Je me sens, je nous sens, donc je me sens déjà mieux !
Les dictionnaires n'expliquent bien que les mots qu'on connaît déjà.
Sourire, c'est un truc de gens riches, monsieur Ibrahim. J'ai pas les moyens.
Grâce à l'intervention de monsieur Ibrahim, le monde des adultes s'était fissuré, il n'offrait pas le même mur uniforme contre lequel je me cognais, une main se tendait à travers une fente.
Nous avions le temps. Lui, parce qu'il était vieux, moi parce que j'étais jeune.
J'avais la haine qui se vidangeait.
C'était incroyable de découvrir comme l'univers devenait intéressant sitôt qu'on voyageait avec monsieur Ibrahim. Comme j'étais crispé sur mon volant et que je me concentrais sur la route, il me décrivait les paysages, le ciel, les nuages, les villages, les habitants. Le babil de monsieur Ibrahim, cette voix fragile comme du papier à cigarettes, ce piment d'accent, ces images, ces exclamations, ces étonnements auxquels succédaient les plus diaboliques roublardises, c'est cela, pour moi, le chemin qui mène de Paris à Istanbul. L'Europe, je ne l'ai pas vue, je l'ai entendue.
- Et être juif, ça n'a aucun rapport avec Dieu?
- Pour moi ça n'en a plus. Etre juif, c'est simplement avoir de la mémoire. Une mauvaise mémoire.
- Je ne savais pas que l'eau était si rare, ici.
- Ce n'est pas l'eau qui est rare, mademoiselle, ce sont les vraies stars.
Pour un homme normal, je veux dire un homme comme toi et moi ( pas Alain Delon ou Marlon Brando) , ta beauté, c'est celle que tu trouves à la femme.