Écrit entre 1949 et 1957, “Zachée l'aveugle” est un roman d'inspiration religieuse, qui apparaît à certains plutôt comme une succession de nouvelles dont le seul point commun est le protagoniste. Sous couvert d'une trame narrative simple, l'intention de l'auteur est de nous plonger dans un monde de ténèbres qui appelle une nécessaire quête de la lumière. À l'instar de cette omniprésence de la religion dans la vie des Roumains d'aujourd'hui, internet compris, la guérison de Zachée ne saurait survenir dans un monde impur. Seul le Christ est Lumière.
Ioan Petru Culianu, qui a publié plusieurs articles sur la symbolique biblique orthodoxe ou en lien avec d'autres religions, présente cette oeuvre (je ne m'attarderai pas, faute de compétences suffisantes en la matière).
Il s'agit principalement d'un roman d'errance dans lequel le lecteur suit Zachée dans différents milieux des plus inhabituels, des plus défavorisés dirait-on aujourd'hui. Il le conduit dans des hôpitaux, dans les faubourgs pittoresques, des propriétés de boyards, au bagne, dans le fourmillement coloré des ports danubiens. L'aveugle compte bien retrouver la vue, ainsi que celui qui la lui a ôtée en l'empoisonnant. Entre autres épreuves d'une âpreté parfois insoutenable, Zachée est confronté à la sodomie au bagne. le pope Țurcă officie au mariage des sodomites, avec l'accord des surveillants qui se montrent parfois plus indulgents avec le protagoniste dont la cécité semble les émouvoir. Il s'agit presque d'un événement public auquel même les filles du directeur de la prison veulent participer. Pour l'époque une des rares occurrences de ce thème, si ce n'est la seule.