1776 sous le règle de Louis XV. Auguste Benjowski, jeune noble polonais hongrois, arrive enfin en France, pays des philosophes et des Lumières qu'il admire suite aux leçons de son précepteur. Son périple lui a déjà fait traverser toute l'Europe jusqu'au Kamchatka où il fut exilé puis courir les mers et découvrir le grand Nord, le Japon, Formose puis Canton. Mais sa soif d'aventures ne va pas s'arrêter là et le conduire à Madagascar où il deviendra le roi Zibeline.
Jean-Christophe Rufin nous conte à la première personne, par la voix d'Auguste et de sa compagne Aphanasie, cette incroyable histoire vraie d'un explorateur dont l'histoire française n'a eu de cesse que d'effacer la trace. le roman débute quand le couple de héros demande audience à Benjamin Francklin, le père fondateur des Etats-Unis himself, et lui raconte son histoire afin de lui demander son aide. La trame historique de ce roman est tout bonnement incroyable car je n'avais personnellement jamais entendu parler de cet Auguste Benjowski et, arrivée au milieu du livre, j'ai relu la 4e de couverture pour m'assurer que j'avais bien compris et qu'il s'agissait bien d'une histoire vraie et non d'inventions de l'auteur, tellement le récit enchainait les mésaventures. J'ai trouvé passionnante l'histoire des explorations menées par Auguste, notamment sa fuite du Kamchatka et sa découverte de l'extrême Orient de l'époque, l'hypothétique passage qui pourrait conduire le navire d'est en ouest vers l'Amérique puis sa redescente vers le sud, le Japon, Formose et Canton et enfin, des années plus tard son arrivée à Madagascar.
C'est dans ces récits d'exploration, d'aventures maritimes et de découvertes de terres vierges et peuplades inconnues que la plume de
Jean-Christophe Rufin fait mouche. Malheureusement j'ai aussi trouvé beaucoup de longueurs à ce roman, notamment dans les descriptions plus psychologiques et les passages introspectifs où l'auteur essaie d'expliquer la personnalité de son héros. L'auteur insiste beaucoup sur l'enfance et l'adolescence d'Auguste, faisant ensuite constamment allusion à ces années de formation et à la manière dont elles l'ont façonné, au point que ça en devient parfois un peu agaçant (qui peut vraiment dire pourquoi une personne va évoluer de telle ou telle manière ou prendre certaines décisions). de la même manière, le chapitre consacré à la vie parisienne et à la machination montée par Aphanasie pour s'attacher définitivement l'amour d'Auguste m'a assez vite ennuyée, j'ai eu l'impression de lire quelque chose de vu et revu, les machinations de cour, les soupirants et courtisanes, comme une sous-version des Liaisons dangereuses qui n'avait rien à faire là. Ces baisses de rythme conjuguées au style volontairement très littéraire, très XVIIIe siècle de l'auteur ont pour moi brisé un peu le charme de l'aventure et ont parfois provoqué quelques soupirs lors de ma lecture. J'aurais finalement préféré en apprendre plus sur Madagascar et la fin tragique d'Auguste qui est expédiée en quelques maigres pages.
Cela reste un roman sympathique qui nous fait découvrir une page méconnue et étonnante de l'histoire et voyager avec ses héros mais qui pour moi aurait gagné à adopter franchement un vrai parti prix de roman d'aventures et historique plutôt que de plaquer à tout prix des explications et introspections psychologiques sur chaque agissement de ses personnages. Un avis finalement mitigé, dommage.