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Gentleman au grand jour, Démon sitôt dans l'obscurité…

En juillet dernier, j'avais désespérément cherché « le Démon » d‘ Hubert Selby, Jr. dans ma médiathèque et, sans conviction, j'avais griffonné le titre de ce roman sur la liste des suggestions.

Début septembre, un Pelecanos à la main pour l'emprunter, je suis averti à la dernière minute que « le Démon » aux éditions 10/18 était réservé à mon nom. Divine surprise ! Brandissant comme un trophée ce roman tout neuf, encore chaud comme une bonne baguette de pain, je me dis que Pelecanos attendra bien quelques jours…

Rentré à la maison, discipliné comme un élève de 6ième, je mets à jour ma liste Babélio et reste interloqué sur la page du Démon. Les étiquettes de ce roman mettent en avant les mots « Sexe » et « sexualité » à coté du « roman » de « Littérature américaine ». Ciel ! On m'aurait menti. On m'avait « vendu » un polar culte et voila que je me retrouve avec un « Cinquante nuances de grey » des années 70.

Si voulez, c'est un peu comme si je commandais un fraisier dans ma boulangerie et que la vendeuse me rapporte, avec le sourire, un gâteau au chocolat en m'expliquant que faute de fraise, elle pensait que ce délice au chocolat ferait l'affaire. Franchement, le pâtissier aurait pu au moins ajouter des framboises en remplacement. (1)

Bref ! Vous comprenez mon désarroi comme l'élève Torless a pu l'être durant son premier rendez-vous avec une prostituée. Et contrairement aux grands critiques de lectures érotiques, je ne suis pas le dieu de la vigne, du vin et de ses excès pour me lancer dans de telles lectures ! (2)

Prenant mon courage à deux mains, je m'attaque donc au Démon paru en 1976 et écrit par l'auteur américain Hubert Selby, Jr.

Le héros du livre, Harry White, est un jeune cadre dynamique dans une société new-yorkaise en pleine expansion. Harry partage sa vie entre son travail et ses conquêtes d'un jour. En effet, son besoin de coucher avec des femmes, de préférence mariées pour éviter de s'attacher à elles, s'avère de plus en plus addictif et altère même sa concentration au bureau. Plus grave encore, Harry doit sans cesse consulter sa montre pour arriver au travail à l'heure ou après sa pause déjeuner. Une pause déjeuner souvent les jambes en l'air si vous voyez ce que veux dire…

Passant de moments d'euphorie intense à des périodes de déprime maladive, Harry réussit tout de même à cacher les apparences dans son entreprise et se laisse même séduire par Linda, une jeune secrétaire au bord d'une piscine lors d'une journée détente organisée par sa société pour galvaniser les troupes.

Malgré ses pulsions sexuelles, Harry va-t-il réussir à conquérir la belle Linda ? Pourra t-il poursuivre son ascension fulgurante dans sa société malgré un premier rappel à l'ordre sévère de son chef Wentworth ? Pourra t-il accéder au luxe d'une belle maison, d'une belle voiture, des plus grands restaurants ou de la carte du Country Club de golf réservé aux élites?

En somme, deviendra t-il quelqu'un d'important et de respecté comme il en rêvé toute sa vie malgré ses travers de plus en plus difficiles à dissimuler ?

Pour avoir réponse à toutes ces questions, je vous invite à découvrir ce roman pour le moins déconcertant, déversant des paroles crues et immondes en alternance avec de longues tirades superbement écrites. Stressé par l'heure qui tournait lors des pauses déjeuner d'Harry, j'ai vécu cette lecture comme une véritable épreuve exhortant Harry à cesser de franchir la ligne jaune à tout bout de champ. En vain, malheureusement…

Si je compare « le démon » à des ouvrages cultes de Jim Thompson, le roman de Selby laisse moins de place à la violence physique que dans « le démon dans la peau » (ou sa nouvelle traduction « L'assassin qui est moi ») et se rapprocherait plus de « Rage noire » pour le langage cru et la pulsion intérieure destructrice du héros du livre incapable de la maîtriser. Malgré tout, le Démon n'atteint pas du tout, selon moi, le génie des deux chefs d'oeuvre de Thompson.

Si je devais énoncer une faiblesse, je déplorerais le milieu du roman trop long et répétitif contrastant avec une première partie tellement intense et lumineuse. Heureusement, la dernière partie est enlevée et se révèle à la hauteur d'un bon roman à la frontière du polar et sur la folie des hommes.

Et comme le dit si bien un proverbe indien, méfiez-vous : "L'homme est son propre démon."

Ps : J'oubliai la conclusion de l'histoire. J'ai bien eu un fraisier en fin de compte avec, il est vrai, de grosses pépites de chocolat sur le dessus fondant au bout d'un certain temps et des fraises un trop clairsemées à mon gout. A vous d'en déduire la fin du roman...

(1) Variante à la boulangerie pour les Belges exclusivement :

Si voulez, c'est un peu comme si je commandais une tarte aux pommes dans ma boulangerie et que la vendeuse me rapporte, avec le sourire, une tarte aux poires. Pas très content, je lui annonce qu'elle me prend vraiment pour la reine des pommes. En guise de réponse, elle m'explique que le pâtissier est belge et que faute de pommes, il s'est dit que je serais parfait pour être la reine des poires...

(2) voir la savoureuse critique de Dionysos89 sur les "Cinquante nuances de Grey"
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Tout souriait à Harry White. Jeune cadre dynamique, il passe pour un modèle aux yeux de ses parents. Mais ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'Harry a des pulsions. Des pulsions sexuelles au départ qui le mènent à ne coucher qu'avec des femmes mariées. Il se rassure en se disant que c'est pour la bonne cause, qu'il leur donne un peu de bonheur pendant ces instants éphémères. Mais Harry se rend bien compte qu'il y a quelque chose "qui ne tourne pas rond". Car il est capable de tout abandonner d'un coup, d'arriver en retard à son travail, de remplacer son repas de midi, pour céder à ce désir oppressant. Cela lui vaudra d'ailleurs des réprimandes de son patron qui le met aux pieds du mur en nommant son collègue directeur adjoint alors que cette récompense était, en toute logique, réservée à Harry. Monsieur Wentworth veut quelqu'un d'équilibré.

Le démon qui est en Harry s'apaise alors pour atteindre cette place tant convoitée. Il va presque devenir "normal" en passant ses journées à travailler et en fondant une famille. Mais pour combien de temps ? Trouvera-t-il un moyen d'assouvir ses pulsions par autre chose que le sexe ?

Ce roman m'a coupé le souffle ! Il est d'une intensité ! Alors attention quand même, car c'est cru, parfois glauque. Ceci dit, ce n'est pas gratuit et c'est justement ce qui aide à comprendre qu'Harry réagit à des pulsions. Il est malade. Une force intérieure le pousse à agir ainsi, à avoir des montées d'adrénaline, comme si sa vie en dépendait. C'est puissant, très puissant ! Et la narration y est aussi pour quelque chose car on entre souvent dans les pensées du personnage, d'où l'absence, pouvant déstabiliser au premier abord, de certains signes de ponctuation. Mais quoi de mieux, pour adhérer pleinement à l'histoire, que d'être nous aussi bousculés ?
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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AIDEZ MOI, NOM DE DIEU, AIDEZ MOI!

Harry a un démon, en lui, sans le savoir. Il ne lui apparaît qu'en rêve :
"Un visage... la bouche ouverte, sur un gémissement muet."
Harry a la beauté du diable et peut séduire autant de femmes qu'il désire.

Il est devenu Harry White, le plus jeune vice-président de sa société, marié à Linda, sa jolie épouse et père de 2 enfants...
Et heureux propriétaire d'une belle demeure. Il est riche et a du pouvoir!
L'American way of life.

Harry a eu de nombreuses aventures avant son mariage. Il continue, sans comprendre pourquoi, alors qu'il est heureux avec Linda.
Le "démon de midi" ?
"Elles étaient belles, surtout avec le vent qui plaquait leur robe, sur leur mont de Vénus."..

Mais, pourquoi lever des pochardes et les baiser?
Parfois, son esprit vagabonde, il ne sait pas comment il a fait pour être, dans cet hôtel sordide ?
"Pleurer, ne serait-ce que pleurer... Il fut pris d'un frisson d'angoisse..." Pauvre diable...

Pourquoi ce plaisir malsain pour le sexe et l'adultère, le vol, puis cette envie de tuer...?
"De nouveau, il se retrouva au fond de l'abîme, qui cette fois, était puant et dégueulasse..."
Une descente aux enfers?

Il savait, depuis des mois, comment s'y prendre pour tuer quelqu'un, sans risque. Pas sa femme, pas Linda! Car, il serait soupçonné...
Non!
Un inconnu! Oui, un inconnu...

Il voulait faire de ce crime, un acte de charité! Une cloche, un pauvre diable, qui ne serait regretté par personne.
.."Vêtements en lambeaux, chaussures dont les semelles bâillaient, col auréolé de crasse."
Le bruit de la rame de métro se fit plus fort...

Le cardinal Leterman allait célébrer la messe, ce dimanche de Pâques, dans la cathédrale.
.."il guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du démon, car Dieu était avec lui!"

Mais, que fait Harry ? Cherche-t-il le pardon et l'absolution!
Il est comme une âme en peine...
..."tout homme qui croit en Dieu, reçoit par Lui, le pardon de ses péchés. "
Que tient donc en main, Harry, un missel ou?

DIS LE, NOM DE DIEU DE BORDEL DE MERDE, DIS LE, DIS LE, S'IL TE PLAIT!...

Selby écrivit : J'écris avant tout sur la solitude... Tout le monde connaît ça, le désir d'être quelqu'un. le besoin de trouver quelque chose. Les addictions , la dégénérescence de l'être humain.
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Roman lu en trois jours. Impossible de m'en détacher. Harry, jeune cadre dans une société de Manhatan en pleine extension va monter les echelons et devenir vice-président. Il trouvera le bonheur dans le mariage et la paternité. Pourtant, une angoisse profonde et grandissante va lui faire commettre des actes de plus en plus déviants. Mais cette angoisse ira s'accroissant, compromettant sa réussite sociale.
Magnifiquement écrit, je vois dans ce roman une métaphore de l'impossibilité de vivre dans une société dominée par l'argent et le sexe. Il n'y aura pas d'echappatoire pour Harry.
Un livre à lire absolument.
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Et "ça" c'est un classique de la littérature américaine, salué par les critiques ? "ça" a remporté un vif succès lors de sa parution ? Il va falloir m'expliquer. C'est d'un ennui profond, il ne se passe rien hormis les petites histoires de "queutard" de Harry. Où est le démon ? Je me le demande encore. Un roman à éviter, nul, nul nul... mais ce n'est que mon humble avis.
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"vous avez lu l'histoire de Jesse James,
comment il vécut, comment il est mort
ça vous a plu hein, vous en demandez encore,
eh bien, écoutez l'histoire de Linda et Harry.

Alors voilà, Harry a de nombreuses conquêtes
elles sont belles et leurs prénoms sont : Mary ; Louise ; Tyna ; Irma ; Cherry...
Femmes infidèles, il les choisit mariées
pour Harry, pas question de s'attacher.

Et puis il a rencontré Linda,
connu l'amour, le voilà dans d'beaux draps
car Harry a un mal à gérer,
le démon, dont il est habité.

Forniquer, c'est sa façon de tenir
ses pulsions, l'empêchent de s'abstenir,
ça l'rend malade, mais que peut-il y faire
si sa vie se transforme en enfer.

Par moment, il contient son poison,
avec Linda, se love dans leur maison,
mais dans les trois jours, voilà le Tac Tac Tac !
le démon et sa queue qui repartent à l'attaque.

Alors là, au Diable les femmes mariées,
dans les loques imbibées, il ira se soulager,
bien-sûr il regrettera juste après,
mais le Démon ne l'laissera pas en paix."

~~~
Harry est un jeune cadre New-Yorkais, brillant et promis à un bel avenir professionnel. C'est un homme amoureux de sa femme Linda, qui lui a donné un fils ; il a des parents aimants qu'il rend fier, une grand-mère qu'il adore et des beaux-parents aux p'tits soins.
Mais.....
Harry est en proie à un démon, un démon qui lui bouffe les tripes, dans sa gorge, une boule qui le pousse à vomir s'il essaye de le contenir. Harry est prisonnier, accro à l'adrénaline, malheureusement, pas la saine adrénaline du sportif de l'extrême, non, une adrénaline malsaine. du genre ? :

(p11) _"Harry n'enculait pas n'importe qui. Uniquement des femmes... des femmes mariées.
Avec elles, on avait moins d'emmerdements. Quand elles étaient avec Harry, elles savaient à quoi s'en tenir. Pas question d'aller dîner ou prendre un verre. Pas question de baratin. Si c'est ce qu'elles attendaient, elles se foutaient dedans ; et si elles commençaient à lui poser des questions sur sa vie, ou faire des allusions à une liaison possible, il se barrait vite fait...
... il trouvait que coucher avec une femme mariée était beaucoup plus jouissif.
Pas parce qu'il baisait la femme d'un autre, ça Harry s'en foutait, mais parce qu'il devait prendre certaines précautions pour ne pas être découvert. Il ignorait toujours ce qui pouvait se produire, et son appréhension augmentait son excitation ".

Nonobstant, quelques précisions s'imposent :
non ! Harry n'est pas l'obsédé ou le pervers que vous êtes en droit de vous imaginer. Il est malade, esclave de son obsession. Mais encore une fois, le cul pour le cul ne l'intéresse pas. Son vrai démon est bel et bien l'adrénaline que lui procure le fait de pratiquer l'adultère, le risque de se faire pincer par le cocufier, ou de faire l'amour à la va-vite dans une ruelle avec encore une fois, ce bon vieux risque qui le fait se sentir si vivant et lui pourrit la vie en même temps.
Roman de la dualité.
Les aventures de midi à 13, les 5 à 6, lui deviennent indispensables et mettent sa carrière en danger, puis viendront les découches sous divers prétextes, et cette culpabilité envers Linda qui le rend de plus en plus dépressif.
Le démon va aller crescendo, les femmes infidèles reléguées au second plan au profit des pochardes dégueulasses, d'épaves envinassées dans des piaules puantes de pisse.
Harry se perd dans le hors-norme, le crade, le viol (viol dans la mesure où certaines sont trop défoncées pour se souvenir de quoi que ce soit...il leur glissera un billet).
Le démon lui réclame toujours plus...la boule dans sa gorge grossit toujours plus...son couple s'effrite...sa culpabilité l'étouffe... plus, plus, plus...
"il va te falloir trouver d'autres moyens Harry pour alimenter ton putain de démon !"
"Push in the limits !!!"
Harry est un camé au fond de l'abîme.
Un camé en perdition qui jouit du danger.
Le démon, c'est le roman d'un homme bien envahi par un mal.
C'est un roman de la douleur.

~~~
Quel plaisir ça a été de retrouver ce bon vieux Selby.
Il vient une fois de plus de nous remettre une claque, à moi et ma moitié (qui est encore plus fan de l'auteur que moi).
Et quelle claque...SPLAFF !!!... Merci Hubert ! On a aimé ça...

On renoue tout de suite avec les tics d'écriture propres à Selby :
_les répétitions de mots et les jeux de majuscules/minuscules : (ex.p312) _"C'EST fait, une fois de plus, C'EST fait, une fois de plus... j'rentre chez moi, j'rentre chez moi... C'EST fait une fois de plus, UNE fois de plus, UNE fois de plus, ET encore une fois, ET encore une fois, ET encore une fois, ET encore..."
_ les phrases en apnée s'étalant sur une ou deux pages, puis celles de un, deux, ou trois mots .
_ l'écriture au caractère bi-polaire (comme je l'avais déjà souligné dans un autre billet sur Selby)... phase d'accalmie avant la tempête : le héros ou le non-héros, vrille, puis on se calme, on se parle à soi-même, on se résonne et BÂM !!! ça hurle ! ça chiale ! tout craque !... et on se resaisit, on redevient amour, on se caline, on chuchote, mais dans la foulée...PSHIIIT ! noirceur ; déprime ; douleur ; hurlement ; gerbe !
_ on retrouve aussi les allusions Christiques, chères à l'auteur, puis au passage, quelques insultes à Dieu... chères à l'auteur.
_ les potes, ici Steve et Vinnie, le bar qui fait office de QG, répondent présents eux aussi à l'appel.
_ les prénoms : Harry ; Vinnie qui sont souvent de la partie dans bon nombre de romans de Selby .
_ puis New-York évidemment, ici, Manhattan, après avoir eu le droit au Bronx avec le Saule, Brooklyn avec Last exit... Coney Island, Central Park, le Lower east side, Time Square, Grand Central... Selby écrit New-York, son Old New-York, dangereux et crasseux (celui-ci, le démon fait un peu figure d'exception)
_ et puis cette écriture qui sonne si vrai, qui sait sonder la face sombre de tous ces hommes et femmes, avec ce respect perceptible pour ces pauvres zouaves livrés à eux-mêmes, se débattant tant bien que mal dans cette foutue mélasse qu'est leur vie.
Tellement violent mais tellement réel !

~~~
C'est avec un p'tit pincement au coeur que j'ai refermé ce livre.
Car il ne me (nous) reste plus qu'un seul roman à lire de Selby : "Retour à Brooklyn" (Requiem for a Dream)
(Je ne compte pas "Psaumes" et "Song to myself" qui eux, ne sont pas des romans, mais que je ne manquerais pas de lire ;))
Et là... DILEMME !
J'ai adoré le film "Requiem for a Dream" tiré du roman. Je le classe d'ailleurs dans mon TOP 15 cinématographique. Mais voilà... quand j'ai aimé un film, je veux dire "vraiment aimé" , je n'arrive pas à aller vers le bouquin après. Je pense à : "37°2 le matin" ; "Le Diable tout le temps" ; "No country for old men" ; "Mystic River"... et quelques autres...
C'est idiot, mais c'est comme ça ! Je reste sur ma bonne impression ciné
Bon, je ferai peut-être une exception pour le Requiem de Selby, si le manque se fait sentir. (j'ai déjà fait une entorse à ma règle avec "Into the Wild", mais c'était un cadeau de ma fille, donc... Joker ! ; puis avec "Ma mère" de Bataille, mais le film ne m'avait pas frappé plus que ça, donc, deuxième chance avec le livre qui lui, était bien meilleur).
A contrario, quand un roman m'a plu, je ne boude pas la version cinoche, si l'occasion se présente.
Bref...
~~~
Allez, le démon rejoint mon île déserte, pas spécialement pour lui-même, mais aussi comme digne représentant de la biblio d'Hubert Selby Jr, pour le remercier de toutes ces chouettes lectures qu'il nous a offert ! :)

A+ Hubert ! je me chope Psaumes et on se refait un petit bout de route ensemble... cool !















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Je ne sais plus pourquoi j'avais acheté ce livre : une émission, un article qu'importe mais je l'avais noté immédiatement car il était vivement recommandé comme une référence de la littérature américaine, un classique comme on dit, mais dont je n'avais jamais entendu parler auparavant, ni du roman ni de l'auteur d'ailleurs . Se fier à son instinct, et malgré un démarrage de lecture un peu lent et interrogatif sur la suite, j'ai finalement découvert un roman d'une force incroyable, d'une tension inouïe et d'une introspection dans l'âme humaine d'une rare intensité. Si je m'étais contenté de cette première partie, cela n'aurait pas été un coup de coeur et je ne sais même si j'aurai été au bout, mais tout tient dans la construction minutieuse et l'intensité qui règne au fur et à mesure de la lecture.

Harry White, le narrateur, a tout pour réussir : 25 ans, une situation en pleine progression, il vit chez ses parents par commodité et a une passion : les femmes mariées, par simplicité, pour éviter tout engagement. Une vie pour lui idéale..... Mais derrière cette façade se cache finalement un esprit tourmenté, que dis-je tourmenté, un démon. Mais qui est finalement le démon ? Lui ou cette chose qui le ronge de l'intérieur et qu'il n'arrive à assouvir, à faire taire.

J'ai trouvé la première partie du roman assez "banale", une histoire d'addiction au sexe, un personnage assez narcissique, au langage assez cru, je n'étais pas convaincue que ce roman était pour moi. Mais il y avait dans la narration, quelque chose qui me poussait à aller plus loin, je sentais que ce Harry White n'était pas aussi ordinaire que cela et bien m'en a pris car au fur et à mesure de ma lecture, c'est une escalade infernale jusqu'à un final magistral. Et quand je parle d'escalade, c'est pas un vain mot. 

"Une force irrésistible semblait le pousser vers la folie ou vers la mort. (p267)"

La dualité d'un esprit toujours en questionnements, en recherche d'adrénaline, quitte à mettre sa vie professionnelle, pourtant prometteuse, en danger. Mais comm c'est un esprit brillant il parvient toujours à sortir des pires situations. Il joue avec le feu et il aime cela. C'est sa came. Un homme à deux visages : une image publique faite de réussites de tous ordres, qui forme avec Linda et leurs deux enfants une famille parfaite et une image intime sombre, de plus en plus ténébreuse et tourmentée. Un Jekyll et Hyde.....

(...) mais il savait qu'il ne pouvait s'empêcher de sortir de temps à autre, qu'il ne pouvait renoncer à ses virées dans ces bars dégueulasses où il levait quelque loque humaine répugnante pour y déverser son poison et ensuite essayer de vomir la pourriture infernale qui lui rongeait les tripes..... (p252)

Harry White (serait-ce un clin d'oeil de l'auteur de lui avoir donné ce nom "blanc" en opposition à la noirceur de son esprit) s'enfonce dans les ténèbres, déjouant par orgueil les aides qu'on lui propose : sa femme, un psychiatre, son employeur, rien n'y fait, rien ne le retient, la seule chose qui l'épanouit c'est être un autre, sentir le pouvoir qui est en lui, être sur le fil du rasoir, la mise en équilibre au bord de l'abîme. Et comme dans toute addiction, il lui en faut plus, toujours plus. Pendant dix années, on suit sa descente aux enfers dans la solitude de son enfermement mental. Il n'a d'estime que pour lui-même et encore pour une certaine image de lui, pour sa satisfaction personnelle, il a besoin de se lancer de nouveaux défis, toujours plus dangereux, sans conscience de la portée de ses actes, dans l'indifférence totale des conséquences, seulement pour sa satisfaction personnelle. Bien ou mal n'ont plus d'importance, il lui faut un "shut" pour continuer.

"C'EST fait, UNE fois de plus, et il répondait, J'rentre chez moi, J'rentre chez moi, et, en arrivant chez lui, il alla directement à la salle de bains pour prendre une douche et resta sous l'au jusqu'au moment où elle commença à tiédir, la laissant rebondir sur ses épaules et couler le long de son corps en essayant de chasser la pensée qui revenait constamment lui harceler l'esprit, sans y parvenir car il savait que c'était la vérité, qu'il allait devoir recommencer, et il sentit que le mal commençait à lui ronger les entrailles et il comprit que ce n'était qu'une question de temps, que bientôt le démon s'emparerait à nouveau de lui et qu'il lui faudrait trouver un moyen pour se délivrer de cette tension poignante et de cette anxiété dévorante. (p310)"

Est-il un démon ou est-il habité par un démon ? Est-il dément, schizophrène ? Lui argumente, justifie ses actes. ne culpabilise jamais, passe par des périodes de "rémission" mais qui ne durent jamais, sa vraie nature, son autre moi reprend le dessus.

"Il resta dans l'étuve pendant des heures, regardant le poison suinter par tous les pores de sa peau, n'arrêtant pas de déglutir, pas tant en raison de la bile amère qui emplissait sa bouche que pour repousser ce quelque chose qui, du tréfonds de lui-même, essayait de remonter au grand jour. Et il continua à ravaler et à refouler ce démon sans jamais reconnaître son existence.. (p238)"

J'ai rarement eu entre les mains un roman aussi noir, avec une plongée aussi vertigineuse dans l'âme humaine et ses tourments. L'écriture est en parfaite adéquation avec les pensées du "héros", elle le rend vivant, présent, on est pénétré par sa folie, son enfermement, dans son orgueil et sa misanthropie. La tension est palpable et va crescendo. Car après les femmes, la fange, le vol il va s'attaquer à la religion, à ce qu'elle représente : le bien et voudra prouver que le mal peut l'emporter, qu'il est au-dessus de tout, qu'il peut tout en toute impunité

"Le vide contemplant le vide. L'abîme contemplant l'abîme. La conclusion contemplant les prémisses. (p329)"

Et sa dualité provoque une dualité chez le lecteur : faut-il le plaindre, le haïr ? C'est le mal à l'état pur sous un visage lisse. Qui pourrait croire que parallèlement à une telle réussite professionnelle et personnelle, un homme aussi brillant puisse basculer dans la nécessité presque vitale pour lui de faire mal ou le mal.

J'ai lu les dernières pages en apnée, partagée entre épouvante dans ce que l'âme humaine peut avoir de plus retors et complexités mais, bizarrement, avec une certaine compassion pour lui : est-il responsable ou simplement le résultat de sa folie ? Pas de prise de position de la part de l'auteur. Il expose, il raconte et finalement nous laisse seul juge.

C'est un roman d'une maîtrise incroyable dans sa construction, dans le style et dans la vision de l'auteur sur l'homme, dans ses retranchements, dans sa multiplicité psychologique.

"Et ce qui s'était dit serait oublié, mais les sentiments resteraient présents dans les mémoires, comme ils le font  toujours, et ce, pendant longtemps, alors que les paroles et les événements sont déjà oubliés.(p158)"
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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Une lecture jubilatoire. Plonger dans la démence la plus profonde, Hubert Selby Jr. ne prendra pas de pincettes pour vous décrire ce qu'est la folie à l'état pure. Un roman aussi puissant qu'un coup de poing en plein abdomen, vous adorerez ou vous détesterez, mais croyez moi, ce roman vous vous en souviendrez !

Dans la descente aux enfers de cet homme, on va croiser différents niveaux de folies. Des moments de pure allégresse, des moments d'oublis profonds. le tourmente d'un homme qui mène sa vie entre deux chemins : celui que son esprit l'oblige à réaliser, et celui que la société à modelé pour lui. Cet homme vit son pire cauchemar. Jours après jours, il subit les attaques de sa psyché qui tente de le détourner du bien et de lui prouver que sa vie se réalise dans le péché, toutes les formes de péchés ! On voit ces moments de paix et de tortures s'emmêler pour nous livrer un texte d'une folie pure.

La force d'un tel roman, est directement liée à la plume de son auteur. Hubert Selby Jr. n'a pas peur d'utiliser les mots crus qui nous font frissonner. Les paroles qui nous attaquent, qui nous touchent et nous laissent sans souffle au bord de la route. Ici tout est mis en oeuvre pour nous décrire au plus près la réalité cet homme terrible. Cet homme qui cesse de l'être, le moment où ses pulsions prennent le pas sur sa vie.

En résumé ce roman est un livre qui parvient à lier le sexe, la mort, le pouvoir ou encore l'autorité, ce qui va nous permettre de nous donner une vision complète et tourmenté de cet homme. Un homme qui n'arrive plus à faire les choses, un homme qui essaye coûte que coûte à maintenir sa vie « parfaite ». Une vie qu'il s'est donné tant de mal à obtenir.

J'avais ce roman depuis si longtemps que je ne savais plus à quoi m'attendre. Tant mieux, il doit être lu, de cette manière : sans arrière pensé, sans freins. Tout sera une affaire entre vous et cet auteur pour nous révéler la noirceur d'une âme perdu. Un homme persuadé, obligé de faire le mal pour pouvoir enfin aller bien. A la recherche de la jouissance absolue, il n'y parvient qu'en ayant assouvis les pulsions les plus sombres de son esprit.

Ce roman est à couper le souffle, tant par son sujet que par la manière dont le texte est rédigé. Mais il ne conviendra pas à tout le monde. Il fait partie de ces livres qui ne peuvent être adopté à moitié. Ici soit on aime, soit on le jette !
Lien : https://charlitdeslivres.wor..
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La descente aux enfers de Harry, jeune cadre dynamique, qui a tout pour réussir. Poussé par des pulsions internes sordides, Harry va inexorablement sombrer dans les ténèbres.
Ecrit à deux voix, celle du narrateur, et la seconde, insidieuse, impérieuse et maléfique, la petite voix intérieure de Harry qui le conduira à sa perte, ce roman vous capture dès les premières pages pour vous laisser lâchement en fin de lecture, véritablement pantois .

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Le démon, c'est l'histoire d'un homme qui est mauvais. Tellement mauvais, qu'il ne peut l'accepter lui-même, et qui, le jour où il trouve quelqu'un de bon et de pur qui l'aime, il l'épouse, trop heureux de retrouver un peu d'humanité.
Mais son démon intérieur ne le laissera pas aimer et vivre simplement. Il va se salir de plus en plus, tentant aussi de salir la pureté de l'amour que lui porte sa femme. Car si sa femme l'aime, lui, aussi pourri, c'est qu'elle aussi a quelque chose de pourri... non ? Et pourquoi ne voit-elle rien ? S'aveugle-t-elle volontairement, devenant ainsi complice de cette ignominie ?
Mais tout cela, bien entendu, n'est pas exprimé aussi clairement, c'est impuissant, comme le "héros", qu'on assiste à la lente délitation de cet être humain, se pensant victime d'une maladie alors qu'il n'est juste que vil, ignoble et obsédé. Obsédé par l'abîme sans fin qui l'habite. Obsédé par ce qu'il y a de plus mauvais en lui, et dans les autres.
Un livre à part dans la bibliographie d'Hubert Selby Jr.
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