Merci aux Éditions du Seuil et à Babelio pour la découverte de ce livre.
Pour un sujet aussi important que celui-ci, ce livre permet d'appréhender toute la difficulté à cerner la part des faits relevant de la criminalité, de celle de l'illégalité voire de la légalité.
Les frontières sont poreuses et une ouverture objective du sujet tend à nécessairement pointer une remise en cause des modèles de consommation de masse.
Bien que les crimes environnementaux soient très bien identifiés, l'extraction minière illégale, la déforestation sauvage et le trafic de bois, le trafic d'espèces sauvages, le trafic de déchets et la pêche illégale, la réalité des investigations montre clairement que les impacts ne relèvent pas uniquement de trafiquants mais aussi d'entreprises et de gouvernements parfois en toute légalité apparente.
La question posée est donc clairement de définir la notion de criminalité environnementale. Parle-t-on de légalité, de gravité, d'excès, tous les travaux de recherche interrogent cette notion et tentent de cerner le périmètre des pratiques à encadrer.
En revanche, l'ouvrage est une analyse juridique assez poussée et difficile à suivre.
La première partie m'a presque découragée car portant sur une analyse critique de rapports officiels sur le sujet, sans maîtriser la question. le postulat du livre est que le lecteur connaisse le sujet. Cela deconcerte un peu car on tend à chercher le cadre et un résumé de la situation pour rentrer dans le sujet du livre.
Quoiqu'il en soit on en ressort avec le sentiment que le sujet est bien plus large et grave que l'idée intuitive que l'on s'en faisait. Il est même dans notre vie de tous les jours par nos actes de consommation quotidiens qui créeent un marché de masse et attirent les pratiques deviantes voire les mafias.
On comprend enfin surtout que les dispositions et outils juridiques en place sont insuffisants, inadaptés et manquent de moyens malgré quelques affaires ayant défrayé la chronique.
Même Interpol ne dispose que d'une seule modeste équipe pour traiter l'ensemble des affaires dont ils sont saisis de par le monde.
On ressort de cette lecture largement sensibilisé, mais aussi quelque peu épuisé d'une lecture complexe et laborieuse pour suivre les différentes analyses de l'auteur.
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Ce petit livre, comme son titre l'indique, pose la question du crime environnemental.
Une chose à noter avant tout est que ce livre prend parti, c'est clairement exprimé dès le début mais il faut savoir qu'une opinion politique est établie dans ce livre, il n'est pas neutre. Personnellement, je suis tout à fait en accord avec les idées défendues par l'auteur et ses explications tiennent tout à fait la route ! Je n'ai donc aucun problème avec ça. Tout est très bien documenté, chiffré, expliqué. C'est un livre qui m'a appris énormément de choses. J'ai trouvé les différents chapitres très bien renseignés, très clairs et plein d'informations très intéressantes. J'ai appris beaucoup sur le sujet. Travaillant actuellement sur l'écologie, cela m'a également apporté des informations pour mes rédactions ce qui n'est pas négligeable... le découpage du livre est également bien fait les chapitres sont suffisamment courts pour qu'on puisse apprécier les informations fournies à leurs justes valeurs. Ce livre remet les choses à leur place et n'hésite pas à prendre parti contre certaines actions. Ce n'est pas juste de l'information sans conviction, c'est plus que ça et ça fait du bien...
C'est donc un livre que j'ai lu avec énormément d'attention et qui m'a beaucoup appris sur le crime environnemental au niveau de ses formes comme de son traitement par les médias. Si le sujet vous intéresse, n'hésitez pas, foncez lire ce livre !
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Même les inégalités, qui pourraient être invoquées comme l'une des causes profondes du développement d'activités illégales aux dépens de l'environnement, sont en tant que telles quasiment absentes des rapports. Tout juste y est-il question de «pauvreté" ,ce qui est très différent: on y perd le caractère relationnel de la notion d'inégalité, a fortiori toute inscription dans les rapports sociaux façonnés par le développement capitaliste. Du reste, c'est le capitalisme lui-même qui, dans ces rapports, est à la fois absent et omniprésent. Absent au sens où le mot n’apparaît pas, mais omniprésent parce qu'il constitue implicitement indépassable cadre général.
Au moment de résumer les causes du désastre écologique, Edwin Zaccaï ne désigne rien d'autre que le business as usual : "énergie bon marché, recherche d'augmentation de bénéfices économiques en négligeant les externalités (impacts dont le marché ne tient pas compte), culture d'une consommation excessive, le tout dans un contexte de profonde inégalité entre les nantis et les populations plus démunies de la planète". p233
Les estimations chiffrées incitent à penser que l'empreinte carbone issue de l'utilisation de biens dispendieux [marchandises de luxe, bolides, jets ou yachts] dans le seul périmètre états-unien est supérieure à celle de certains pays, alors même que l'empreinte carbone n'est qu'un critère partiel, induisant une sous-estimation de la pollution engendrée. p120
J'achète un téléphone portable en France, et ce faisant j'ai exploité des mineurs au congo, détruit des forêts primaires de Papouasie, enrichi des oligarques russes, pollué des nappes phréatiques chinoises, puis, douze à dix-huit mois plus tard, j'irai déverser mes déchets électroniques au Ghana ou ailleurs, resume Philippe Bihouix. p19
Chaque jour 90 millions d'américains sont exposés à une atmosphère dont la qualité viole les normes légales. Il y a ainsi 3,6 fois plus de chances d'être victime d'un crime environnemental en une journée, et pour une seule infraction, que de l'être par la délinquance de rue en général. p112