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EAN : 9782021155099
360 pages
Seuil (28/08/2014)
4.5/5   2 notes
Résumé :
Jaurès n’est pas aujourd’hui honoré comme l’authentique socialiste anticapitaliste et révolutionnaire qu’il fut. Les « réformistes » du parti socialiste édulcorent depuis longtemps la vigueur de sa critique du capitalisme et l’audace de sa conception du socialisme démocratique. Beaucoup ne voient plus en lui qu’un champion de la justice et un réformiste précurseur des compromis sociaux-libéraux.

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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
AVERTISSEMENT! JE SAIS QUE BEAUCOUP ME SUIVENT QUI EPROUVENT UNE AVERSION SPONTANEE ET LEGITIME POUR LES MOTS "SOCIALISME" ET "REVOLUTIONNAIRE" ETANT DONNE CE QUE NOUS AVONS A SUBIR SOUS CES ALIBIS. C'EST PRECISEMENT A EUX/ELLES QUE J'ADRESSE LE LARGE EXTRAIT DU BOUQUIN DE JEAN-PAUL SCOT CI-DESSOUS: CE QU'ON NOUS INFLIGE SOUS LE NOM DE SOCIALISME N'EST PAS DU SOCIALISME. PREUVE INFRA. CITATIONS ELOQUENTES A L'APPUI!

Livre très intéressant et solidement étayé. Une analyse des idées politiques de Jean Jaurès dont on se demande de quel nom d'oiseau les médias du Système l'affubleraient aujourd'hui... La conclusion, qui porte sur L'Armée nouvelle de Jaurès, remet sérieusement les pendules à l'heure.

Voici un passage éloquent de cette conclusion, textuellement (ce qui vaut mieux que mes éventuels bavassages de critique à deux ronds):

"Dans L'Armée nouvelle, Jaurès revient sur la formule de Marx sur les prolétaires sans patrie, « si souvent répétée et exploitée en tous sens» pour la replacer dans son contexte. Il remarque, à la différence de nombre de lecteurs pressés d'aujour'hui, que Marx corrige aussitôt sa formule en précisant que « le prolétariat doit conquérir tout le pouvoir politique, s'ériger en classe nationale souveraine.» Si la formule « les ouvriers n'ont pas de patrie » est à ses yeux une « boutade passionnée, une réplique toute paradoxale et d'ailleurs malencontreuse», il en décrypte toutes les fausses interprétations qui aboutissent à une conception absurde et artificielle de la révolution prolétarienne et à l'incompréhension de « la profonde évolution révolutionnaire si souvent définie par Marx lui-même avec toute sa force.»

Jaurès ne tolère donc pas un internationalisme prolétarien qui prétendrait abolir ou ignorer les patries pour ne considérer que les classes. Pour lui, la patrie ne se définit pas tant par un territoire ou un marché, par une population et des activités, que par une réalité organique, une histoire unificatrice et des modes de vie communs, des cultures et des valeurs partagées, en dépit des rapports de classes.

Dans la patrie, « une conscience collective s'est formée en qui les consciences individuelles étaient unies et exaltées. Toute l'histoire des nations est marquée par l'action des classes et du prolétariat en particulier, et une société nouvelle ne peut surgir si ses éléments n'ont pas été préparés à l'avance dans la société présente. Pour Jaurès, c'est la loi de l'évolution révolutionnaire qui régit les rapports entre les nations et le socialisme : « le socialisme ne se sépare plus de la vie, il ne se sépare plus de la nation. II ne déserte pas la patrie ; il se sert de la patrie elle-même pour la transformer et pour l'agrandir. L'internationalisme abstrait et anarchisant qui ferait fi des conditions de lutte, d'action, d'évolution de chaque groupement historique ne serait qu'une Icarie plus fictive encore que l'autre et plus démodée! »

Qu'est donc le véritable internationalisme ? Ce ne sera ni la dissolution des nations dans des « groupements minuscules » dont même Proudhon n'a pas voulu, ni la subordination des petites nations à « un impérialisme effroyable et oppresseur ». L'unité humaine se réalisera par la libre fédération des nations autonomes, se soumettant à des règles générales de droit, par « la continuation de l'idée de patrie jusque dans l'humanité ».

Dès aujourd'hui, les prolétaires peuvent lutter dans la patrie pour la transformer ; ils peuvent et doivent lutter pour l'indépendance de la nation parce qu'elle est la garantie de leur lutte pour le socialisme et la paix internationale ; ils ne peuvent vaincre qu'en s'emparant de « l'essence même du génie de la nation. » le véritable internationalisme n'est pas la suppression des patries, mais la reconnaissance de l'égalité de droit des nations. « Elles seront élevées à l'humanité sans rien perdre de leur indépendance, de leur originalité, de la liberté de leur génie. (...) L'humanité nouvelle ne sera riche et vivante que si l'originalité de chaque peuple se prolonge dans l'harmonie totale, et si toutes les patries vibrent à la lyre humaine. »

MES QUELQUES MOTS POUR CONCLURE:

Voilà qui est très proche du personnalisme gaullien (de Gaulle, on l'ignore trop souvent, avait des idées jauressiennes en matière d'économie, poursuivies par Louis Vallon et René Capitant): « Dante, Goethe, Chateaubriand appartiennent à toute l'Europe dans la mesure même où ils étaient respectivement et éminemment italien, allemand et français. Ils n'auraient pas beaucoup servi l'Europe s'ils avaient été des apatrides et s'ils avaient pensé et écrit en quelque espéranto ou volapük intégré. »

Et, de fait, que nous disent Jaurès et De Gaulle? La même chose. Que la mondialisation qui abolit les frontières pour détruire les sociétés et en faire des MARCHÉS - donc détruire le socialisme, réfléchissez-y si ce n'est pas encore fait: sans SOCIETE pas de SOCIALisme - en se servant des idiots utiles de la gauche folle sert en réalité les intérêts d'un Capital transnational inhumain qui ne vise qu'une seule chose: la réduction de 90 à 99% de l'humanité au servage en faveur des 1 à 10% qui la gouvernent.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Jaurès ne tolère donc pas un internationalisme prolétarien qui prétendrait abolir ou ignorer les patries pour ne considérer que les classes. Pour lui, la patrie se définit par une réalité organique, une histoire unificatrice et des modes de vie communs, des cultures et des valeurs partagées, en dépit des rapports de classes.
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Ce qui éclate à tous les yeux, c’est qu’il y a, dans notre société, un antagonisme profond d’intérêts ; c’est qu’il n’y a entre les classes d’autre arbitrage que la force, parce que la société elle-même est l’expression de la force.
C’est la force brute du capital, maniée par une oligarchie, qui domine tous les rapports sociaux ; entre le capital qui prétend au plus haut dividende et le travail qui s’efforce vers un plus haut salaire, il y a une guerre essentielle et permanente.

La grève n’est qu’un épisode de cette guerre. Le combat continue incessant, silencieux, dans l’atelier comme hors de l’atelier ; car à chaque minute le capital prélève une part du produit du travail, et le travail, averti peu à peu de son droit, refuse à cette spoliation incessante son consentement profond.
Même quand il subit la domination capitaliste, même quand il croit l’accepter, il ne l’accepte point en effet. Cette acceptation apparente n’est jamais qu’une résignation provisoire, consentie par la fatigue ou par une ignorance qui va se dissipant. La clarté ne peut pas faire l’apaisement, car elle révèle aux hommes exploités la cause même de leur souffrance.

Quand donc la paix sera-t-elle faite entre les hommes ? Quand la société reposera non sur la force, mais sur la justice, et la justice veut que tous les êtres humains soient appelés à gouverner leur propre travail et à en recueillir les fruits.
L’ordre capitaliste crée de la passivité et de la misère, parce qu’il réserve à une minorité privilégiée la direction du travail et une large part du produit créé par l’effort de tous.

Jean Jaurès, 30 décembre 1906,
éditorial de l'Humanité intitulé "La guerre sociale".
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