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Sublime. Bien que je dois avouer, j'ai davantage lu ces Sonnets dans la très belle traduction offerte dans cette édition bilingue que dans la version originale, trop ardue à comprendre.

J'avais très envie de découvrir cette oeuvre depuis la pièce de théâtre de Tiago Rodrigues "By heart", consacrée au trentième sonnet. Je n'ai pas été déçue.

Tous les sonnets pourraient être reproduits en citation.

Recueil de poèmes relatant la passion d'un homme, l'auteur ?, pour un jeune homme. Subversif et scandaleux, mais ô combien splendidement écrit.
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J'ai un sentiment partagé après la découverte de ces sonnets. Je connaissais William Shakespeare comme auteur de théâtre et je l'appréciais, trouvant ses oeuvres finalement très modernes. Les sonnets offrent un énorme décalage, d'un grand classicisme, ils sont difficilement abordables, car traduits depuis un anglais élisabéthain. le traducteur, Jean Malaparte, doit d'ailleurs être salué pour ce travail considérable. J'ai apprécié plusieurs sonnets, cependant leur lecture me semble monotone, l'atmosphère et les expressions sont désuètes, ou tout au moins, je le ressens ainsi.
Le recueil est présenté dans une édition bilingue.
Assez contente d'avoir pu découvrir cette poésie, même si je la juge trop classique, je resterai fidèle à Shakespeare pour son théâtre.
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Le passage de l'anglais au français a du être laborieux. Je n'aurai pas aimé être le(s) traducteur(s) et encore moins me lancer dans un défis aussi dangereux. Mais, il faut l'avouer, les résultats sont bien la. Je n'ai pas le niveau adéquat pour savourer pleinement la qualité de l'oeuvre en anglais, alors je commenterai la version française de Jean Malaplate. La rime est respectée, ainsi que le rythme et la musicalité. La profondeur est toujours présente. Les sujets développés par Shakespeare sont tout simplement intemporels, ce qui permet, presque 5 siècles après, de toujours être profondément touché par ces sonnets. Ce n'est pas qu'un vulgaire texte, c'est de la musique. La délicatesse, la douceur, et la verve de Shakespeare sont omniprésent dans cette oeuvre poétique et lyrique.
Je tiens à souligner que, dans mon édition, à la fin, j'ai des notes pour chaque sonnet, ce qui permet de donner une autre dimension à l'oeuvre, et de mieux comprendre certains points. C'est une excellente initiative.
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Les sonnets de Shakespeare, c'est quelque chose pour l'étudiant de littérature. Je ne crois pas qu'il y ait beaucoup qui ont lu les cent ou deux cents sonnets. Pour goûter ces poèmes une sélection de dix sonnets serait souhaitable, anglais et français avec des annotations et un petit commentaire qui montre un peu de l'art de Shakespeare -
mais il faut chercher quelque chose comme ça ou bien l'écrire soi-même.

J'ai sélectionné le sonnet 18 en anglais, français et allemand. Voyez citations. En tant qu'allemand je dois dire qu'il me faut la traduction allemand pour pouvoir goùter le poème de Shakespeare dans toute sa beauté.

Dans le sonnet 18 Shakespeare se demande s'il devrait comparer la beauté de sa dame admirée à la beauté d'un jour d'été. Non, dit-il. La beauté du jour d'été ne dure pas.
Mais, et cela il dit dans les dernières lignes, tant qu'on lira mon poème tant ta beauté durera aussi, car mon poème ne change pas.
Est-ce que Shakespeare s'est douté que des hommes 400 ans plus tard liront ses vers?

Texte en anglais: http://www.shakespeare-online.com/sonnets/18.html
traduction française: http://fr.wikipedia.org/wiki/Sonnets_(Shakespeare)#Sonnet_18
Lien : http://www.deutsche-liebesly..
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Pourquoi lire autre chose que de très grandes oeuvres?
William a utilisé plus de 24 000 mots...Soit environ 20 fois plus que ce qu'un romancier contemporain utilise...
En un sonnet (14 vers, moins de 100 mots) il dit tellement plus et tellement mieux, que nous, misérables traducteurs ne faisons que rebondir contre ses mots.

Voici une traduction du premier sonnet;
je vais proposer la traduction d'une dizaine de sonnets
c'est ma troisième traduction que je fais, les deux premières ont été publiées.

Sonnet 1
1
From fairest creatures we desire increase,
That thereby beauty's rose might never die,
But as the riper should by time decease,
His tender heir might bear his memory:
But thou, contracted to thine own bright eyes,
Feed'st thy light'st flame with self-substantial fuel,
Making a famine where abundance lies,
Thyself thy foe, to thy sweet self too cruel.
Thou that art now the world's fresh ornament
And only herald to the gaudy spring,
Within thine own bud buriest thy content
And, tender churl, makest waste in niggarding.
Pity the world, or else this glutton be,
To eat the world's due, by the grave and thee.


Des superbes créatures notre désir s'accroit,
que jamais ne disparaisse la beauté,
que le vieillard parti avec le temps soit
vivant en son adorable héritier.
Toi sous contrat avec tes yeux d'or,
tu entretiens la flamme de la bougie,
créant famine là où il y a pléthore,
trop cruel, tu es ton pire ennemi. Tu es parure de beauté de l'univers, l'éblouissant messager du printemps, tes plaisirs, en ton sein tu les enterres,
tu dilapides, cher idiot, en lésinant. Fais pitié ou sois ce goinfre qui mange
ce qui est du au tombeau et à la fange.


(Ces mots qui suivent sont les miens, je souhaite imodestemment les inclure à la traduction)
Premier vers du premier sonnet - je sais
que Will les a écrit dans le désordre -
mais c'est lui qui a choisi ce premier,
lui, qui au quarto, a donné cet ordre;
un seul vers, déjà tant d'hésitations,
et aucune réponse ne vient nous aider;
même en étudiant toutes les traductions,
s'ouvre la voie de la perplexité,
les choix multiples sont autant de mystères,
portes de toutes les subtilités,
il ne nous reste qu'une seule chose à faire:
nous aussi, obscurcir l'obscurité.
Sans être assez grossier pour s'arrêter
à des billevesées d'identités.

Reprenez-vous, tendre traducteur,
seul annonciateur de sens inconnus,
et faisons patience, avec Arthur, en attendant le bateau.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Il y a longtemps que je cherchais les sonnets de Shakespeare dans une traduction française qui respecte la rime et qui conserve le ton et la manière du grand William, et sans les dénaturer. D'autant plus que je lis rarement les sonnets de Shakespeare en français, préférant me délecter longuement de l'édition de poche de ceux-ci achetée à Oxford il y a plus de vingt ans.

Puis le hasard faisant bien les choses, j'ai découvert les sonnets traduits par Bertrand Degott, poète né en Alsace en 1955 et professeur de français à Besançon depuis 1994 qui présente ainsi son travail sur le quatrième de couverture : «On ne traduit bien que son proche, paraît-il. Traduisant Shakespeare, je pars à la rencontre de quelqu'un qui me ressemble assez pour me rester accessible. À l'évidence, ce que nous avons de voisin c'est notre expérience du monde en tant qu'homme, du vers et de la forme en tant que poète. Entretenir ce voisinage n'est pas une communauté certes, mais peut-être du bois pour en faire. »

Un travail magnifique et respectueux de Shakespeare qui donne à celui-ci ses lettres de noblesse en français.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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Bien avant d'être un dramaturge, William Shakespeare était avant tout un poète. Ce recueil comporte 154 sonnets du célèbre auteur. Abordant des sujets vastes tels que l'Amour, le mariage, le Beau,a politique, la mort ou encore le Temps qui passe, Shakespeare aborde ainsi des sujets intemporels et qui sont donc toujours d'actualité. Il est impossible de faire un résumé concis de ce que sont ces textes car la poésie ne se raconte pas, elle se vit ! Aussi, je vous invite à consacrer un peu de votre précieux temps à venir découvrir cet ouvrage duquel vous ressortirez un brillant apprentissage de la vie. À découvrir !
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Cette lecture est pour moi la première découverte de Shakespeare en tant que poète, et non pas dramaturge. En fait, il y en a au total 154 sonnets; mais le recueil que j'ai lu n'en propose qu'une petite sélection. Les poésies sont adressées (directement ou métaphoriquement ?) à un beau jeune homme. Elles insistent notamment sur la beauté de la jeunesse, sur la brièveté de cet âge d'or, sur la nécessité de se marier et sur l'intérêt d'avoir des enfants. L'intention me semble très "raisonnable" - voire un peu académique. le lyrisme de l'auteur m'échappe en grande partie. Quant à la forme, je ne comprends quasiment pas l'anglais de Shakespeare et la traduction ne m'a pas transporté. Pour dire la vérité, je n'ai pas été très sensible à la beauté de ces sonnets pourtant célèbres.
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Un chef d'oeuvre, tout simplement
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Voilà un chef d'oeuvre sur lequel j'ai eu la chance de tomber en fouinant dans les librairies de Bruxelles. Un vieil ouvrage taché, jauni, déchiré, abîmé par les outrages du temps mais dont le contenu est sans conteste un trésor pour les yeux, une douce mélodie émanant des Temps Modernes dans la froideur de l'Angleterre. Ce qui est fantastique c'est que cet ouvrage présente les textes originaux sur la page de gauche en vieil anglais et les traductions françaises du poète Mélot du Dy sur la page de droite. Ainsi il est plaisant de lire d'abord le texte original, d'essayer d'en capter le sens général et parfois même quelques vers entiers et puis de se laisser aller à la découverte plus fine du texte en français. Mélot du Dy précise dans la préface que les sonnets de Shakespeare pourraient dans leur ensemble s'appeler le Roman de Shakespeare. Ils nous content en effet l'historique pathétique, de son double amour. le roman comporte cent cinquante quatre sonnets ou chapitres qui parfois se répètent. C'est pour cela que Mélot du Dy s'est concentré sur vingt-cinq sonnets en tentant de rendre l'interprétation vivante. Il conclut en écrivant : « Les sonnets de Shakespeare, haut poème De La Renaissance, nous apparaissent ainsi comme un de ces paysages de montagne devant lesquels il doit être permis au simple copiste de poser en plein air, même si cet air l'enivre un peu trop, son chevalet. »

En tournant la première page, je découvre un second trésor : une page de « le journal des poètes » de décembre 1954. On y consacre un article sur Mélot du Dy, sur la grâce et la fantaisie de ses écrits. Je cite quelques extraits de l'article : « Les réalités belles ou laides, les émotions tristes ou joyeuses, ne sont pas livrées dans leur nudité, telle que le poète les a vues ou ressenties. L'artiste transpose toujours et dans le ton que lui impose son tempérament. L'auteur de « Jeu d'ombres » les revêt, précisément, d'un voile de discrétion ou de pudeur comme ces nus antiques de Ménades ou de statues funéraires. Les formes n'en sont pas, pour cela, étouffées, mais soulignées ou tempérées selon les circonstances. Les plis de ces voiles enchaînent le rêve dans leurs courbes ou aiguisent la curiosité dans sa recherche du trait révélateur. […] Son ironie il s'en sert pour dissimuler les vibrations trop aigues de sa sensibilité. Il s'en sert également pour décrire des ridicules, et ceci avant ceux-là qui, aujourd'hui font rire peut-être mais hélas jamais sourire. [….] Il connaît la densité des mots, joue avec leur éclat comme un joaillier, et fait preuve, a-t-on dit, d'un art si savant qu'il paraît le plus simple du monde. » Tout cela laisse rêveur. Ce journaliste Philippe Jones aurait pu être un poète aussi, ne trouvez-vous pas cet extrait sublime ! Pourquoi n'écrivons-nous plus ainsi aujourd'hui ? Plusieurs poèmes de Mélot du Dy sont cités au-dessous, je vous en présente deux :

La sirène La gisante
Lointaine rumeur de la vie Tu souris, dormeuse
Un jour, un seul pour mes regards, Au marbre figée,
Océan de tous les hasards Entre la nuit creuse
Et de monotonie. Et l'aube ridée,
Dans un coin d'église.
Je t'imagine sur les plages, Un pas de chaisière
Amour pareil à mon erreur ! Traîne sur les dalles,
Assez de vie et de fureur Un rais de lumière
Pour déplacer les coquillages… Touche tes mains pâles,
Prière immobile.
Ces flots dans la chambre, lumière La mort sollicite
Sue mes mains d'aveugle. Voici Un geste de joie,
Ton premier silence ébloui, Mais comme on hésite
Voici ma chance, la dernière, Avant qu'on y croie…
Et tu sembles vivre.
Vite, et saisir ce qui se donne, Dors ! Je m'aventure
L'aurore d'une épave, un sein Dans les jours informes,
Délicieux : regarde bien ! O présence pure
Vite et mourir. Personne. Afin que tu dormes
Image d'amie.

Place maintenant à William ! Je vous ai choisi 11 sonnets qui m'ont particulièrement plu.

Sonnet I
Regarde ton miroir, et dis à ce visage
Que les temps sont venus d'en former un nouveau ;
Car si tu refusais d'en faire un aussi beau,
Tu décevrais le monde et quelque vierge sage :

Quelle belle, en effet, pour un moins doux fardeau,
Dédaignerait ici ton marital usage,
Et, de son propre bien préférant le tombeau,
Quel sot consentirait à briser son lignage ?

Tu sembles le miroir de ta mère ; elle, en toi,
Rappelle la fraîcheur de l'avril de sa vie :
Par la vitre de l'âge, en un pareil émoi,

Vieillard, tu reverras ta jeunesse fleurie.
Mais qui veut vivre seul, pour que chacun l'oublie,
Mourra seul, emportant son image avec soi.

Sonnet III
Ces heures dont le clair travail accomplissait
La charmante merveille où tout regard s'arrête
Blesseront quelque jour cette chose bien faite,
Ravissant la beauté de qui nous ravissait ;

Car le temps, sans répit, mènera le succès
De l'été triomphant à l'hiver, sa défaite ;
Le froid surprend la fleur ; la feuille, de son faîte,
S'abat ; la neige enfin recouvre un noir décès.

Mais l'esprit, mais l'essence adorable demeure,
Le parfum de l'été dans sa prison de gel,
Afin qu'à tout jamais toute gloire ne meure :

Ce n'est donc qu'un aspect fugitif que l'on pleure,
Et la fleur, distillée en délice immortel,
Au mépris de l'hiver nous ravit tout à l'heure.

Sonnet IV
Ni marbre blanc, ni monument doré
Ne survivront à ces rimes princières ;
Tu brilleras chez moi plus honoré
Qu'un temple impur de temps et de poussières,

Et quand l'excès des armes et des guerres
Aura le temple et le socle rasé,
Ni fer, ni feu n'atteindra sur mes terres
Ton souvenir en ces lieux déposé.

Malgré la mort et l'ennemi farouche,
Tu poursuivras ton destin ; par ma bouche,
Et jusqu'au jour du dernier jugement,

Le monde encore entendra ta louange ;
Oui, tu vivras jusqu'à l'appel de l'ange,
Dans ce poème et les yeux d'un amant.

Sonnet VII
Le péché d'amour-propre à tel point me possède
Que mes yeux, que ma chair, que mon coeur en est plein ;
Contre un péché semblable il n'est point de remède,
Tant sa marque est profonde et gravée en mon sein.

Nul visage, à mon gré, n'est plus beau que le mien ;
Nul charme n'est plus vrai que celui qui m'obsède :
Devant ma vérité, toute vérité cède ;
Auprès de ma valeur, toute valeur n'est rien.

Mais lorsque en un miroir je connais mon visage,
Tout flétri, tout mordu des morsures de l'âge,
J'entends mieux le secret de pareilles amours :

S'aimer, s'aimer ainsi, ce serait une injure ;
Mais moi-même, c'est Toi, ma beauté, ma parure,
Et mon âge s'est peint des fraîcheurs de tes jours !

Sonnet IX
Quand, mal vu par le sort et les yeux des humains,
Déplorant mon état de réprouvé sur terre,
Je maudis mon malheur, de moi-même me plains,
Et fatigue le Ciel de mon cri solitaire ;

Envieux de celui dont les voeux sont moins vains,
De son cercle d'amis, de son talent pour plaire,
De la beauté d'un tel et de l'art de certains,
Et jamais satisfait de ce que je sais faire ;

Quand, parmi ces pensers, dans le mépris de moi,
Je songe à Vous, - soudain, dans la naissante aurore
Ma fortune, pareille à l'alouette, monte,

Et chante au ciel, bien loin d'une terre de honte,
Et votre amour très douce et brillante me dore,
Et me fait riche au point que j'en dédaigne un roi.

Sonnet XIII
L'amour est mon péché ; votre vertu, la haine,
La haine du péché que je porte en mon sein :
Comparez votre état, je vous en prie, au mien,
Et ma faute à vos yeux paraîtra moins certaine.

Ou, venant de ta bouche, un tel reproche est vain
Quand elle a profané sa pourpre et son haleine,
Scellé des faux serments comme j'ai fait, sereine,
Et volé de l'amour au lit de ton prochain.

Qu'il me soit donc permis de t'aimer comme, certe,
A d'autres tu portas tes importunités :
Qu'à la compassion votre âme soit ouverte

Afin que nous sachions si vous la méritez !
Si là-bas tu requiers ce qu'ici tu refuses,
Ton exemple est mauvais, bonnes sont mes excuses.

Sonnet XVII
J'aime mieux être vil que d'être estimé tel
Quand de ne l'être pas fait que l'on m'en accuse,
Quand j'y perds des plaisirs qu'un homme se refuse,
Jugeant par d'autres yeux de son bien personnel :

Et pourquoi le douteux regard d'un autre (et quel ?)
Devrait-il approuver ce beau sang qui s'amuse,
Si d'un moindre pécheur un pécheur plus réel
Espionne et reprend ce que j'aime sans ruse ?

Non ! véritablement ; je suis ce que je suis.
Qu'on se juge soi-même alors qu'on me poursuit :
Je puis bien marcher droit si leur marche est oblique ;

Ce n'est pas à leur vice à tracer mon portrait,
A moins que de prétendre, injurieux excès,
Que tout homme est pourri dans notre république.

Sonnet XVIII
Quand tu voudras me prendre à la légère
Et me railler sur un air de chanson,
Contre moi-même avec toi, pour te plaire,
Je nommerai vertu la trahison.

Bien mieux que toi, je sais une raison,
Un secret pour me perdre, et je vais faire
A ton usage un récit de l'affaire :
Il te vaudra de l'honneur ! – de façon

Que par ceci, j'y gagnerai moi-même,
Car ne pensant qu'à toi, puisque je t'aime,
Ton avantage est doublement le mien,

Serait-ce au prix d'un tort que je m'inflige. –
Je suis à toi, je t'aime assez, te dis-je,
J'accepterai tout le mal pour ton bien.

Sonnet XIX
Ce n'est point tout mon mal, qu'elle soit ton amie,
Et tu sauras pourtant que je l'aimais beaucoup ;
Que tu sois son ami, ma peine est infinie,
La perte d'un tel bien m'accable plus que tout.

Amants injurieux ! Mon excuse pour vous,
C'est qu'Il t'aime sachant combien je t'apprécie,
Et qu'Elle te permet cet amour des plus doux
Parce que l'amitié l'un et l'autre nous lie…

Lui perdu, c'est un gain pour mon amour, tant mieux !
Elle perdue, eh ! bien, mon ami l'a trouvée ;
Ils se trouvent l'un l'autre et je les perds tous deux ;

Mais c'est en mon honneur, la chose m'est prouvée,
Qu'ils m'ont mis cette croix sur le dos. Et, ma foi,
Deux amis ne font qu'un : elle n'aime que moi.

Sonnet XXII
Quel élixir de larmes de Sirène
Né dans l'enfer d'un alambic malsain
Ai-je donc bu, changeant mon plaisir en peine,
Espoir en crainte, en perte tout mon gain ?

De quelle erreur mon coeur était-il plein
Qui savourait sa chance plus qu'humaine !
Et dans la fièvre alors de la géhenne
Combien mes yeux s'égarèrent soudain,

Maos, ô bienfait du mal ! si l'on ignore
Que le meilleur par le mal s'améliore
Et que l'amour – à présent je le sais –

Renaît plus fort, plus beau de sa ruine :
J'y fus déçu, mais sans qu'il m'en chagrine,
Riche trois fois de mécomptes passés.

Sonnet XXIII
Je n'admettrai jamais de divorce valable
Au mariage des esprits ; l'amour n'est pas
L'amour, s'il doit changer quand on change ici-bas,
Quitter quand on le quitte et par un mal semblable,

Oh ! non. Voici l'amour : un phare inébranlable
Qui regarde les flots tumultueux ; l'éclat
D'une étoile guidant la nef qui se débat,
Sans prix, dans sa hauteur vainement calculable.

Il n'est pas le jouet du Temps, bien que la rose
Du visage demeure à l'ombre de la faux :
Il ne s'altère point comme le temps dispose ;

Et si ce que j'affirme en ce langage est faux,
Avant le dernier Jour s'il connaît sa défaite,
Nul n'a jamais aimé, je ne suis pas poète.
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