Le juge Ti à l'oeuvre

Pour concilier la rigueur d'une enquête policière et la culture chinoise, il n'y a pas meilleur chaudron. Ajouter aussi une pointe d'érotisme et de cruauté pour parfaire la recette. En effet, les sbires usent du fouet, comme le magistrat de son encre indélébile, quotidiennement, pour exercer la justice.

Les nouvelles de ce recueil se déroulent entre 663 et 670, période Tang. Dans "Les cercueils de l'Empereur", il s'en faut de peu pour que le juge Ti sauve un innocent capitaine de la peine de mort. Pour cela, il doit convaincre l'impressionnant et vociférant maréchal, de revenir sur sa décision fatale. Tandis que celui-ci doit organiser ses armées pour affronter 300 000 tatares massés à la frontière.
Concis, carré et tranquille, les mains dans ses manches, le juge Ti a le regard avisé pour dénoncer le traitre du maréchal et obtenir ainsi audience auprès de celui-ci pour son affaire.
De la prostituée amoureuse au soldat traitre, en passant par le colporteur sans le sou. Des gens très modestes. C'est donc un aperçu crédible de la société chinoise de l'époque qui est présenté ici.

Cinq nuages de félicité - Une affaire de ruban rouge - le passager de la pluie - Meurtre sur l'étang de lotus - Les deux mendiants - La fausse épée - Les cercueils de l'Empereur - Meurtre au nouvel an – sont les différentes affaires que devra résoudre le Juge TI, célèbre personnage de la Chine antique, ayant existé.

J'ai beaucoup aimé ces petites chroniques policières, menées par le Juge TI qui sait se montrer très sévère, mais aussi juste, notamment envers le « petit peuple ». Il déteste qu'on lui mente et ne sera plus sévère qu'envers ceux qui voudront lui cacher la vérité. C'est le Sherlock Holmes de la Chine antique. Il aime humer l'atmosphère des lieux de crime, et chercher le moindre petit indice. Il sait également écouter et s'entourer. Il a fait de ses assistants des adeptes qui sont plein de respect pour lui, respect largement mérité.

C'est le premier recueil que je lis de Robert van GULIK que j'ai découvert lors d'une émission diffusée sur ARTE « Invitation au voyage ». Je vais m'empresser de lire les autres titres de cet auteur, certes qui date, mais quel plaisir de lecture ! le lecteur est dépaysé, ramené à des temps immémoriaux, nous sommes en 663 et 672, dans une culture autre qu'occidentale, et avec lequel j'ai passé de bons moments.

Réjouissant !

Les trois premières nouvelles font partie des toutes premières enquêtes du juge Ti (après "Trafic d'or sous les T'ang"). le juge vient tout juste de prendre ses nouvelles fonctions dans la ville de Penglai et n'a pas le temps de s'ennuyer ! La quatrième nous emmène à Han-yuan et les deux suivantes à Pou-yang. Les deux dernières nouvelles ont lieu quand le juge Ti était en poste dans la ville frontalière de Lan-fang et sont plus sombre puisque nous découvrons la Chine en état d'urgence dans "Les cercueils de l'empereur" (an 672, ici à Ta-chi-kou), il manque de beaucoup d'aliments, une maladie ravage la population et les troupes sont sur le point de lancer l'assaut. Dans "Le meurtre du Nouvel An", nous y découvrons un juge Ti triste, qui aimerait avoir un poste dans une autre ville.

J'ai beaucoup aimé la deuxième nouvelle qui nous emmène dans un cadre militaire et dont l'enquête a été finement menée. Quel esprit de déduction incroyable !
Chaque nouvelle est plus ou moins longue et nous entraîne dans des univers différents : un foyer, une garnison, une troupe de théâtre etc.

Nous continuons en apprendre plus sur l'époque, notamment au niveau de l'administration (administration conjointe d'un district par le juge et par le commandant de l'unité de l'Armée impériale en garnison dans la ville, mais avec des juridictions respectives), les risques d'attaques des "Barbares", mais aussi sur la vie du peuple qui pouvait être très dure, sur la polygamie, les courtisanes etc.

J'ai aussi apprécié découvrir les prises d'initiatives de Ma Jong et Tsiao Taï dans la nouvelle "La fausse épée", ils y tentent de mettre en pratique l'esprit de déduction affuté du juge Ti, mais ce sera encore finalement le maître qui résoudra l'énigme. Toutes les affaires sont résolues en un tour de main par ce favuleux juge et j'apprécie toujours autant sa logique er son esprit vif et intelligent. Aucun détail ne lui échappe !

Liste (Wikipedia) des nouvelles du recueil :

- Cinq nuages de félicité, enquête située en l'an 663 dans la ville (fictive) de Peng-lai.

- Une affaire de ruban rouge, enquête située en l'an 663 dans la ville (fictive) de Peng-lai.

- le Passager de la pluie, enquête située en l'an 663 dans la ville (fictive) de Peng-lai.

- Meurtre sur l'étang de lotus, enquête située en l'an 666 dans la ville (fictive) de Han-yuan.

- Les Deux Mendiants, enquête située en l'an 668 dans la ville (fictive) de Pou-yang.

- La Fausse Épée, enquête située en l'an 668 dans la ville (fictive) de Pou-yang.

- Les Cercueils de l'Empereur, enquête située en l'an 670 dans la ville (fictive) de Lan-fang.

- Meurtre au Nouvel An, enquête située en l'an 670 dans la ville (fictive) de Lan-fang.

avant d'écrire, je signale que le dessin de couverture de "mon" livre n'est pas celui indiqué ci-contre.
retrouver le Juge Ti, même sous forme de courtes nouvelles, c'est un grand plaisir. sous ce format, la résolution des crimes est relativement abrégée par les déductions du juge, mais ça ne gâche pas les retrouvailles.
j'aime retrouver cette Chine ancestrale, avec son organisation et ses préjugés, par comparaison, ça donne à méditer sur notre époque.
hélas, je vais sans doute bientôt avoir lu tous les romans de van Gullick...

8 enquêtes du célèbre juge : « Cinq nuages de félicité »(un faux suicide) , « Une affaire de ruban rouge »(dans le milieu militaire) , « le Passager de la pluie » (non ce n'est pas du cinéma) , qui se passent à Peng-Laï ; « Meurtre sur l'étang de lotus »(Mort d'un poète) , à Han-yuan, « Les Deux Mendiants »(le juge croit-il aux fantômes ?) , et « La Fausse Épée »(ici les deux lieutenants se substituent au juge) , se déroulent à Pou-Yang , « Les Cercueils de l'Empereur »(Etrange trafic d'armes) et « Meurtre au Nouvel An »(où l'erreur peut conduire à la vérité) , à Lan-fang.