Terre des Hommes est un essai autobiographique dans lequel
Saint-Exupéry aborde ses valeurs humanistes, à travers une série d'histoires de ses voyages, lorsqu'il était aviateur pour l'Aéropostale. Dans divers chapitres, avec une forme sobrement poétique, il relate d'abord les exploits des pionniers de l'aviation comme ceux de Mermoz ou Guillaumet, prêts à mettre en péril leur vie contre des conditions météorologiques dangereuses, pour ouvrir la voie à des nouvelles routes aériennes. L'écrivain en profite pour méditer sur le progrès technologique, dont celui de l'avion, qu'il voit comme un outil pour servir les hommes et non comme une fin en soi. Pour lui, l'Homme est trop obnubilé par un progrès excessif et à tendance à oublier son essence. Aussi, qu'importe le perfectionnement de la machine, l'homme est en conflit permanent avec les éléments fondamentaux, rappelant les diverses réflexions sur le rapport animiste entre le pilote et la planète, car vu du ciel, on retrouve une nature primitive et originelle, tout comme les Hommes que l'on voit différemment.
Plus le fil du livre se suit dans une capsule sensorielle où les réflexions se mêlent avec une mosaïque émotionnelle, plus la notion d'espace-temps devient floue, car l'écriture nous absorbe dans une douceur philosophique et méditative qui ne prend plus en compte les notions de lieux et de temps. C'est le cas lorsque l'auteur, en Argentine, se voit accueillir dans une maison de fermier et voit la vie simple, digne et douce que la famille mène. Un havre de paix qui se transforme toujours en désert, et ce motif du désert est central dans le livre comme le démontre toute la survie de
Saint-Exupery dans un désert après un accident. Gagné par la faim, la soif et le désespoir, il comprend ce qu'est la solitude, ne plus croire en rien, être au bord de la mort et du néant intérieur. Sauvé par un Bédouin, l'auteur consacre aussi ses interrogations sur le mode de vie des peuples autochtones, sur leur notion de liberté, de religion et leur sens de la vie.
Au fond, l'écrivain se demande ce qu'est un homme et quelle est sa vérité. C'est à travers cette philosophie et cette fable de la terre qu'il déroule ses notions de camaraderie et d'amitié, d'héroïsme et de responsabilité, mais surtout de l'inflexibilité exigeante des relations qu'il faut garder pour survivre et qu'il n'y est pas de Mozart assassiné, c'est-à-dire d'enfant vivant dans la misère sociale et n'ayant pas la chance de devenir un grand Homme.