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sur 1085 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un soir, en rentrant de sa librairie, Kaspar retrouve sa femme noyée dans la salle de bains. Dans les papiers abandonnés par son épouse, Kaspar découvre qu'avant de fuir la RDA pour le rejoindre illégalement à l'Ouest en 1965, Birgit avait eu une fille, abandonnée de l'autre côté du Mur. Un secret bien gardé, qu'il décide d'aller démêler…

Derrière cette intrigue familiale qui tisse des liens particulièrement émouvants entre un grand-père et sa petite-fille par alliance, Bernhard Schlink réveille les vieux fantômes de l'Allemagne : celui de la RDA et de la réunification, mais également celui du régime nazi. Des blessures pas encore totalement refermées, comme en témoigne cette enquête mêlant brillamment un passé qui continue de diviser et un présent où l'idéologie nazie semble encore bien vivante…

Si beaucoup retiendront cette belle leçon d'histoire, je retiendrai surtout la relation émouvante entre un grand-père endeuillé et cette petite-fille endoctrinée par le milieu extrémiste dans lequel elle grandit. Un choc plein de tendresse entre deux générations qui vont tenter de se réparer au fil des pages. Lui, offrant sa sagesse, sa culture, son amour des livres, de la musique et de l'art à une adolescente élevée dans un environnement d'extrême droite très cloisonné. Elle, offrant un amour familial auquel il ne pensait plus avoir droit, ainsi qu'une jeunesse qui nous invite à revisiter les traumatismes de cette Allemagne sous un regard différent…
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L'enfant perdu de la RDA.
Bernard Schlink donne vie ici à un héros bien touchant et inoubliable! Kaspar, un libraire berlinois d'âge mûr, vous accapare d'emblée et vous entraîne entre mélancolie lancinante et effroi vers une Allemagne au double visage pour y exhumer fantômes politiques et familiaux.

Entre passé et présent, on navigue d'Est en Ouest par-delà les vestiges du mur de Berlin et la cicatrice indélébile qu'il a laissée. Et l'on découvre à quel point ce mur de la honte en scindant le pays a scindé des vies.

Un soir en rentrant de sa librairie Kaspar retrouve dans son appartement le corps sans vie de sa femme Birgit alcoolique et dépressive. Quelques jours plus tard il tombe sur un manuscrit caché et apprend qu'elle a abandonné une fille à la naissance alors qu'elle fuyait la RDA en 1965 pour le retrouver. Hanté par cette histoire il décide de poursuivre les recherches débutées dans le secret par sa femme.
En même temps qu'il découvre un pan inconnu de la vie de Birgit il dévoile un autre visage de l'Allemagne réunifiée dont le spectre du nazisme porte les traits. Il retrouvera la fille de sa femme qui hélas a pris un mauvais chemin. Avec son mari et sa fille de 14 ans, Sigrun, ils appartiennent à la communauté « Völkisch » et militent activement pour ce mouvement nationaliste dans leur village de l'Est où subsiste une idéologie nazie et une nostalgie du III ème Reich.
C'est surtout à Sigrun sa « petite-fille » de coeur que Kaspar va s'intéresser. Les deux générations ne se comprennent pas pourtant Kaspar et la jeune fille vont se rapprocher. La vision radicale de Sigrun l'effraie et il essaiera de lui ouvrir l'esprit sans jugement, utilisant la culture surtout la musique classique et la littérature, ainsi que le dialogue comme vecteurs d'émancipation et moyens d'élargir son horizon intellectuel.
Grand livre sur la transmission et la tolérance, j'ai été touchée par ce vieil homme pacifiste, empli de pudeur, de bonté et de compassion, touchée aussi par ce lien puissant unissant Sigrun à son « grand père » qui avancent main dans la main vers une difficile reconstruction faisant écho à la difficile réunification du pays.
Émouvant et instructif.
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Kaspar, soixante-et-onze ans, est libraire à Berlin. Lorsqu'elle décède de trop d'alcool et de somnifères, il découvre dans les papiers laissés par sa femme Birgit qu'elle avait une fille et qu'elle se s'était jamais pardonné de l'avoir abandonnée à la naissance, juste avant de fuir la RDA en 1965, où le couple venait de se rencontrer. Décidant d'accomplir pour elle ce qu'elle n'avait jamais osé tenter, il entame des recherches à partir des quelques indices à sa disposition et finit par retrouver cette fille dans un village de l'ancienne Allemagne de l'Est. Elle y vit avec un fermier d'extrême-droite et leur fille de quatorze ans, Sigrun.


La famille fait partie d'une communauté völkisch, à l'idéologie paganiste, anti-moderniste et raciste – en partie reprise par le nazisme –, qui rêve depuis la fin du XIXe siècle de restaurer la grandeur du peuple élu germanique. Sigrun a dans sa chambre des posters de Rudolf Hess et d'Irma Grese – dite « la hyène d'Auschwitz » –, nie la Shoah et croit dur comme fer à la volonté de conquête de l'Allemagne par les musulmans. Sa seule opposition à ses parents a trait à son amitié pour une fille d'un autre groupuscule, les Nationalistes Autonomes, d'extrême-gauche ceux-là, mais tout aussi racistes, antisémites et complotistes dans leur revendication d'une nation débarrassée des influences étrangères.


Rusant avec l'avidité des parents et les conditions de leur héritage dans la succession de Birgit, Kaspar obtient d'emmener Sigrun chez lui à chaque période de vacances scolaires. Débute pour lui le délicat apprivoisement de sa petite-fille. Comment déconstruire ses convictions radicales, sans la faire fuir ni pousser ses parents à la rupture ? L'adolescente s'avérant sensible à la musique et douée pour le piano, c'est par ce biais que, tout en douceur et en intelligence, son grand-père s'efforce de tisser peu à peu avec elle une relation d'affection et de respect mutuel. de concerts en musées, d'explorations littéraires à la librairie en conversations subtilement dirigées, le vieil homme s'emploie, par petits coups de culture, à semer le doute dans cette jeune intelligence.


Du désarroi identitaire des Allemands de l'ex-RDA – joyeusement accueillis lors de la réunification comme « qui rentre de voyage » et n'a aucune raison de se montrer durablement différent, ces gens issus d'un pays qui n'existe plus se retrouvent en sévère perte de repères, en particulier la génération perdue des jeunes alors âgés de vingt-cinq ans, à peine formés, déjà inadaptés – aux dérives en tout genre, alcoolisées ou extrémistes, qu'il favorise, l'amour et l'intelligence de ce grand-père, usant de l'art et de la culture pour sauver sa petite-fille de son terrifiant embrigadement, séduisent tellement, qu'à défaut de croire totalement à cette résilience peut-être un peu trop belle, l'on ne demande qu'à se laisser convaincre par ses jolis symboles.


« Il n'y a qu'une vérité. Elle n'appartient ni à moi ni à toi. Elle est simplement là. Comme le soleil et la lune. Et comme la lune elle n'est parfois visible qu'à moitié et elle est pourtant ronde et belle. »
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J'avais envie de lire depuis un moment « La petite-fille » de Bernhard Schlink, pour découvrir la plume de cet auteur mais, avant tout, pour son contenu historique. En effet, je voulais voyager dans l'histoire allemande, être transportée des décennies en arrière, au temps de la guerre froide et de la division de l'Allemagne, puis de la chute du mur et de sa réunification.

*
Le narrateur de ce récit est Kaspar, un septuagénaire berlinois cultivé et sensible, qui tient une petite librairie. Après le décès tragique de sa femme Birgit, l'homme fait du tri dans ses affaires personnelles et ses cahiers remplis de poèmes. Il trouve aussi une ébauche de récit autobiographique commencé plusieurs années auparavant. Sa lecture est un choc car en entrant dans l'intimité de sa femme, il apprend qu'en fuyant la RDA en 1964 pour le rejoindre en Allemagne de l'Ouest, Birgit lui a caché l'existence de sa fille, abandonnée quelques semaines avant leur rencontre.

Ce secret bien caché lui révèle une facette de la personnalité de Birgit. Sous ses airs rêveurs et peu loquaces, sous son attitude distante et son besoin de liberté, se dissimulait une femme meurtrie qui souhaitait au fond de son coeur retrouver son enfant, mais qui avait aussi affreusement peur d'être rejetée.

Sa femme rêvant de renouer avec sa fille sans jamais oser franchir le pas, il décide de répondre à son souhait et de partir à sa recherche. Dans cette quête, il finit par retrouver à la fois Svenja, désormais adulte, mais aussi sa petite-fille, Sigrun.
Il s'attache très vite à cette enfant de 14 ans élevée dans les idéaux völkisch.

*
Dans la première partie du livre, nous lisons avec Kaspar le manuscrit de Birgit : nous apprenons qui était réellement cette femme discrète, partagée entre son envie de vivre libre, sa douleur d'avoir abandonné son enfant et la nostalgie de son pays. Cette lecture est difficile pour le vieil homme qui était heureux auprès de Birgit et qui se rend compte que ce bonheur n'était peut-être pas réciproque.
Sa vie avec Birgit avait-elle été réelle ou un mensonge ?

La seconde partie est très différente : se dessine une nouvelle partition du temps, où les visites de Birgit chez le vieil homme brisent sa solitude et mettent à distance son chagrin.
C'est la rencontre entre un grand-père et sa petite-fille, mais également la rencontre entre deux univers contraires. Avec sagesse et patience, tact et tolérance, Kaspar essaie de nouer une relation étroite avec Sigrun, de la faire entrer dans son monde, de lui ouvrir l'esprit, de développer son esprit critique sans jamais lui imposer sa façon de penser.

*
L'écriture de Bernhard Schlink est à la fois tendre et profonde, prenante et délicate, sobre et lyrique. L'auteur a su développer des portraits authentiques et réalistes tout en les replaçant dans leur époque. Il a fait de Kaspar un personnage sympathique, attachant et généreux, réfléchi et sensible ; et de Sigrun, une jeune adolescente intelligente et réfléchie, mais pétrie de préjugés, de clichés et de méfiance.

En entremêlant étroitement destins individuels et histoire allemande, Bernhard Schlink a bien retranscris les liens précieux et fragiles entre les grands-parents et les petits-enfants.
Mais de manière plus pénétrante et subtile, il a également mis l'accent sur deux visions du monde en opposition : entre Kaspar et la famille de Sigrun se dessine une Allemagne fracturée dans laquelle les relations sociales et les modes de vie sont si différents qu'ils laissent la place à l'amertume, au ressentiment.
On sent alors combien les différences et les blessures sont profondément ancrées, le temps sera nécessaire pour construire une identité historique, culturelle, sociale et nationale communes.

« Qu'est-ce que je ferais si du jour au lendemain je devais renoncer à ma vie passée et en commencer une nouvelle ? »

*
Vous avez bien compris que cette rencontre est aussi un voyage dans le passé. Il est question de politique, d'idéologie nationaliste et de la perception des étrangers ; de passé nazi, de mémoire historique, de responsabilité morale et de négationnisme ; d'empreintes laissées par la RDA et de nostalgie d'une époque révolue, de besoin de reconnaissance et de résilience.

« Quand j'écoute Bach, j'ai le sentiment que la musique contient tout, le léger et le lourd, le beau et le triste, et qu'il les réconcilie. »

En initiant sa petite-fille à l'art, en lui ouvrant le monde des livres et de la musique, en l'accompagnant dans sa visite du camp de Ravensbrück, Kaspar lui ouvre les yeux face à la réalité des camps de concentration, la responsabilité des allemands face à l'Holocauste ou encore la diabolisation et la haine des étrangers et en particulier des juifs.

« Il n'y a qu'une vérité. Elle n'appartient ni à moi ni à toi. Elle est simplement là. Comme le soleil et la lune. Et comme la lune elle n'est parfois visible qu'à moitié et elle est pourtant ronde et belle. »

Si j'ai trouvé parfois une simplification un peu trop manichéiste des personnages, petit bémol qui n'engage que moi, l'arrière-plan politique et historique est particulièrement marquant, tout en retenue et en sobriété. Et les dernières lignes sont magnifiques de pudeur.
Un beau roman de transmission baigné de musique et de littérature, doux et respectueux, émouvant et très bien écrit.
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La petite- fille, c'est celle que Kaspar, libraire berlinois, va retrouver alors que c'est déjà une adolescente. Et ce n'est même pas la sienne, mais celle de sa femme, récemment décédée.

Présentée comme cela, cette histoire peut paraitre nébuleuse. Elle est pourtant très subtilement et clairement racontée par cet auteur que j'avais découvert avec Olga, et dont j'ai retrouvé avec plaisir les qualités d'écriture, le don pour raconter des histoire, créer des personnages que l'on retient. J'ai également retrouvé ce que j'avais moins aimé , une certaine austérité, mise à distance qui personnellement me rend l'empathie envers les personnages plus difficile.

Mais revenons à l'histoire qui se déroule en deux parties. Kaspar retrouve un soir en rentrant du travail sa femme morte, noyée. Anéanti par cette disparition, après quelques hésitations tant il a peur de violer l'intimité de sa femme, Kaspar va se plonger dans un manuscrit qu'elle avait commencé. Et c'est là qu'il va découvrir que Birgit, dont il était tombé amoureux, qu'il avait fait sortir de RDA pour pouvoir vivre avec elle, Birgit y avait eu un enfant qu'elle a abandonné. Ce manuscrit de Birgit, est la partie du livre qui m'a le plus touchée.On y voit toute la difficulté de cette femme originaire de RDA à s'adapter à la vie en RFA. Et cette opposition entre les deux Allemagnes est renforcée par les deux visions de la vie du couple, celle de Kaspar que lui nous avait livrée auparavant et celle de Birgit, et l'abime qui existe entre elles, écho de l'abime entre les deux Allemagnes.

Bouleversé par cette lecture, Kaspar va se lancer à la recherche de cet enfant et retrouver cette femme et sa famille. Et là encore, l'auteur va opposer deux mondes : Celui de Kaspar, épris de liberté, épris de justice, épris de culture et celui de la fille et la petite fille de Birgit. C'est une famille de Néo-nazis, dans laquelle l'holocauste est dénié, pour laquelle les musulmans vont envahir l'Allemagne, pour laquelle les Allemands sont au-dessus de tous. Kaspar pour pouvoir passer du temps avec sa petite-fille va devoir promettre de ne pas changer sa vision du monde. Il va cependant essayer de l'amener à réfléchir, à lui faire découvrir la musique, l'opéra, les livres. Cette partie toute en nuances m'a cependant moins séduite. Il m'aurait fallu pouvoir m'attacher plus aux personnages. Ilss sont restés trop enfermés dans leur rôle, trop dans la retenue. j'aurais aimé que Kaspar soit plus percutant, même si je comprenais la réserve qui lui était imposée.Et la petite- fille m'a semblé bien égoïste.

Cela reste cependant un livre passionnant sur ce qu'il décrit de l'Allemagne, celle divisée d'hier, et celle d'aujourd'hui ou les séquelles de la réunification n'ont pas encore disparu.
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Déchirements allemands

Le Liseur est un des livres qui m'ont le plus marquée. Quand j'ai vu que son auteur publiait un nouveau roman ancré dans l'histoire de l'Allemagne, je n'ai fait ni une ni deux.

J'ai été très vite embarquée par ce texte-gigogne qui entremêle en réalité plusieurs romans. Il y a d'abord une histoire d'amour : Birgit étudie à Berlin Est, Kaspar à Berlin Ouest, ils tombent amoureux lors d'une improbable rencontre de jeunes organisée à Berlin en 1964, il l'aide à fuir la RDA dans des circonstances rocambolesques, ils restent ensemble mais les choses sont compliquées. Pourquoi ? Une partie de l'énigme se dissipe avec le deuxième roman, autobiographique : celui qu'écrivait Birgit avant de mourir dans des circonstances troubles et dont la lecture révèle à Kaspar qu'il ignorait des pans entiers de l'existence de sa femme. Cette découverte noue un nouveau fil d'intrigue, celui de l'enquête désespérée qui s'ensuit et qui va entraîner Kaspar au coeur de communautés d'extrême-droite implantées dans l'Est de l'Allemagne. Puis il y a les répercussions de l'enquête qui nous entraînent encore sur un tout autre terrain, à la fois plus politique et plus intime…

Et que vient faire cette petite fille dans cette histoire, demanderont ceux qui suivent ? Et bien, je vous laisserai lire le roman par vous-mêmes pour ne pas vous gâcher le plaisir de la découverte !

Tout cela est très bien imbriqué et donc très prenant. Les perspectives des différents personnages soulignent les déchirements individuels et l'incompréhension générés jusqu'à aujourd'hui par la division de l'Allemagne. Elles disent les blessures des Allemands de l'Est qui, sans être nostalgiques du régime, trouvent difficilement leur place et ne se sentent plus chez eux nulle part. Les frustrations de ceux qui se sentent trahis par les promesses de la réunification qui n'a jamais complètement abouti. le poids des mensonges et des secrets. L'imperméabilité des mentalités de part et d'autre, les difficultés de communication.

J'ai aimé les nuances avec lesquelles le roman évoque l'histoire allemande. Chez Schlink, le ton est toujours légèrement didactique. J'ai été particulièrement intéressée par les descriptions de scènes néonazies qui restent relativement méconnues.

Mais j'ai surtout été touchée par la tendre maladresse du personnage de Kaspar qui s'empare avec une telle humilité de la quête que sa femme n'a pas eu la force de mener. Son cheminement parle du deuil, de la nostalgie d'une famille qu'on n'a jamais eue, de la difficulté de s'extraire des schémas de pensée dans lesquels on a été endoctriné.

On pourra critiquer la tolérance de Kaspar, sa crainte que les portes se ferment qui l'incite à comprendre, son espoir naïf de voir les gens devenir meilleurs par la musique et la littérature. Mais il n'y a pas de solution simpliste aux conflits qui traversent ce roman. J'ai été émue de lire dans la presse qu'il était d'inspiration autobiographique – parfois, la réalité dépasse la fiction.
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Voici un petit bijou, une pépite délicatement ciselée::

Comment qualifier ce roman d'une beauté sourde, sorte d'épopée exaltante:

AMOUR, deuil, politique, déchirements, empêchements nichés dans les recoins les plus intimes des êtres et des familles —— fascinant drame relationnel ——-jusqu'à l'exploration minutieuse de l'Histoire de l'Allemagne ——-, surtout celle de l'après deuxième guerre mondiale ——- à travers d'hallucinants personnages féminins, et rigueur, esprit de justice, bienveillance et culture, pudeur et mélancolie de Kaspar, ———un auto- portrait déguisé ——-de Bernard S.? .

Les dates correspondraient? ….. Peu importe….

Un veuf, Kaspar, en rentrant de sa librairie , découvre dans la baignoire le cadavre de sa femme Birgit, tant aimée.

S'est - elle donnée la mort? .

Elle était devenue alcoolique depuis longtemps, murée dans le silence, et de solitaires et dérisoires désirs d'écriture, déchirée , empêchée …..

Lui, toujours à l'écoute, bienveillant, l'écoutait, la regardait , l'apaisait , l'aimait tant sans s'avouer qu'il ne la comprenait plus.

Birgit venait de RDA, à l'été 1964, lors d'échanges entre étudiants de l'Est et de L'Ouest, Kaspar en était tombé immédiatement amoureux .

Ils avaient décidé ensemble qu'elle fuirait avec lui de l'autre côté du mur…
Elle ne lui a jamais avoué qu'elle avait une fille, abandonnée , à la naissance, dont elle venait d'accoucher.

Il le découvre à travers une ébauche de roman où Birgit conte, à la première personne, combien elle désirait retrouver sa fille .

Intrigué, Kaspar part à sa place la chercher.

À l'Est de l'Allemagne il découvre des communautés nostalgiques des nazis , désirant restaurer la grandeur du Reich.

Sigrun, sa petite fille , âgée de 14 ans, Svenja, sa belle - fille, mariée à un neo- nazi , appartiennent à ce mouvement haineux «  Völkisch » .

Kaspar rêve d'en sortir sa petite fille d'adoption, Sigrun , mais les portraits de Rudolf Hess et de la gardienne de camp Irma Grese surnommée «  La Hyène d'Auschwitz » ornent glorieusement sa chambre .. ….

Ce livre suscite, au fil des pages, une intense émotion pétrie d'étonnement et de compassion, de tolérance et de générosité.

L'auteur raconte , alerte, sans jamais juger, caricaturer, sans pathos , ni mièvrerie, juste avec une intense humanité dans un monde, qui , lui, en est dénué …

Dans ce climat de haine et de méfiance, au coeur des théories complotistes et racistes.

Au sein de ce voyage au coeur de l'Allemagne où règnent encore de bien sinistres fantômes , pour Kaspar, le libraire , à l'image de l'auteur, la musique, les mots, la poésie , la littérature, peuvent ouvrir en grand l'esprit et l'âme, libérer.

Peut - être sauver ?

L'affection qu'il porte à Sigrun l'engage dans un chemin de renoncements, de lumière , une véritable incitation personnelle pour l'amour de Birgit, elle, qui l'a pourtant , hélas , toujours tenu à l'extérieur d'elle même …

Par delà le destin de l'Allemagne ce roman est une éblouissante histoire d'amour——-, le véritable amour——-de deuil douloureux impossible puis accompli , une compréhension contrariée, intelligente, entre un grand - Père et sa petite fille., une réparation …..
Il n'y est , en fait , outre ce fascinant drame relationnel , que question «  d'Aimer » aimer l'autre jusqu'au bout, de son indéchiffrable, désespérante voire insupportable différence.

L'auteur s'exprime avec une infinie délicatesse, tristesse lancinante, secrets et silences….
Que de belles pages !

Une inépuisable source de réflexion pour le lecteur, voire méditation. ….
L'auteur ausculte la place du passé dans le présent, nous interroge puissamment sur ce qui peut unir ou séparer les êtres .
Un expert des relations Est - Ouest .

Passionnante et dérangeante odyssée politique !

Je n'oublie pas «  -Le-Liseur » et «  Olga, lu , lui, il y a peu de temps .

Un superbe ouvrage que je ne regrette pas d'avoir acheté !
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La Petite-Fille de Bernhard Schlink connaît dans nos pays francophones un succès qui me surprend un peu, mais il faut reconnaître que ce roman brosse un portrait assez complet et plutôt juste de l'histoire récente de l'Allemagne depuis les années 1960 jusqu'à cette date. Il revient sur les conséquences sociétales massives suite à la séparation de l'Allemagne en deux, deux Allemagne avec des systèmes politiques radicalement différents, et ce pendant 40 ans, jusqu'à la chute du mur de Berlin. Dans la seconde partie du roman, Schlink nous montre l'Allemagne réunifiée d'aujourd'hui et la recrudescence de divers mouvements d'extrême-droite, en particulier dans ce qui avait été l'ancienne Allemagne de l'Est communiste.
Si l'évolution historique et politique du pays sont bien dépeints, les personnages imaginés par l'auteur pour illustrer ses propos m'ont moins convaincus, car trop caricaturaux. La trame est trop construite et si Kaspar m'a fait de la peine, en particulier dans ses efforts à l'encontre de sa petite-fille, sa femme Birgit m'a plutôt agacé. Mais cette impression n'engage que moi et je laisse aux lectrices et lecteurs le soin de se faire leur propre opinion sur les personnages de ce roman et leur histoire propre.

En revanche, j'ai trouvé le style de Schlink très bon (j'ai lu ce livre dans sa langue originale), assez poétique, quoique parfois un peu désuet pour une oeuvre contemporaine.

Par conséquent, mon avis sur cette oeuvre est mitigé, mais globalement cela reste une lecture satisfaisante et je conseille ce livre à celles et ceux qui souhaitent en apprendre davantage sur l'histoire de l'Allemagne post IIIe Reich.
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L'Allemagne post-2nde guerre mondiale s'est voulue irréprochable. Finies les bottes qui claquent, place aux chaussettes de tennis dans les Birkenstocks. Et ça a pas mal marché pendant plus d'un demi-siècle. Mais l'extrême-droite est à nouveau à la mode, et pas seulement en Allemagne, comme tout le monde peut s'en rendre compte. Mais plus encore qu'ailleurs, sa résurgence de l'autre côté du Rhin semble être le signal de la catastrophe à venir.
Bernhard Schlink ausculte donc cette montée de l'extrême-droite dans son pays et c'est assez souvent passionnant.
Il évoque bien entendu le thème de la réunification et le mépris des Wessis envers les Ossis. La piste est exploitée sans être approfondie, sans doute parce qu'elle n'est pas nouvelle. Plus intéressant, surtout pour nous qui en ignorons à peu près tout, est le phénomène völkisch, cette conception mystique du peuple allemand couplée à un refus de la modernité qui se trouve redynamisée par l'inquiétude écologique.
Mais l'explication la plus convaincante est sans doute le portrait de la génération des boomers qui, à force de tout intellectualiser, ne parviennent plus à passer à l'action : l'une voudrait bien rechercher sa fille mais préfère l'écrire que de le faire et ne se tue que par inadvertance ; l'autre veut s'occuper de sa petite-fille mais abandonne l'affaire à la première difficulté et confond la tolérance avec la compromission (Genre : « Ah, il est sympa votre piercing en forme de croix gammée ! »). Mais surtout les grands-parents vivent dans un entre-soi qui les coupe de ceux pour qui la vie est un combat quotidien : d'un claquement de doigt, ils trouvent le meilleur prof de musique ou le meilleur avocat, qui sont bien entendu des amis et cette connivence est encore plus choquante que l'argent qui n'est jamais un problème.
Mais aux explications sociologiques se superposent les développements individuels et ils me convainquent nettement moins. Schlink reprend avec beaucoup moins de talent les thèses d'Alice Miller sur la maltraitance exercée par les parents qui condamne les enfants à glorifier la violence. Et surtout, la petite-fille qui donne son titre au roman est un personnage improbable qui après avoir vécu 15 ans dans un environnement sectaire saute de joie à l'idée de devenir une étudiante Erasmus et qui, après avoir découvert Chopin et Satie, est prête à admettre que la Shoah a vraiment existé.
Bref, si chacun adopte un jeune facho, après deux expos, trois concerts et quelques livres bien choisis, il s'abonnera à Télérama et deviendra très fréquentable. Quelque chose me dit pourtant que si la nazification des esprits devait marquer le pas, ce n'est certes pas à Schlinck qu'on le devrait.
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C'est quelque chose d'assez rare qui peut se produire à la fin de la lecture de la petite-fille de Bernard Schlink : revenir quelques pages en arrière, en se demandant si le roman était écrit à la première ou bien à la troisième personne (c'est bien la deuxième option et pourtant cela ressemble davantage à la première). le récit commence par la mort de l'épouse de Kaspar (celui qui est presque le narrateur), un libraire berlinois de 70 ans. Cette femme, issue de RDA, il lui a fait franchir la frontière entre les deux Allemagne, dans les années 60. Celle qui s'était peu à peu éloignée de lui, à la fin de sa vie, portait un lourd secret : une fille, abandonnée bébé, et qu'elle n'a jamais eu le courage de rechercher et d'aller voir. Commence alors l'enquête de Kaspar et sa rencontre avec la susdite, désormais mariée et mère d'une fille de 14 ans, élevée dans un environnement d'extrême-droite, dans le culte du 3ème Reich et dans la volonté de rendre à l'Allemagne sa "grandeur." C'est ce dialogue a priori impossible entre un grand-père de l'Ouest et sa "petite-fille" de l'Est qui nourrit la majeure partie du livre, par petites touches et sans esprit moralisateur. L'Allemagne, après la réunification, reste un pays toujours divisé, économiquement, socialement et idéologiquement et c'est par le biais de ce duo improbable que Schlink réussit, de manière très romanesque, parfois presque candide, à nous le montrer avec acuité. C'est l'oeuvre d'un écrivain que les années ont rendu sage et avisé, aux convictions certes bien arrimées, mais qui croit l'échange possible, y compris avec des opinions opposées, avec foi dans la transmission et surtout par l'entremise de la culture. C'est cela que raconte Bernhard Schlink dans ce roman d'hier, d'aujourd'hui et demain. Une leçon d'Allemand, administrée avec nuances et empathie qui veut fait confiance à l'humanité et à l'intelligence des nouvelles générations.
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