"on croit mourir pour la patrie; on meurt pour des industriels". Cette citation
Anatole France prend tout son sens ici.
En effet, en octobre 1950, après la prise de Dong Khê, au nord Viet Nam, suivie par l'évacuation et la déroute de Cao Bang(plusieurs milliers de morts), rien ne va plus pour les forces francaises coloniales. Alors, à l'assemblée nationale, les députés débattent de ce qu'il faudrait faire face à Ho Chi Minh et son armée, soutenue par la Chine. Ce 19 octobre 1950, Mendès France, propose au parlement de négocier avec le Vietminh... Mais cela ne passe pas, la France ne va quand même pas laisser cette armée de va nu-pieds s'emparer des mines d'étain de CAO Bang, dont le siège des Mines d'étain se trouve à Paris, dans le riche 8eme arrondissement. Et à Mai Khê, en 1951, il ne sera pas non plus question de laisser couler les bénéfices de la société des charbonnages du Tonkin (400 millions de capital). Alors, tout ce beau petit monde, cet entre soit, des députés, qui avaient bien navigué au sein des ministères de la 4eme République, va refuser et faire continuer le combat soulevé par la diatribe de Maurice Violette ( le député de l'Eure et Loire) et contre la démoralisation des militaires présents en Indochine... Ce qui se discute dans ce petit monde de bourgeois installés dans le sénacle, c'est le prix de la guerre. Pas en coût humain, non ! En monnaie trébuchante. Alors de Lattre ira chercher l'argent américain (40% du budget) et puis, puisque personne ne veut y aller, c'est
Henri Navarre, le général, qui se cogne de reconquérir l'Indochine... Avant de la quitter !
Son plan ? Protéger le Laos pour couper le Viet Minh, et pour cela... Il faut s'enterrer à Dien Bien Phu ! Bravo ! Cogny, autre général, n'y croit pas, cela sera un gouffre... Et il a raison ! le commandant en chef de cette défaite à venir est Christian Marie Ferdinand de la croix de Casties, le caïd. Malgré les sorties catastrophiques des forces françaises, le plan Navarre est un échec, Dien Bien Phu est encerclé, et le 31 avril 1954, c'est la défaite. Dulles, diplomate américain et baigné ndans tous les complots de la CIA propose donc aux français la bombe atomique... Ce sont les Etats-Unis qui prendront les choses en main, pour une guerre qui devait durer 2 ans et qui s'etirera sur 30 ans. Cela finira en bourbier et lamentable échec américain
Voilà pour les faits historiques.
Mais ce qui est important aux yeux d'
Eric Vuillard, c'est qu'en avril 1954 Minost dirige le conseil d'administration de la banque d'Indochine, au 96 boulevard Haussmann à Paris. Sous des airs funestes de la déroute, rendant hommage au courage de la soldatesque, il annonce le triplement des dividendes de la banque pendant la guerre ! En effet, des 1947, sentant le vent tourner, la banque avait diversifier ses avoirs, ailleurs, loin du conflit, laissant les militaires, les députés et les soldats, s'affairer à combattre le communisme !
Alors, les administrateurs se fichent bien de la débandade de Saïgon, des 4 millions de morts du viet Minh... Car les affaires continuent et prospèrent...
C'est bien cela que nous dit
Eric Vuillard,
Et quel verbe ! Malgré la tragédie qu'il décrit, le cirque des pantins de la diplomatie, le parlementarisme cocardier, il nous passionne, nous fait même rire, et le principal nous saute aux yeux : lors d'une guerre, la sortie honorable n'existe que pour les riches, et pour les autres. Il reste le sang et les larmes...