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EAN : 9782707179104
224 pages
La Découverte (06/03/2014)
4.5/5   4 notes
Résumé :
Malgré les lois, discours et autres chartes, en France, le salaire des femmes reste inférieur d'un quart à celui des hommes. Comment expliquer cet écart persistant ?

Au XIXe siècle, on considérait qu'il n'était pas vital pour une femme de travailler. Pouvant compter sur « monsieur Gagnepain », celle-ci ne pouvait prétendre qu'à un « salaire d'appoint ». De manière insidieuse, ce modèle pèse encore aujourd'hui. Les salariées semblent piégées, entre « p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Un essai fort salutaire, plus de 30 ans après la loi Roudy, souvent connue comme "loi sur l'égalité salariale entre hommes et femmes", mais plus large que cela. Comme le rappellent les repères chronologiques en fin d'ouvrage (pp.221-226) : "13 juillet 1983 : la loi Roudy réaffirme le principe de l'égalité dans tout le champ professionnel (recrutement, rémunération, promotion ou formation). Elle exige que les entreprises de plus de cinquante salarié(e)s publient un rapport de situation comparée sur l'égalité professionnelle ..."

L'auteur dresse un constat assez effrayant, notamment dans les rappels historiques du chapitre I "Le spectre du salaire d'appoint".
Pendant longtemps en France, les femmes ont travaillé sans aucune reconnaissance, sans aucun salaire, puis pendant longtemps encore, on leur a octroyé seulement "un salaire d'appoint". le salaire de l'homme devait toujours permettre de subvenir aux besoins d'une famille, et ce même s'il était un jeune célibataire sans enfants. La femme, elle, se devait d'être mariée, mère de famille, bonne épouse, ou à défaut, entretenue et soutenue par sa famille (frères, cousins, parents ...). Il n'était pas question de réfléchir aux célibataires et veuves (pourtant très nombreuses, surtout pendant et après les guerres), parfois avec charge d'enfants. Certaines devaient se prostituer en plus de leur travail, pour survivre et pouvoir nourrir leurs enfants.

La femme n'avait aucun statut individuel non plus, et était censée avoir peu de besoins ! Moins de viande, peu de vin, pas de visites au café, pas de tabac ... la femme modèle ne devait pas forcément travailler, du moins c'est ainsi que les patrons le concevaient, mais aussi parfois, les syndicats. La femme mariée qui travaillait, était censée s'acheter uniquement "des épingles à cheveux et des bas de soie" ...
On s'effrayait aussi, à l'époque, de la "concurrence" féminine, accusée d'accepter de bas salaires (qui auraient découragé les hommes, mais ces bas salaires étaient décidés par des hommes, les femmes n'ayant aucun pouvoir de décision ni de vote), de briser les grèves ... La femme mariée qui travaillait était aussi suspecte, on se demandait si le travail était bien nécessaire et bien raisonnable pour celle qui se devait avant tout d'être mère et tenir une maison.
Certains prétendaient que travail et maternité étaient incompatibles (mais personne ne se demandait si le travail des hommes leur permettait d'être de bons pères, hormis le fait qu'ils touchent un salaire prévu pour une famille).

Les femmes avaient pendant longtemps des travaux aussi durs et pénibles que ceux des hommes, avant l'interdiction du travail des femmes et des enfants, interdiction du travail nocturne dans les mines, usines, etc. en 1892, interdiction totale de ces travaux dangereux aux femmes et enfants en 1914.
Les femmes devaient aussi tenir des cadences très dures dans l'industrie textile, étant souvent payées à la pièce et non à l'heure ou à la journée.
Travaux souvent très durs, mais nullement reconnus, et toujours payés moins qu'un travail d'homme. Certaines femmes faisaient rapporter les pièces de tissus ou les pièces fabriquées par leur mari, ce qui permettait de gagner plus. Pourtant la qualité du travail fourni était bien la même voire supérieure, on a longtemps recherché des femmes dans la couture et l'industrie textile.

Dire que tout cela avait cours en France, où pourtant le taux d'activité des femmes, mères ou non, a souvent été plus élevé que dans d'autres pays ...
La notion de salaire féminin ne disparaît officiellement qu'en 1946, puis en 1950 on inscrit les conventions collectives dans un nouveau principe "à travail égal, salaire égal" ... Depuis les lois se sont multipliées, mais sont peu appliquées dans les entreprises ...

L'ouvrage est ensuite plus encourageant, montrant les progrès historiques, syndicaux, législatifs, et un net début de prise de conscience des femmes.
Côté législatif : la France est plutôt bien armée, hélas il y aurait même trop de lois, des lois confuses et pas toujours assez précises, et surtout mal appliquées. La loi Roudy n'étant pas la seule dans ce cas, bien sûr.
Les plus grandes victoires viennent peut-être même de ce qui a été supprimé, par exemple le retrait de toute idée de salaire féminin, salaire d'appoint, dans les textes, les classifications et les grilles de rémunérations. Ces notions injustes et discriminantes ayant été gravées très longtemps dans le marbre, alors que le travail féminin a été si important et si peu reconnu, pendant et après les guerres mondiales notamment.

Certaines femmes discriminées osent enfin porter plainte.
Certaines ont gagné leur procès et témoignent.
Des témoignages variés, plutôt de femmes dans des secteurs à prédominance féminine, ou au contraire à prédominance masculine. Les 2 situations étant intéressantes, et complexes à analyser, mais l'auteur déroule un exposé d'une grande clarté.

Dans les cas de discrimination qui ont été reconnus et ont eu gain de cause, la méthode Clerc a été appliquée pour la compensation et le calcul des dommages et intérêts.
Le contexte et la méthode de calcul sont clairement expliqués.
C'est qu'une femme, en général, ne touche pas seulement un salaire plus faible, à travail égal ou à travail de valeur égale. Elle touche aussi moins de primes, même si les femmes travaillent plus que les hommes les samedis, les dimanches, en conditions pénibles ... Une femme a aussi, très souvent, moins d'avancement, de formation, de promotion, d'accès au statut cadre, de reconnaissance de ses diplômes (cf. les infirmières et sages-femmes, dont les mouvements de grève et les manifestations ont un peu plus médiatisé les discriminations, toujours pas résolues ...) Cela aura aussi des impacts sur sa retraite, or l'espérance de vie augmente ... Un préjudice parfois très lourd. Même si certaines femmes renoncent à la maternité, il reste toujours le "soupçon de maternité" pendant très longtemps, et même sans recours au temps partiel, les carrières féminines pâtissent de l'image que les entreprises se font des femmes ...
Sont aussi évoqués le fameux "plafond de verre", et le "plancher collant" : le déclassement persistant qui touche beaucoup plus les femmes ... Les méthodes d'évaluation des cadres peuvent aussi être remises en cause, avec la féminisation croissante du monde des cadres : critères redondants, clairement pénalisants pour les femmes ... le monde du travail est toujours très "androcentré" comme l'ont fait remarquer des psychologues, sociologues et chercheuses. le travail est conçu, pensé, évalué, classifié et rémunéré avant tout pour les hommes.

Un seul bémol, il aurait peut-être été intéressant d'aborder plus les progrès faits dans d'autres pays, et les moyens de ces progrès : les lois, mais aussi l'application de ces textes. En Scandinavie, aux Etats-Unis ... dans d'autres pays, la situation des femmes n'est pas la même, quelles sont les lois, quelles sont les bonnes idées que nous pourrions appliquer aussi en France ...
Le sujet n'est que brièvement évoqué, de temps en temps.

Un essai passionnant et motivant. A lire !
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Pour les femmes, rien n'est égal par ailleurs

Un constat statistique. Des écarts de rémunération entre femmes et hommes. le cercle vicieux de la sous-qualification, le « soupçon de la maternité », les tâches non partagées par les hommes, le travail domestique invisibilisé et « gratuit », le temps partiel, le salaire dit « d'appoint »…

« Ces femmes racontent leurs carrières, si souvent interrompues et contrariées ; les obstacles qu'elles ont rencontrés au cours de leur formation, au moment de leur embauche, dans leur emploi, fréquemment déqualifié par rapport à leurs diplômes, leurs vicissitudes promotionnelles et salariales, la condescendance, le mépris parfois avec lesquels on les traite, voir l'invisibilité qui les anéantit. Sur elles, le regard glisse comme si elles n'existaient pas ». (Michelle Perrot dans sa préface). Et pourtant « les plaignantes ont gagné et obtenu d'importants dédommagements ». L'action de femmes devant les tribunaux contre les discriminations.

Rachel Silvera nous rappellent les faits « aujourd'hui encore, le salaire des femmes reste inférieur d'un quart à celui des hommes ». Ce quart en moins est certes différent de celui du début du vingtième siècle, le différentiel est inférieur à celui existant dans les années 50, mais « depuis les années 1990, l'écart stagne ».

Temps partiel, secteurs féminisés, poids du travail domestique et spécialisation des rôles sociaux, ségrégation « horizontale » dans quelques métiers et secteurs, ségrégation « verticale » dans peu d'emplois qualifiés, travail le samedi, le dimanche, primes plus fréquentes pour les hommes, « modèle de la disponibilité », orientations scolaires très sexuées, l'avantage éducatif ne se transforme pas en avantage professionnel… Discriminations.

Dans une première partie « le spectre du salaire d'appoint », Rachel Silvera revient sur l'histoire du travail des femmes, « Les femmes ont toujours travaillé, et ont toujours été moins payées ». de l'abattement institutionnalisé par rapport au salaire masculin à aujourd'hui, « toute l'histoire du salaire d'appoint repose sur un non-sens et beaucoup de mauvaise foi ». Et si le salaire féminin est supprimé dans les années 50, « le spectre du salaire d'appoint demeure ».

L'auteure évoque « l'éloge de la ménagère », la femme « forcement mariée et dépendante », le statut d'incapacité des femmes mariées, les inégalités construites sur le mariage, la notion de salaire familial, l'image de la femme mariée inactive… « L'origine du salaire d'appoint renvoie donc à des considérations sur les rapports de domination entre les femmes et les hommes plus qu'à des observations sur la rémunération du travail en soi ». Il s'agit bien de l'effet d'une « catégorisation des femmes selon leur statut familial ». L'autre face de monsieur Gagne-pain.

L'auteure rappelle l'hostilité radicale de Proudhon au travail des femmes, les ambiguïtés de Marx et d'Engels, les positions des organisations syndicales dont les refus du travail des femmes y compris dans la CGT, l'histoire est longue de la non-reconnaissance par le mouvement ouvrier des femmes comme « salariées à part entière ».

Elle poursuit sur la « longue bataille contre le salaire féminin », la revendication « à travail égal, salaire égal », le droit au travail des femmes, l'impact de la première guerre mondiale, la non pensée du travail des femmes comme « moyen d'accéder à l'indépendance économique », le rendez-vous manqué de 1936, le vieux démon « du retour des femmes au foyer », etc…

1945. Deux clauses dans les nouveaux salaires « à conditions égales de travail et de rendement, le calcul de la rémunération doit être établi sur les mêmes bases pour les hommes et les femmes » et « les taux minimaux des salaires des femmes ne pourront être inférieurs de plus 10% à ceux des hommes de même catégorie professionnelle ». Comme le souligne Rachel Silvera « l'abattement, même de 10%, suppose que le travail d'une femme n'a pas la même valeur et légitime l'inégalité des salaires ».

« Salaire d'appoint », une idée persistante, sans oublier sa résurgence sous forme de travail (de salaire et de cotisations pour la retraite) à temps partiel. Pour le salaire du travail des femmes, il semble « naturel » de prendre en compte la situation familiale (ou supposée, plausible, imaginaire, future situation familiale, en omettant par ailleurs d'interroger le partage, très souvent inégalitaire, des revenus disponibles au sein d'un couple). Pour les femmes mais non pour les hommes. Pour les unes, la famille comme horizon naturalisé et son travail invisibilisé et dénié, pour les autres le travail professionnel et l'oubli à la fois du travail domestique et du souci de celui-ci. La famille comme élément important de l'asymétrie dans les rapports sociaux de sexe, dans la structure des rapports de pouvoir des hommes sur les femmes, (un sujet sur lequel il faudrait revenir…).

Dans la seconde partie, « Elles se battent aujourd'hui », Rachel Silvera fait le constat que l'obligation d'établir un rapport de situation comparée permettant de constater les écarts des salaires entre femmes et hommes, n'est respecté que par une entreprise sur deux, que des accords sur l'égalité n'existent que dans 18% des entreprises…

Elle souligne les manques, les oublis, les omissions dans l'appréhension des écarts : primes individuelles, temps passé par les salariées à un échelon donné, déroulement de carrière… « Certaines femmes ont entrepris d'ester en justice pour faire reconnaître leur carrière ».

Car, faire carrière semble réservé aux hommes !

Pour les femmes, moins de possibilité d'accéder à un poste supérieur, moins de promotions, d'avancements, de changements de coefficient ou d'échelon, sans oublier le poids de la question de la maternité. « Nous sommes loin d'une prise de conscience collective de l'ampleur du retard pris par les carrières des femmes ».

L'auteure détaille la « méthode Clerc » pour calculer les retards de carrière et pouvoir obtenir réparation des préjudices subis. Elle insiste sur les « mobilités contrastées selon le sexe », les effets des filières sexuées, les pratiques et représentations sociales très sexuées, les liens entre « poste stratégique » et « disponibilité », les effets de la maternité (« l'ombre des enfants plane sur toutes les femmes »), les soupçons d'absentéisme…

Alors que les discriminations pour raison syndicale sont partiellement reconnues, les retards sont considérables pour la prise en compte des discriminations sexuelles. Sans oublier que rien ne semble encore possible pour des actions collectives et non simplement individuelles. Pourtant « la possibilité de se défendre contre les formes de discrimination sexiste existe désormais ».

Troisième partie : « A travail de valeur égale, salaire égal ! »

En rappelant la lutte des infirmières en 1988-1989, Rachel Silvera insiste sur « la reconnaissance du travail et de sa valeur véritable ». Cette reconnaissance passe par la prise en compte du travail réel et des qualifications invisibilisés (savoir-faire informel, diplômes, « vraies » responsabilités, charges nerveuses, mentales, physiques non reconnues, etc.).

L'auteure analyse les emplois à prédominance féminine (non par « nature » faut-il le préciser), emplois souvent de services « qui ont en commun d'être invisibles », d'où la « difficulté de cerner le travail réellement effectué par les femmes », ces savoir-faire dit « discrets », ces travaux qui ne se voient que lorsqu'ils ne sont pas faits. Et pourtant les employées non qualifiées « développent d'importantes compétences, non reconnues par les employeurs ».

Rachel Silvera rappelle des décisions de justice indiquant que « la valeur du travail doit s'apprécier au regard des « fonctions réellement exercées ». Une classification d'emploi ne peut pas favoriser des opérateurs hommes par rapport à des emplois équivalents, occupés par les femmes ». Il est donc possible de comparer des emplois occupés par des femmes « à des emplois à prédominance masculine d'une même convention collective, plutôt qu'à des emplois aux intitulés identiques d'autres branches ». Reste que l'objectivation d'un poste est ambiguë, d'autant qu'il faut s'interroger sur les liens entre postes et résultats valorisés par l'entreprise, sur les fonctions commerciales ou techniques versus les fonctions supports, sur les emplois dits improductifs versus ceux nommés productifs.

Pour l'auteure, il faudrait redéfinir « les qualifications requises, la complexité-technicité du poste, les responsabilités engagées et les conditions de travail ».

Elle souligne aussi que « les diplômes sont sous-estimés dans la définition des postes à prédominance féminine », que le caractère multidimensionnel des tâches relève de la complexité, que le « relationnel » n'est ni inné ni naturel mais bien « technique », que la polyvalence ne peut-être réduite à la polyactivité…

Elle montre aussi les responsabilités non reconnues de l'encadrement au féminin, les dimensions plus informelles dans les emplois dits féminins, la survalorisation de ce qui est visible et mesurable, plus souvent présent dans les emplois à prédominance masculine, les modalités sexuées de la pénibilité (dont les gestes répétitifs) et des conditions de travail…

Comme Rachel Silvera l'indique « la négociation des classifications sous l'angle de l'égalité est un levier essentiel » ou de manière élargie « L'objectif est de faire en sorte que les biais sexués et les risques de discrimination des méthodes d'évaluation des emplois et des grilles de classification soient repérés et supprimés ».

En conclusion, l'auteure revient, entre autres, sur les « indicateurs de suivi » à intégrer dans la négociation annuelle obligatoire, les « études d'impact en terme de genre » dans les classifications professionnelles, les class action contre la discrimination, le sexisme sous-estimée par les femmes elles-mêmes, la revalorisation des emplois dits de support, les meilleures organisations du travail, moins chronophage, pour les hommes aussi…

Il n'y aura pas d'égalité salariale sans lutte contre les discriminations et j'ajoute sans prise en compte du caractère très largement socialisé du travail et les effets discriminatoires de l'individualisation des salaires.

Largement illustré par des exemples historiques et des témoignages de femmes, cet ouvrage devrait concerner toutes celles et tous ceux qui combattent pour l'égalité réelle, ici celle des salaires, entre femmes et hommes.

Et avec cette égalité salariale (qui devra passer, entre autres, me semble-t-il, par des politiques d'affirmative action), le refus de l'assignation des rôles sociaux sexuels, des rapports sociaux de domination et de pouvoir des hommes sur les femmes.
Lien : http://entreleslignesentrele..
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Excellent livre qui explique les écarts de salaire entre les femmes et les hommes.
Il est accessible, facile à lire, tout en apportant un éclairage complet, en s'appuyant sur des recherches, l'historique de l'évolution des lois, des témoignages, des décisions de justice, etc.

J'ai vraiment adoré ce livre qui m'a beaucoup appris et m'a permis de pousser plus loin m'a réflexion sur le choix des outils et la répercussion que cela a sur l'interprétation des résultats. La manière dont nous choisissons nous outils d'analyse vont dépendre de notre regard et vont influencer notre regard, les différentes méthodes statistiques permettant d'évaluer les différences de salaire entre les femmes et les hommes l'illustrent parfaitement.

Les exemples donnés concernant la sous-évaluation des métiers féminisés sont très intéressants.
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En lisant ce livre, on comprend mieux d'où viennent les écarts de salaire entre hommes et femmes, toujours de 24% aujourd'hui en France.
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critiques presse (1)
LaViedesIdees
06 janvier 2015
Une économiste remonte dans le temps pour comprendre la profondeur de la justification de l’inégalité salariale en défaveur des femmes. Elle montre la dévalorisation des savoirs investis par les femmes dans le travail et les voies de réparation ouvertes par la justice.
Lire la critique sur le site : LaViedesIdees
Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
D'autres formes de pénibilité ne sont pas reconnues dans bon nombre d'emplois à prédominance féminine : la minutie, la répétition de gestes, lesquelles ont de fortes répercussions physiques, à tel point que, dans l'industrie textile, par exemple, on ne pouvait employer que des femmes jeunes. C'est encore vrai dans le commerce, où l'on recherche un fort turnover aux caisses, du fait de la pénibilité des postes ...

(...) L'étude coordonnée par Florence Chappert, responsable du projet "Genre et conditions de travail" de l'ANACT, montre que les conditions de travail des femmes, pourtant également marquées par la pénibilité physique ou mentale, sont moins visibles et objectivées que celles des hommes.
Par exemple, dans l'industrie, les ouvrières sont plus sujettes au travail répétitif et à la chaîne ; elles ont moins d'autonomie ; elles subissent davantage de postures contraignantes (debout, sur écran) ; dans les services, elles sont plus souvent face à un public hostile ou en situation de détresse.
Même sur le plan de l'organisation du travail, leur situation se détériore : leurs horaires sont de plus en plus atypiques. Elles sont plus nombreuses que les hommes à travailler régulièrement les samedis et dimanches ...
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Bien souvent, les diplômes sont sous-estimés dans la définition des emplois à prédominance féminine.

De ce point de vue, l'exemple des infirmières est révélateur : jusqu'en 2011, le niveau "infirmière" qui exige plus de trois années d'études après le baccalauréat, n'était reconnu que comme un bac+2 et donc positionné en catégorie intermédiaire (B).
La réforme mise en œuvre en 2011 a reconnu le niveau licence des infirmières et leur passage en catégorie A (cadre), mais sous condition : cette option n'est possible que si l'infirmière renonce au départ anticipé à cinquante-cinq ans.
Or ce départ anticipé est lié à la pénibilité toujours réelle de ces emplois (horaires de nuits, alternés et décalés, confrontation à la détresse psychique, au handicap, à la mort ...)

(...) Toujours dans la santé, la grève des sages-femmes lancée en octobre 2013 pour exiger une vraie reconnaissance de leurs compétences est au cœur de notre sujet.
Seules trois des cinq années d'études de sage-femme sont reconnues.
Alors que ces professionnelles ont le droit de diagnostic et de prescription (contraceptions, suivis gynécologiques ...) et assurent environ 80% des accouchements (sans pathologie), elles sont souvent considérées comme du personnel paramédical. Leur rémunération s'élève à 1621 euros en début de carrière, soit trois fois moins que celle d'un médecin. (...)
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Le travail prescrit est difficile à évaluer, a fortiori en ce qui concerne les cadres. (...) parler de fiches de poste et de travail strictement prescrit est un non-sens.
(...) Mais cela n'empêche pas une division sexuée du travail et une dévalorisation des emplois confiés aux femmes cadres.

De façon sophistiquée, les méthodes d'évaluation des salariés, au départ centrées sur les emplois de cadres, ont eu comme conséquence indirecte de maintenir une division sexuée parmi les emplois qualifiés.
La méthode Hay, la plus connue, est fondée sur trois critères :
la compétence, la résolution de problèmes et la finalité du poste.
Par "compétence", on entend les connaissances requises, mais aussi des capacités de management et les compétences relationnelles.
Pour ce qui est de la "résolution de problèmes", on mesure si le cadre de réflexion est routinier, clairement ou abstraitement défini. (...)
Enfin, le critère de "finalité" du poste est décomposé en trois sous-critères :
la liberté d'action (degré d'autonomie laissé au poste), l'ampleur du champ d'action et l'impact du poste sur les résultats.

Tous ces critères visent en principe à "objectiver" la contribution de chaque poste, mais, en réalité, leur simple énoncé montre toute l'ambiguïté de la démarche : il paraît difficile de les dissocier (comment, par exemple, distinguer ce qui relève de la liberté d'action, l'autonomie et l'existence d'une pensée créatrice ?). Il s'agit de critères redondants, qui confortent la hiérarchie des emplois et le management.

Enfin, la critique principale porte sur le fait d'évaluer l'impact d'un poste en fonction de résultats visibles (du chiffre d'affaires généré, la plupart du temps).
Tout ceci nuit aux emplois dits supports, ceux qui agissent de façon indirecte, sans faire appel à des capacités de technicité, d'expertises reconnues et valorisées dans l'entreprise. On l'explique par le fait que l'impact de ces postes sur les résultats n'est pas mesurable. (...)

En réalité, ces systèmes d'évaluation privilégient ce que l'on appelle le "cœur de métier". Ce dernier correspond à l'activité principale d'une entreprise, ce qui est réellement "productif", qui se mesure et surtout contribue directement à son chiffre d'affaires. Autour, à côté, les emplois périphériques sont jugés "improductifs", engendrant même un coût pour l'entreprise.

Cette division entre emplois productifs et improductifs traverse tous les niveaux de l'entreprise, mais se repère tout particulièrement au sein de la direction et renforce le plafond de verre, ces barrières visibles et invisibles qui bloquent l'accès des femmes au sommet de la hiérarchie.
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Préface - Des femmes en colère (suite)

Pourquoi une telle situation ?

Un faisceau de raisons est habituellement avancé, que les études de genre s'efforcent de démêler.

D'abord, le cercle vicieux de la sous-qualification (...)
Au nom de "qualités innées", si "naturelles" qu'il n'est ni besoin ni de les apprendre ni de les payer, on pousse les filles, plus ou moins consentantes, prisonnières des séductions de la féminité, vers les filières sous-cotées des "métiers féminins", jadis la couture, le secrétariat, maintenant le secteur protéiforme des soins à la personne qui, parés de la modernité du care, héritent des caractères de la domesticité traditionnelle.
Certes, c'est de moins en moins vrai. Les filles ont formidablement progressé sur la voie des diplômes et conquis une à une les "professions de prestige" qui les ont si longtemps exclues. (...)

Et puis, elles sont mères. Ou elles le seront. Le "soupçon de la maternité" (...) Comment confier à une jeune femme, qui risque de s'absenter rapidement, une responsabilité stratégique ? (...) La maternité freine la carrière des femmes. Seules, elles en assument presque exclusivement le poids. En couple, elles continuent à assurer des tâches qui décidément ne se partagent guère. D'où la nécessité de prendre un temps partiel qui ralentit sérieusement, voire définitivement, la progression.
L'enfant demeure le principal "obstacle à l'égalité professionnelle", dit François de Singly, sagace observateur des "infortunes de la femme mariée".
Faut-il y renoncer, comme le préconisait Simone de Beauvoir (...) ?
Les jeunes femmes d'aujourd'hui rêvent d'amour, de couple et d'enfant et l'exaltation du "modèle" français, qui conjugue taux élevés d'activité et de natalité, les y encourage, sans les y aider beaucoup (le manque de places en crèche est à cet égard significatif).
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Toute l'histoire du salaire d'appoint repose sur un non-sens et beaucoup de mauvaise foi.
Les femmes y sont assimilées aux femmes mariées, seul statut reconnu et établi comme norme sociale, et au-delà comme LA norme statistique.

"La thèse du salaire d'appoint, écrit la sociologue Margaret Maruani, est censée s'appliquer à tout un groupe social : les femmes.
Mais que vaut-il pour les femmes seules, les femmes "chefs de famille", pour toutes celles qui ne vivent que de leur salaire - et elles sont quelques millions dans ce cas ?"
Penser que les femmes qui travaillent ne le feraient que de façon accessoire est absurde : en 1910, on évalue à 40% la part des ouvrières qui vivent seules ou avec leurs enfants. Or le salaire d'appoint s'applique également à elles ...
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Inégalités hommes-femmes : Rachel Silvera. Paris, le 31 janvier 2012.
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