Dans une maison bourgeoise, au début du XXème siècle, Madame est oisive, peu épanouie, Monsieur est notaire, très pris par son travail, et de temps en temps, il s'occupe bestialement de la jeune bonne.
Le début du roman parait un peu désuet. On croit entendre la chanson de Fragson
« Bien qu'il possède une femme charmante
L'ami Durand est un coureur
V'là t'y pas qu'il reluque sa servante
Et qu'il la reluque en amateur
……………
Ah Monsieur, répond la petite bonne…….. »
Ce scénario, à l'intrigue assez banale, semble avoir déjà été écrit et réécrit.
Et pourtant,
Leonor de Recondo réussit à en faire une histoire passionnante.
Elle décrit le non-amour :
« C'est long, c'est laborieux»…..« Comme il est lourd, lourd et vidé, lourd et sans force » pense Céleste la petite bonne
« L'enchevêtrement immonde » pense Victoire, l'épouse
« Il ira à l'essentiel. L'essentiel se situant entre ses cuisses quelle rechigne à écarter et qu'il faut forcer un peu » ainsi agit Anselme, le notaire.
Et elle décrit tout aussi bien l'amour
« Elle la laisse se gorger de ce corps nouveau. Dans cet éblouissement elle n'a qu'une seule pensée : nous sommes enfin vivantes. »
ou encore « L'amour lui a soudain donné une identité propre. Jusque là elle n'avait fait que se mouvoir à tâtons, aveugle aux autres et à elle-même»
C'est un roman d'une autre époque, qui rappelle des classiques, comme
Flaubert, ou Colette.
Un roman au charme indéniable, un beau roman d'amour, des portraits de femmes délicats, mais aussi un tableau réaliste des différences de classes sociales et les évènements qui se produisent ne sont pas ceux auxquels on aurait pu s'attendre.
Fort heureusement, je n'avais pas lu la quatrième de couverture, ni les critiques qui en révèlent bien trop.
Quel plaisir de passer ainsi un excellent moment de lecture.