écho du temps de Kevin Powers -traduit par Carole d'Yvoire- est de ceux-là.

Que s'est-il passé en 1865 près de Richmond en Virginie, sur la plantation Beauvais, peu après la fin de la guerre de Sécession ? Un drame s'y est manifestement déroulé, épilogue d'un scénario qui couvait depuis longtemps ente les différents protagonistes : Levallois, le propriétaire arriviste et affairiste ; Reid l'ancien propriétaire, que l'on croyait mort à la guerre ; Emily sa fille désabusée ; sans oublier Rawls et Nurse les esclaves en passe d'être affranchis, John Talbot le rescapé ou le colonel Fitzgerald nordiste vainqueur venu appliquer la nouvelle loi dans le Sud défait. Et parallèlement, Georges, qui des années plus tard tente de comprendre ce pan d'histoire dont il fut acteur malgré lui.

Vous l'aurez compris – et j'en omets volontairement – le nombre d'acteurs du drame est important et Powers s'attache à nous les décrire longuement un à un (y compris les personnages a priori secondaires), comme s'il souhaitait que l'on comprenne chacun. C'est lent, c'est émouvant, c'est souvent très beau. Des longs chapitres, peu de dialogues, une mise en place déstructurée des scènes, époques et points de vue, mais une remarquable maîtrise de la construction littéraire qui finit par faire sens au fil des pages.

Enfin, au-delà du drame, c'est une plongée originale dans une tranche d'histoire de quelques semaines, période charnière et violente où l'Amérique -en tout cas ses états du sud- a hésité, vacillé, presque perdu ses repères. Fin de la guerre, abolition de l'esclavage, développement à marche forcée des infrastructures routières et ferroviaires, montée en puissance des investisseurs-roi opportunistes… Cela fait beaucoup de bouleversements simultanés pour le vieux Sud traditionnaliste. Et 90 ans plus tard, tout a-t-il vraiment changé ?

L'écho du temps est un grand livre, certes exigeant. Mais n'est-ce pas le propre de la plupart des grands livres ?
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C'est une belle prouesse de la part de Kevin Powers car en un peu moins de 300 pages il passe sur 100 ans d'Histoire américaine, de la guerre de Sécession à la guerre du Vietnam, en s'attachant aux changements que subit la Virginie sur cette période.
Visiblement éprouvé par la guerre - il est vétéran de la guerre d'Irak - c'est clairement son thème de prédilection, comme le montre son recueil de poème magnifique Lettre écrite pendant une accalmie dans les combats et son premier roman Yellow Birds qu'il me reste à lire.
Nous entrons de front au coeur des affrontements en Virginie entre Confédérés et Unionistes, tout en suivant le destin des Reid et de Levallois. Près de 100 ans plus tard, George, 94 ans, revient une dernière fois sur son passé, à la recherche de ses origines -il a été abandonné à trois ans - dont le lecteur entrevoit petit-à-petit les tenants.
Les personnages du récit ont assez de complexités et contradictions en eux pour que le roman ne soit pas manichéen, leur psychologie est explorée un peu à la manière de Faulkner (mais sur ce point le roman mériterait d'être plus dense) qui rend leur caractérisation difficile.
C'est pas loin d'être un coup de coeur, il manque juste quelque chose, une étincelle, une profondeur pour que ce soit un chef-d'oeuvre. Donc à quand le prochain?
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Aujourd'hui est un jour difficile, et demain le sera plus encore. Une phrase récurrente, qui court à travers tout le livre et concerne tous les personnages. Nous sommes dans le Deep South, ici en Virginie, avant, pendant et après la guerre de Sécession. Avant : l'esclavage ; pendant : les désastres de la guerre ; après : un pays ravagé et pillé qui peine à se reconstruire sous la férule des Yankees.
1856-1862 : Deux plantations limitrophes, Beauvais, du Français Anthony Levallois et la plantation de Bob Reid. Parmi les esclaves de Bob devenu veuf très tôt : Aurélia qui tient la grande maison et son fils muletier Rawls ; il a grandi dans l'ombre d'Emily Reid, fille unique du maître, au comportement un peu étrange. D'un propriétaire précédent, Rawls a gardé des pieds mutilés pour avoir à six ans dépassé les limites de la plantation ce qui en a fait, crime suprême, un fugitif. Lors d'une réunion de prières, il tombe amoureux de Nurse, plus éduquée et avec une réputation de guérisseuse ; Nurse appartient à un autre planteur. Rawls la rejoint clandestinement la nuit mais apprend le motif d'une absence prolongée : n'ayant pu sauver sa maîtresse après une grave chute de cheval, Nurse a été fouettée de nombreuses fois, puis enfermée dans la sordide prison pour esclaves près de Richmond en attente d'être vendue. Vouloir la rejoindre va faire de Rawls un vrai fugitif. Il est sauvé in extremis d'une mort atroce par Levallois qui le rachète. Il rachète aussi Nurse. Aucune bonté dans ces gestes, mais la mise en place d'un plan machiavélique.
1862-1870 : la guerre tourne rapidement au désastre pour les Confédérés, malgré des enrôlements massifs qui laissent les plantations à l'abandon. Bob Reid perd un bras et une jambe sur le champ de bataille. Il est soigné par Nurse, « prêtée » par Levallois. Quand Bob rentre chez lui, c'est pour apprendre que Levallois a racheté ses terres, arasé complètement sa maison, et s'est instauré « protecteur » d'Emily qui loge désormais dans la maison du contremaître. le pays est mis en coupe réglée par les pillards de tout bord, Unionistes qui se vengent, esclaves libérés abandonnés à eux-mêmes, petits blancs errants, incultes et sans travail. Levallois, arriviste sans scrupules, profite des désordres pour agrandir ses terres, et ouvrir des routes et des chemins de fer, persuadé qu'il conduit le pays vers la modernité. A la grande rage de Bob, Emily contrainte épouse Levallois, mariage qui tournera à la catastrophe : Bob sombre dans une folie meurtrière, Emily met le feu à la maison dont elle croyait avoir éloigné ses enfants et disparait pour entrer dans la légende. Rawls et Nurse s'éloignent avec le petit George, fils de Nurse, de ces lieux maudits pour un ailleurs qu'ils ne connaissent pas. Rawls est tué peu de temps après par une bande de pillards.
En alternance avec ce récit, nous suivons au début des fifties un Noir très âgé, George Seldon quatre-vingt-dix ans, élevé par une vieille fille en Caroline du Nord, dans une maison isolée au milieu des marécages. Georges souhaite retrouver les traces de son enfance, car pour ses origines il n'en connaît rien : il est un enfant trouvé à l'âge de trois ans avec une courte imploration épinglée sur ses vêtements de prendre soin de lui. Grâce à l'aide de Lottie, une serveuse de bar, qui le prend en affection, George retrouvera la cabane en ruines, mais ce sera pour mourir aussitôt, la quête est terminée. La chaleureuse Lottie continuera son chemin jusqu'au début des années 1970. Toute cette partie du récit se déroule sur fond de guerre de Corée, guerre froide, industrialisation du Sud et guerre du Vietnam.
Cette composition en alternance rend parfois difficile à la lecture l'identification des personnages, mais finalement, nous comprenons assez vite qui est George, le grand intérêt du livre est surtout dans un style remarquable de réalisme poétique, et une distanciation pleine d'empathie par rapport aux tragédies vécues par les protagonistes. Comme Underground Railway de C. Whitehead, comme les livres de Tony Morrison, Kevin Powers rend fort bien la dureté de l'esclavage dans le Sud, et aussi à quel point la guerre est chose affreuse quand on la vit au ras du sol sur un champ de bataille. de quelque côté qu'on soit. Une des plus belles pages est le dialogue échangé sur un sol trempé de boue et de sang entre Bob Reid blessé et un nordiste mourant : ils se découvrent frères en condition humaine. Au petit matin, le Nordiste est achevé par un pillard.
Un livre violent pour dénoncer la violence. Violence extérieure de l'esclavage, de la guerre, mais aussi de l'éventration des terres pour construire des routes. Violence intérieure de la haine, de la domination de l'autre, de l'exploitation, de la vengeance. Les personnages emblématiques de Nurse et Rawls cherchent à comprendre, sans bien y arriver. Lottie et George se laissent davantage couler dans le moment qui passe. L'interrogation qui les concerne est plutôt ; quelle trace laissons-nous ici-bas ?
En exergue du livre, l'auteur écrit : Je pleurerai ce qui échoue ici  (Roger Reeves). Nous de même.




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🔥 L'écho du temps - Kevin Powers 🔥
Traduction : Carole d'Yvoire Éditions Delcourt

Masse critique Babelio de septembre

Vous aimez les jeux de construction? Ce livre en est un, où chaque chapitre est une pièce qui vient se placer pour donner forme à l'histoire finale.
Les chapitres s'alternent sur deux époques. Celle de la grandeur de la plantation Beauvais dans les années 1860 avant le grand incendie, propriété de M. Levallois, homme machiavélique et sadique qui ne recule devant rien pour accroître sa fortune et son pouvoir. Et celle des vieux jours de George Seldom dans les années 1950, en quête de ses origines, lui qui a été retrouvé, commençant à peine parler, avec ce simple mot épinglé sur sa poitrine "Prenez soin de moi. Je vous appartiens maintenant."
De nombreux personnages jalonnent le récit, certains sont les personnages principaux, d'autres les secondaires (pas forcément si secondaire) et enfin ceux qui ne font que passer. Cette multitude de personnages et les allers-retours d'une époque à l'autre auraient pu être déstabilisant mais j'ai été tellement happée par l'histoire que tout m'a semblé fluide. J'ai particulièrement aimé les chapitres sur les années 1860, où il est question de l'esclavage, de la domination masculine, de la guerre de Sécession, du désir de liberté et d'émancipation. J'ai pris beaucoup de plaisir à ma lecture même si une petite question me taraude encore...
Un roman qui emmêle personnages et époques que l'on prend plaisir à démêler 😊.
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Bien qu'exigeante, j'ai apprécié la lecture de "L'écho du temps". Dans son dernier livre, Kevin Powers s'attaque à la brutalité de la guerre civile américaine et à la reconstruction du pays et des gens sur plusieurs générations. le récit est construit autour de deux intrigues : celle de George Seldom, nonagénaire dont la maison est détruite en 1956 pour construire une autoroute et qui cherche à résoudre le mystère de ses origines ; et celle des habitants d'une plantation de Virginie appartenant à l'impitoyable Antony Levallois avant, pendant et après la guerre de Sécession. Les personnages sont délibérément archétypaux, mais présentés de manière crédible comme des individus avec une vraie profondeur. Les deux intrigues abordent le thème du destin dans l'histoire avec la violence et le racisme comme toile de fond. À la plantation Beauvais, le maitre Levallois détient dans ses mains les clés du destin de plusieurs personnages : Nurse et Rawls, deux esclaves qui luttent pour garder vivantes les braises de leur amour, Emily, la fille d'un propriétaire voisin qu'il n'aime pas, mais souhaite posséder. L'histoire de George Seldom vient s'immiscer dans le premier récit et l'on comprend lentement que les intrigues vont fusionner. Celles-ci ne sont pas racontées de façon continue et chronologique, mais avec des sauts en avant ou en arrière dans le temps, ce qui entretient le suspense, mais rend la lecture parfois difficile à suivre. La langue de Kevin Powers elle-même requiert toute l'attention du lecteur, car elle est riche, luxuriante, parfois exagérément, les phrases à la construction déroutante transmettent à la fois une histoire et un futur qu'on ne comprend que plus tard. C'est en revenant en arrière dans les pages du livre qu'on réalise que Kevin Powers nous a déjà parlé de prénoms, de noms de lieux qu'on ne pouvait pas comprendre à la première lecture. En marge du suspense des intrigues volontairement entretenu, l'auteur n'hésite pas à écrire sur la violence inhérente à la guerre civile et sur la façon dont les propriétaires de plantations pouvaient être méchants et pervers envers leurs esclaves. Et pas seulement envers eux, car la cupidité du maitre Levallois le pousse à s'approprier la terre de ses voisins. Quant aux scènes de bataille de la guerre de Sécession, les descriptions sont si vivantes que le lecteur sentira les blessures infectées et ressentira la douleur fantôme des membres amputés. En contrepoint au méchant Levallois, on suit les esclaves Rawls et Nurse, et George Seldom, des personnages qui réchauffent le coeur avec leurs histoires respectives finalement liées. L'écriture lyrique devient parfois un peu excessive, mais il est clair que Kevin Powers est un écrivain talentueux. J'ai aimé par exemple la façon dont la fin se connecte si merveilleusement avec le début.
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critiques presse (1)
Telerama
28 octobre 2019
Avec “L’Écho du temps”, Kevin Powers nous fait traverser un siècle d’histoire de l’Amérique, de la guerre de Sécession aux années 1980. Dans ce nouveau roman, l’écrivain et poète, salué par la critique et reconnu par ses pairs, continue à dénoncer la violence.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Il contempla la cabane et hocha la tête.
Plus de soixante-quinze années s'étaient écoulées depuis son départ.Le temps avait laissé sa marque.
Une maison exige qu'on y vive pour mériter ce nom.
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Les Rivers avaient survécu à la rudesse des premières années et occupé une place importante dans le comté, pourtant son père et lui s'étaient depuis débrouillés pour défaire le dur labeur de générations entières. Pete vivotait aujourd'hui grâce à la réputation des morts et à la pitié des vivants, une mixture au goût amer.
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Dans certains endroits, et dans certaines circonstances, plus aucune distinction entre vie privée et vie publique n'était autorisée. Un peu comme si on vous jetait nu à la rue. Et même s'il ignorait l'étendue de cette mise à nu, il ne pensait pas que cela pourrait passer pour une bénédiction.
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Un homme nommé Levallois l'avait achetée à Lumpkin pour une bouchée de pain, à l'été 1862. Elle n'avait pas mangé depuis des semaines. Lumpkin pensait qu'elle mourrait bientôt, aussi quand l'homme aux cheveux noirs lui en offrit un prix raisonnable, il la vendit sur le champ. M. Levallois n'expliqua pas pourquoi il l'achetait, seulement qu'il avait entendu parler de ce qu'il lui était arrivé chez son ancien maître et qu'il avait un marché à lui proposer. "Va travailler à l'hôpital pendant un temps, en échange, je ferai quelque chose pour toi" Elle ne lui répondit pas. "Tu préfères mourir ici?" Nurse garda le silence."J'essaie toujours de me montrer raisonnable , mais parfois vous les nègres vous ne comprenez vraiment rien. Tu ne peux pas mourir si je ne t'y autorise pas. Tout ce que tu as été, tout ce que tu seras jamais, m'appartient"
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Tandis qu'il s'en allait, le chagrin qu'il éprouvait pour lui-même fut remplacé par du chagrin pour le monde. Il avait l'impression de reconnaître tous les noms qui avaient existé avant lui et tous ceux qui lui succéderaient. Il mit les noms sur son souffle, et à chaque exhalaison, les dit dans une langue au-delà du langage. Lottie joignit ses mains en coupe et les plaça sous la bouche du vieil homme.Il exhala une fois de plus et remplit la coupe; Lottie laissa le silence l'entourer. George dit tous les noms, puis il ne fut plus là.
(p. 203)
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