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Paul Dupont (01/01/1896)
4.5/5   2 notes
Résumé :
L'enfance révolutionnaire de Rochefort, ses errements dans le journalisme, ses polémiques, puis la création de son journal resté célèbre "La Lanterne" et son exil à Bruxelles.
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Plan des chapitres :
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PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE PREMIER
Les ascendants. - Maison ruinée. - Mon grand-père à l'armée de Condé. Ma grand'mère et mon père à la Conciergerie. - Le bonnet de la Du Barry. Le marquis d'Autichamp. L'affaire du collier.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La singularité d'Henri Rochefort était évidente dès ses jeunes années.
Pour lui, les murs du collège et de l'internat ressemblaient plus à un infâme cachot qu'à un sanctuaire de l'éducation ; l'esprit aérien de ce drôle d'oiseau ne pouvait être confiné par de simples barrières de pierre.

Ses éclairs d'ingéniosité, surprenants et audacieux, ne passaient pas inaperçus.
Lorsque le mariage royal du rejeton de Louis-Philippe avec la princesse espagnole se présenta sous la forme d'une dissertation, Henri, ennuyé à mourir, décida de traiter l'exercice sous la forme d'une poésie.
Sa fantaisie a si bien été reçue que le proviseur l'envoya tout droit au Palais des Tuileries, haut lieu du pouvoir monarchique, et en retour, reçut un porte-crayon en or comme preuve de sa reconnaissance royale.
Mais ces temps de gloire avaient aussi leurs parts d'ombre.
Henri était envié par ses camarades, accusé de "courtisanerie", de flatterie flagrante envers la royauté : « Tais-toi ! Tu rampes aux pieds des grands ! » lui disait-on.

Afin de contredire habilement ces attaques, il s'adressa, par un poème flatteur, à Béranger, célèbre chansonnier et fervent républicain. La lettre chaleureuse qu'il reçu en retour déclencha une vague d'ébahissement et d'admiration parmi les collégiens.

Mais cet éloge avait lui aussi ses conséquences. A présent, il était considéré avec suspicion par l'abbé du collège qui eut connaissance de la lettre. Béranger avait la réputation de tenir des propos douteux contre l'église, et Rochefort ne faisait qu'accentuer cette méfiance par son excès de curiosité et son goût pour la provocation.
Lorsqu'on lui vantait la pauvreté de Jésus-Christ, il demandait par exemple :

"Mais, monsieur l'abbé, Jésus n'était pas vraiment pauvre. Ne nous avez-vous pas appris que les Rois Mages ont apporté des trésors à Jésus, dont des vases d'or remplis de parfums ? Ces présents royaux valaient certainement une fortune. Si la sainte Vierge et saint Joseph étaient vraiment dans la misère, ils auraient facilement pu s'en sortir en les vendant.
Et avec un sourire d'innocence, j'ajoutais :
"Et ces vases d'or, où sont-ils passés ? Ont-ils été retrouvés chez Christ lors de son arrestation ? Sait-on qui les possède maintenant ?"
L'abbé Flandrin, tout en reconnaissant la fausse naïveté de Rochefort, répliquait parfois, irrité, à son insistance : "Tu es trop curieux pour ton âge. »

Plus tard, à 17 ans, Henri fut saisi par les convulsions tumultueuses de la révolution de 1848, séduit par les rumeurs et autres murmures insurrectionnels :

« Quoi ! vous vous émotionnez ainsi pour quelques gamins qui cassent des carreaux ! 
Ces paroles déloyales devinrent le signal du déchaînement.
Nous renversâmes la chaire du professeur… »

Le jeune Rochefort, pareil à un général d'armée, enrôla ses camarades et fit escalader les remparts du collège à sa troupe, composée de certains fils de bonne famille noble.
Ces gamins étaient plus effrayés par l'idée d'une réprimande parentale que par l'éventualité d'une mort héroïque.
Tous semblaient rire au nez des conséquences politiques de la révolution. Bien qu'ils avaient l'intuition que le vent du changement ne soufflerait pas en leur faveur, ils étaient enivrés d'une fraternité effrénée envers leurs "frères" périssant à leurs côtés.
Par un heureux hasard, les risques pour ces jeunes de finir en boucherie étaient très minces, leur audacieuse escapade coïncidant avec les dernières heures de la révolution :

« j'étais sur le premier rang, complètement à découvert et je pris une intonation pleine d'indifférence pour demander à un de ceux qui nous donnaient des armes :
Est-ce que ces soldats vont nous attaquer ?
Mais non ! Répondit-il, ce sont des amis. Ils ont fraternisé. »

Ces mêmes petits enragés se rangeaient toutefois immédiatement à l'ordre en rentrant chez leurs parents, sans dire un mot :

« La mère de mon camarade faillit s'évanouir en nous voyant aussi nu-tête. Mais son fils lui arrivant sain et sauf, l'émotion céda vite le pas à la colère. Elle se mit à déblatérer avec une excessive véhémence contre l'opposition, contre Ledru-Rollin et même contre Lamartine, allant jusqu'à me prendre à témoin et me demander mon opinion sur le coup de force populaire qui bouleversait et mêlait ainsi toutes les couches sociales. Peut-être croyait-elle, à cause de mon nom, que j'allais faire chorus avec elle contre la « tourbe » et la « vile populace », et je me rappelle encore l'exaltation qu'elle mettait à me répéter :
« Maintenant, la chiffonnière qui vient fouiller sous mes fenêtres, dans les tas d'ordures, sera autant que moi. »

Une expression qui illustre parfaitement la persistance de l'idée de privilèges malgré leur abolition en août 1789.

Éjectés du collège la veille, ils y furent réadmis le lendemain, le 25 février 1848, au moment où le sort de la révolution était scellé :
« Le vendredi 25, l'affaire était tellement dans le sac et un retour offensif de la branche cadette si impraticable, que nous reçûmes du même proviseur qui m'avait la veille renvoyé du collège, une nouvelle lettre annulant la première et nous faisant part de la vive satisfaction qu'il éprouverait à me rouvrir ses dortoirs, ses réfectoires et ses classes. le succès justifiant tout, il n'était pas loin de nous féliciter de notre héroïsme, moi et mes trente-cinq compagnons d'armes. »

Durant l'insurrection sanglante de juin 1848, bien que les étudiants eussent le bon sens de ne plus s'évader, une fracture se formait parmi eux : des insultes fusaient de toutes parts, des « démoc-soc » pour démocrates-socialistes, aux « henri-quinquistes » pour les légitimistes rêvant du retour d'Henri V.

Puni à copier des lignes dans les combles du collège, Henri Rochefort se hisse sur le toit et reste là, fasciné, observant une attaque d'une barricade par la garde mobile à l'entrée de la place du Panthéon, voyant hommes et enfants chuter l'un après l'autre. En redescendant, la vision de blessés de l'insurrection le fait s'évanouir sur le champ, une salle du lycée venait d'être convertie temporairement en infirmerie.

Au même moment, un événement des plus tragiques venait de se dérouler : l'archevêque Affre, dans un acte héroïque de tentative de pacification des foules, succomba à une balle perdue.
Les élèves, en pleine effervescence une fois de plus, montraient une insensibilité glaciale face à ce drame. "Pourquoi s'est-il mêlé de ça ?" Demandaient-ils, comme s'il était tout à fait justifié que l'archevêque rencontre une telle fin tragique. Les professeurs, d'ordinaire si stricts, n'osaient pas intervenir : "En temps normal, l'élève responsable d'un tel dérapage aurait été immédiatement expulsé, mais nous étions en plein chaos de bataille et personne n'aurait osé prendre la responsabilité de le ramener chez ses parents."

Dans le but d'apaiser les esprits, le nouvel archevêque, Monseigneur Sibour, fit une visite au collège en présence de hauts responsables et de parents. Henri Rochefort avait pour mission de lui souhaiter la bienvenue en récitant à voix haute un poème.

Il devait présenter à l'avance sa composition poétique au proviseur pour validation. Afin de le duper, Henri lui adressa un poème de complaisance rempli d'éloges.
Aussi, l'ahurissement fut énorme lorsque Henri s'avança vers l'archevêque pour déclamer une cantate républicaine où il félicitait avec sarcasme l'archevêque pour sa récente adoption des enfants de deux insurgés condamnés à mort tout en soulignant la contradiction flagrante de ne pas s'être "interposé" devant la guillotine pour sauver les parents grâce à son influence. C'était une manière de montrer l'hypocrisie de la charité chrétienne.

L'audace fut tellement grande que l'on fit semblant d'oublier ce qu'il venait de lire :
« L'archevêque Sibour comprit immédiatement qu'il avait été joué, mais il n'en prit pas moins son air le plus prêtre pour me complimenter sur ma « facilité » et, à toutes les restrictions du proviseur, il répondait : - Mais non ! c'est très bien ! »

Les premiers pas de Rochefort dans le monde du journalisme sont marqués par la frustration. Il commence dans un journal satirique où la moindre allusion politique est proscrite. Imaginez, les journaux politiques, malgré leur autorisation et reconnaissance légale, étaient déjà sévèrement bridés par la censure. Mais pour un journal non destiné à la politique, les règles étaient encore plus draconiennes...
Même ses critiques d'art pouvaient être sujettes à censure : le Saint-Michel de Raphaël venait d'être récuré de façon exécrable au Louvre, il fut menacé pour avoir exprimé sa colère à ce sujet :

« Ainsi, pour m'être plaint de la détérioration d'un tableau qui m'appartenait autant qu'à M. de Nieuwerkerke (conservateur du Louvre), puisqu'en ma qualité de contribuable j'en payais le conservateur, j'étais poursuivi et exposé à une peine qui pouvait aller jusqu'à trois ans de prison. »

Ce n'est que grâce à l'intervention de dernière minute d'Ingres, qui lui offrit de témoigner en sa faveur, qu'il échappa aux griffes de la justice, manoeuvrée en coulisses par un gouvernement à travers des juges corrompus.

La censure atteignait des sommets d'absurdité à peine croyables, et Rochefort nous en offre quelques savoureuses anecdotes :

« On aura peine à croire que la censure avait supprimé dans le manuscrit d'un vaudeville de Paul Siraudin cette phrase où on aurait vainement cherché, pendant trois mois, une allusion politique :
« Mon père, qui était fabricant de pâtés de Chartres à Orléans. »
Et comme l'auteur, surpris, essayait de découvrir ce que ces quelques mots pouvaient contenir de coupable ou de dangereux, le censeur lui fit malicieusement :
"Voyons, monsieur Siraudin, vous avez trop d'esprit pour ne pas comprendre l'inconvénient qu'il y aurait à laisser dire devant le public : « Chartres » et « Orléans » ; vous saisissez : "le duc de Chartres !" Mettez : fabricant de pâtés d'Amiens à Pithiviers », et nous vous rendons votre pièce. »

Et le plus grotesque dans tout cela, c'est que le Duc de Chartres de l'époque, Robert d'Orléans, n'était même pas le prétendant orléaniste au trône de France, un titre revendiqué par Philippe d'Orléans. Alors, même si cet extrait abritait une allusion politique, elle n'aurait eu aucune incidence. du pure délire psychiatrique de censeur !

Mais également, en autre exemple :
« Adolphe Choler s'était vu mettre à l'index pour avoir placé dans la bouche d'un de ses personnages cette innocente formule :
« Je ne daignerai pas me disculper devant cette foule d'imbéciles ! »
Fould (Achille) était alors ministre d'Etat, et les spectateurs auraient pu entendre « Fould imbécile ». »

Comment ne pas comprendre, face à toutes ces iniquités, cette rage politique sourde qui montait et grandissait en lui au fil des censures, toujours plus absurdes les unes que les autres :

« Aussi, encore tout jeune, guettais-je l'occasion de me jeter dans une mêlée, sans savoir au juste laquelle ; mais j'éprouvais un irrésistible besoin de contribuer à déchirer le voile de plomb que les hommes du Deux-Décembre avaient épaissi sur la tête de la nation française au point de lui obstruer l'air et de lui intercepter la parole 
(…)
Je débutais là dans l'art de dire quelque chose tout en ayant l'air de ne rien dire. Cette tendance à fourrer un doigt indiscret entre les événements et l'autorité fut vite saisie par la censure, qui, depuis la loi de Sûreté générale, était devenue, comme le virus antirabique, à la fois curative et préventive. »

Afin de le séduire, on alla jusqu'à lui offrir le prestigieux titre d'inspecteur général des Beaux-Arts de la ville de Paris. Mais, dans un geste audacieusement insolent, Rochefort refusa, repoussant la main qui tentait de le nourrir tout en le muselant.

Le demi-frère de Napoléon III, M. de Morny, lisait toutes ses chroniques, et, venant de jouer une de ses pièces de théâtre dont il était immensément fier, attendait avec excitation la critique de Rochefort, qui fut celle-ci :

« Ah ! qu'il est heureux pour l'auteur que, ayant participé à un fructueux coup d'Etat, il n'ait pas besoin de sa plume pour vivre ! Si un de nous osait porter à un directeur une ineptie de ce calibre, il le ferait immédiatement saisir et précipiter dans la fosse aux ouvreuses (…) »

Et pourtant, loin de le réduire au silence, M. de Morny, le coeur brisé, suppliait Rochefort de lui expliquer l'origine de sa rancoeur...
Cette insolence atteignit son apogée le jour où il refusa de rencontrer M. de Morny lors d'un entracte au théâtre, proclamant haut et fort qu'il considérait son interlocuteur comme un assassin. Toute autre personne aurait été jetée en prison sur-le-champ pour une telle insolence, mais Rochefort, à ce stade, était devenu un personnage si redouté et respecté qu'on espérait encore pouvoir le corrompre, le domestiquer un jour ou l'autre.

Assemblant audacieusement une collection de ses articles en un seul volume, assortis d'une préface irrévérencieuse et de titres qui suscitent la provocation tels que « Les Français de la décadence » « La grande Bohème » il aurait dû largement être censuré. Mais c'était Rochefort… Il s'était en outre placé sous la protection d'un grand industriel qui lui servait d'éditeur… Après de longues hésitations de la part du gouvernement, on décida de ne pas le censurer.
Plus le temps passait et plus Henri Rochefort s'imposait et ouvrait des brèches dans la liberté de presse et d'expression au sein du Second Empire.

Peu de temps avant lui, « Les propos de Labienus » ouvrage sans prétention, se voyait réduit au silence.
L'oeuvre compilait seulement les pamphlets de Labienus, orateur romain réputé pour son hostilité envers Auguste. Dans cette collection de citations, le spectre de Napoléon III fut discerné par les censeurs, et c'était effectivement l'objectif poursuivi, mais sans allusion directe au régime actuel, il fallait donc être diablement despotique pour forcer une condamnation… 5 ans de prison pour l'auteur ! (Louis-Auguste Rogeard).

Autre censure absurde : un livre d'histoire naturelle… Suspecté d'être une satire politique car l'on dépeignait l'aigle, emblème tant de Napoléon III que de Napoléon 1er, comme la bête la plus cruelle de toutes les espèces.

C'est sous ce second Empire orageux que Rochefort réussit un autre coup de force : le répertoire de V.Hugo était injouable à Paris ; toutes ses pièces étaient censurées, mais par mégarde une pièce de théâtre fut jouée à Bordeaux et suscita un enthousiasme débordant sans que le préfet ne réagisse.

Rochefort, en bon observateur des incohérences du pouvoir, brandit aussitôt sa plume acerbe :

« Je me hâtais de signaler aux lecteurs du Figaro cette grotesque incohérence dans l'arbitraire.
Il résultait de cette défense opposée à cette autorisation, faisais-je remarquer, que la littérature de Victor Hugo, intolérable dans la capitale, n'offrait aucun danger dans les départements. »

Et dans un élan de libéralité à peine croyable, le ministère des Beaux-Arts concéda enfin la représentation de "Hernani", l'oeuvre maudite de Victor Hugo, à Paris, juste après l'article piquant de Rochefort.
Cependant, ce geste habile et libéral du gouvernement fut interprété plutôt comme une maladresse coupable.
L'ovation déchaînée du public parisien face à ce retour inattendu d'une pièce d'Hugo paraissait comme une victoire humiliante à l'encontre du gouvernement actuel.

Le vent politique commençait sérieusement à tourner d'une façon menaçante pour le gouvernement, et les tactiques employées pour déstabiliser Rochefort se transformaient en lâchetés d'une bassesse sans précédent. Une avalanche de livres et de brochures, vomissant des injures ridicules et des accusations mensongères à l'encontre d'Henri Rochefort, commencèrent à envahir les librairies en 1868. Publiés sous de faux noms et commanditées par le gouvernement, ces grotesques ouvrages l'accusaient de toute sorte de perfidies, notamment :

« 1° de porter un faux nom ;
2º de me donner comme Français, bien que je fusse Américain ;
3º D'avoir été condamné plusieurs fois pour escroquerie ; »

Se laissant malheureusement emporter par sa juste colère, Rochefort distribua deux gifles cinglantes aux misérables auteurs de ces diffamations. Aussitôt, le bras de la justice - incarné par le juge d'instruction M. Delesvaux, marionnette dévouée du pouvoir - s'abattit sur lui avec une froideur implacable : 4 mois de prison ferme.

Sa peine purgée, on n'attendait plus qu'un énième débordement, aussi infime soit-il, pour l'exclure définitivement du journalisme par la force, et c'est cet article futile et sarcastique qui le perdit presque définitivement :

« Un article où, à propos d'une chasse impériale à Compiègne, je racontais comment on plaçait, à huit mètres devant l'empereur, un lapin savant qui faisait semblant d'être atteint par son coup de fusil et reparaissait cinq minutes après pour recommencer la scène, fit, non pas seulement déborder, mais éclater le vase qui chauffait à mon intention. »

Isolé mais soutenu par une majorité de ses confrères journalistes, sans qu'on ose pourtant recueillir la bête noire du gouvernement, Pierre Véron, un journaliste satirique et influent, lui proposa en ses termes :

« Puisqu'on ne vous permet pas de vivre chez les autres, pourquoi ne vous mettez-vous pas dans vos meubles ? Créez un journal dont vous serez l'unique rédacteur. Vous bataillerez alors à vos risques et périls, sans crainte d'entraîner personne dans votre naufrage. »

Le projet de journal, refusé d'abord, obtint ensuite son aval lors d'une deuxième requête, grâce à l'appui astucieux de journalistes influents et à l'aide financière d'un banquier pour s'acquitter du cautionnement politique alors requis. Avant même la sortie du journal « La Lanterne », Paris est en ébullition, toute la ville attend avec une impatience fébrile... Et personne ne sera déçu !

(Suite au tome II)
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
C'était Morny (le demi-frère de Napoléon III), qui, tenant à me connaître au moins physiquement, avait prié mon rédacteur en chef de me placer afin qu'il eût le loisir de m'examiner sous tous mes aspects.
(…)
-Morny désire très vivement que vous lui soyez présenté. Il ne vous en veut pas du tout de ce que vous avez écrit à propos d'une de ses pièces. Venez, il est là, à quatre pas de nous.

- Pas pour un million ! fis-je avec un mouvement de recul qui n'échappa certainement pas aux messieurs du groupe.

- Mais, enfin, que vous a-t-il fait ? me demanda Villemessant tout désorienté.

-Il m'a fait le Deux-Décembre ! (Coup d’Etat du 2 décembre 1851) répondis-je très haut.

Et, m'exaltant tout à fait, j'ajoutai :
-C'est un assassin ! Je n'ai pas l'habitude de me faire présenter à des assassins.

Puis je rentrai dans ma loge, et Morny rentra dans la sienne. Il n'avait pas perdu un mot du dialogue, d'autant que j'avais tout fait pour qu'il l'entendît.
Lorsque, quinze jours ou trois semaines plus tard, il s'alita pour ne plus se relever, ceux de son entourage furent tout surpris de l'entendre, au milieu de sa fièvre, non seulement prononcer mon nom à tout instant, mais répéter avec insistance:

-Prenez garde à Rochefort ! défiez-vous surtout de Rochefort !

J'étais un jour, à Nice, assis sur un banc de la promenade des Anglais, à côté d'un monsieur que je ne connaissais pas et qui, s'adressant à moi, me dit tout à coup :
Vous êtes monsieur Henri Rochefort ? Moi, je suis M. Delahante, le banquier. Je n'ai presque pas quitté le chevet de Morny pendant sa dernière maladie. Ah ! vous pouvez vous vanter d'avoir occupé son cerveau jusqu'à sa dernière heure. Il ne parlait que de vous et paraissait vous craindre comme si vous étiez dans sa chambre.

Je crus à une plaisanterie de la part de M. Delahante, que j'ai retrouvé à Paris depuis cette étrange confidence ; mais Alphonse Daudet et plusieurs autres familiers de l'hôtel Morny me la confirmèrent pleinement.

L'accueil que ses gracieuses avances avaient rencontré chez moi avait probablement frappé cet homme tout-puissant, peu habitué à des rebuffades, et l'impression n'en était pas encore effacée au moment où il tomba malade. Il n'en est pas moins particulier qu'il ait, en mourant, donné au gouvernement impérial le suprême conseil de se défier de moi, qui, en effet, devais bientôt en faire assez contre lui pour qu'il me tînt en sérieuse et légitime défiance.
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(Au sujet des casinos)
Cet étalage de frais quotidiens, cette multiplication de tous les plaisirs, ces opéras pour lesquels on fait venir de France et d'Italie des ténors à 5.000 Frs par soirée équivalent à cet aveu :

"- Faut-il que nous vous en prenions, de l'argent, pour que nous en dépensions tant et qu'il nous en reste encore dix fois plus !"

Mais, après le Traité de la servitude volontaire, il y aurait encore à écrire un Traité des dévalisés volontaires. Ils savent qu'ils sont en face de l'abattoir et ils s'y ruent tout de même, se disputant les places pour être égorgés les premiers.
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