« C'est l'histoire d'une petite fille, elle s'appelle Emma, elle marche sur la plage. Je détourne les yeux, quelques secondes passent. Quand je regarde à nouveau, elle a disparu. »
Lorsque l'on ouvre
L'année brouillard, il est impossible de résister à l'attraction puissante de l'envoûtement : on entre en ce roman comme on pénètre la couche épaisse d'une brume qui semble vous arracher au réel, vous emporter ailleurs, là où plus rien n'existe que vous et ce trouble du monde. Lire
L'année brouillard, c'est cela, plus rien n'existe autour : on ne lâche pas car on veut comprendre, sortir de ce long tunnel et savoir, savoir ce qu'est devenue Emma, l'enfant disparue.
Tout commence un jour saturé d'un froid blanc. Abby, photographe professionnelle, se promène sur la plage avec la fille de son compagnon. Il y a du brouillard ce jour-là. Emma s'amuse à quelques mètres d'Abby qui règle son objectif, le porte à l'oeil, perçoit une forme, s'avance et reconnaît le cadrave d'un phoque ; cela ne dure qu'un instant, mais ces quelques minutes ont suffi : Emma n'est plus là. La panique ne l'envahit pas immédiatement. Abby se dit que l'enfant doit être un peu plus loin. En son esprit, elle la voit, se la figure accroupi derrière le petit mur, là à quelques mètres, elle y court, elle en est certaine, Emma est déjà en ses yeux réelle, vibrante de vie. Abby arrive, Abby voit. Elle ne voit rien. Nulle Emma. C'est alors que lui prend le vertige, ce glissement du monde, la terre sous ses pieds se dérobent, qui se fend et d'où surgit l'épouvante, l'innommable : la disparition d'un enfant.
Le roman explore alors les conséquences de ce drame : les recherches, la solitude, l'angoisse, la culpabilité, l'espoir, la colère du père, sa quête désespérée et celle d'Abby. Et le roman de saisir avec une intelligence subtile toute la complexion psychique de ces personnages soudain projetés en enfer, de sonder les mécanismes de la mémoire, de la peur, du doute, de l'imagination lorsqu'elle est soumise à l'effroi, de l'amour paternel lorsqu'il est rendu désespéré. Il est rare de pouvoir lire, en une écriture si fine et habile, un roman qui donne si bien à visualiser autant qu'il invite à pénétrer les épaisseurs obscures de l'âme aux prises avec un réel qui le dépasse.
Entre roman psychologique et polar, un livre fascinant à dévorer d'une traite.
Lire les premières pages sur le site des éditions Buchet-Chastel :
Lien :
http://www.libella.fr/buchet..