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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Bravo Francine ! Vraiment Bravo !
Babelio cache des talents insoupçonnés, et afriquaeh, notre Francine en est un que je découvre à mon grand plaisir, en plus une histoire autobiographique, instructive, foisonnante de citations littéraires intéressantes et tout cela racontée avec beaucoup de sincérité et d'humour, d'une prose simple et naturelle.

Francine nous ouvre son coeur sur cette vie passée en Afrique, « un véritable océan, une planète à part, un cosmos hétérogène et immensément riche…. », où elle atterrira suite à son mariage avec un étudiant gabonais , rencontré sur les bancs de la fac en France. Ce qui est intéressant et émouvant est son approche naturelle à un nouveau pays aux vies, us et coutumes totalement différents du pays d'où elle arrive, où l'argent , confort et autres gadgets de la civilisation occidentale sont quasi inexistants. Pourtant ces us et coutumes de retour en France ne seront plus aussi intéressantes et pratiques à vivre…..

La forme subtile et nette est découpée en chapitres , dont chacun débute par une citation superbement choisie qui reflète le pitch de son sujet précis se référant à la vie sociale, l' histoire, les coutumes et les conditions de vie souvent assez tragiques du Gabon et de la Guinée Équatoriale, deux pays sous le joug de la dictature et de la corruption que je ne connais pas du tout. Elle nous y détaille ses expériences, ses ressentis dans et sur ces pays en l'enrichissant avec détails et explications de teneur très instructive.
Un aperçu lumineux de l'Afrique d'une touche très personnelle.

Pour terminer une citation du livre,
« Seul celui qui envisage son projet comme une entreprise toute naturelle et non comme une entreprise extraordinaire, qui ne fait pas étalage de sentiments d'héroïsme, mais connaît seulement le devoir accepté dans un enthousiasme calme et sans illusions, est capable de devenir un de ces aventuriers de l'esprit dont le monde a besoin. »
Albert Schweitzer
Cela te correspond chère Francine ; humilité, générosité, honnêteté et intelligence sont pour moi les quatre qualités primordiales chez une femme et un homme, tu les possèdes toutes. J'adore aussi comment tu glisses entre les lignes tes mariages ( spéciales 😊) et ton divorce comme des faits banales de la vie courante, « Mon mari (car j'ai rencontré l'homme de ma vie, un Andalou, nous nous sommes mariés, je le raconterai par la suite) »😁 , Merci.
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« Un grand silence gêné suivi de rien, un peu comme si j'avais prononcé une grossièreté, comme si poussée par la désespérante volonté de ramer à contre-courant, j'essayais de donner de l'importance à ce qui, pour tous, semblait futile, un grand silence a ponctué mes essais de parler de l'Afrique. »

Ce livre de mémoires, écrit à des décennies de distance, est une réponse éclatante au grand silence qui accompagna les tentatives de Francine de mettre en mots ce qui constitua pour elle une expérience primordiale, fondatrice et inoubliable. C'est l'amour qui l'a d'abord menée en Afrique. L'amour pour Yenoth, un étudiant gabonais rencontré sur les bancs de l'université, qui s'est mué en amour pour son pays, où elle fut reçue de longs mois deux années de suite par des gens simples avec lesquels elle sut nouer un lien fort et durable. C'était au début des années 70, et lorsque Francine pose pour la première fois son pied sur le sol africain, à Libreville, elle est frappée par l'évidence, celle de se retrouver chez soi, celle de renaître « dans une matrice originelle et sécurisante. » :
« Plus que tout, je ressens une sorte de connivence secrète, une acceptation totale, une correspondance absolue avec cette culture que je connais parce que mon mari qui y est né m'en a longuement parlé. Je retrouve mes origines, celles de l'humanité, je retrouve ce que j'ai toujours voulu vivre. Pourquoi ? Je ne sais pas, c'est ainsi. »

Sur le chemin qui la mène de Libreville à Port-Gentil, puis au village de Yombé II où elle fait la connaissance de sa belle-famille, Francine se déleste de toutes ces choses futiles qui encombrent nos existences, maquillage, crèmes, chaussures, vêtements, ainsi que de sa montre qui scande inutilement les heures dans un pays où le temps ne se découpe pas en tranches, mais se vit.

« La nuit nous tombe dessus, sans prévenir, nous enroule dans sa douceur, puisque nuit ne veut pas dire froid. Les nuits sont chaudes ici. Je prie à la vue de cette splendeur, prière spontanée, sans autre but que de dire merci. le matin, j'assiste, aussi minuscule qu'une fourmi, à la création du monde dont l'immensité se déploie, se multiplie, se colore en une incroyable variété de tons roses, bleus et violets, en un sans fin de nuances se mariant entre elles. »

À cette expérience liminaire, à cette immersion dans une vie villageoise et familiale blottie sur un banc de sable coincé entre le fleuve Ogooué et la forêt tropicale où il est interdit de pénétrer, en succède une autre seize ans plus tard, bien différente, en Guinée Équatoriale, un des pays les plus pauvres du monde où elle se rend pour raisons professionnelles. Pas de famille africaine cette fois pour l'accueillir en son sein, mais l'Afrique des blancs, un monde confiné et à part, douteux mélange de ragots, de condescendance et d'ignorance, relevé d'une pincée de corruption avec, Dieu merci, quelques personnes, comme elle authentiquement désireuses d'apprendre et d'aider au développement du pays.
S'appuyant sur ses expériences et impressions personnelles ainsi que sur ses nombreuses lectures, aiguillonnée par un inassouvissable désir de comprendre et de transmettre, Francine nous livre une multitude d'informations sur l'Afrique de l'Ouest — historiques, politiques, culturelles — qui constituent de précieuses clés d'analyse pour les lecteurs qui, comme moi, ne connaissent l'Afrique qu'au travers de ses clichés les plus éculés : épidémies, malnutrition, guerres ethniques…

Nous faisant part de ses questionnements et de ses doutes avec la franchise et l'honnêteté qui la caractérisent, Francine nous invite à réfléchir. Ainsi lorsqu'elle s'interroge sur le supposé fatalisme africain susceptible d'expliquer des siècles de sévices, j'y ai vu un écho d'une réflexion que Karen Blixen nous livre dans La ferme africaine :
« Ils considèrent comme naturel que la plupart des hommes soient capables de tout et il est impossible de les offenser, même en le cherchant. Un Kikuyu qui serait sensible à la manière dont d'autres personnes le traitent serait considéré comme mauvais, dégénéré ou fou — cela reviendrait à juger la vie ou Dieu en fonction du temps qu'il fait. »

Si Francine reste très pudique sur ses sentiments, l'émotion pourtant, nimbée de la nostalgie de ce qu'elle a aimé et perdu à jamais, irradie chaque page de son livre. J'y ai lu un amour infiniment reconnaissant, loin de tout lyrisme, pour l'Afrique et pour ceux qui la peuplent, pour ce que ce continent « dansant sur le passé et tourné vers l'avenir » lui a donné : ses racines.
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Comment aurais-je pu deviner que l'amie qui était en train d'admirer une toile de Joan Mitchell, avait été une aventurière et qu'elle avait aimé un bel étudiant Gabonais au point de quitter son confort occidental pour partir à la découverte de sa nouvelle famille.

Une personne à la générosité telle, qu'elle est parvenue à accueillir des us et coutumes très éloignés de son mode de vie occidental, sans jugement, en toute simplicité, afin de se fondre dans le creuset de cette nouvelle vie au Gabon et de partager le quotidien du village.

Et c'est son récit chaleureux qui donne toute la valeur de ce livre, cet amour d'une terre qu'elle a peut-être connue dans une autre vie au point d'avoir eu le sentiment de retrouver ses racines ; mais Lucy n'est-elle pas à l'origine du rameau humain, l'Afrique ne serait-il pas le berceau des représentants de notre espèce, un retour aux origines en quelque sorte qui pourrait lui donner ce sentiment d'appartenance du temps où nous étions des australopithèques.

Un livre qui dispose d'un prologue magnifique de Birago Diop, ne pouvait qu'être écrit par une femme de coeur. Chaque chapitre se voit doté d'une très belle citation en rapport avec le thème.

Le voyage peut alors commencer. L'avion décolle de Paris en partance pour Johannesburg via Libreville. Atterrissage à Libreville, nous sommes en 1972, commence alors l'aventure avec la rencontre d'un « mamba noir », un serpent qui peut vous tuer en quelques secondes. le ton est donné, il fait chaud, nous sommes bien en Afrique et la montre n'est plus d'aucune utilité.

Port-Gentil avec la présentation des oncles et des tantes et ensuite remonté du mythique fleuve Ogooué en pirogue à moteur à destination du village où l'authenticité est au rendez-vous ainsi que la chaleur humaine.

L'adoption s'effectue chaque jour un peu plus tout en participant aux travaux habituels. J'ai aimé accompagner ces femmes à travers la plume de Francine, je les ai visualisées :

« Je revendique aussi de partir avec elles au petit matin, l'une derrière l'autre, jusqu'au fleuve, le long d'un sentier étroit créé dans la brousse au fur et à mesure de notre avancée, puis en pirogue, puis de nouveau l'une derrière l'autre, chacune portant sur la tête les plats que nous allons manger à midi, et tenant à la main les machettes qui vont nous servir à débroussailler. Germaine allie une démarche de déesse à une silhouette longiligne digne d'un mannequin, elle enroule un lourd pagne au-dessus de sa tête pour y poser les plats avec un remarquable équilibre »

Ce village vit au jour le jour avec le souci de se nourrir au quotidien, à l'abri des grands arbres qui sont plantés là, nourriciers et protecteurs, pour les familles des alentours. Il faut apprendre à vivre en défiant la mort, les maladies, le paludisme notamment, les rats, les mouches, c'est particulièrement impressionnant cette insolence constante que lancent les humains à la nature environnante.

Tous ces villageois sont magnifiquement évoqués. On se sent relié à chacune de leur personnalité et la conscience "d'être" prend tout son sens loin du verbe avoir.

« Puis Papa Mandembi, un autre oncle à la barbe blanche qui habite un village de l'autre côté du fleuve, le traverse en pagayant debout, royal, superbe, inoubliable vision, pour rendre hommage à notre fils, son homologue de deux ans. Dans l'émotion générale, il a offert un coq vivant, en le tenant par les pattes, au petit garçon à qui nous avons donné le même nom que lui, comme pour l'assurer par ce choix d'être certain qu'il ne va pas mourir tout à fait ni disparaitre intégralement de la terre ».

Le chapitre sur les rituels de deuil, sur les guérisseurs, les confréries, la forêt et ses esprits qui convoquent le surnaturel, sont captivants. Ils nous enseignent, autant que possible, sur toutes ces traditions qu'il nous faut respecter et qui ont forgé le peuple Bantou, installés sur les rives du fleuve l'Ogooué ; ce fleuve précédemment emprunté par le Docteur Albert Schweitzer en 1913, qui le mènera en forêt équatoriale pour y installer son hôpital.

J'ai beaucoup aimé ce premier séjour au Gabon bien qu'il se soit terminé par un divorce mais aussi avec deux très beaux enfants. Dans un couple, chacun apporte une part de lui-même façonnée par sa culture, son éducation. Dès l'instant où les désillusions dessillent nos yeux, il devient difficile de rester uni, main dans la main.

La deuxième partie du livre s'attache au séjour de Francine dans la Guinée Equatoriale, de 1989 à 1994 où elle a été mutée, et qui est un des pays les plus pauvres du monde et ancienne colonie espagnole. de son poste et durant cette période, son regard a le temps de noter toutes les défaillances, les irrégularités, qui gangrènent ce petit pays. Cette partie jette un coup de projecteur sur les malversations, la dictature, l'Afrique des blancs, le pétrole. Mais il n'y a pas qu'un constat négatif, il y aura, là aussi, une belle rencontre amoureuse.

J'ai été fascinée par cette lecture qui m'a rappelée les récits de ma grand-mère qui a vécu dix ans en Afrique où une partie de ma famille s'était installée. Elle avait un amour immense pour ce continent et en lisant ces chapitres, je revivais les souvenirs de mamie. Longtemps l'Afrique fut pour moi comme un appel auquel je n'ai pu répondre si ce n'est qu'au travers de mes échanges avec mes amis d'origine africaine qui ont eu la gentillesse de m'inviter à des soirées culturelles, me donnant le sentiment de voyager un peu.

Je termine l'année 2023 en rédigeant ce retour de lecture d'un récit emprunt de tendresse pour le continent africain même si celui-ci est immense et qu'on ne peut généraliser. Francine Romero @Afriqueah, nous offre un beau cadeau, la découverte d'une part importante de ce qui a été son histoire personnelle.
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Ceci, sur un livre que j'ai écrit, n'est bien entendu pas une critique, mais une déclaration d'amour et d'amitié : amour lorsque je suis arrivée, par les hasards de la vie, dans un petit village gabonais dont j'ai découvert les racines qui me liaient à lui.

J'ai vécu au Gabon chez des paysans simples, et qui pourtant revivaient Homère, avec les sirènes qui sont des lamantins, animaux qui existent tout au long de l'Ogooué et qui font rêver comme Ulysse le faisait. A l'arrivée au village, en plus de la chaleur, de la vie minimaliste et austère, de la générosité de ma nouvelle famille, je retrouve, comme si je renaissais après une vie antérieure, ce dont j'ai toujours rêvé, mes racines. Je ne peux, par ailleurs, que comparer cet ancrage avec le monde antique ; par bien des points, les libations, les cimetières au-delà du fleuve, les mariages romains avec adoption, je reconnais une civilisation où la mort n'est pas normale, où les féticheurs jouent un rôle pour la dénoncer, où donc les empoisonneurs existent, où les sociétés secrètes d'hommes, puis de femmes luttant contre le pouvoir des hommes, se font respecter et craindre, à l'aide de drogues dures et nécessitant des initiations dont j'ai juste vu le préambule.
Mais je l'ai vu.
Amour passion pour mon deuxième mari, en Guinée Équatoriale, avec qui j'ai partagé la connaissance de l'Afrique, vécu la vie des blancs tout à fait privilégiés, et, pourtant, ne fraternisant pas, mais pas du tout, avec eux, pauvres expatriés dont je raconte le racisme, l'appât du gain et la corruption. Toutes pensées méprisables fondées sur l'ignorance.

Déclaration d'amitié vis-vis de Pierre (@Dombrow01), restant dans l'ombre de babelio, qui m'a encouragée, aidée, corrigée vingt mille fois, suivie, puis s'est chargé de la mise en page, de la couverture, de l'envoi enfin à amazon/kindle.
Sans lui, sans son amitié le long des mois, nos échanges constants par téléphone, sa vigilance devant mes failles, ce livre n'aurait pas vu le jour.
L'amitié aussi s'est révélée, puissante, de la part de ma belle-soeur, qui avec brio et intelligence, a relu et corrigé le livre racontant une partie de ma vie que mon frère, militaire, avait refusé d'admettre, et dont, cinquante ans après, je reçois avec émotion les commentaires élogieux.
Déclaration d'amour à ma fille Inès, l'amour de ma vie, qui elle aussi a relu et fait des suggestions, sur un passé dont elle a eu les oreilles rabattues.
Car ce que j'ai vécu en Afrique a imprimé en moi une marque, comme si ma couleur de peau importait moins que l'amour que j'ai ressenti pour ce continent.
Pourquoi raconter ses souvenirs ? Pourquoi ce dont on se souvient prend sa valeur du fait même que l'on a gardé, parmi toutes les conversations, les rencontres, les épisodes d'une vie entière, certains faits et pas d'autres ? Il se trouve que ces souvenirs personnels trouvent un répondant dans d'autres évènements et dans d'autres lectures.

J'avais envoyé en MP aux personnes de babelio que j'avais rencontrées à Paris, ou avec qui j'avais eu un dialogue particulier, l'annonce de ce livre à paraitre. Ne m'en veuillez pas, ne soyez pas troublés, si vous voyez soudain apparaitre Troublantes racines de Francine Romero sans avoir été prévenus. 
Et puis, 400 millième chronique.
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Je me suis embarqué sur la pirogue de mon amie Francine et j'ai remonté en sa compagnie le fleuve Ogooué pour découvrir le Gabon de 1972 avant de poser mes bagages avec elle en Guinée Equatoriale de 1989 à 1994.

Un voyage incroyable pour le petit français que je suis et qui ne connait rien de l'Afrique. Un dépaysement m'attendait à chaque page. Un plaisir qui se veut unique et exotique. Une aventure à taille humaine avec une véritable copine qui a su me prendre par la main en m'invitant au grand voyage sans chichi et en toute honnêteté. Une invitation privée pour un récit autobiographique dans un pays où le mot racine a une résonnance toute particulière.

On savait que Francine était une inconditionnelle du continent africain, aujourd'hui on découvre cette facilité qu'elle possède à nous faire partager cet amour passionnel. On ressent avec elle toutes les choses qui l'unissent à ce pays, à son deuxième pays. Des habitants jeunes et âgés à ceux de sa famille d'adoption, elle sait si bien nous les décrire qu'elle nous donne l'impression de les toucher, de les sentir, de les voir et de les aimer. On perçoit entre les lignes leurs accents, leur gouaille, leur humanité. On comprend avec Francine que les petites choses de tous les jours dans nos cultures occidentales, revêtent une importance vitale dans ces pays où l'eau courante et l'électricité ne sont pas à la portée de tous. Où il faut apprendre à se débarrasser du superflu si l'on veut vivre, vivre tout simplement en respectant la nature, en revenant à nos racines ancestrales même si cela peut paraître quelquefois troublant…

Mais notre amie sait aussi nous montrer une autre image de l'Afrique. Derrière la femme complaisante, il y a aussi la femme révoltée. Celle qui nous montre l'autre côté de la carte postale et des Tours opérateurs. L'Afrique de la corruption, de l'exploitation, des dictateurs et des fonctionnaires d'une certaine coopération qui se veut souvent à sens unique. Elle n'est pas tendre avec cette Afrique des Blancs et des profiteurs. Sans entrer dans le pathétique, elle sait bien nous expliquer la mentalité de ces petits blancs encore empêtrés dans leur colonialisme. Heureusement son optimisme bien diffèrent d'une naïveté gentille redonne à son récit la sincérité qui ne la quitte jamais et qui donne tant de véracité à ses propos.

Merci pour ce merveilleux bout de chemin fait ensemble mon amie. Merci pour ces images et ses décors riches en couleurs et en bruits. Merci pour ces odeurs, ces épices, ces plats typiques (je vous laisserai découvrir le fameux poulet bicyclette). Merci de m'avoir fait aimer et surtout ressentir ce beau pays qui est le tien et que tu as su également faire devenir le mien tout au long de ces pages. Merci ma chère Afriqueah pour ta franchise et ton authenticité. Ah ! Vivement qu'on puisse y retourner ensemble !!!

« En arrivant à Malabo après les tangages incertains de l'avionnette affrétée pour l'occasion depuis Douala, après la jungle vue du haut et ainsi transformée en un ensemble pacifique de brocolis annonciateurs, après la vue du petit volcan enveloppé de romantiques nuées, je retrouve une touffeur qui me serre dans ses bras, la chaleur poussée à son plus haut point d'humidité s'enroulant amoureusement en une caresse palpable, mélangée à une odeur de fruits, de parfums inconnus, de pourriture terrestre, la pourriture de la vie, l'humus du commencement, la moiteur du désir, l'alanguissement qui nous saisit à vivre sous ces climats délétères. »
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Avec Troublantes Racines, Francine Romero m'a fait voyager en Afrique et découvrir l'histoire de la Guinée équatoriale. J'aime les livres qui me font faire des voyages imaginaires et me permettent d'en apprendre davantage sur des pays (moeurs, culture) où je n'irai probablement jamais.

Francine Romero a beaucoup voyagé : Gabon, Guinée, Nouvelle-Calédonie avant de poser ses valises en Andalousie, aux côtés de son mari Curro (splendide description du mariage dans la cathédrale de Malabo !). L'agréable souvenir de mes séjours en Espagne m'avait donné envie de l'inviter à faire partie de mes ami(e)s babelionautes. Ainsi, j'ai eu la chance d'être informée qu'elle préparait un livre-témoignage sur ses diverses pérégrinations en Afrique. Pour le premier anniversaire de sa parution, voici ma chronique et félicitations pour cet ouvrage, qui poursuit son chemin auprès des lecteurs !

C'est avec plaisir que je suis partie avec Francine Romero, d'abord au Gabon dans les années soixante-dix avec son mari Yenoth, un étudiant gabonais, pour rendre visite à sa belle-famille. Cette partie est l'occasion de voir comment s'organise la vie au village Yombé II, les différences culturelles dans la manière d'appréhender la mort, celle d'une petite fille notamment, les rites, les sociétés secrètes. C'est à la fois instructif et émouvant, la photo de l'enfant, en particulier.

Le retour à Lille après cette immersion, cette aventure anthropologique, est plus difficile : le sentiment ambigu d'avoir trouvé ses racines en Afrique, alors que Francine Romero n'en est pas originaire, et pourtant la sensation de ne pas tout comprendre, de ne pas tout partager, de ne pas être d'accord avec tout. Ce décalage paradoxal crée une rupture.

Je connaissais un peu l'histoire du Gabon mais j'ai néanmoins appris beaucoup de choses sur les divers dirigeants, la Françafrique, l'affaire Elf. En revanche, j'ignorais tout de l'histoire de la Guinée. Guinée Bissau, Conakry, Malabo, Bata… ne sont que des mots sur une carte, pour moi, et encore… Il faut dire que ceux qui tentent d'approfondir le sujet parmi les expatriés finissent mal. le sort réservé à André Branger est révélateur.

Cette affaire, qui donne au récit une allure de thriller financier et géopolitique, m'a fait penser à celle du juge Borrel à Djibouti en 1995. le témoignage de Francine Romero, comptable à l'ICEF, l'Institut culturel d'expression française, à Malabo, est édifiant sur certaines pratiques dictatoriales : la mainmise du parti unique sur les médias, ce dont on ne parle pas n'existe pas, la corruption, les douanes, les petits et gros dysfonctionnements du quotidien…

Un texte qui m'a donné envie d'effectuer des recherches sur la Guinée équatoriale et qui m'a aidée à mieux comprendre l'Afrique contemporaine. L'exemple des échanges commerciaux entre l'Occident et la Guinée équatoriale est d'un réalisme cruel : le dictateur vend à prix d'or le pétrole, met l'argent sur son compte privé à l'étranger et la Guinée équatoriale reçoit en retour des déchets toxiques, issus du nucléaire, à enfouir sous son sol. Où ? Sur l'île d'Annobon ? Merveilleux ! de quoi réjouir la population !

J'ai particulièrement apprécié, au début de chaque chapitre et tout au long du récit, les citations d'écrivains, de poètes, d'explorateurs, les références culturelles érudites et passionnantes, pour moi. L'une d'entre elles a eu une résonance intime et j'ai trouvé que c'était une excellente idée de commencer ainsi Troublantes Racines :

« Écrire, c'est s'ouvrir à tous les vents. Écrire, c'est entreprendre la quête inachevée. J'écris parce que la vie me déroute, j'écris parce que j'ai peur de la mort. J'écris pour apprendre à penser, pour mieux comprendre autrui, j'écris pour me comprendre. » Birago Diop.
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J'ai appris par la présentation qu'elle en a fait que mon amie babeliote afriqueah aka Francine avait écrit un livre sur l'Afrique. Pour tous ceux qui lisent régulièrement ses billets, cela ne peut constituer une surprise. J'ai toujours aimé ce qu'elle nous partage à chaque fois dans ses retours sur ses lectures à propos de l'Afrique, dans lequel le ressenti sur le livre se mêle à des souvenirs, à des anecdotes personnelles qui m'ont souvent fait sourire.

Déjà, cette prouesse, écrire un vrai livre, m'a remplie d'admiration, et puis j'ai lu quelques retours tous élogieux. Et je me suis dit, il faut que tu le lises.

Déjà, ce titre interpelle : quelles sont ces racines, pourquoi troublantes ? Francine est une fille de France, étudiante dans le Nord quand elle rencontre Yenoth, étudiant gabonais. Études en commun, mariage, enfant, tout va vite et Francine s'envole pour l'été au Gabon découvrir le pays et la famille de son mari. Et c'est là que ce titre prend toute sa signification : l'Afrique est pour elle une évidence, elle a comme elle le dit si bien l'impression d'y retrouver ses racines. Elle fille du Nord, dont la famille n'a jamais vécu en Afrique s'y sent chez elle, c'est une seconde naissance :
« Dès les premières marches descendues depuis l'avion, le sentiment de retrouver un monde connu me gagne. le monde oublié d'un ventre où il fait toujours chaud, où cette chaleur sur laquelle je peux à partir de maintenant tabler revêt un caractère certain, où je renais dans une matrice originelle et sécurisante. Je régresse au stade de foetus dans ce pays lointain et saturé de moiteur musquée. Plus que tout, je ressens une sorte de connivence secrète, une acceptation totale, une correspondance absolue avec cette culture que je connais parce que mon mari qui y est né m'en a longuement parlé. Je retrouve mes origines, celles de l'humanité, je retrouve ce que j'ai toujours voulu vivre. Pourquoi ? Je ne sais pas, c'est ainsi. »

Elle décrira dans ce livre deux expériences très différentes, celle du Gabon au sein de la famille de son époux, dans un village où le travail aux champs rythme les journées. Et seize ans plus tard, une nouvelle en Guinée équatoriale où elle est envoyée comme coopérante et elle découvrira l'Afrique des blancs, avec leurs pires travers, mais qui lui donnera également la chance de rencontrer son deuxième mari, espagnol .

Mais ce livre n'est pas qu'un livre de souvenirs. Francine ne se contente pas d'égrener ses propres expériences, elle partage avec nous bien plus que cela. Ces pages mêlent avec beaucoup de tendresse, de pudeur aussi, d'intelligence, anecdotes personnelles, moments de bonheur, descriptions de la nature et réflexions sur l'Afrique, à la fois sur son histoire, son art, la politique, ses croyances, sa manière de vivre. Tout cela à travers de petits chapitres chacun préfacé d'une citation qui introduit et éclaire le thème qu'elle va y développer. J'ai été frappée à chaque fois par l'accord parfait entre la citation et les propos de Francine, dont je salue l'érudition pour avoir su choisir si bien tous ces passages qui enrichissent son propos.

Une lecture enrichissante pour moi qui ne connais pas grand-chose de ce continent, et dans laquelle j'ai retrouvé avec plaisir le ton des billets de Francine et ressenti à travers ses mots son amour indéfectible pour ce continent sur lequel tant de clichés abondent. Merci Francine de m'avoir permis de le découvrit un peu mieux.
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Voilà mon voyage par procuration terminé, un voyage très riche d'enseignements, et ce, par l'intermédiaire du livre de mon amie Francine, alias Afriquea.

L'auteure nous relate, avec par instants un brin d'humour, ses expériences lors de son séjour au Gabon de 1972 à 1973, puis en Guinée équatoriale de 1989 à 1994.

Le prologue, inspiré de l'écrivain Birago Diop, est d'une grande beauté, d'une grande profondeur, et ses anaphores lui confèrent une puissance qui étreint le coeur. "J'écris parce que j'ai peur de la mort". Oui Francine. Raconter ce qui à nos yeux revêt de l'importance, avant que nous ne puissions plus le faire.

À la lecture de l'introduction, je n'ai pu m'empêcher de sourire, car celle-ci illustre si bien ce que ressentent les auteurs qui, à tort, se sentent un peu comme des imposteurs. "Un grand silence gêné, suivi de rien, un peu comme si j'avais prononcé une grossièreté". Ce silence gêné évoque l'hésitation qu'a pu ressentir Francine, avant, enfin, de nous partager ses expériences, aussi magnifiques qu'atypiques, ce pour quoi je la remercie.

Parlons, Francine, de ce sentiment d'appartenance que tu as à l'Afrique. "Dès les premières marches descendues depuis l'avion, le sentiment de retrouver un monde connu me gagne... Je ressens une sorte de connivence sécrète, une acceptation totale, une correspondance absolue avec cette culture". le sentiment d'appartenance à un pays qui n'est pas le nôtre est d'une force telle, qu'il ne peut être réellement compris que par ceux qui l'ont vécu. Couleur de peau, éducation, croyances, il n'est rien qu'il ne puisse défier. C'est comme si tout celà était absorbé par la terre que notre coeur a choisie, se transmutait et nous reprogrammait pour faire de nous quelqu'un d'autre, celui où celle que, dans le secret de notre âme, nous avons peut-être toujours été.

Grâce à la description précise mais sans redondance que tu fais de Libreville, j'ai eu le sentiment de m'y promener. Dans ce Libreville des années 70, petite bourgade entre passé et modernité, où se côtoient hôtels gratte-ciel, aéroport en bois et blocs de béton posés pêle-mêle en guise de débarcadère, et où le temps n'importe plus. Certes, le danger n'est jamais loin, il peut se manifester sous forme, entre autres, de serpents tapis on ne sait où, pour autant, il m'a semblé qu'il était doux de vivre dans cette petite bourgade à l'air provincial, non aseptisée et un tantinet brouillonne. S'y trouve cependant un hôpital sans médicaments, le ton est donné...

À Port Gentil, accompagnée de ton jeune époux Gabonais, tu fais la connaissance de ta grande et chaleureuse belle-famille. J'ai regretté que tu n'aies suffisamment brossé le portrait des uns et des autres, car vis-à-vis d'eux, j'ai gardé une certaine distance. Mais peut-être n'était-ce pas vraiment le propos, et que ton intention était certes, de faire partager au lecteur ces tranches de vie, mais aussi et surtout de nous dépeindre les couleurs de l'Afrique, sa complexité, ses us et coutumes, et en ce sens ton livre est d'une grande richesse et fort instructif.
Le deuil et ses rites, la libation, la conception de la famille, bien curieuse au regard de l'occidentale que je suis, tout celà ponctué de la Grande Histoire. La Grande Histoire que tu as distillée avec la juste mesure, suffisamment pour immerger le lecteur dans cet univers, mais sans que ce soit pour autant indigeste. le climat politique y est également abordé, donc il va sans dire que corruption et malversations vont bon train.

La corruption n'est certes pas l'apanage des Africains, mais celle-ci, lorsqu'elle a lieu dans des pays d'Afrique, me révolte et m'inspire encore plus de mépris.
Comment des politiciens dont les ancêtres ont connu l'humiliation de l'esclavage, peuvent-ils à leur tour se montrer si vils. Si assoiffés de pouvoir et d'argent ? Ne devraient-ils pas avoir à coeur d'assurer à la population, à leurs frères, une vie un tant soit peu décente. Ne devraient-ils pas marquer un point d'honneur à montrer au monde qu'ils sont des êtres responsables, et que leur pays ne peut en aucun cas être le terrain de jeu des uns et des autres. Eh bien non. L'appât du gain est le plus fort. Tout est permis. Pourvu que celà servent leurs intérêts financiers. Et qu'il y a t-il de plus criminel, de plus nuisible et inconstructif pour un pays, que de le priver de ses têtes pensantes, dans le but, il va sans dire, de mieux s'agripper à son "trône". Toute ces exactions m'ont proprement révoltée.

À ce propos Francine, un passage de ton livre m'a particulièrement interpellée et mérite qu'on s'y arrête un instant. Je cite : "J'apprends cette notion de destin inéluctable dès mon arrivée. Je me pose la question de savoir si le passé de ces peuples les a éduqués dans l'acceptation, ou si une certaine indifférence de départ à permis les siècles de sévices, si le fatalisme les a aidés à supporter la captivité, ou si les déportations leur importait finalement peu, comme si ce sort était prévu de tout temps et que toute révolte aurait été futile.
Habib Bourguiba a dit : "Si nous avons été colonisés, c'est parce que nous étions colonisables". Aimé Césaire a d'ailleurs tenu des propos très ressemblants. Je n'ai plus les termes précis en tête, mais sa pensée était la même, sauf qu'elle s'appliquait à l'esclavage. Et à Malek Benabi de dire, "Une nation n'est pas tant défaite par des agressions extérieures que par la perte de sa cohésion interne". Alors peut-être avons-nous notre réponse...

Mais heureusement qu'après tous ces sujets que tu fais bien d'évoquer, il y a de l'amour dans l'air !!! Voilà qui fait
du bien ! Vient ta rencontre avec ce bel Andalou, "ce beau chevelu sauvage ", puisqu'entretemps tu as divorcé de ton premier mari. Tout m'est apparu si fluide entre vous. L'amour est parfois comme une évidence, et c'est beau.

Le chapitre intitulé "L'Afrique des blancs ", lui par contre m'a carrément amusée. Tu donnes la parole aux "illustres" épouses de coopérants qui cassent du sucre sur le dos des Africains, et je n'ai pu m'empêcher d'établir un lien entre ces pestes ignorantes et les Français métropolitains établis en Guadeloupe qui, en 2023 ! Pratique l'entre-soi et cassent du sucre sur notre dos. Heureusement que je suis venue quelques fois en métropole, ce qui m'a permis de me forger une opinion plus juste, de reconnaître que ces imbéciles ne sont pas du tout représentatifs de la population Française.

Je vais quand-même conclure, Francine, ton livre est très enrichissant, très instructif, émaillé de nombreuses références littéraires, une prose simple et belle, alors je te dis merci. Merci pour ton érudition qui ne peut susciter qu'admiration, ton
humour et ton impartialité, car en dépit de l'amour que tu as pour ce continent, c'est sans concessions que tu as dévoilé ses aspects les plus lumineux comme les plus sombres. Merci Francine, de m'avoir fait passer un fort bon moment.










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L'Afrique : terre de mystère et de croyances ancestrales. Quand j'étais petite un griot est venue à l'école, il avait fait vivre la savane, la brousse, le vaudou, les chants ancestraux la voix basse et mystérieuse le djembé battant le rythme, il avait transporté loin là bas les enfants assis autour de lui dans une sorte de transe dont le charme ne fut rompu que quand la voix cessa.

L'Afrique, je ne connais rien de ce contient mes passions m'ayant porté ailleurs. Une culture qui m'échappe, alors quand on ne sait pas la seule chose censée est de demander aux passionnés, à ceux qui aiment, qui vibrent, pour cet ailleurs. Francine ROMERO est ce ceux là. Depuis que j'ai croisé sa route sur Babelio elle m'a toujours parlé de l'Afrique (et Picard aussi mais ça c'est une autre histoire), ses lectures en témoignent et ses éclairages dans les commentaires aussi. L'Afrique elle l'aime, mais pas aveuglément. Alors quoi de plus naturel que de partager ? Dans son livre elle nous parle de son expérience d'abord du Gabon puis de la Guinée équatoriale.

Cet amour presque viscéral pour le Gabon où elle se sent chez elle, elle le partage avec nous en nous expliquant les coutumes, la vie traditionnelle non pas d'une touriste mais d'une habitante. Avec enthousiasme et spontanéité elle essaie de trouver sa place dans cet univers dont elle a tant à apprendre. Mais Francine n'est pas un griot, elle n'est pas là pour émerveillée les lecteurs, pas seulement. Elle n'est pas naïve, son regard est acéré et son amour du Gabon ne l'aveugle pas. Les magouilles politiques, financières, les luttes de pouvoir tout ça elle le voit. de même qu'elle ressent parfois un fossé qui ne peut pas toujours être comblé, une culture différente qui créé parfois des incompréhensions, de la colère, qui peut blesser aussi mais qui n'empêche ni l'amour ni l'échange. Ce que j'ai préféré ce sont les parties qui parlent de la vie de tous les jours car elles sont profondément humaines. J'ai aussi beaucoup appris sur le fonctionnement de la famille très différent du nôtre et j'ai été subjugué par les guérisseurs et le culte des ancêtres.

La partie sur la Guinée équatoriale est différente, nous ne somme plus dans un petit village et Francine est désormais une représentante de l'État français. de par son poste et sa position dans l'administration elle voit les choses sous un autre angle. La corruption, les abus des fonctionnaires du pays et de ceux des ambassades, les intrigues, les enjeux politiques, et même un meurtre digne d'un James Bond ! Mais elle nous parle aussi des maladies, des difficultés à trouver certains produits, du manque de confort, des risques sanitaires et pour leur sécurité. Une véritable aventure humaine pleine de rebondissements, et même une histoire d'amour (qui se termine par ils eurent un perroquet!).

J'ai beaucoup aimé ce livre rempli d'amour, d'humilité, d'honnêteté et d'objectivité à la fois sur ce que l'autrice a vécu et sur ses enchantements et ses désillusions. C'est franc, honnête, direct, comme Francine. Il n'y a pas de jugement de valeur, juste un partage. J'ai aussi beaucoup aimé les introductions sous forme d'extraits d'auteurs dont beaucoup me sont inconnus. J'ai quelques lacunes en littérature africaine. Oui bon d'accord je pars de zéro y'a du boulot… ma PAL est déprimée.

Merci Francine pour la balade en pirogue, les journées avec ces fières gabonaises, les nuits avec les gros cafards (ah non pour ça non en fait…), les parties de pêche, les repas (j'adore le manioc) et pour m'avoir emmenée au bout du monde.
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Tout commence par une histoire d'amour. Sur les bancs de l'université, dans un cours magistral sur Platon, Francine Romero a un coup de foudre pour Yenoth. Yenoth est gabonais. L'histoire va se poursuivre par un mariage, et une révélation capitale, celle de ses Troublantes racines.

« Je retrouve mes origines, celles de l'humanité, je retrouve ce que j'ai toujours voulu vivre. Pourquoi ? Je ne sais pas, c'est ainsi. Personne de près ou de loin dans ma famille n'a jamais franchi les Pyrénées, je n'ai pas rencontré d'Africains dans mon enfance bourgeoise et protégée ». (p.17)

Plus de cinquante ans plus tard, Francine va sonder ce mystère à travers ce témoignage qui est comme une bouteille à la mer. Comme elle nous le dit, en ouverture, elle n'a jamais réussi à parler de l'Afrique.

« Un grand silence gêné suivi de rien, un peu comme si j'avais prononcé une grossièreté, comme si poussée par la désespérante volonté de ramer à contre-courant, j'essayais de donner de l'importance à ce qui, pour tous, semblait futile, un grand silence a ponctué mes essais de parler de l'Afrique ».

Son propos est de nous parler de son Afrique à elle.

« Mon but est de donner une vision à l'opposé de celle des enfants morts de faim, et de l'Afrique comme suite ininterrompue de malheurs et de malédictions, ravagée par les épidémies, les maladies et les guerres ethniques ».

Nous allons la suivre au Gabon (1972, 1973), jusqu'au village de Yombé II, berceau de sa belle-famille, sur les rives de l'Ogooué, puis après son divorce, en tant qu'expatriée (1989-1994), à Malabo, capitale de la Guinée Équatoriale, située sur l'ile de Bioko.

Pour se rendre à Yombé II, Francine emprunte une pirogue à moteur, qui se fraye un chemin, à travers de « gigantesques arbres, eucalyptus, oukoumés, acajous, dont les branches et les lianes tombent dans l'eau ». [Elle doit se] plier assez souvent pour les éviter, tout en vérifiant qu'aucun animal style panthère ne [lui] tombe dessus », et surtout ne pas mettre la main dans l'eau sous peine de se faire mordre par un crocodile ou un serpent d'eau.

Elle arrive à bon port, reçue à bras ouverts par sa belle-famille. Elle dort sur une « natte, dans une hutte construite avec piliers de bois et un lacis de feuilles de palmiers tressés entre eux ». ((p.38)

Elle nous confie cette expérience passionnante, sensorielle, spirituelle, existentielle, totalement dépaysante pour une française bourgeoise. Elle nous raconte les personnages, la vie quotidienne, le village divisé en deux camps, les Myénés – ethnie de sa belle-famille – et les Fangs « redoutés pour leur violence ». Elle nous initie aux coutumes, aux rites, aux légendes, aux croyances. Son propos est illustré de pittoresques anecdotes.

J'ai adoré cette partie du récit.

La partie concernant Malabo est d'un tout autre acabit. Je pense que Francine a voulu souligner le contraste entre Yombé II et Malabo, en exprimant, dans un deuxième temps, ses amères réflexions sur la colonisation, l'esclavage, la corruption, le pillage des ressources…

Ce passionnant témoignage est étayé par de nombreuses références littéraires, philosophiques, historiques, culturelles et sociologiques.

Francine Romero, alias Francinette, nom de code Afriqueah, est ma nouvelle amie babéliote. J'ai tout de suite eu des atomes crochus avec elle.

C'est donc avec plaisir que j'ai accepté son invitation au voyage, surtout que j'ai une branche de ma famille qui est burkinabé.
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