Ce livre aurait dû s'appeler « Chocs frontaux » tant il est évident que le personnage principal est confronté à plusieurs problèmes essentiels de son existence, l'un touchant sa vie professionnelle, un autre sa vie de militant des droits des sans-papiers et enfin sa vie privée. Il est vrai que pour Georges Moisson, ils semblent ne faire qu'un. Ce personnage n'est pas aux prises avec des tourments psychologiques touchant à sa personnalité mais plutôt à des contradictions entre ses convictions d'homme engagé et un événement qui va marquer sa vie personnelle. J'ai donc eu l'impression de lire deux livres.
Le personnage est sympathique et il est facile, si ce n'est de s'identifier à lui, au moins de se reconnaître dans ces situations. Je ne veux pas révéler ces intrigues. Critiquer un livre c'est faire part des émotions qu'il vous a procuré tout en gardant une vigilance analytique sur sa conception et son contenu.
Comme toujours
Claude Rouge est un excellent narrateur et ce deuxième livre est écrit avec la même transparence que le premier, «
En scène », qui rend sa lecture tout aussi agréable. S'il ne me semble pas aussi cohérent, celui-ci est sans doute plus vivant. À mon sens il aurait gagné à être plus concis, quelques lieux communs constituent des scories dont on pouvait se passer. Mais la clarté de l'écriture nous permet de suivre constamment de fil conducteur de cette histoire.
En fermant la dernière page j'ai repris la quatrième de couverture. D'après elle le livre parle principalement de la profonde contradiction que Georges Moisson ressent lorsque « sa fille Marielle lui annonce qu'elle va se marier à un musulman et de son propre gré se convertir à l'Islam ». Là se pose un problème, car c'est bien le sujet du début et de la fin du livre. Mais, entre les deux, ce sont de toute évidence son engagement militant et sa vie professionnelle qui constituent le noyau du livre, d'où ma surprise. On pourrait donc dire que le livre ne tient pas ses promesses.
Mais cette petite part du livre est d'une intensité si grande que j'ai envie de demander à l'auteur de traiter le sujet à fond avec la même conviction plutôt que de l'effleurer. D'où vient cette timidité à aller au fond du projet ? Est-ce l'aspect psychologique de la question qui l'en empêche ? Serait-ce l'impression de livrer une part de soi-même qui créerait une inhibition ? On se perd en conjectures bien entendu. Il ne nous reste plus qu'a demander à l'auteur d'écrire un troisième roman que nous attendons avec impatience.