Bien avant que le XXe siècle ne parte à la recherche du temps perdu, le mythe de l'enfance flottait sur la lagune. Fulvio Roiter, dans son album, nous montre beaucoup d'enfants. Il faut l’œil d'un grand photographe pour nous débarrasser des clichés que trop d'esthètes, trop de littérateurs ont collés sur Venise. Venise n'est ni ce théâtre d’illusions planté pour une mascarade frivole, ni cette nécropole geignant d'échos funèbres : mais une cité vive, jeune, changeant au rythme des saisons, blanche de neige l'hiver, couleur de saumon au printemps, de rouille à l'automne ; luttant courageusement contre l'adversité, qui a pour nom aujourd'hui finance, industrie, technocratie ; mais surtout, il importe de le comprendre, une cité où la beauté n'a jamais été un placage élitaire, mais l'expression même de la vie.
Dominique Fernandez
Fulvio Roiter e il metodo nella fotografia