AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,84

sur 1531 notes
Ce livre est extrêmement bien écrit et la fluidité du texte mêlée à l'étrangeté du narrateur le rend presque addictif. Il ne se passe rien dans de nombreux passages (parties de chapitre), et pourtant en commençant ma lecture je ne m'ennuie pas du tout, les traits d'humour sont même assez subtils. En revanche, le héros est vraiment détestable, lâche, grossier, lunatique, menteur et du reste conscient de sa propre inhumanité. Certaines scènes, comme celle où Saul entraîne Laurie au restaurant, ou celles avec Dianah, sont carrément pénibles. Les autres personnages se fourvoient sans cesse sur son véritable état d'esprit. On se demande même si Saul, qui ne semble jamais maître de ses humeurs et laisse les autres décider, est extrêmement clairvoyant ou complètement fou. Au point que l'on s'interroge constamment, et lui de même, sur sa véritable identité. Pour moi, il s'agit avant tout d'un roman sur l'identité, mais je pense qu'il peut être interprété de multiples façons. Il engendre une vraie réflexion, sur le cinéma, sur le monde et sur soi, à travers un récit incontestablement très bien écrit et un personnage dont je ne connais aucun équivalent dans la littérature (et pas seulement américaine).

Saul, qui fuit constamment l'intimité, semble paradoxalement très seul du fait d'un mur infranchissable entre lui et le reste du monde : ce monde totalement ignorant de ses humeurs mais auquel il se soumet sans résistance, car pourquoi ne le ferait-il pas ? pour reprendre ses mots. Peut-être vais-je un peu trop loin, mais personnellement j'y vois la métaphore d'une caractéristique fondamentale de la condition humaine : il est impossible d'être entièrement compris par les autres. Saul l'accepte complètement, lui qui comprend pourtant si bien les autres.

Cependant, de plus en plus de longueurs et de non-dits apparaissent vers la fin... Puis vient cette cinquième partie qui brise complètement l'espoir du lecteur de voir cet homme sans convictions reprendre enfin sa vie en main... La lecture de cette dernière partie a été particulièrement lourde et déplaisante pour moi... Une tragédie bien noire donc, et dont on ressort presque épuisé...
Commenter  J’apprécie          50
J'ai vu ce matin un pamphlet creux et visqueux, tellement imbibé de ressentiment et d'envie que j'évitai la nausée de justesse grâce à ma diète. Mon esprit convoqua mon allemand préféré Nietzsche, mais Little Boy pour un cancrelat, c'est excessif. Karoo vint à ma rescousse, dans la superbe édition de Monsieur Toussaint Louverture pour assainir l'atmosphère. le fly-tox de la jalousie. Lisez ou relisez, ce livre somme, drôle, et qui instruit sur l'âme humaine tout autant que Sigmund Freud.
Commenter  J’apprécie          40
Avec « Karoo », réédité dans la collection « Les grands animaux », Monsieur Toussaint Louverture nous gâte, une fois de plus. Jaquette brûlée d'aluminium, bestiole à bois de cerf, histoire à l'avenant…

Mais de qui, mais de quoi qu'on cause ?

À l'instar de Steve Tesich, auteur de ce roman, le narrateur Saul Karoo, travaille pour les studios hollywoodiens en tant que script doctor. Il vit seul à New York, est marié, séparé et père d'un fils adoptif.

Dès les premières pages, la séduction opère. le narrateur use d'un ton corrosif pour dépeindre un microcosme huppé et superficiel. Il se décrit lui-même en ivrogne névrosé, qu'une sobriété toute neuve plonge dans une crise existentielle. Cette soudaine tolérance à l'alcool, en dépit d'une consommation vertigineuse, lui est insupportable, car elle le rend lucide. Il la surnomme sa « maladie », cependant qu'un autre mal le tourmente : une incapacité chronique à entretenir des rapports sincères avec ses proches.

Dès lors, il tente de racheter une vie de dépravations par des manoeuvres exigeant bien plus de détermination qu'il n'en possède. de revirements en lâchetés, sa fuite en avant jalonne la première moitié du roman d'occasions tourné au désastre.

Quand, enfin, Saul Karoo entrevoit une chance de salut, il s'humanise et son cynisme craquelle au profit d'affleurements de tendresse. le lecteur – quoique pressentant le pire – se prend à croire en la rédemption de ce vieux bonhomme maladroit et pathétique. Une seconde partie de roman durant laquelle Steve Tesich nous piège par quelques chapitres lumineux, où foisonnent les réflexions fulgurantes. le bonheur le dispute à la fatalité, si bien que, d'une satire acerbe, le roman glisse vers la tragédie pure.

« Karoo » s'achève par une troisième partie d'inspiration élégiaque.

Autant dire que le scénariste a brillamment élaboré son bouquin. Il sait planter son décor, caractériser ses personnages avant de nous mener où il l'entend. Au fil de ces trois parties, l'histoire prend de l'ampleur, la vivacité de l'écriture traque l'ennui, la justesse des observations tour a tour nous réjouit et nous émeut.

Voilà donc un voyage odysséen qui mérite d'être entrepris sans attendre.

Bonne lecture à tous !
Lien : https://avoslivreschroniques..
Commenter  J’apprécie          101
Saul Karoo, cinquantenaire, fortuné et désabusé, oeuvre en tant qu'écrivaillon dans l'industrie du spectacle,"religion unificatrice de notre époque". En cours de divorce d'avec son épouse, éloigné de son fils adoptif, il sombre dans les mondanités et les restaurants new-yorkais. Il a beau ingérer des litres de mixtures alcoolisées au cours de ses journées et soirées, il reste lucide et c'est son drame.

Pour donner le change face à sa future ex-femme et son producteur, il feint l'ivresse, même pour cela, il ment. Au détour d'un chef-d'oeuvre cinématographique qu'il doit remonter pour en faire un banal produit commercial, il lui semble reconnaître le rire de la mère génétique de son fils. Il entreprend de la rencontrer et d'essayer de remodeler le scénario de sa vie. Mais comme dans la production de fiction, se prendre pour Dieu est risqué dans la vraie vie.

Steve Tesich décrit avec brio le vide des existences dans les suites de palaces, la nonchalance délétère engluée dans le matérialisme. Les vies sans valeur ajoutée. le personnage principal tente de sortir de son tunnel de conventions sociales, de sa "zone de confort" pour retrouver une vie sincère, se rapprocher d'une forme de vérité. Un récit émouvant et féroce qui vous capte des les premières pages où l'on suit sans ennui le courant d'une vie d'un homme vieillissant au travers des plus de 500 pages du livre.
Commenter  J’apprécie          30
Un roman qui va vous faire balancer entre divers sentiments. En racontant l'histoire de Saul Karoo, Steve Tesisch signe un livre envoûtant. Entre son impossibilité physiologique ( selon lui) d'être saoul, son incapacité à se retrouver seul avec son fils qu'il dit pourtant aimer, son divorce, ses « amours », vous allez le suivre et tantôt le haïr, tantôt le plaindre, tantôt le trouver prétentieux, vulgaire, creux, vil...et tantôt vous dire que son ex-femme y va quand fort, que ce qui lui arrive est cher payé... bref c'est de là littérature au sens noble du terme. Avec une histoire, des personnages qu'on aime détester ou qu'on déteste aimer, des sentiments forts et bien décrits avec une plume vive et acerbe, de belles phrases qui pourraient être autant de sujets de dissertation. Seule la fin m'a... laissé sur ma faim ! Encore une perle de Monsieur Toussaint Louverture.
Commenter  J’apprécie          101
Coup de coeur. Coup de coeur. Coup de coeur. Ce roman m'a bouleversée en profondeur. Quand, dans certains romans, on assiste à un ou deux moments de grâce où l'auteur fait un constat subtil et lucide, on se réjouit. Dans "Karoo", les constats subtils et lucides sont partout, et si je devais décrire le livre, je dirais même que c'est une succession de constats subtils et lucides. Saul m'a touchée, avec ses multiples problématiques : peur de l'intimité, impossibilité d'être saoûl, objectivité. Il s'analyse et analyse le monde, et les gens qui l'entourent, avec une acuité sublime. J'ai lu ce roman comme un plat délicieux, lisant morceau par morceau pendant deux semaines pour faire durer le plaisir et distiller la joie de le lire chaque jour un peu. Steve Tesich est un écrivain remarquable, je suis heureuse d'avoir découvert son roman, qu'il a fini juste avant sa mort. Dans "Karoo", on est face aussi à une satire de la société américaine, fine, et à un personnage infiniment attachant, Saul. Si aujourd'hui, on me demandait "Quel personnage de fiction souhaiterais-tu rencontrer ?", ma réponse serait Saul immédiatement. Il est si humain, malgré tout ce qu'il dit. L'ensemble du roman est dans ma tête, comme un film, certains moments me causant de la tristesse ou des rires. Un chef d'oeuvre que je recommande à tou.t.es.
Commenter  J’apprécie          91
L'histoire tragique de certains auteurs face à leur oeuvre est souvent déchirante et celle de Karoo et Steve Tesich n'y coupe pas. Cependant, il serait bien réducteur de s'en tenir à cette partie romanesque réelle quand la fiction ici écrite est prodigieuse.
Les déboires de ce pauvre type, qui se débat vers le bas sans manquer d'être attachant, tiennent le lecteur en haleine. Est-ce par un goût morbide pour la déchéance ? Allons... Suivons plutôt un homme, simplement un homme, dans ses questionnements, ses doutes, ses faiblesses, ses lâchetés et finalement ses rayonnements.
Ce roman est un grand roman. Un très grand roman. L'écriture, pour ce que j'en ai lu de traduction, est éminemment américaine et profondément mélancolique dans sa justesse. Il y a du Cioran dans ce Bret Easton Ellis bouleversant, il y a de L'Homme surnuméraire de Patrice Jean, il y a du Houellebecq américain. Il y a, ensuite et enfin, ce dernier chapitre lumineux et si sombre, cet excipit qui suffit à qualifier Karoo de chef d'oeuvre.
Commenter  J’apprécie          50
"L'ouvrage ne mesure que 140mm de largeur sur 195 mm de hauteur. Pourtant, la chute qu'il raconte est vertigineuse". (sic)
Commenter  J’apprécie          20
Roman puissant. J'ai adoré le style, cette autodérision permanente, le recul du narrateur, ce côté détaché et en même temps conscient de ne rien contrôler. J'ai retrouvé un peu de John Fante dans l'écriture. L'histoire est tellement bien construite et la fin est grandiose. Dommage que cet auteur ne soit plus de ce monde.
Commenter  J’apprécie          91
Tout a été dit déjà :
Extrait :«  Saul sait tout sauf ce qu'il faut faire avec ce qu'il sait ».
Le narrateur évoque aussi : «  La soupe psychique de mon esprit. »

Ou l'odyssée féroce , sans concession du naufrage d'un homme pathétique, cynique et malsain , peu sympathique au demeurant , dont la déchéance dés le début de l'ouvrage semble inéluctable.

Les 200 premières pages très drôles bousculent le lecteur. ...

Portrait d'un personnage pathétique à la personnalité très particulière , gros, gros fumeur et alcoolique , «  écrivaillon » soi - disant sans talent ,riche consultant, qui «  réécrit » des scénarios et «  sauve » le travail des autres.
Mais ce n'est pas si simple ...

Cet handicapé du sentiment ,instable, imbu de lui - même , manipulateur ,odieux , sans ami, pétri de paradoxes, se ment à lui- même et sa vie est faite de mensonges jusqu'à ....mais je n'en dirai pas plus...

Un anti-héros , ou l'auto - portrait d'un narrateur quand il comprendra «  ne plus être un être humain » une chute sans fin qui bouleverse, semblable à un puits , où l'on jette un caillou qui ne rejoindra jamais le fond ...

Une fiction alerte, sarcastique, vertigineuse, originale , extravagante qui critique vertement la société américaine et l'industrie cinématographique au sein d'une société superficielle et décadente...
Un livre atypique trop long ...et la phrase «  je fume une cigarette ou j'allume une autre cigarette » sans cesse répétée...Lassant ...


Commenter  J’apprécie          447




Lecteurs (3209) Voir plus



Quiz Voir plus

Compléter les titres

Orgueil et ..., de Jane Austen ?

Modestie
Vantardise
Innocence
Préjugé

10 questions
20362 lecteurs ont répondu
Thèmes : humourCréer un quiz sur ce livre

{* *}