Estevanico : L'extraordinaire destin de l'esclave marocain devenu explorateur en Amérique

" L'extraordinaire destin de l'esclave marocain devenu explorateur en Amérique: Estevanico"
de Marc Terrisse.
1.  d'abord,  l'auteur.
Un drôle de personnage que ce Marc Terrisse, dont je viens de terminer son "Estevanico", livre que m'a aimablement transmis Babelio. Marc Terrisse et son humour sympathique ; il parle de lui comme Alain Delon, à la troisième personne, mais avec talent et beaucoup d'humour, ce qui n'est pas le cas de Delon, bien sûr, même de loin...
Exemples :
P.76: "Un éclair de génie fondroie le cortex mis à rude contribution de l'inspecteur des temps anciens " (c'est un peu alambiqué, mais c'est déjà une façon originale de se mettre en scène. L'inspecteur des temps anciens étant, bien sûr...lui-même)
P.194: le détective hérite d'indices dont la nature et la teneur...etc.
...Et ainsi de suite en de nombreux endroits du récit. Ça ajoute quelque chose comme un clin d'oeil au lecteur, et c'est malin.

2. Ensuite, le récit :
Ce récit d'un certain esclave sous la coupe de conquistadors en quête de nouvelles terres pour la couronne d'Espagne est un vrai jeu de piste semé d'embûches (je parle bien du récit). le texte est décousu à souhait parce que Marc Terrisse joue à Sherlock Holmes en partant de pas grand chose. Il se lance à l'étude de n'importe quel texte faisant, de près ou de loin, référence à un certain Estevanico. Et comme ce personnage est la troisième roue d'une charrette (qui pourtant n'en a que deux), on peine à savoir qui il était et ce qu'il fit. On saute donc du coq à l'âne, on part d'un texte, on continue sur des hypothèses, on brode, tout cela pour en tirer une histoire sur cet homme dont on s'accorde à louer ses talents de diplomate malgré lui. C'est deja cela ! Marc Terrisse enquête également sur place, au Maroc dont est issu le héros du livre, et dans les États sud-américains, pour rencontrer ceux qui veulent bien livrer ce qu'ils savent d'Estevanico sur place, ou ce que l'on suppose.
Si, par exemple, j'osais une synthèse de la page 200, j'en dirais: "peut-être bien que. ., et si ? Et si ? Et pourquoi pas ?. Et ailleurs dans le texte: "La réponse pourrait..." et "Il est plausible que..."
En fait, c'est un peu "l'homme qui a vu l'homme, qui a vu l'homme, qui a vu l'homme, etc.etc , qui a vu l'ours"
3. En conclusion :
C'est donc une formidable enquête qu'a mené là l'auteur. Un travail phénoménal dont j'ai retenu de belles pages sur les relations maître/esclave; la façon dont, à l'époque, on considérait le "Noir" avec un regard et une analyse sans concession; la justification d'une identification menée par diverses communautés américaines, faisant qu'Estevanico devient un nouveau symbole pour les Afro-américains. Marc Terrisse s'échappe souvent de son récit pour faire des parenthèses en portant un regard contemporain sur une époque vieille de 500 ans. de là toute la création d'un mythe auquel il apporte une belle pierre.
Ma déception va à l'aspect décousu du récit dont le fil est constamment rompu.

Je remercie Babelio, les éditions Erick Bonnier et Marc Terrisse pour l'envoi du très intéressant livre « Estevanico, l'extraordinaire destin de l'esclave marocain devenu explorateur en Amérique » dans le cadre de l'opération Masse Critique « Non Fiction » de juin 2023.

Marc Terrisse nous propose de suivre son enquête historique sur les traces d'Estevanico, esclave marocain qui, au début du XVIème siècle, parti en Amérique du Nord avec son maître Dorantes.

D'Estevanico on ne connaît pas grand-chose mis à part la légende colportée ici et là, de bouche à oreille et son apparition dans les écrits d'autres explorateurs dont il aura croisé la route.

L'auteur le dit lui-même : « L'histoire du personnage n'est qu'un amoncellement de rébus, de devinettes et autres charades oscillant entre mythe et réalité, porte ouverte aux inventions les plus farfelues » (p.239)

Marc Terrisse aura exploité toutes les sources possibles : de journaux de voyage aux articles de presse et aux romans de vulgarisation, en passant par une exploration de terrain et la rencontre avec des artistes contant l'épopée d'Estevanico ou des descendants des amérindiens rencontrés par Estevanico pendant son périple.

Le parcours d'Estevanico est particulièrement incroyable pour l'époque. Il fut le premier esclave noir à explorer l'Amérique de la Floride au Mexique jusqu'à la poursuite des 7 cités de Cibola, plus connues de nos jours comme le mythe des mystérieux cités d'or, vulgarisé notamment par le dessin animé du même nom des années 80.

C'est un écrit difficile d'accès. le chercheur nous fait suivre ses recherches avec moulte détails pour décrypter les faits dont nous sommes sûres et ceux qui tiennent de l'extrapolation, du mythe, de la légende. le lecteur devra s'armer de beaucoup de détermination pour comprendre et suivre les différentes hypothèses, parmi le nombre impressionnant de lieux et de personnages.

J'ai eu des difficultés dans un premier temps à me passionner pour l'histoire contée, il a fallu que je m'accroche réellement. Néanmoins, je suis heureuse de ne pas avoir lâché prise : ce travail de recherche fut en définitive extrêmement intéressant et m'aura apporté beaucoup de connaissances sur un contexte, des faits et des personnages historiques méconnus pour moi.

Je suis heureuse d'avoir rencontré Estevanico, rendu dans toute sa grandeur par un historien consciencieux. Je vous invite au voyage sur les traces de ce personnage incroyable.

Un grand merci à Babelio et aux éditions Erick Bonnier pour m'avoir fait découvrir le livre « Estevanico » de Marc Terrisse!

Pour faire court, il s'agit d'un ouvrage que l'on peut utiliser comme un outil essentiel pour comprendre le récit moins connus (du moins, par moi) des conquistadors espagnols explorant les terres de l'Amérique du Sud-Ouest au XVIème siècle.

Il nous fait découvrir l'invraisemblable destinée d'Estevanico, esclave d'Afrique du Nord, devenu un véritable héros à la suite d'une expédition. Il y a de nombreuses analogies avec Christophe Colomb, toujours en quête de connaissances et à la recherche de l'érudition du passé.
Marc Terrisse est aussi similaire à Estevanico dans sa recherche du passé, ne laissant place à aucun doute, cherchant dans les journaux de voyage, les articles de presse, allant même sur place pour comprendre le terrain sur lequel vivent les amérindiens rencontrés par Estevanico.

Petite mise en garde cependant, il s'agit d'un récit assez dense, et j'ai eu du mal à me passionner sur ces 300 pages, mais lorsque l'on referme le livre à la fin, il n'y a qu'un mot qui nous vient en tête : Fascinant.

L'écrivain-voyageur Marc Terrisse nous conduit sur les traces d'un personnage méconnu : un esclave marocain devenu explorateur. Estevanico, tel est son nom, est né au Maroc. C'est l'occasion d'arpenter les rues d'Azemmour, ville de naissance du héros. On y rencontre un guide roublard, moment cocasse fort bien décrit et on apprend qu'Estevanico est en passe de devenir le Christophe Colomb maghrébin. Ce séjour au Maroc précède une traversée de Gibraltar vers l'Andalousie, lieu de départ pour l'expédition de 1527 en Floride. Des rencontres avec des historiens, des anthropologues, des écrivains ou des comédiens rythment la quête de celui qui s'autoproclame "inspecteur du passé". Il n'oublie pas de manier la poésie, de décrire avec érudition ce qu'il voit, de nous plonger dans les entrailles de ses investigations parfois entravées par les hasards de la vie. Carnet de recherche à ciel ouvert fort documenté, ce livre traite des Amérindiens, de leur rapport aux conquêtes européennes et du rôle que les esclaves ont pu jouer dans les entreprises coloniales des temps modernes. On aborde également le chamanisme que pratique Estevanico, réhabilité pour l'occasion dans la mémoire et l'histoire à l'aide d'arguments fort bien construits.

L'ouvrage mêle littérature et essai, reste dense mais très agréable à lire. Une réussite.