J'ai toujours un peu une sale impression de moi-même quand je note mal un livre – vraiment. Je sais le travail derrière, l'implication. Personne ne peut juger ça.
Pourtant, c'est ce que je vais faire.
«
Amours », de Léonor de Récondo, c'est une (autre) de ces (nombreuses) histoires d'amour lesbienne entre une servante et sa maîtresse.
J'espérais qu'elle serait différente, cette histoire, enfin. Mais non. J'espérais qu'elle finirait bien, pour en finir avec le Dead Lesbian Trope. Mais non (oups, spoil).
Pourtant, ça réunit tous mes kinks littéraires et ça éveille mon Downton Abbey frisson. Une maison XIXe, des dramas entre les domestiques et les maîtres, des histoires d'amour, les castes, des mômes illégitimes, bref. Mais y a même pas le plaisir du plaisir coupable, et ça c'est triste.
Parce que là, aucune pudeur vraiment dans l'écriture. Ça arrive avec ses gros sabots. On comprend d'entrée de jeu ce qui va se tramer quand l'héroïne mentionne avoir lu Madame Bovary et avoir aimé – what a surprise. Et encore, sachez qu'on a tout lu de l'histoire lorsqu'on en lit la quatrième de couverture, qui couvre les trois quarts du bouquin, sans exagérer nullement (et la lecture passe donc plus faiblement encore).
Les personnages n'ont que des strates de profondeur bien basses, des platitudes sans nom – même Charles Bovary en a plus lolilol. Ce sont des feuilles de papier cuisson.
En fait, tout peine à se faire une place. L'histoire, le décor, les persos. le seul personnage travaillé semble être Céleste, la petite bonne. Et encore, son être qui oscille entre la sainte Vierge (et ça sort au milieu du bouquin de nulle part), son fils issu d'un viol (mais les viols de Céleste tout le monde s'en bat un peu les roupettes et c'est jamais mentionné) et sa maîtresse amante avec laquelle elle échangent « peu de mots », ça peine à se broder ensemble, tout ça. « Peu de mots », ceci dit, cela décrirait bien ce livre.
C'est aussi son avantage : il se lit vite, grâce à l'écriture épurée, dépouillée, trop simple, beaucoup trop simpliste. Qui se veut simpliste sans doute, mais simpliste, on peut l'être en laissant supposer des choses, en utilisant de jolis mots. Meh.
Je ne me suis attachée à aucun personnage – pas même au bébé, il aurait pu mourir dans son berceau que personne n'aurait remarqué. Pas même à la bonne. Encore moins aux personnages secondaires qui feignent d'avoir des profondeurs. (le pauvre monsieur qui décide de ne plus jamais parler après avoir vécu la guerre, le pauvre maître violeur tout triste parce qu'il n'a jamais eu de papa et en fait son papa c'était son oncle caché, la pauvre gouvernante sévère-mais-juste qui a avorté six fois parce qu'elle était enceinte du maître)(vomi).
Et COMME DE PAR HASARD,
(SPOIL) à la fin, la p'tite bonne meurt. Oh, ça alors. Pauvre petite chose fragile qui n'a rien compris à sa vie et qui meurt pour que tout le monde soit heureux (?????). Et d'ailleurs, sa mort, c'est ultra deus ex machina, comme à peu près l'entièreté du livre. C'est-à-dire (attention j'vais aller vite, aussi vite au moins que dans le bouquin) qu'elle va chouiner dans l'église parce qu'on lui dit qu'elle ira en enfer après avoir couché avec une femme, et là, elle dort dans l'orgue, et en se réveillant l'organiste lui joue de merveilleux trucs, et il a la phtisie, il va mourir, alors elle lui vole son mouchoir plein de glaires sanglantes et elle le RENIFLE et elle attrape la phtisie et elle se laisse mourir (mais sans la refiler à personne jamais entre temps, elle est sympa). Dites-moi que j'suis pas la seule à rouler des yeux.
Dans la dernière scène, elle danse dans la clairière contente et mourante parce que grâce à son amour la maîtresse aime son fils toubabien dans le meilleur des mondes et en plus la sainte Vierge va la pardonner.
Bref.
Disons de ce livre que c'est un joli vase blanc Monoprix.