Quand la mémoire s'embrase !
Ana Mirallès est une illustratrice et dessinatrice de BD espagnole née en 59, qui travaille régulièrement avec son compatriote et compagnon
Emilio Ruiz. Ensemble ils ont signé l'album érotico-pornographique ‘
Corps à corps' (1991), après quoi elle a fait paraître durant ces mêmes années 90, la trilogie ‘Eva Medusa' avec la collaboration d'
Antonio Segura, puis à nouveau avec son compagnon
Emilio Ruiz, le triptyque ‘A la recherche de la licorne'. Mais ce n'est qu'en 2001 que celle qui sait si bien éveiller et entretenir nos fantasmes, et pour une fois les femmes devraient y trouver leur compte, a vraiment cartonné grâce à la formidable série ‘
Djinn' scénarisée par le français
Jean Dufaux. Et tout en continuant de travailler sur ‘
Djinn', elle a lancé en 2011 cette toute nouvelle série en quatre volumes, avec
Emilio Ruiz, ‘Murraqqa'', dont l'action se déroule à la cour de l'Empereur moghol Jahangir au XVII° siècle.
‘
Muraqqa' 1 : vêtue par le ciel' (2011) - 46 pages en couleur directe (ce qui nous vaut de bien belles aquarelles) ==> couverture avec l'héroïne assise; + 16 pages de croquis et d'aquarelles en N&B et en couleur et un dos toilé pour l'édition spéciale ==> couverture avec l'héroïne debout
Priti est une Jaïn (une très ancienne religion qui compte quelques 12mio de fidèles de par le monde, essentiellement en Inde, et qui prône une vision, une connaissance et une conduite justes) qui a appris à peindre des enluminures (dessins ou peintures destinés à illustrer des textes manuscrits) dans une école financée par l'empire moghol (fondé au début du XIV° siècle en Inde par des musulmans turco-mongols persanisés). Son travail ayant été remarqué par le grand eunuque de la Reine, Priti est ‘invitée' à rejoindre le harem de l'Empereur au fort d'Agra, siège de la cour, afin d'y réaliser un muraqqa' (un livre composé de miniatures) sur la vie des femmes au gynécée, ce labyrinthe de sensualité qui est autant un lieu de complots, voire de crimes que de séduction…
Ana Mirallès se plaît apparemment en Inde puisqu'aussi bien le troisième cycle de ‘
Djinn' que cette nouvelle série voient leur action s'y dérouler, même si c'est à des époques très différentes. Nostalgique peut-être de l'ambiance des harems dans laquelle elle a baignée pour les quatre premiers volets de ‘
Djinn – le premier cycle', elle nous replonge, en prenant son temps (c'était peut-être son but premier), au coeur même de l'un de ces zenanas de légende qui regroupaient des centaines de femmes de tous âges, classes, races et religions, et dont les concubines les plus appréciées disposaient carrément de leur propre palais avec domestiques à l'intérieur de l'enceinte du harem, qui était une véritable petite ville à l'intérieur de la grande. Moins érotique et sans personnages aussi marquants que ‘
Djinn' (pour le moment), mais magnifiquement peint, ‘Muraqqa'' ravira les esthètes !