Ce billet à été écrit un an en avance ‑puisque j'ai lu ce livre fin novembre 2021- pour participer au mois « les feuilles allemandes ».
Walter Stucki était ambassadeur de la Suisse à Vichy pendant la guerre, il a fréquenté et beaucoup apprécié Pétain. En octobre 2021, des propos d'Éric Zemmour sur le régime de Vichy m'ont troublée et je n'étais visiblement pas la seule, puisque dans un podcast que j'écoute régulièrement : « le Nouvel Esprit Public » un participant a conseillé ce livre de mémoire de l'ambassadeur Suisse pour mieux comprendre la période. Si
Walter Stucki est bien de langue allemande nulle part, on ne peut lire que ses mémoires ont été traduites, on peut supposer qu'il a lui même écrit ce livre dans les deux langues qu'il pratiquait couramment.
Contrairement à ce que j'avais espéré, ces mémoires ne permettent pas de mieux comprendre la personnalité de Pétain, elles n'apportent rien de nouveau pour quelqu'un comme moi qui me suis toujours intéressée à cette période. En revanche, je l'ai lu avec intérêt car cet ambassadeur fait revivre cette période avec un regard extérieur, témoin actif de ce moment tout en n'étant pas un acteur de la politique française. Voici donc à l'oeuvre la fameuse neutralité Suisse dont
Walter Stucki est si fier.
L'auteur décrit la grande estime dont était entouré Pétain, autant par le personnel qui était proche de lui que par une très grande partie de la population française. Les images de foules l'acclamant sont dans toutes les mémoires. Mais ce que l'on sait moins, c'est combien cet homme a cru à toutes les turpitudes que les allemands lui ont fait avaler en les dissimulant plus ou moins sous des prétextes très grossiers et sans doute plus faciles à dénoncer aujourd'hui qu'à l'époque. Je n'avais jamais lu les deux lettres adressées à Pétain, l'une en 1941 l'autre en 1943 par Hitler et Ribbentrop, elles sont très intéressantes et permettent de mesurer l'asservissement de la France. La position des forces de l'occupation est très claire, c'est la France qui a déclaré la guerre, et qui doit supporter le poids des vainqueurs. de plus si des excès sont commis par les troupes d'occupation, ils ne sont que les justes réponses aux attentats terroristes et ne sont qu'une réplique dece que les troupes françaises ont fait subir aux allemands lorsque après la guerre 14⁄18 celles-ci ont occupé la Rhénanie.
En 1944 , Pétain veut suivre sa position première « faire don de sa personne à la France » et ne veut donc pas fuir Vichy, les Allemands l'y contraindront. C'est là son unique résistance, racontée dans les mémoires de cet ambassadeur. Personnellement, je ne vois pas en quoi cela serait une preuve de grandeur de Pétain.
Ce que l'on voit très bien dans cet ouvrage, c'est l'absence totale de marge de manoeuvre du chef de l'état français et si on est logique on ne comprend pas pourquoi il n'a pas démissionné dès que les allemands ont occupé la zone « libre ». Il n'était pas grand chose avant cette occupation, il n'est vraiment plus rien après. Stucki déteste
Pierre Laval mais il a peu d'importance dans cet ouvrage car il est absent de Vichy dans les derniers moments de ce régime.
Stucki a joué un rôle actif dans ces derniers moments de guerre : il a tout fait pour éviter les règlements de comptes sanglants entre la résistance et les forces allemandes encore présentes et très bien armées. Ce n'est pas simple parce que du côté de la résistance il y a plusieurs factions les FFI rallié à
De Gaulle et le FTP communistes. Ces hommes de l'ombre ont beaucoup souffert et ont du mal à rester dignes dans la victoire. du côté des allemands, les troupes peuvent être très proches de la gestapo et sont capables du pire . Tout le monde même à l'époque connaît le drame d'Oradour sur Glane. Il faut à tout prix éviter un autre village martyre. Il raconte comment, en tant que diplomate suisse, il discute avec les allemands aussi bien qu'avec des résistants et c'est très intéressants. Pendant ce temps c'est la fuite éperdue du côté des anciens partisans de Pétain, les ralliements de dernière heure vers les FFI ne sont pas très glorieux. Stucki est très sévère pour la milice créée pour lutter contre la résistance et qui a utilisé les mêmes procédés de terreur que le parti Nazi en Allemagne. Dans ce livre, on ne voit jamais Pétain désapprouver la conduite de cette milice coupable de tant d'horreurs. Certes, c'est
Pierre Laval imposé à Pétain par les allemands qui créé cette milice mais Pétain ne s'y oppose pas. Pendant ces soubresauts de l'histoire Pétain veut toujours garder un semblant de légalité, c'est pitoyable.
Pour conclure sur le rôle de Pétain, ce livre ne permet pas de savoir si d'une façon ou d'une autre ce Maréchal de France a atténué les méfaits de l'occupation allemande sur le sol français. Mais on voit que l'homme a gardé sa lucidité jusqu'au bout et que ceux qui l'ont approché étaient séduits par sa personnalité. Mais on n'apprend rien dans ce livre sur le rôle de Pétain et des juifs.
Ces mémoires confirment, grâce à un témoignage direct, que les fins de régime sont peu glorieuses et que les guerres civiles engendrent des violences fondées sur la vengeance particulièrement atroces.
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