J'ai mis trois étoiles, mais c'est plus 2 étoiles et demie que j'aurais mis si j'avais pu le faire. le roman n'est pas ennuyeux (raison pour laquelle je n'ai pas mis deux étoiles uniquement), mais l'impression générale qui en ressort est celui de la grande immaturité du personnage principal (qui a seulement 25 ans, ce qui explique en partie cette immaturité) à la fois dans ses relations amicales et amoureuses (elle passe presque un an à être jalouse de la collègue de son petit ami qui le sait sans la rassurer, elle ne gère pas bien ses relations d'amitié et se retrouve dans des situations ridicules, etc.), et dans sa vie professionnelle. Tout le récit reste également très superficiel, alors qu'il aurait été si intéressant de sortir de l'anecdotique de premier plan pour aller vers des différences culturelles plus profondes (comme c'est le cas dans le très drôle God Save la France). Bref, on dirait un début de roman qui ne va jamais plus loin que les prémices, on est donc insatisfait à la fin de la lecture.
Commenter  J’apprécie         80
— L’hôtel Crystal à Boulogne-Billancourt, en banlieue de Paris, s’il vous plaît, a demandé mon amoureux à la conductrice du taxi, le plus naturellement du monde, comme s’il avait fait ça toute sa vie.
— Vous, vous n’êtes pas Français, a affirmé la chauffeuse avec conviction pendant qu’elle entrait maladroitement les coordonnées de l’hôtel dans son GPS.
Je l’observais discrètement. Elle portait un chapeau étrange duquel sortait une immense chevelure frisée indomptée. Pour une conductrice qui allait chercher des gens à l’aéroport, elle était perspicace…
— Nous arrivons du Québec, a poursuivi Michaël avec son intarissable bonne humeur.
— Ah, des petits Canadiens! a-t-elle chantonné en tentant de nous regarder par le rétroviseur, comme si nous étions de petites bêtes curieuses qu’elle voyait pour la première fois.
Ma mère est une grande craintive. Elle a possiblement une part de responsabilité dans ma nature anxieuse, comme de raison. C’est le genre de femme à vérifier trois fois que sa porte est bien verrouillée avant de partir. Et que dire des ronds de poêle! Combien de fois avons-nous rebroussé chemin simplement parce qu’elle les croyait allumés!
Elle n’a jamais aimé voyager et n’est jamais allée plus loin que Joliette où vit l’un de ses frères. Sa connaissance de la géographie est limitée. Pour elle, tout ce qui se passe au-delà des frontières de la province est «l’étranger». Je ne lui en voulais pas; ses parents avaient eux aussi été de grands anxieux. Il fallait briser le moule, non? J’allais être celle-là.
Je manquais d’ambition? Pourquoi? Parce que je n’éprouvais pas de plaisir à étaler des histoires scandaleuses dans le simple but de faire avancer ma carrière? Les conférences de presse m’ennuyaient, je voulais tout simplement écrire. J’avais toujours cru que je désirais être journaliste, car comment écrire tout en étant payée? Je savais que devenir auteure n’était pas réaliste comme projet de carrière si je souhaitais continuer de me payer un appartement et des restaurants, puis subvenir aux besoins de mes futurs enfants. Or, le métier de journaliste n’était pas de l’écriture, je m’en rendais bien compte. Écrire pour un journal était tout simplement le résultat d’un travail d’enquête et de recherche.
Nous avions rêvé de voyager, de découvrir le monde, de nous déraciner pour un temps. Mais qui n’en rêve pas? La Californie, l’Espagne, l’Australie… il n’y avait aucune limite à notre imagination. Nous en avions parlé les yeux remplis d’espoir, tout en sachant pertinemment que la possibilité de concrétiser ce projet était mince.
Voilà un peu plus de trois ans que nous avions quitté les bancs d’école et que nous avions entamé nos carrières respectives, moi comme journaliste dans un hebdo et Michaël comme consultant en informatique. Et vu la vie de travailleurs actifs que nous menions, j’avais peu à peu cessé de réellement croire à cette folle idée de voyages et d’aventures.
Sans vouloir passer pour une héroïne, je crois que ça prend plutôt une bonne dose de courage pour accepter de quitter son pays, taire ses inquiétudes, enfermer ses craintes et oser en se disant qu’au fond, on a une seule vie à vivre, non?