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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Il n'est pas évident de rédiger un avis sur une oeuvre aussi riche que "Le Guépard", seul et unique roman d'un auteur pas tout à fait comme les autres ; d'abord parce que sicilien, ensuite parce que prince et qu'en Sicile, un Prince, c'est tout un monde.

Un monde en marche, en mutation ; un monde qui change vite et inexorablement, malmené par les coups de boutoir de Garibaldi et de ses soldats, bien déterminés à opérer l'unité de l'Italie jusque sur cette île à l'identité séculaire, ravagée par le soleil méditerranéen.

Nous sommes donc en Sicile et la narration débute en 1860, peu de temps avant le débarquement des garibaldiens à Marsala, pour s'achever en 1910. Roman politique, roman sociologique, "Le Guépard" prend tour à tour des accents romanesques, érotiques et romantiques. Écrit en 1956, on peut légitimement le qualifier de roman historique, voire de témoignage, Giuseppe Tomasi di Lampedusa s'étant librement inspiré de la vie de son grand-père pour créer le personnage principal, son fameux guépard, le prince Fabrizio Salina.

Tout d'abord moins accessible que je l'imaginais, ce récit, quoiqu'assez court, est d'une richesse si foisonnante que le lecteur met quelque temps à comprendre où l'auteur veut en venir avant de finalement lâcher prise, enivré par le spectacle de cette Sicile aristocratique et rurale superbement retranscrit, et de se laisser entraîner dans le tourbillon du temps où les nouveaux riches libéraux viennent inexorablement balayer sous la chaleur caniculaire les traditions d'un peuple perpétuellement assommé par le soleil vertical, l'antique patrimoine et la débilité congénitale siciliens.

Je ressors de cette lecture presque aussi fascinée qu'épuisée ; l'histoire de l'unité italienne était une des lacunes de ma culture historique, elle est désormais en partie comblée. Je garderai sans doute longtemps en mémoire la galerie de portraits à la psychologie finement travaillée qui rend ce roman si fulgurant et néanmoins si attachant.


Challenge ABC 2014 - 2015
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Le guépard est un de ces livres que je pourrais relire et relire. C'est qu'on y retrouve des thèmes assez universels : la question de l'identité (individuelle ou collective), les bouleversements économiques et sociaux, le temps qui passe, la mort qui rôde, etc. Et y a-t-il meilleur moment ou endroit pour le constater qu'en Sicile au milieu du XIXe siècle ? Sur cette ile écrasée par la chaleur estivale, la vieille aristocratie voit d'un mauvais oeil le débarquement des troupes de Garibaldi, tentant par la force de rattacher le pays au royaume d'Italie.

Il est intéressant de noter que l'auteur, Giuseppe Tomasi di Lampedusa, s'est inspiré de sa propre famille. En particulier, son aïeul Giulio Fabrizio Tomasi di Lampedusa, dont l'emblème était un lion. (Après tout, on ne peut trop voler à L Histoire.) Aussi, sa reconstitution minutieuse de la Sicile de l'époque est réussie. Évidemment, il faut aimer le genre historique pour apprécier pleinement. Heureusement, c'est mon cas.

La famille Salina semble d'abord s'en émouvoir mais l'on se rend vite compte que, pour eux, Bourbon de Naples ou Savoie de Turin, c'est du pariel au même. le prince Fabrizio dit lui-même que les Siciliens sont paresseux. Mais il a tort, son neveu Tancrède le voit bien, c'est pourquoi il rejoint les révolutionnaires. Un vent de changement souffle, la bourgeoisie monte et la vieille aristocratie n'a qu'à bien se tenir. D'ailleurs, le jeune homme s'éprend de la jolie Angelica, fille d'un roturier qui s'est enrichi. Les moeurs doivent changer…

Par moment, je trouvais la lecture du Guépard un peu lourde. le dépaysement passé, il me semblait que je ne faisais que suivre la famille dans ses déplacements, dans ses activités apparemment sans importance. Les courses de Tancrède et de sa fiancée Angelica dans les recoins du palais, le père Pirrone qui retourne dans son village natal... Bof ! Mais j'ai continué. Et heureusement ! En effet, plus on avance dans l'histoire, plus on se rend compte que tous ces éléments permettent de comprendre les changements qui s'opèrent.

Les échanges entre le prince Fabrizio et différents interlocuteurs (son confesseur le père Pirrone, son neveu Tancrède, le chasseur Ciccio Tumeo, l'envoyé Aimone Chevalley, etc.) mettent en relief les bouleversements politiques et sociaux qui affectent la Sicile. Pour la première fois depuis… trop longtemps, l'ancien monde vit ses dernières heures de gloire, il agonise. Des nouvelles classes sociales tentent de bouleverser l'ordre établi et l'analyse qui en est faite est très intéressante. Et pas seulement pour les sociologues.

Pour tout dire, je trouvais des accents poétiques à cette prise de conscience du prince Fabrizio. « Nous fûmes les guépards, les lions ; ceux qui nous remplacerons seront les chacals et les hyènes. » Il n'est pas optimiste sur le sort de la vieille aristocratie (c'est pourquoi il consent à l'union de Tancrède avec une roturière), mais ne voit pas d'un meilleur oeil cette bourgeoisie arriviste. Mais que faire ? Regarder la mort en face. Cette impuissance, cette lucidité, ce chant du cygne, il est beau et terrible à la fois. Quand j'y repense, j'en ai des frissons.

C'est d'autant plus incroyable que Giuseppe Tomasi di Lampedusa n'était pas un homme de lettres. Cela explique que, par moment, le roman soit moins facile d'accès que d'autres du même genre. Parfois, la narration devient plus sèche et elle délaissée au profit d'une analyse de la situation. C'est que l'auteur ne fréquentait pas les milieux littéraire et s'est attelé à son unique roman que très tardivement, à la fin de sa vie. D'ailleurs, il ne la verra pas publiée de son vivant. Il deviendra un best-seller. Combien c'est triste !

J'ai lu le roman puis écouté tout de suite après le film. Deux chefs d'oeuvre ! En fait, l'adaptation cinématographique de Lucchino Visconti a su mettre des images sur des scènes que j'avais de la difficulté à visualiser. Par exemple, l'entrée des troupes garibaldiennes dans Palerme, la «procession» marquant l'arrivée de la famille à Donnafugata, le bal des Ponteleone, etc. Il faut dire que le réalisateur a veillé à ce que le moindre détail soit fidèle au roman et à l'époque. Mais, alors que le film laissait le spectateur avec une fin ouverte (bien qu'il puisse «sentir» la mort, la fin d'une époque), le roman décrit clairement le déclin. Plusieurs années plus tard, les trois filles, âgées et esseulées, vivent au milieu des reliques d'un temps révolu. C'est la déchéance. le prince la sentait venir, ses descendants la vivent.
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Nous sommes en Italie, en 1860 tandis que Garibaldi et ses chemises rouges tentent de renverser le pouvoir en place. Au-dessus de la mêlée, le Prince de Salina, qui pense que "quelque chose doit changer pour que rien ne change » règne en père bienveillant sur la Sicile, dans son palais de Palerme.


Autour de lui une famille nombreuse, ses sept enfants et son neveu Tancrède, qu'il a élevé après la mort de ses parents.

C'est lors de son séjour d'été dans sa résidence de Donnafugata que Tancrède fait la connaissance d'Angelica, la fille de Don Calogero, un rustre mais riche paysan. Malgré les espoirs de Concetta la fille ainée de Salina, c'est pour Angelica que Tancrède succombe à la passion amoureuse. La jeune fille n'est pas indifférente au beau jeune homme revenu du champ de bataille avec les honneurs.

C'est une fresque familiale qui parcourt cinquante ans de l'histoire italienne, avec une puissance narrative séduisante. le Prince de Salina serait l'arrière grand-père de l'auteur, qui reconnait que les idées qu'il défend dont aussi les siennes.

C'est le seul roman publié de l'auteur.

Le film, réalisé par Visconti, regardé après la lecture, est une fidèle reproduction du roman, avec une brillante distribution et une qualité d'image remarquable.

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Une petite tranche de l'histoire, ancienne et complexe, de la Sicile , cette île de la Méditerranée enviée, conquise ou indépendante au gré des conquêtes, a bénéficié de multiples influences. Ici le roman se situe dans les années 1860, la fin d'une époque pour la Sicile qui va être rattachée à l'Italie naissante.

Le Prince Fabrizio Salina règne encore en son domaine au début du récit. Représentant de sa classe, il est tout imprégné des convenances et des règles que sa classe se doit d'utiliser, ce qui ne l'empêche pas d'être colérique ou de tromper sa femme. Ses enfants sont à l'image de ce milieu, tout en retenue, en maitrise des émotions, fades, enfants chez qui le Prince a bien du mal à se reconnaître, enfants trop dociles qui laissent toute la place au neveu chéri et turbulent Tancredi. Tancredi qui séduit, ne respecte que moyennement les règles et va soutenir Garibaldi. Tancredi qui apportera de l'argent et du sang neuf à la famille en épousant une roturière rompant ainsi avec la tradition.

Car les temps changent, et le Prince, qui n'est pas un sot, s'en rend compte sans pouvoir ni vouloir réagir. Il assiste à la disparition de son monde avec une nonchalance et une résignation toute en élégance et en désespoir silencieux.

C'est un très beau texte, servi par une écriture riche et fine qui nous décrit des personnages grandioses tel le Prince et Tancredi mais aussi un décor magnifique et dur , la Sicile n'est pas une île de douceur,et nous raconte la mort de la noblesse sicilienne
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Je suis contente d'avoir lu "Le Guépard" de Guiseppe Tomasi di Lampedusa avant de revoir le film de Luchino Visconti dont j'avais surtout gardé le souvenir de la scène du bal. C'est un film culte qui exacerbe l'histoire d'amour entre Angelica Sedara et Tancrède Falconeri, tant le couple joué par Claudia Cardinale et Alain Delon est superbe.
Mais c'est d'abord un roman historique, le seul écrit par l'auteur italien, achevé en 1956 juste avant sa mort et publié à titre posthume en 1958.
Il donne une description ample et précise de l'aristocratie sicilienne de la fin du 19ème siècle à travers celle de la famille du prince Salina appelé le guépard parce que le fauve est présent sur ses armoiries. La puissance de sa famille est fondée sur les terres, elle vit de l'exploitation et de la rente des domaines et les valeurs qui lui sont chères sont celles du catholicisme, de l'ordre social, de la fidélité au roi, de l'honneur et de la conscience de la grandeur de la noblesse.
En 1860, Don Fabrizio Salina va vivre un moment historique : le débarquement de Garibaldi en Sicile qui annonce le déclin du vieux monde.
L'île semble pourtant rester à l'image du prince, immuable et incapable d'évoluer dans une Italie unifiée.
Il est difficile de ne pas penser à Burt Lancaster dans ce rôle du prince irascible et nostalgique qui n'est autre que l'arrière-grand-père de l'auteur. Il reste donc attachant malgré sa vision très pessimiste des événements.


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Le plus célèbre roman italien de l'après-guerre, que son auteur ne put publier de son vivant, refusé par deux grandes maisons d'édition... Comment refuser le Guépard"?
Un roman si drôle où l'auteur s'amuse de chaque situation et tourne en ridicule les moments les plus solennels. Un roman si sensible, notamment dans la scène de l'agonie de Don Fabrizio, décrite depuis le regard du mourant, où la scène finale avec le chien empaillé. Les éditeurs n'ont même pas accordé un entretien à Tomasi, pas un petit mot d'explication quand on lui renvoya le manuscrit. Il y aurait de quoi écrire une histoire sur le monde éditorial, une histoire drôle et pathétique.
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C'est une histoire du XIXe siècle écrite cent ans plus tard avec beaucoup de style un peu à la manière des grands auteurs du XIXe. On s'attache aux personnages, à leur grandeur, leurs ambitions autant que leur décadence et leurs désillusions. La violence du climat de la Sicile et des Siciliens est rendue par des descriptions sublimes en opposition avec ce qui est du domaine de la vie intérieure, suggéré avec finesse et beaucoup de subtilité. On sent la grande intelligence de l'écrivain et la maîtrise de sa langue que la traduction ne trahit pas.
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Faire un roman sur le hors-champ, faut être sacrément doué quand même !

Le roman a traîné longtemps dans ma bibliothèque, ma soeur l'a lu pour le Bac, je l'ai revendu parce qu'il lui sortait par les yeux et qu'elle ne m'avait pas donné envie, je l'ai racheté il y a quelques jours et je l'ai dévoré.

Bon j'avoue que je le début était pas facile. J'ai décroché pas mal de fois, même si on voit clairement que la construction de la narration n'est pas classique et que ça annonce un gros truc à la fin. J'étais à quelques pages de la fin quand je me disais "mais pourquoi un sujet uniquement sur Bendico au bac)... jusqu'à ce que je tourne la dernière page. Ça prend tout son sens.
Les deux dernières parties invitent presque à relire complètement le roman une 2e fois juste après. Bon, j'ai pas eu la patience de me refaire une relecture tout de suite, vu le parcours lecture du moment que je me suis imposé, mais le roman doit avoir une autre saveur !

Bref, j'ai dû accrocher à l'intrigue à partir du milieu du roman. Don Fabrizio a enfin arrêté d'être un personnage de fond à ce moment-là. le roman a été pour moi un délice de descriptions et d'ironie. Par contre il n'est pas épais, mais c'est tout comme !
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Un grand roman qui dissèque la disparition de la noblesse au profit de la bourgeoisie en Sicile à la fin du XIXe et l'impuissance et la nostalgie de ses anciens dépositaires. Un memento mori divinement bien écrit et malheureusement le seul ouvrage écrit par Giuseppe Tomasi di Lampedusa.
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Chers amis, ce livre est le 53ème livre que j'ai lu cette année et j'aimerais vous inviter à le découvrir, même si vous avez déjà vu l'adaptation remarquable faite pas Visconti au cinéma avec Alain Delon et Claudia Cardinale. le retour à l'oeuvre originale écrite est toujours indispensable pour penser par soi-même. Répétons-le : le primat actuel de l'image est dommageable à notre intelligence comme à notre sentiment. Par exemple, savoir que l'auteur, le Prince Giuseppe Tomasi de Lapedusa, nous livre ainsi le récit vrai de son propre grand-père, ajoute un charme mystérieux à la complexité des évènements racontés.
On s'attend à ce que le héros, le Prince Fabrizio, noble de haute lignée sicilienne en 1860, se détourne et condamne l'engagement de son neveu aux côtés du mouvement révolutionnaire de Garibaldi. Pas du tout. Il comprend et il aide son neveu, au grand dam de sa propre caste, de sa famille et même de son petit peuple. Mais le Prince Fabrizio qui incarne avec panache le scepticisme aristocratique s'en fiche. Il pose sur la pantomime de la montée des Républicains bourgeois au détriment des grands propriétaires à particules le regard lucide et détaché qui, sous le changement apparent de pouvoir, discerne la continuité des appétits humains naturels, les contrecoups de la mutation géopolitique, et le prix à payer de la fossilisation obtuse des uns par la cupidité habile des autres. Ce roman considéré comme un des plus grands romans du siècle par Louis Aragon se lit avec délectation pour ses pages de maturité politique et de lucidité historique. Aujourd'hui encore, on y goûte comme une leçon qui sied à notre vision actuelle des jeux de société.
Par ailleurs, dans la description du paysage sicilien, des moeurs de la paysannerie, des coutumes locales et des pratiques religieuses, le mélange détonnant et baroque d'humour et d'âpreté, de cocasserie et de finesse d'analyse, renvoie le lecteur au style puissant et rieur de Marcel Pagnol et d'Alphonse Daudet.
Le temps a passé. Lorsque ce livre fut écrit 1957, la misère noire était encore une plaie répandue en Sicile. Au XIXème siècle, le Prince Fabrizio, fort savant en astronomie, regardait les étoiles : leur fiabilité le délassait des vaines agitations de son temps et des impasses sociales de son milieu. En amoureux de la statique cosmique, il croyait aussi à l'éternité des choses humaines. En cela, même si l'histoire fut longue à lui prouver le contraire, il se trompa car la pauvreté cruelle et définitive qu'il constatait à l'époque n'existe plus maintenant en Sicile. Ainsi, certaines pantomimes politiques peuvent quand même laisser un humus de progrès humain, substrat d'une ère nouvelle visible bien des générations plus tard.

© Patricia JARNIER- Tous droits réservés- 31 décembre 2012
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