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sur 372 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La guerre des pauvres est un opuscule de soixante-huit pages seulement mais c'est un récit fort et intéressant sur ces oubliés qui constituent les masses laborieuses, paysans, ouvriers et manants : les pauvres.
En 1524, ceux-ci vont se soulever dans le sud de l'Allemagne contre les puissants et les nantis. le jeune théologien Thomas Müntzer est à leurs côtés. La diffusion de la Bible puis sa traduction ont permis sa lecture et des interprétations.
Ainsi, Thomas Müntzer pense qu'il existe « une relation directe entre les hommes et Dieu. » Aussi, pourquoi tant de prélats et tant d'apparat dans l'Église qui, elle, exhorte les pauvres à accepter leur sort ?
Ses idées se diffusent et la révolte prend de l'ampleur mais les détracteurs s'organisent et le conflit est inévitable.
Dans La guerre des pauvres, Éric Vuillard relate les luttes sociales du Moyen Âge mais comment ne pas voir en écho nos propres luttes actuelles, dans un monde contemporain où plus de 80 % des richesses sont concentrées entre les mains de 1 % des plus fortunés. Il relate une lutte d'abord d'origine religieuse puis économique et politique.
Nous sentons, sous sa plume, comme dans ses précédents ouvrages, que ce soit 14 Juillet ou L'ordre du jour, un sentiment de colère, d'indignation contre l'injustice, le cynisme et l'égoïsme des puissants. Un sentiment que je partage entièrement.
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Comment écrire un livre très actuel en parlant de faits datant de plusieurs siècles ?

Éric Vuillard le fait et le réussit bien dans ce court récit, La guerre des pauvres. Auteur découvert avec 14 juillet puis son fameux Prix Goncourt, L'ordre du jour, il excelle dans la concision et sa lecture est toujours très instructive.
En quelques pages, il nous raconte l'histoire de Thomas Müntzer dont le père fut exécuté en 1500. La vie de cet homme aurait sûrement été tout autre si, cinquante ans plus tôt, l'invention de l'imprimerie n'avait permis à de plus en plus de monde de lire enfin la Bible dans le texte plutôt que de se contenter de ce latin incompréhensibles et des commentaires orientés des gens dit d'Église.
Éric Vuillard rappelle fort à propos que, deux siècles plus tôt, de l'autre côté de la Manche, Johan Wyclif avait traduit cette même Bible en anglais, préconisant une relation directe à Dieu, se passant donc de prélats. Ensuite, John Ball a mené la révolte contre une nouvelle taxe : « Les paysans marchent en ordre et ils sont nombreux, plus de cent mille, on vient de partout, des foules misérables se rassemblent. » Hélas, ces révoltes se terminent dans le sang et par l'écrasement des plus faibles.
Retour en Bohême avec Jan Hus qui se bat contre l'argent et le pouvoir des princes : jugé, brûlé ! Enfin, on retrouve Thomas Müntzer en 1522. Il dit la messe en allemand, parle de « pauvres laïcs et paysans » mais ne voit que la violence pour changer, violence qui se retourne contre les hordes de misérables.
Dans ce livre étonnant, Dieu est mis à toutes les sauces, permettant de justifier tout et son contraire. Cette invention humaine offre toutes les perspectives puisqu'on lui fait dire ce que l'on veut, s'appuyant sur des textes écrits puis réécrits par des humains.
Éric Vuillard rappelle donc et démontre que seule la violence arrive à faire reculer les puissants qui ne cessent de tout faire pour s'enrichir toujours plus. Hélas, ceux-ci possèdent la force et les armes. Combien de révoltes suscitées par la misère se sont terminées dans le sang ? de plus, il est certain que quantité de conquêtes sociales sont sans cesse remises en cause, comme l'époque actuelle nous le confirme.

Heureusement, Éric Vuillard promet une suite à cet essai, suite peut-être plus optimiste…
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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« La Guerre des pauvres« , le tout dernier livre d'Eric Vuillard, paru chez Actes Sud, est très bref. 68 pages. Mais quel talent de contempteur des maux de nos sociétés, quelle plume incisive et surtout quelle célébration du pouvoir des mots. Eric Vuillard a l'art de concasser, extirper les théories, les faits historiques les plus complexes pour nous livrer un matériau d'une clarté, d'une limpidité qui m'a toujours paru salutaire. La « Guerre des pauvres » débute avec une pendaison, celle d'un père, son fils Thomas Müntzer n'oubliera jamais cette image gravée dans sa mémoire. Né en 1489 à Stolberg en Allemagne du Sud, dans les montagnes du Hartz, Thomas Müntzer deviendra pasteur en 1520. Il écrit le « Manifeste de Prague » en 1521. Un brûlot où il s'adresse à tous ceux qui, habitué à courber l'échine, ne voit même plus le ciel et son Créateur.. Son discours est profondément révolutionnaire. Il conduira une révolte à l'été 1524, les paysans, les plus humbles se joignent à lui mais il est vaincu à la bataille de Frankenhauser le 15 mai 1525. Les représailles des puissants contre les paysans sont terribles. Capturé, Müntzer est emprisonné, torturé avant d'être décapité à Mülhausen le 27 mai 1525. Une fois encore, Eric Vuillard use de sa si jolie plume pour rendre justice aux oubliés des livres d'histoire. Impossible de ne pas voir dans la « Guerre des pauvres », une résonnance de ce que nous vivons aujourd'hui. Un petit livre par sa taille mais un grand livre par sa puissance d'évocation.
Lien : https://thedude524.com/2019/..
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C'est souvent beau, puissant, incisif, comme un slogan tagué sur un mur. Si, jusqu'à aujourd'hui, l'Histoire semble souvent se répéter, y compris jusque dans les défaites, Éric Vuillard, qui a souhaité avancer la parution de son texte pour que soit plus audible son écho avec l'actualité, rend la parole aux vaincus tout en prévenant : « le martyre est un piège pour ceux que l'on opprime, seule est souhaitable la victoire. Je la raconterai. »



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Superbe texte que cette Guerre des pauvres .Souffle de justice, hommage à la rébellion, plaidoyer pour le peuple,Éric Vuillard nous instruit, nous émeut, nous invite ( peut être) à prendre le relais de Munstzer,John Ball, jack Cade ...tous ces hommes qui ".…parlait d'un monde sans Privilèges, sans propriété, sans État.." et affirmaient que "...le coeur doit devenir plus vaste que tous les châteaux, plus solide que toutes les armures..". Ces hommes qui pensaient qu'il est possible de parler directement à dieu sans s'encombrer des intermédiaires tyrans du peuple et usurpateurs.
Tout petit livre mais très grand moment de plaisir à sa lecture et très grand désir de le mettre entre de multiples mains. Merci Éric Vuillard pour votre si beau talent à raconter L Histoire non pas de la bouche du chasseur mais de la gueule du lion!
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68 pages étourdissantes, comme un flux qui emporte par la puissance du verbe et la force du propos. A peine 70 pages pour raconter les conséquences révolutionnaires de la création l'imprimerie à Mayence au milieu du XVème siècle. de cela découlent, selon Vuillard, la diffusion de la Bible, puis sa traduction en langue dite vulgaire pour ne pas dire l'accès direct à Dieu par tous, et par conséquence la remise en question des intercesseurs ecclésiastiques. La remise en cause de l'ordre du monde en quelque sorte.
Venue d'Allemagne, cette découverte technique entraîne l'apparition de prédicateurs comme la figure centrale de Thomas Muntzer, et derrière eux le réveil des populations qui se transforme guerre des pauvres.
De cette matière dense, d'une actualité brulante, Eric Vuillard fait également oeuvre de haute littérature tant le style est à la fois incisif, concis et saisissant.
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John Wyclif, John Ball, Wat Tyler ,14 e siècle, Angleterre, la Révolte des Paysans et La réforme sont en marche. ..Jack Tad, 15e siècle, et la révolte populaire contre le gouvernement anglais d'Henri VI… Jack Tad que l'on surnomma Jean-demande – tout. ..John et William Merfold...Comme des vagues, des soulèvements. Des guerres trop lourdes, des greniers vides, une morale qui accable et punit et qui ne secourt pas, un obscurantisme pétri de mauvaises lois, trop de privilèges, trop de misère, trop de dogmes, trop d'injustices, un monde devenu trop étroit , trop de pouvoir, trop de castes ….Jan Hus, Bohême, 15 e siècle ... « Les exaspérés sont ainsi , ils jaillissent un beau jour de la tête des peuples comme les fantômes sortent des murs. ». Soudaineté d'une flambée populaire dont les siècles ne surent jamais éteindre les braises et les gouvernements comprendre l'urgence et la pertinence de leurs manifestations . «  Plus la peine est régulière et plus les voix sont saccadées.Et plus l'autorité semble unanime et plus les voix sont singulières »… Allemagne , 16 e sièce, Thomas Müntzer. C'est sur cette période de l' Histoire de nos soulèvements populaires, qu ‘Eric Vuilllard pointe sa plume. Thomas Müntzer, symbole d'une colère inextinguible
, d'un jusqu'au boutisme absolu. Car rien, ni valets de dieu, ni serviteurs du diable ne l'arrêteront. Colère, comme brûlot.La guerre des paysans ne fait que commencer. le siècle est alors l'enfant du siècle de Gutenberg. On traduit, on diffuse, on veut que le savoir voyage, on rêve que toutes et tous puissent lire enfin ce que contiennent les livres jusqu'à lors inaccessibles...On écrit, on traduit, on publie, on édite. Échange d'idées, de passions, de cris, d'espoirs et de raisons. Thomas Müntzer ne décolère pas, il insulte, il accuse. Il est chassé des villes mais il revient sans cesse . Il ne veut pas se taire. Il est emporté par sa colère, son urgence de justice et de vérité.
L'action prend le pas sur la réflexion. Il ne décolère pas...
Jusqu'à la bataille de Frankenhausen qui fut un massacre, jusqu'à ces quatre mille morts, jusqu'à ce que sa tête tombe, jusqu'à ce quelle soit exposée sur les remparts de la ville. Jusqu'à ce qu' un certain ordre revienne recouvrir les braises….Jusqu'à ce que les paysans retrouvent leur peine.
« Le martyre est un piège pour ceux que l'on opprime ». Pourquoi ce livre Eric Vuillard ? Pourquoi l'urgence de cette publication que vous avez avancé ? Il suffit de suivre le fil des actualités du monde. Guerre de pauvres, guerre d'opinions, guerre du pain, guerre de religions. Crise de civilisation, guerre civiles, soulèvements. Basculement des démocraties… Il suffit de regarder le monde et on comprend votre urgence. Et on comprend votre crainte, et on comprend votre désir, et on comprend votre message. «  comme les fantômes sortent des murs »… Histoires de fantômes pour grandes personnes comme Georges Didi Huberman et Arno Gisinger titraient leur exposition lorsqu'il s'étaient penchés sur la question d'un passé persistant devant la 42e planche de l'atlas Mnémosyne d'Abby Warburg. Tous ces fantômes que vous faites resurgir du passé ont ils valeur à projeter des gestes de la survie ? Car il s'agit dans ce livre, selon moi, d'un écrit sur la survivance. Oui le martyre est un piège, mais n'oublions jamais que les lucioles sont une chance. Lorsque la réalité embrasse à pleine bouche le possible peut elle deviner le goût de l'avenir ?.
« Le martyre est un piège pour ceux que l'on opprime, seule est souhaitable la victoire.Je la raconterai ». Eric Vuillard , il nous tarde de l'entendre !

Astrid Shriqui Garain

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C'est avec plaisir que j'ai retrouvé l'écriture d'Eric Vuillard , concise et incisive . Un livre très intéressant , en quelques courts chapitres , tout est dit et tout est clair .
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Cette vive chronologie de rébellions populaires anglaises et allemandes, du XIV au XVIèmes siècles, qui prend parfois la forme d'une enquête énergique, nous parle de Dieu et de la violence de l'Histoire.
Dieu, quand "Dieu et le peuple parlent la même langue".
A tombeau ouvert, ce récit nerveux et concis, ponctué de mots crus ou poétiques, nous rend proche certains libres penseurs en avance sur leur temps ; qui veulent dépouiller le christianisme de ses oripeaux et de ses rituels, pour revenir au coeur du message biblique, contre les puissants du monde.
Vite lu, ce texte finit en apothéose ; Eric Vuillard les aime, et nous les fait aimer. On rage de voir David tomber contre Goliath, cette fois, mais certainement pas en vain.

(à cette récurrence d'un cri du peuple, assénée et matraquée dans le temps, jamais entendue, on songe à Villiers de l'Isle-Adam et sa nouvelle Vox Populi)
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La guerre des pauvres faisait à sa parution clairement référence aux Gilets jaunes. Non comme un enrôlement de l'histoire ou une captation de l'actualité, mais pour inscrire les luttes d'aujourd'hui dans une continuité historique, par-delà les révolutions dites bourgeoises qui ont fondé nos sociétés modernes.
Les manifestations des GJ étaient qualifiées de "jacqueries". Eric Vuillard rend justice, dans son style à la fois sec et lyrique, à ces révoltes en apparence confuses, dans leurs raisons comme dans leurs buts, recouvertes dans l'histoire par l'ombre que jettent dessus leurs puissants vainqueurs.
Ce pourquoi ce tout petit livre très puissant, écrit dans un moment particulier, à une valeur universelle et fait écho à chaque combat mené par les pauvres contre les riches, les faibles contre les puissants, tous ceux à qui la défaite est promise et qui font pourtant trembler l'ordre établi.
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