Rumiko Takahashi est une autrice dont j'ai toujours aimé le travail, enfant avec les animes tirés de ses oeuvres, adultes avec les oeuvres en question. J'ai donc été ravie quand elle a remporté le Grand Prix d'Angoulême en 2019. Depuis, j'attendais la réédition de ses oeuvres et après Ranma, j'ai été ravie de voir Glénat annoncer Mermaid Saga.
Ce shonen paru au Japon dans le Shonen Sunday en 1984, nous revient dans une belle édition grand format qui comptabilisera 2 tomes, regroupant l'ensemble des histoires de l'autrice sur le thème des sirènes. Malheureusement, l'éditeur français n'a pas pu ajouter les pages couleur de l'époque, c'est mon seul regret, avec les deux trois fautes de traduction que j'ai notées. Pour le reste, nous avons une édition de qualité, sur un beau papier avec une couverture travaillée dont le petit effet écailles m'a beaucoup plu tout comme le personnage en sépia sur la 4e de couverture, pour bien appuyer le côté vintage de l'oeuvre.
L'oeuvre en question est une suite d'histoires en un ou deux chapitres dans lesquelles nous suivons Yuta, un ancien pêcheur japonais, qui est devenu immortel après avoir ingéré de la chair de sirène. Mais mécontent de cet état, il cherche à redevenir mortel et doit pour cela rencontre une sirène.
Le ton des histoires est volontiers mélancolique et nostalgique, bien plus sombre que ses oeuvres précédentes. Il fait état d'un Japon passé du plus bel effet, que ce soit à l'époque lointaine où la piraterie y était un art de vivre, ou à une époque plus récente où l'on voit la ville prendre le pas sur la campagne. L'autrice a choisi un très beau décor qu'elle a très bien su utiliser.
Il en va de même pour les légendes qu'elle reprend ici. S'appuyant sur le mythe archi connu de la sirène, elle lui insuffle un souffle typiquement japonais et tragique, avec une vision monstrueuse de la sirène, qui a un effet ravageur. Dans chaque histoire, nous voyons des victimes de ces croyances qui pensent pouvoir trouver la réponse à leurs attentes dans la chair de sirène et ses vertus, mais s'en trouvent fort déçus au final.
Pleine d'aventures, les histoires sont fort agréables à suivre malgré un schéma un peu répétitif. Dans chacune, Yuta est le personnage principal aux côtés des gens qu'il rencontre et bien souvent de belles femmes. Il sera d'ailleurs au bout d'un moment accompagné par l'une d'elle pour vivre ces aventures, un peu en mode "demoiselle en détresse" de manière récurrente. Attention à la vision de la femme made in années 80... On naviguera aussi bien dans son passé que dans son présent. Et la narration archi fluide de l'autrice est ici au service de belles histoires tragiques.
Avec un dessin moins comique et plus sombre et poétique que ce qu'on lui connait,
Rumiko Takahashi m'a rapidement charmée. J'ai retrouvé la force de son découpage dynamique tel qu'on le retrouve dans un shonen comme Ranma, mais avec une puissance dramaturgique propre à cette oeuvre. En effet, on la connait désormais soit pour ses comédies romantiques, soit pour ses shonens toujours un peu légers et comiques. Mais ici, le ton est beaucoup plus sombre et cela se retrouve dans un dessin moins cartoon. Elle prête ainsi une grande attention au folklore à travers ses décors et le dessin de ses créatures qui font froid dans le dos, ce qui en fait une lecture parfaite en cette saison.
Je remercie donc grandement Glénat pour cette réédition qui arrive à point nommé et me permet de découvrir une autre facette de l'oeuvre de cette célèbre autrice. J'espère maintenant que Delcourt-Tonkam aura un jour la même idée avec ses histoires courtes plus tranche de vie qu'il y a à son catalogue. En attendant, je trouve
Rumiko Takahashi particulièrement douée pour revisiter avec force et poésie un mythe aussi fondateur dans des histoires universelles et poignantes.
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