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Un conte noir à la tessiture délicieusement kafkaïenne !

Si ce livre était un film, ce serait assurément un film de David Lynch, vous savez ce genre de film, à l'image de Mulloland Drive, que vous devez regarder plusieurs fois pour commencer à avoir un début d'explication, explication toute personnelle qui diffèrera sans aucun doute de celle de votre voisin. Mais dès le premier visionnage, vous êtes admiratif, stupéfait et hagard…Vous ne comprenez pas tout, voire même rien, mais le film vous a happé, vous a fait sombré dans des abimes d'interrogations, est venu contrecarrer sans cesse vos débuts de compréhension, vous a parfois mis mal à l'aise surtout à la fin, lorsque les lumières se sont rallumées dans la salle et que vous vous êtes sentis démunis pour donner une cohérence à ce que vous avez vu. Surtout vous avez perçu confusément l'esthétisme du film dans les cadrages, les plans, la photographie. Ainsi fonctionne « le locataire chimérique ». Je ne m'attendais pas du tout à lire un roman d'une telle étrangeté dont le sens m'a échappée par moment tout en me fascinant et en venant me hanter une fois le livre fermé.

J'imaginais ce roman basé sur un scénario plus classique et comme c'est Grégoire Bouiller qui m'a donné envie de le lire, le citant à de multiples reprises dans son dernier livre « le coeur ne cède pas » pour lequel j'ai eu un énorme coup de coeur, je pensais qu'il s'agissait simplement de l'histoire d'un homme, nouveau locataire, qui s'installe dans un appartement dans lequel la précédente locataire s'est suicidée. Un homme est vraiment venu s'installer dans l'appartement de Marcelle Pichon après son suicide par inanition, c'est pour cette raison que Grégoire Bouiller évoque ce livre que je ne connaissais que via les critiques dithyrambiques de certains amis babeliotes. Certes, il s'agit bien du point de départ de ce curieux roman, mais au lieu de développer par exemple ce que ressent le nouveau locataire dans cet appartement où certainement l'âme de la défunte rode, Roland Topor brode en réalité une histoire absurde, sombre, à la fois douloureuse et drôle. Une sorte de conte noir, gothique, fantastique, burlesque. J'ai envie de retourner voir les passages du livre « le coeur ne cède pas » car je suis certaine que j'aurais une compréhension différente de cette référence dans le cadre de l'enquête menée par Bouillier.

Trelkovsky, un homme poli, simple, banal, sans histoire, petit employé transparent, a repris en toute légalité l'appartement d'une certaine Simone Choule qui, après s'être défenestrée, git mourante dans un hôpital. Gênée d'être déjà dans cet appartement meublé alors que cette femme est mourante, il va la voir à l'hôpital et découvre une femme à l'article de la mort, enrubannée, d'où émerge seul un oeil, hagard…Elle ne semble pas percevoir la présence de Trelkovsky qui lui a apporté des oranges ni celle de sa meilleure amie Stella avec laquelle le jeune homme va sympathiser puis avoir une relation amoureuse éphémère. le soir même Simone Choule décède. Commence pour Trelkovsky la vie dans cet appartement, sans cuisine ni toilettes, à qui le propriétaire, Monsieur Zy, qui vit juste à l'étage en-dessous, a donné moult recommandations à suivre impérativement : pas de bruit, pas d'animaux de compagnie, pas de femmes, pas de fête, pas d'enfant.

« Lorsqu'il soulevait le couvercle ‘une poubelle pour y déverser le contenu de son sceau, il était toujours étonné par la propreté qui y régnait. Ses ordures à lui étaient les plus sales de l'immeuble. Répugnantes et abjectes. Aucune ressemblance avec les honnêtes ordures ménagères des autres locataires. Elles ne possédaient pas leur aspect respectable. Trelkovsky était persuadé que le lendemain matin, en inventoriant le contenu des poubelles, la concierge saurait sans hésitation possible quelle était la part qui lui revenait. Elle ferait sans doute une moue de dégoût en songeant à lui. Elle l'imaginerait dans une attitude dégradante et elle froncerait le nez comme si c'était sa propre odeur qu'exhalaient les ordures. Il allait même, quelque fois, pour rendre l'identification plus difficile, jusqu'à remuer et mélanger ses ordures aux autres. Mais ce stratagème était voué à l'échec car lui seul pouvait avoir intérêt à cette manoeuvre saugrenue ».

Très rapidement, la vie dans cet immeuble devient pour lui un enfer, une véritable plongée dans les ténèbres les plus noires, les voisins frappant à la porte ou au plafond au moindre petit bruit. Ne voulant pas se faire remarquer et se fondre avec les murs, le pauvre homme tombe dans un délire, un véritable cauchemar… Je ne veux rien dévoiler de plus pour que vous ayez le même étonnement que j'ai pu avoir en le lisant. C'est cet effet surprise qui fait tout le sel de cette lecture. Sachez juste que les thématiques abordées sont celles de la destinée, celle de la paranoïa, de la folie, du piège, de la machination, de la gêne d'être au monde et de trouver sa place. Et alors que vous commencez à vous faire une idée de ce qui arrive à ce pauvre homme, la toute fin vous coupe l'herbe sous les pieds pour vous retourner comme une crêpe. Qu'est-ce qui est réel, qu'est-ce qui ne l'est pas ? Quelle est la réalité et l'envers de la réalité ? Qui est Simone Choule ? Une femme venue hanter ses pensées ? Sa propre névrose ? L'élément déclencheur qui lui permet de voir vraiment l'absurdité de la vie, ordure parmi les ordures ? L'absurdité et le non-sens de sa propre vie seulement ?

J'ai refermé le livre, hébétée et songeuse, en me disant que décidément Roland Topor m'avait bien eu et que, par sa faute, j'allais encore me poser mille et une questions…
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L’écriture impertinente, absurde, fantasque, drôle et douloureuse de Roland Topor pose les fondations d’une histoire délicieusement aberrante et noire. Un conte fantastique et cruel. Trelkovsky gravit les marches de l’immeuble qui le conduit à son appartement. Il bâtit son délire mental. Chaque marche le rapproche un peu plus de ses angoisses, de son désarroi. Possédant et possédé, il n’arrive pas à se défaire de cet immeuble où tous le persécutent. Car ils veulent son expulsion, sa mort ; il finit par s’en persuader. Ils complotent contre lui, ils le harcèlent. Et pourtant ils sont quasiment invisibles. Ayant repris l’appartement de Simone Choule, locataire précédente, suicidée et mourante dans un hôpital parisien, il affronte peu à peu son espace mental. Simone Choule l’accompagne, goule invisible et incompréhensible. Trelkovsky finit par s’identifier à elle tout en essayant de la combattre. Mais que peut-on contre son destin ?
Lui, le petit employé banal essayant de se fondre dans les murs de la ville ; l’étranger ne voulant pas se faire remarquer, soupçonneux et soupçonné, se retrouve embarqué dans une histoire délirante, cauchemardesque.
Il est ridicule Trelkovsky quand il tente de descendre ses poubelles sans faire de bruit, sans se faire remarquer mais il est aussi pathétique face à l’adversité. Justement qui sont ses adversaires ? Tout le monde, les cloisons, les bruits, les ombres, la vie en somme. Qui est Simone Choule ? Sa conscience ? Son aliénation ? Sa fuite ? Préoccupé par le regard des autres, préoccupé par sa sexualité, Trelkosky s’enferme au sens propre comme au sens figuré. Rien ne semble pouvoir le faire dévier de son abyssale plongée dans les ténèbres. Pauvre Trelkovsky ! On peut le trouver grotesque, même méchant. Il est un naufragé à qui n’est promise aucune terre d’accueil.
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Quel étrange mouvement, quelles cadences oubliées nous retiennent ici, avec un personnage se présentant lui-même, d'emblée, comme un indésirable ?
Que se passe-t-il dans l'appartement ?
Délire scatophile, tentative de fuite organisée, dépersonnalisation la plus crue...

Peut-être un genre de thriller intérieur, une drôlerie intime où tout se passe dans le corps et la tête jusqu'à l'irréversible
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Contraint de partir de chez lui, Trelkovsky est bien content de retrouver un nouvel appartement. Certes, les commodités sont réduites au strict minimum, et il n'est pas encore tout à fait libre, puisque l'ancienne locataire, qui a tenté de se suicider en sautant de la fenêtre, est toujours en train d'agoniser, mais dans le besoin, on prend ce qui vient !

Dès la pendaison de crémaillère, ses relations avec ses voisins se compliquent. le bruit des discussions provoque la colère de tous les autres locataires, qui ne manquent pas de faire savoir leur mécontentement. Trelkovsky vit désormais dans la crainte de leur déplaire, persuadé que l'immeuble entier épie ses moindres faits et gestes pour le prendre en défaut. Sa paranoïa s'accentue au fil des mésaventures qu'il rencontre : cambriolage, disparitions mystérieuses d'objet, personnes inconnues qui rôdent dans les couloirs, ...

L'ambiance de ce roman devient vite oppressante : le lecteur oscille sans cesse entre l'impression que les voisins lui préparent en effet un sale coup, comme à tous les nouveaux arrivants, et de se retrouver face à un personnage en proie à des délires paranoïaques de plus en plus importants. Cette indécision ne sera tranchée qu'à la toute fin du roman, qui apporte son lot de surprise.

Si vous aimez les histoires kafkaïennes, dans lesquelles la réalité vous file quoi que vous fassiez entre les doigts, lancez-vous dans ce court roman, vous ne serez pas déçus du voyage !
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relecture du "locataire chimérique" de Topor, après l avoir découvert il y a une bonne quinzaine d'années. livre aimant, addictif, troublant. le talent de l auteur tient avant tout du fait que les locataires de l immeuble, quoique légèrement stricts et à cheval sur qq principes, n ont rien de particulièrement original ni monstrueux mais que notre locataire accumule les bévues tout en étant très intrigué sur le sort de l ex locataire, Simone Choule,qui s est jetée par la fenêtre et gît sur un lit d hôpital, momifiée. les faits et gestes comme les pensées de Kielovski se teintent rapidement (le livre est relativement court) de parano et de complot contre sa personne. vrai, faux...Le héros semble emporter par le climat étrange, jusqu à en devenir le jouet. Simone Choule, Kielovski va lui rendre visite, de plus en plus persuadé qu elle aussi a été victime des habitants de l immeuble. Une ambiance étrange s installe très vite, suspicion, traquenard, veut on aussi éliminer le nouveau locataire? Un texte hors norme,une fin glaciale. folie, réalité, Kielovski est devenu un personnage symbolique de la littérature absurde. Ce livre est un fil tendu entre cauchemars, horreur dans lequel le héros se perd, malgré ses raisonnements factuels, qui ne l empêcheront pas de sombrer dans cet enfer, réel ou non. un grand livre, sous ses airs de rien.
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J'ai lu hier soir, d'une traite, ce court roman qui a servi à Polanski de base pour son film "Le locataire" (que je n'ai jamais vu) et aussi indirectement à David Bowie pour son album "The Lodger" que j'ai par contre beaucoup écouté ! L'atmosphère rappelle celle de Kafka, puisqu'il s'agit de l'histoire assez effrayante d'un locataire persécuté par ses voisins. Il finit par se prendre (être possédé ?) pour/par la locataire précédente, dont il a pris l'appartement alors qu'elle était mourante (suicide par défenestration). le récit est prenant, fort, avec beaucoup d'images violentes, scatologiques ... le style, quoi que très honorable, n'est pas tout à fait à la hauteur du sujet. Mais je lirai volontiers autre chose de Topor si l'occasion se présente.
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Roland Topor, auteur de « le locataire chimérique » est un écrivain inclassable.

Bon vivant et grand observateur de la nature humaine, il raconte une histoire singulière et provocante.

Dans un premier temps, nous allons suivre Trelkovsky à la recherche d'un appartement à Paris. Il jette son dévolu sur un pied -à -terre Rue des Pyrénées.

Nous suivons notre héros dans une longue négociation avec le propriétaire de cet appartement. Après s'être installé dans sa nouvelle demeure l'auteur nous fait entrer dans une seconde phase, et pas des moindres, dans la cohabitation avec un voisinage indélicat.

Petit à petit Trelkovsky s'enlise dans la folie jusqu' à terminer à l'hôpital. Cette histoire est tellement irréelle que ça vaut le détour !

Quelques mots sur ma perception de l'écrivain. Roland Topor a été d'abord et avant tout une belle découverte. Son originalité et son imagination débordante m'ont attiré dès les premières pages.
Je vous laisse découvrir cette ouvrage !

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Connaissez-vous vos voisins ? Ont-ils déjà frappé à votre porte ou au plafond parce que vous faisiez trop de bruit ? Trelkovsky, qui vient d'emménager dans un petit appartement payé au prix fort, sans cuisine ni salle de bains, vient d'être prévenu par le proprio : pas de bruit, pas de fête, pas d'enfant, pas d'animal. Trelkovsky n'a pas eu le choix, il vient d'être mis à la rue et ne peut qu'accepter toutes les conditions.

Il a quand même fêté sa crémaillère, pas plus de cinq ou six personnes, mais grand mal lui a pris ! le voilà pris de toutes parts par les coups de balais, les cris à la porte et les regards de travers. Sa nouvelle vie va devenir un enfer. Les premiers jours, il fait état de quelques bizarreries, mais au fur et à mesure que le temps passe, il observe carrément des phénomènes étranges dans son immeuble. Les premiers avertissements se sont transformés en menaces, puis en tyrannie du silence. Trelkovsky rase les murs et n'écoute plus la radio ; il se contente de lire, éteint la lumière à 10 heures du soir et glisse ses pieds dans des pantoufles silencieuses. Peu à peu, il s'efface, s'efface, jusqu'à devenir invisible. [...] La descente aux enfers ne fait que commencer.

Délirant, grotesque, violent, cauchemardesque, jubilatoire ! le Locataire chimérique frappe par son réalisme, en apparence un locataire discret dans un immeuble banal, sous lequel se cache l'absurdité et l'horreur. Très vite, on devient Trelkovsky, on devient le martyr de ses infâmes voisins. Si le roman paraît loufoque, il est terrifiant parce qu'il dit quelque chose en dessous : il parle de nos pulsions, meurtrières et scatologiques, il parle de l'indifférence, de la mort invisible.

Le Locataire chimérique est à l'image de l'oeuvre de son auteur, fascinante et dérangeante à la fois. D'abord fascinante parce qu'elle est esthétique, et dérangeante parce qu'elle est terriblement transparente : elle est humaine, dans ses contradictions et ses horreurs. Roland Topor fait partie de ces artistes qui savent s'exprimer à travers un art limpide et accessible à tous ; nul besoin de médiateur pour comprendre et ressentir son oeuvre. Roland Topor, volontiers provocateur, a peut-être été là où il ne fallait pas, en tout cas, son oeuvre est passée à la trappe. Il est toujours temps, notamment grâce au travail de Buchet-Chastel et de Phébus, de découvrir au moins ses textes.

Lisez l'article en entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/le-locataire-chimerique-roland-topor-a105679232
Lien : http://www.bibliolingus.fr/l..
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Roman schizophrène, je n'ai pas tout compris mis à part qu'on entrait dans la folie pure. Crime et châtiments des temps moderne c'est comme si on était dans la tête de Trelkovsky et qu'on dérivait vers le drame sans pouvoir rien faire. C'est frustrant, on a envie de lui crier que tout pourrait être plus simple mais Topor rend la chose réaliste et d'autant plus effrayante.
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A chaque page, à chaque phrase, je revoyais les images du film de Polanski et je retrouvais les émotions de cette histoire dérangeante et qui s'imprime dans la mémoire.
Un très beau moment de lecture.
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